Vico, l histoire romaine et les érudits français des Lumières - article ; n°2 ; vol.96, pg 1051-1077
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Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes - Année 1984 - Volume 96 - Numéro 2 - Pages 1051-1077
Mouza Raskolnikoff, ~~Vico, l'histoire romaine et les érudits français des Lumières~~, p. 1051-1077. Si, en France, Vico est à peu près inconnu des «philosophes» avant la fin du XVIIIe siècle, il n'en va pas de même pour les érudits. Trois d'entre eux, historiens de l'Antiquité ou juristes, utilisent directement certains des thèmes développés dans la ~~Scienza nuova~~ à propos de la Rome antique. Tandis que Pierre-Nicolas Bonamy se limite à la question de l'origine de la loi des XII Tables et que le juriste Antoine Terrasson reprend à son compte quelques-uns des principes méthodologiques de Vico, apparaissant ainsi comme le précurseur de l'école historique du droit français, l'abbé Louis-Clair Le Beau du Bignon exploite très largement les filons de la ~~Scienza nuova~~ dans des~~ Considérations sur l'origine et les révolutions du gouvernement des Romains~~ (Paris, 1778) qui préfigurent les recherches de Michelet et de Ballanche au XIXe siècle.
27 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1984
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Mouza Raskolnikoff
Vico, l'histoire romaine et les érudits français des Lumières
In: Mélanges de l'Ecole française de Rome. Moyen-Age, Temps modernes T. 96, N°2. 1984. pp. 1051-1077.
Résumé
Mouza Raskolnikoff, Vico, l'histoire romaine et les érudits français des Lumières, p. 1051-1077.
Si, en France, Vico est à peu près inconnu des «philosophes» avant la fin du XVIIIe siècle, il n'en va pas de même pour les
érudits. Trois d'entre eux, historiens de l'Antiquité ou juristes, utilisent directement certains des thèmes développés dans la
Scienza nuova à propos de la Rome antique. Tandis que Pierre-Nicolas Bonamy se limite à la question de l'origine de la loi des
XII Tables et que le juriste Antoine Terrasson reprend à son compte quelques-uns des principes méthodologiques de Vico,
apparaissant ainsi comme le précurseur de l'école historique du droit français, l'abbé Louis-Clair Le Beau du Bignon exploite très
largement les filons de la Scienza nuova dans des Considérations sur l'origine et les révolutions du gouvernement des Romains
(Paris, 1778) qui préfigurent les recherches de Michelet et de Ballanche au XIXe siècle.
Citer ce document / Cite this document :
Raskolnikoff Mouza. Vico, l'histoire romaine et les érudits français des Lumières. In: Mélanges de l'Ecole française de Rome.
Moyen-Age, Temps modernes T. 96, N°2. 1984. pp. 1051-1077.
doi : 10.3406/mefr.1984.2780
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mefr_0223-5110_1984_num_96_2_2780MOUZA RASKOLNIKOFF
VICO, L'HISTOIRE ROMAINE
ET LES ÉRUDITS FRANÇAIS DES LUMIÈRES*
On sait que le XIXe siècle a véhiculé la légende d'un Vico tout à la
fois méconnu de son siècle et secrètement plagié par bon nombre des
écrivains des Lumières. En particulier, on soupçonnait Montesquieu de
s'être inspiré de la Scienza nuova dans l'Esprit des Lois et d'avoir voulu
dissimuler sa dette à l'égard du philosophe napolitain1. Mais un tel mythe
a été balayé par une série d'études spécifiques, qui ont montré de manièr
e convaincante d'une part les rapports étroits de celui que Giuseppe Fer
rari appelait «le penseur excentrique de Naples»2 avec la réalité intellec
tuelle de l'Europe de son temps3 et d'autre part le retentissement très
limité des idées vichiennes hors d'Italie pendant tout le Siècle des Lumièr
es. En France, la Scienza nuova, à peu près ignorée au XVIIIe siècle, ne
jouit d'une renommée véritable que pendant une courte période, entre
1825 et 1848, au moment où s'élabore une philosophie de l'histoire d'ins-
* Cet article a pour point de départ une conférence faite à l'Institut d'histoire
ancienne de l'université de Trieste le 18 mai 1983.
1 Cf. C. Rosso, Vico e Montesquieu, dans Omaggio a Vico, Naples, 1968, p. SOS
SSI, qui présente une bonne mise au point et donne la bibliographie antérieure.
Pour prouver que Montesquieu connaissait l'œuvre de Vico, on avançait deux argu
ments : 1) lors de son voyage en Italie, en 1728, Montesquieu projetait d'acheter la
Scienza nuova (cf. Voyage de Gratz à La Haye, dans Montesquieu, Œuvres complèt
es, Paris, coll. La Pléiade, 1, 1949, p. 575); 2) un exemplaire de cette œuvre aurait
figuré dans la bibliothèque de Montesquieu à La Brède. Ces deux arguments sont
en fait très fragiles, car il n'est pas sûr que Montesquieu ait pu réaliser son projet,
le livre de Vico étant alors fort rare à Naples, et d'autre part, la Scienza nuova
n'apparaît pas dans le catalogue des ouvrages possédés par Montesquieu.
2 J. Ferrari, Vico et l'Italie, Paris, 1839, p. 391.
3 Voir, entre autres, l'étude exemplaire de G. Cantelli, Vico e Bayle. Premesse
per un confronto, Naples, 1971 (Studi vichiani, 4), qui montre un Vico profondé
ment engagé dans les problématiques les plus actuelles de son époque.
MEFRM - 96 - 1984 - 2, p. 1051-1077. MOUZA RASKOLNIKOFF 1052
piration romantique4. Le nom de Vico devient alors familier au public
français : Bouvard et Pécuchet, les petits-bourgeois immortalisés par
Flaubert, ne vont pas manquer de le lire et de le critiquer lorsqu'ils se
lancent dans l'étude de l'histoire - peu de temps, précisément, avant la
Révolution de 18485.
Vico est à peu près inconnu en France avant la fin du XVIIIe siècle :
c'est vrai si l'on considère les «philosophes»6, mais il n'en va pas de
même pour les érudits. Trois d'entre eux, historiens ou juristes, se réfè
rent directement à la Scienza nuova et utilisent certaines des thèses déve
loppées par Vico à propos de l'Antiquité romaine. Mais pour cela il leur
faut avoir lu cette œuvre directement, car les rares analyses parues dans
des journaux de langue française demeurent trop imprécises pour que les
spécialistes de la Rome antique puissent avoir quelque idée de l'originali
té de Vico par rapport à deux questions susceptibles de les intéresser
immédiatement : l'origine de la loi des XII Tables et le peu de certitude de
l'histoire des premiers siècles de Rome. C'est ainsi que la Bibliothèque
ancienne et moderne de Jean Le Clerc, qui consacre en 1722 un compte
rendu rapide aux deux premiers volumes du Droit universel1, relève bri
èvement une remarque du De constantia jurisprudentis liber alter sur les
insuffisances et les hésitations de Tite-Live, mais ne souffle mot des deux
chapitres qui traitent de la loi des XII Tables8. Un peu plus tard, le Jour-
4 Cf. P. Hazard, La pensée de Vico. HI. Son influence sur la pensée française,
dans Revue des Cours et Conférences, 33, 30 déc. 1931, p. 127-142; J. Chaix-Ruy, La
fortune de J.-B. Vico en France, dans Forum Italicum, 2, 1968, p. 527-545; A. Pons,
Vico et la pensée française, dans Études philosophiques, 1968, 2-3, p. 361-383 (trad,
anglaise dans Giambattista Vico. An International Symposium, éd. by G. Tagliacoz-
zo a. G. V. White, Baltimore, 1969, p. 165-185); P. H. Hutton, Vico' s Theory of His
tory and the French Revolutionary Tradition, dans Journal of the History of Ideas,
37, 1976, p. 241-256; C. D'Amato, // Mito di Vico e la filosofia della storia in Francia
nella prima metà dell'Ottocento, Naples, 1977.
5 Cf. Flaubert, Bouvard et Pécuchet, chap. IV.
6 Parmi les « philosophes », les premiers à parler de Vico furent Chastellux et
Court de Gébelin, le premier dans De la Félicité publique (1772), le second dans Le
monde primitif analysé et comparé avec le monde moderne (1774). Quant à Nicolas
Boulanger, il semble bien que sa pensée ne doive rien à Vico. Pour un avis opposé,
cf. J. Chaix-Ruy, Un disciple hétérodoxe de Jean-Baptiste Vico : Nicolas Boulanger,
dans Revue de littérature comparée, 21, 1947, p. 161-189.
7 J. Le Clerc, Bibliothèque ancienne et moderne, 18, 1722, p. 417-433 (compte
rendu du De uniuersi juris uno principio et fine uno liber unus de 1721, et du De
constantia jurisprudentis liber alter de 1722).
8 Ibid., p. 430: «[Vico] remarque, à la fin de cette Chronologie, que Tite-Live,
qui fait profession d'écrire, depuis la seconde guerre Punique, l'Histoire Romaine L'HISTOIRE ROMAINE ET LES ÉRUDITS FRANÇAIS DES LUMIÈRES 1053 VICO,
nal de Trévoux annonce la parution de la Scienza nuova, puis tente de
présenter à ses lecteurs le projet de Vico, en restant dans les généralités9.
Pour sa part, la Bibliothèque italique reproduit une « Lettre sur le caractè
re des Italiens» où sont énumérées, dans une note explicative, certaines
des œuvres du philosophe napolitain, sans aucune indication sur leur
contenu10.
Tels furent, semble-t-il, les seuls échos que les écrits de Vico rencont
rèrent dans les périodiques de langue française. C'est donc de première
main que Pierre-Nicolas Bonamy, membre de l'Académie des Inscript
ions, connaît les thèses de Vico sur les XII Tables, thèses qu'il entre
prend de discuter dans une «Dissertation sur l'origine des Loix des XII
Tables» présentée à ses confrères de l'Académie entre 1735 et 1737 n.
Il faut rappeler que Vico était revenu à plusieurs reprises sur cette
question, d'abord dans deux chapitres du De constantia 12, ensuite dans les
trois versions successives de la Scienza nuova13, et enfin dans un texte
avec plus de vérité, témoigne néanmoins qu'il ne savoit pas, par quel endroit

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