Sappho ou Hygie ? A propos d une tête féminine découverte dans le quartier des Thermes à Lyon - article ; n°1 ; vol.1, pg 85-92
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Description

Revue archéologique de Narbonnaise - Année 1968 - Volume 1 - Numéro 1 - Pages 85-92
8 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1968
Nombre de lectures 24
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Stéphanie Boucher
Sappho ou Hygie ? A propos d'une tête féminine découverte
dans le quartier des Thermes à Lyon
In: Revue archéologique de Narbonnaise, Tome 1, 1968. pp. 85-92.
Citer ce document / Cite this document :
Boucher Stéphanie. Sappho ou Hygie ? A propos d'une tête féminine découverte dans le quartier des Thermes à Lyon. In:
Revue archéologique de Narbonnaise, Tome 1, 1968. pp. 85-92.
doi : 10.3406/ran.1968.883
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ran_0557-7705_1968_num_1_1_883SAPPHO OU HYGIE ?
A propos d'une tête féminine découverte
dans le quartier des Thermes à Lyon
En 1842, sur l'emplacement des jardins Chinard, quai Pierre Seize, furent trouvés
quelques fragments de marbre qui entrèrent alors au Musée de Lyon, et qui furent
exposés sous le péristyle de la grande cour jusqu'à ces dernières années. Le transfert
des Antiquités lyonnaises au Musée de la Civilisation gallo-romaine permit de
« redécouvrir » un certain nombre de monuments qui étaient tombés dans l'oubli,
et parmi ceux-ci ces marbres, si mutilés qu'ils n'avaient guère attiré l'attention
jusqu'alors.
Une tête, incomplète du côté droit, selon la description qui en fut donnée au
siècle dernier, aurait été celle d'un Apollon (1). Je n'ai malheureusement pas pu en
retrouver la trace. Trois autres fragments en marbre pentélique (2) appartiennent
à une tête féminine (fig. 1, 2, 3). Ces trois morceaux s'ajustent mais la face est presque
complètement détruite : seuls en subsistent l'œil et la tempe droite, la joue et l'oreille
gauche ; l'arrière du cou, le sommet du crâne sont heureusement dans un état qui
permet encore l'identification de la pièce.
Le détail qui attire tout d'abord l'attention est l'épaisse natte qui entoure la
tête. Elle prenait naissance au-dessus de la partie droite de la nuque (le départ en
est nettement visible ici), et remontait vers l'oreille ; elle subsiste sur les frag
ments lyonnais au sommet de la tête, au-dessus de l'oreille gauche, au-dessus de la
nuque, où elle s'amincit progressivement. Un second trait remarquable est la disposi
tion des cheveux divergeant sur le sommet de la tête autour d'une sorte de raie
irrégulière. Enfin les mèches rejetées du front vers l'arrière s'entrecroisent en une
disposition très particulière, plus sensible sur trois exemplaires mieux conservés qui
sont apparentés à la tête de Lyon (3) et qui présentent tous les éléments figurant
encore sur celle-ci : natte, disposition en « polype » des cheveux au sommet de la
tête, organisation en « côtes de melon » des mèches autour du visage (fig. 4, 5, 6).
La série a été longuement étudiée par E. Schmidt (4) qui a proposé de reconnaître
(1) Comarmond, Description du Musée lapidaire de la ville de Lyon, 1846-1854, p. 55, n° 569.
(2)ibid. p. 68, n° 73. Hauteur : 26 cm, 28 cm, 24 cm.
(3) Arch. Jahrb., 47, 1932, p. 263 s, et 49, 1934, p. 181 s.
(4) Cf. note précédente. 1. — 2e et 3e fragments de Lyon, côté gauche. Fig. 2. — 2e et 3e fragments de Lyon, arrière. Fig.
Fig. 3. — Ier fragment de Lyon, côté gauche. SAPPHO OU HYG1E
Fig. 4. -■■ Tête de Vienne, profil droit. Fig. F>. - Tête cle Vienne, fnce
Fig. fi. - Tête de Vienne, ;irrièrc S. ROUGHER
Fig. 7. — Reconstitution de E. Schmidt (torse d'Ephèse et tête de Vienne). SAPPHO OU HYGIE 89
là un portrait de la poétesse Sappho, dont l'original serait dû à Silanion. Le savant
allemand a tenté de reconstituer la statue entière et a pensé trouver dans un torse
d'Éphèse le complément au portrait qu'offrent les bustes ou têtes de Leningrad,
Munich et Vienne (fig. 7).
Sa tentative suscita l'intérêt (1), mais la reconstitution resta hypothétique
jusqu'au moment où fut découverte à Byblos (2) une effigie complète correspondant
aux suppositions de E. Schmidt, dont on ne peut que reconnaître le sens artistique et
archéologique. Mais cette statue est celle de la déesse Hygie, comme en témoigne
un serpent rampant sur les épaules de la déesse qui devait lui tendre de la nourriture.
La supposition de E. Schmidt concernant l'auteur de l'œuvre semble donc ne plus
avoir aucune valeur, et Mme Helga von Heintze dans un ouvrage récent (3) ne manque
pas d'insister sur le caractère dépassé de cette recherche. Avant de la condamner
définitivement il faudrait cependant l'examiner encore une fois.
Le document de Lyon, tout modeste qu'il est, conduit en effet à formuler quelques
brèves remarques. Il fut découvert sur le flanc de la colline qui domine la Saône,
non loin des restes des Thermes antiques. L'existence dans ces Thermes d'une statue
d'Hygie serait des plus vraisemblables. La découverte au même endroit d'une tête
d'Apollon, qui provient très probablement de la décoration d'un même bâtiment,
ne nuit pas à la supposition d'un ensemble de statues décorant des Thermes, mais
conviendrait aussi bien à celle d'un groupe où le dieu serait accompagné de Muses,
et éventuellement d'un certain nombre de poètes, dont Sappho. Les anciens jardins
Chinard, où furent trouvés ces restes, constituent un terrain vallonné ; tout ce quartier
de Lyon comporte des sources, des lacs souterrains, connus sans doute dès l'antiquité,
comme l'atteste une incription mentionnant des sources bienfaisantes (4). On pourrait
supposer, en cet endroit, aussi bien que l'existence d'un sanctuaire ou de dépendances
de Thermes où Hygie aurait figuré , celle d'un Mouséion (5) où Sappho aurait eu
sa place ; aux abords mêmes des Thermes pouvait exister aussi une bibliothèque
abritant la statue ou le buste de la poétesse. Une statue de même type, découverte
au large des grands Thermes de Gherchel (6), présente la même ambiguïté : est-ce une
Hygie salutaire, placée dans les Thermes mêmes, ou bien Sappho inspiratrice, orne
ment d'une bibliothèque voisine ? Le cadre de la découverte lyonnaise n'est donc
ni favorable ni défavorable à l'hypothèse de E. Schmidt. Seule la certitude que la
statue de Byblos soit une réplique d'une statue d'Hygie lui enlève sa valeur. Or si
cette statue est bien une Hygie, il n'est absolument pas certain que le prototype
dont elle s'inspire en ait été une également.
(1) Discussion de mise au point dans Ch. Picard, Manuel d'Archéologie grecque, III, 2, 1948, p. 794 s :
M. H. K. Sùsserott, favorable à l'hypothèse de E. Schmidt dans Griechische Plastik IV s., 1938, p. 175 s. ;
M. K. Schefold, Bildnisse der antiken Dichter, Redner und Denker, p. 81 et p. 206, émet des réserves ; G. Lippold,
Handbuch. Arch. Ill, 1, 1950 p. 273, pi. 99, 3, adopte la proposition de E. Schmidt, ainsi que H. Mobius,
Gnomon, 35, 1963, p. 527. Ch. Picard a examiné à nouveau, plus récemment, les divers aspects du problème
dans son Manuel, tome IV, 2 p. 204 s. et 1016 s.
(2) J. Laufïray, Bulletin du Musée de Beyrouth, 4, 1940, p. 27 s. et pi. I.
(3) Das Bildnis der Sappho, Mayence et Berlin, 1966, p. 29. Cf. Paribeni, Enciclopedia delVArle anlica,
art. Igea; Beazley, A.J.A. 52, 1948, p. 339, qui note simplement l'identité de la statue de Byblos.
(4) CIL, XIII, n° 1926.
(5) G. Roux, Le Val des Muses et les Muses chez les auteurs anciens, BCH, LXXXII, 1954, p. 22 s.
(6) Bévue Archéologique, 1952, p. 22 s. 90 S. BOUCHER
En effet, le serpent qui apparaît de façon extrêmement nette sur les épaules
de la déesse, à Byblos, est absent sur la statue d'Éphèse, qui a servi à E. Schmidt
pour sa reconstitution ; aucune trace n'en est visible sur les épaules ; or cet « attribut »
est de telles dimensions que les arrachements en seraient visibles ici ou là (1). Si la
statue primitive est une Hygie au serpent, dans quelle intention a-t-on supprimé
à l'époque romaine, sur un certain nombre des répliques, un des caractères essentiels
de la figuration ? L'inverse est plus facilement concevable : on a pu transformer une
statue peu déterminée en une déesse précise par l'adjonction d'un attribut caractéris
tique. Ce ne serait pas la première fois qu'une statue aurait, par ce moyen, changé
d'identité (2).
Un buste de la même série, conservé à YAnliquarium Communale à Rome, témoigne
l

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