Un relief controversé de la basilique émilienne : enterrement d une vestale? - article ; n°1 ; vol.148, pg 457-471
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Un relief controversé de la basilique émilienne : enterrement d'une vestale? - article ; n°1 ; vol.148, pg 457-471

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Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres - Année 2004 - Volume 148 - Numéro 1 - Pages 457-471
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 2004
Nombre de lectures 22
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Robert Turcan
Un relief controversé de la basilique émilienne : enterrement
d'une vestale?
In: Comptes-rendus des séances de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 148e année, N. 1, 2004. pp. 457-
471.
Citer ce document / Cite this document :
Turcan Robert. Un relief controversé de la basilique émilienne : enterrement d'une vestale?. In: Comptes-rendus des séances
de l'Académie des Inscriptions et Belles-Lettres, 148e année, N. 1, 2004. pp. 457-471.
doi : 10.3406/crai.2004.22721
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/crai_0065-0536_2004_num_148_1_22721COMMUNICATION
UN RELIEF CONTROVERSÉ DE LA BASILIQUE ÉMILIENNE
ENTERREMENT D'UNE VESTALE ?,
PAR M. ROBERT TURCAN, MEMBRE DE L'ACADÉMIE
L'ex-Musée du Latran, intégré désormais au Museo Grego-
riano Profano du Vatican, conserve depuis 1823 un fragment de
bas-relief (fig. 1), dont la provenance directe est inconnue1. Mais
la nature du marbre, la bordure inférieure, les dimensions et le
gabarit des personnages, la facture et le style de la sculpture ont
conduit en 1955 Antonio Giuliano2 à situer ce bas-relief dans la
frise qui décorait intérieurement la Basilique Émilienne sur le
Forum Romain. Il s'ajoute donc à tous ceux que la fouille du
secteur a livrés, notamment durant la première moitié du siècle
passé. Ce curieux et précieux débris mesure en hauteur 0,64 sur
0,61 m de largeur. Si son appartenance à la frise évoquant les ori
gines de Rome n'a soulevé aucune espèce d'objection, le sens de
la scène qu'il représente demeure énigmatique un demi-siècle
après la démonstration d'A. Giuliano. Mais il convient d'abord de
décrire matériellement ce qui en reste visible, avant d'en discuter
les interprétations.
A gauche, un homme vêtu d'une exomide, comme en portent
ailleurs les travailleurs manuels, les jambes et (apparemment) les
pieds nus, a la tête coiffée d'un chapeau à rebords qui ressemble
à un casque. Ployant le genou gauche, il s'active des deux mains à
la façon d'un terrassier qui tiendrait une pelle pour jeter devant
lui des mottes de terre. Face à lui précisément, dans l'axe de son
regard tendu par l'effort, on voit accumulés des blocs irréguliers,
qui constituent comme un entassement informe. Derrière ce ter
rassier, au second plan, on voit s'élancer à gauche un homme dont
1. E. Simon, dans W. Helbig, Fiihrer durch die ôffentlichen Sammlungen klassischer
Altertumer in Rom, 4e éd., I.Tubingen, 1963, p. 723-724, n° 1008 (Inv. 9557).
2. « Un nuovo frammento del fregio délia Basilica Emilia », Boll. d'Arte, 40, 1955,
p. 165-167. 458 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
le manteau flotte au vent par-dessus sa tunique à manches
courtes. A droite émerge du monceau terreux ou pierreux le haut
d'un corps : celui d'une femme habillée, qui porte ses cheveux
noués en chignon sur la nuque et peut-être deux bandeaux défaits
sur le crâne, plutôt qu'une coiffe à proprement parler, comme l'a
supposé A. Giuliano. Au second plan, derrière cette femme, mais
à gauche du personnage pour le spectateur, un homme qui a la
tête tournée à droite et le corps vu de face, lève son bras gauche
encore visible à la verticale et devait en faire autant avec son bras
droit, qui a disparu. Il a le torse nu, puissamment musclé, au-
dessus d'un linge roulé et comme bouchonné au niveau de la
taille.
On ne retient guère aujourd'hui l'interprétation de Friedrich
Gottlieb Welcker qui, en 1864, voulait déchiffrer là une lapida
tion : celle de Palamède3. Trois ans plus tard, dans leur catalogue
des antiquités du Latran, Otto Benndorf et Richard Schône4 pro
posaient une exégèse inspirée par la comparaison de scènes
qu'on trouve sur les colonnes Trajane et Aurélienne. La coiffure
du terrassier qui fait penser à un casque, d'une part, et, d'autre
part, le personnage du second plan à droite qui a l'aspect d'un
victimaire ou popa, avec son limus noué à la ceinture, leur fai
saient conjecturer un soldat participant aux travaux de retranche
ment, à côté d'un sacrifice comme on en voit dans les deux
séquences sculptées, où la pietas apparaît constamment comme
une garantie du succès militaire. Les blocs visibles à droite
seraient les matériaux de fortification.
En désignant la représentation comme celle de « soldats
romains au travail », S. Reinach5 se ralliait en somme unilatéral
ement à cette explication, sans s'interroger sur le prétendu popa,
non plus que sur la figure féminine. Tout en semblant admettre
que nous avons ici les travaux préludant à l'édification d'un camp
militaire, A. Giuliano6 assortit son affirmation d'un « probabil-
mente », qui laisse affleurer sa perplexité.- Il reconnaît d'ailleurs
que « l'exégèse de la scène demeure encore incertaine ». D'après
3. Alte Denkmàler, V, Gôttingen, 1864, p. 179.
4. Die antiken Bildwerke des Lateranischen Muséums, Leipzig, 1867, p. 302-303, n° 436,
pi. X,2. La femme émergeant à droite n'y est pas identifiée comme telle, mais comme un
personnage masculin.
5. Répertoire de reliefs grecs et romains, III, Paris, 1912, p. 283, 5.
6. Loc. cit. (n. 2), p. 167. RELIEF CONTROVERSÉ DE LA BASILIQUE ÉMILIENNE 459
Fig. 1. - Vatican, Museo Gregoriano Profano : fragment de bas-
relief. Cl. Institut archéologique allemand de Rome.
le savant italien, le personnage identifié avec un victimaire s'ap
prêterait à frapper une victime que tiendrait la femme au premier
plan, ce qui a priori ne laisse pas de surprendre.
Au vrai, si notre terrassier portait un casque de soldat, il re
ssemblerait à ceux que nous présentent d'autres épisodes
conservés de la frise. Or il n'en est rien, et Gianfilippo Carettoni7
avait raison, me semble-t-il, en 1961, de nier dans la scène en
question l'évidence d'un caractère militaire. Le couvre-chef du
travailleur n'est pas nécessairement un casque, mais « semblerait
plutôt un chapeau à large bord »8, un chapeau de soleil en somme
qui correspond au galerus porté par les bergers9 ou par les labou-
7. « II fregio figurato délia Basilica Emilia », Riv. dell'Istit. Naz. d'Arch. e Storia dell'
/lrre,NS,10,1961,p.57.
8. Ibid., p. 75, n. 123.
9. Calp. Sic, Bue, 1, 7 (p. 3 C. Giarratano, Turin, 1951). 460 COMPTES RENDUS DE L'ACADÉMIE DES INSCRIPTIONS
reurs10. Son exomide ne le qualifie pas comme un soldat, car sur
la colonne Trajane, par exemple, même là où ils s'activent à la
construction d'un ouvrage fortifié (fig. 2), les légionnaires appar
aissent toujours cuirassés, le glaive au côté, mais sans casque11.
D'autre part, le sculpteur a donné à l'amoncellement d'où
émerge la femme un aspect sans rapport aucun avec l'appareil
régulier des murs auxquels travaillent les soldats romains sur les
deux colonnes invoquées à titre de comparaison12, car cette com
paraison fait justement ressortir les différences. Enfin, dans ce
contexte, la figure féminine détonne singulièrement et n'autorise
(et pour cause) aucune espèce de parallèle.
Mais quand on tient à une hypothèse, on trouve toujours le
biais d'une argumentation pour répondre aux objections. Ainsi
Erika Simon13, tout en reconnaissant l'aspect fruste du prétendu
rempart qu'elle veut déchiffrer à droite, y voit un mur « cyclo-
péen », comme en avaient certaines cités du Latium. Mais les
murailles d'Alatri, d'Atina, d'Arpinum, d'Artena, de Norba, de
Segni sont bâties en appareil polygonal, lequel n'a rien à voir
avec l'amas des blocs inégaux qui, sur notre fragment, affectent
des courbes irrégulières et interrompues. Quant à la femme vue
de profil, il s'agirait de la déité ou personnification de la ville ici
construite. Quelle ville ? On ne saurait le dire, mais E. Simon
songe à l'une de celles qu'enserraient aux environs de Rome des
murs « cyclopéens ». Pour la divinité qui protégerait la cité, elle
nous réfère à l'image de celle qui figure associée à l'édification
des murs de Lavinium (vraisemblablement) sur l'une des plaques
retrouvées de la frise (fig. 3)14. Cependant elle y figure debout e

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