L exposition du droit par le juge, source d un malentendu sur le droit des Etats-Unis et le droit français.. - article ; n°4 ; vol.12, pg 685-700
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L'exposition du droit par le juge, source d'un malentendu sur le droit des Etats-Unis et le droit français.. - article ; n°4 ; vol.12, pg 685-700

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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1960 - Volume 12 - Numéro 4 - Pages 685-700
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1960
Nombre de lectures 16
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Joseph M. Sweeney
L'exposition du droit par le juge, source d'un malentendu sur le
droit des Etats-Unis et le droit français..
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 12 N°4, Octobre-décembre 1960. pp. 685-700.
Citer ce document / Cite this document :
M. Sweeney Joseph. L'exposition du droit par le juge, source d'un malentendu sur le droit des Etats-Unis et le droit français.. In:
Revue internationale de droit comparé. Vol. 12 N°4, Octobre-décembre 1960. pp. 685-700.
doi : 10.3406/ridc.1960.12457
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1960_num_12_4_12457L'EXPOSITION DU DROIT PAR LE JUGE,
SOURCE D'UN MALENTENDU SUR LE DROIT
DES ÉTATS-UNIS ET LE DROIT FRANÇAIS
Directeur de l'Institut de droit comparé de M. la Faculté SWEENEY de droit de l'Université de New York
A moins qu'il ne soit comparatiste, le juriste français se fait souvent
une idée fausse du droit des Etats-Unis et des différences qui le séparent
du droit français.
Sachant depuis longtemps que ce malentendu existait, je ne fus
pas surpris d'en rencontrer des manifestations nombreuses lors d'un
récent séjour à Paris, où je faisais des conférences sur le droit des Etats-
Unis. Mais en percevant de nouveau et de plus près l'étendue et la ténac
ité de ce malentendu, je fus tenté d'en analyser les causes.
Je dois remarquer d'ailleurs, avant d'aborder le sujet, que le juriste
des Etats-Unis, à moins également qu'il ne soit comparatiste, se fait
une idée tout aussi fausse du droit français et des points sur lesquels
celui-ci diffère de son propre droit. L'erreur est donc mutuelle, et sa
mutualité souligne que les deux droits sont séparés autant peut-être
par les idées que, de part et d'autre, on se fait de leurs différences que
par ces différences elles-mêmes.
Le rôle du juge dans le droit des Etats-Unis est, sinon la cause prin
cipale, du moins l'une des erreurs principales de l'image inexacte que
le juriste français se fait de ce droit. Il est en quelque sorte le foyer d'idées
fausses qui prennent des formes diverses mais alliées. C'est ainsi que le
juriste français pense souvent que nous reconnaissons la décision judiciaire
en tant que source de droit ; qu'elle a, à ce titre, rang égal avec nos lois ;
et donc le concept de la supériorité de la loi n'y existe pas. Il dira
même que le juge est la loi aux Etats-Unis, en faisant état du contrôle
constitutionnel qu'il paraît exercer sur le pouvoir législatif et le pouvoir
exécutif. Nos méthodes d'enseignement, qui utilisent largement l'expo
sition du droit que font les juges dans leurs décisions, tendent à renforcer EXPOSITION DU DROIT PAR LE JUGE, SOURCE D'UN MALENTENDU 686
ses idées. Nous n'entendons pas que ce sont là les seules idées fausses
que l'on se fasse en France du droit des Etats-Unis. Mais ce sont peut-
être les plus répandues et, en ce sens, elles constituent sans doute l'e
xpression principale du malentendu relatif aux deux droits.
On comprendra donc, et il nous faut insister sur ce point, que nous
ne tendons pas ici à dégager entre les deux droits les différences qui,
sur le plan scientifique du droit comparé, conduisent à classifier ceux-ci
en des systèmes différents. Sur ce plan, on pourrait objecter que les diff
érences entre les deux droits ne sauraient aisément être rangées en ordre
d'importance, et qu'il y a dans le droit des Etats-Unis des facteurs autres
que le rôle du juge qui le séparent de façon plus considérable peut-être
du droit français. Mais nous envisageons ici celles des différences qui
tendent à créer chez le juriste français une fausse image du droit des
Etats-Unis avant même qu'il l'ait étudié. Sur ce plan il est possible de
dire que la place accordée aux Etats-Unis à l'exposition du droit dans
la décision judiciaire est une des causes principales de cette fausse image,
et que la place accordée à cette exposition dans notre enseignement du
droit contribue à l'élaboration de cette fausse image de façon subsidiaire
mais importante.
* * *
L'exposition du droit dont nous parlons est celle que fait un tr
ibunal d'ordre judiciaire. Nous laissons de côté l'exposition du droit en
matière administrative et en matière criminelle parce que la comparaison
de la fonction du juge dans ces parties du droit des Etats-Unis et du droit
français présente des problèmes spéciaux qu'on ne pourrait traiter ici.
Ajoutons encore qu'en parlant de décision judiciaire, nous avons en
vue une décision et contentieuse et définitive.
Par exposition du droit dans une décision nous entendons
évidemment cette partie de la décision qui suit les qualités et précède
le dispositif, dans laquelle le juge, après avoir examiné les faits et les
preuves, expose les règles juridiques qu'il estime être applicables à la
cause. Aux Etats-Unis comme en France, le juge doit normalement,
et sous la réserve d'exceptions qui n'ont pas d'importance ici, faire l'e
xposition de ces règles.
En faisant cette exposition du droit, le juge, dans les deux pays,
remplit nécessairement une fonction créatrice. Remarquons immédiate
ment que, ce disant, nous ne disons pas qu'il est la source du droit qu'il
expose et nous ne disons pas non plus que son exposition aura un effet
réglementaire. Nous disons seulement qu'aux Etats-Unis, comme en
France, l'exposition du droit par le juge ne peut jamais réellement être
une fonction mécanique. Le juge doit choisir la règle juridique ; il doit
en décider le sens et la portée ; il doit en déterminer l'application aux
faits de la cause. C'est même, au fond, une certaine forme d'euphémisme
que de parler de « l'application » d'une règle juridique ou, à tout le moins,
c'est une formule qui ne peut se prendre au pied de la lettre. Même quand
la règle paraît à première vue être d'une simplicité et d'une précision
catégoriques, il faut encore que le juge décide de son rapport avec les SUR I.F. DROIT DES ETATS-UNIS ET LE DROIT FRANÇAIS 687
faits de la cause. En bref, il nous semble plus exact de dire que le juge
est, au sens large du mot, « l'interprète » du droit.
La fonction d'interprétation du droit par le juge est une fonction
souple. Il est extrêmement difficile, sinon impossible, d'en définir les limites
exactes. Qui peut dire avec certitude où l'interprétation commence et
où elle finit ? Est-ce que le juge continue d'interpréter quand il change
le sens d'une règle pour l'adapter à des besoins nouveaux ? Le juge agit-il
encore dans les limites de sa fonction d'interprète quand il étend une
règle pour combler les lacunes de la loi ? On ne saurait répondre à ces
questions avec certitude parce qu'une fonction aussi souple que celle
du juge ne peut s'enfermer, comme les abstractions géométriques, dans
des limites d'une définition parfaite. Mais il suffit de consulter la juri
sprudence du droit des Etats-Unis et celle du droit français pour se con
vaincre rapidement que, dans les deux pays, l'exposition du droit par
le juge constitue l'exercice d'une fonction qui est à la fois créatrice et
souple.
Cette fonction, si elle est commune aux deux droits et y est douée
des mêmes caractéristiques, est cependant l'objet, dans le droit des Etats-
Unis, de traditions différant de celles dont elle est l'objet dans le droit
français.
Les Etats-Unis, héritiers de la tradition anglaise, ont toujours eu
la conviction que la fonction créatrice de l'exposition du droit dans la
décision judiciaire était une fonction normale, la conséquence naturelle
et nécessaire de la notion même de pouvoir judiciaire. De cette conviction
dérive notre tradition de reconnaître à cette fonction la place légitime
qu'elle occupe dans le droit, au lieu de chercher à y échapper ou l'ignorer.
De cette simple, en ce sens qu'elle ne dépend pas de cons
tructions abstraites compliquées mais plutôt de la reconnaissance des
faits, le juriste français, qui n'a pas eu l'occasion d'étudier la question
de près, se fait souvent des idées fausses qui, encore qu'elles prennent
des formes variées dont nous avons donné des exemples tout au début,
se

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