La réparation du préjudice économique pur en droit français - article ; n°2 ; vol.50, pg 367-381
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1998 - Volume 50 - Numéro 2 - Pages 367-381
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1998
Nombre de lectures 143
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Christian Lapoyade
Deschamps
La réparation du préjudice économique pur en droit français
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 50 N°2, Avril-juin 1998. pp. 367-381.
Citer ce document / Cite this document :
Lapoyade Deschamps Christian. La réparation du préjudice économique pur en droit français. In: Revue internationale de droit
comparé. Vol. 50 N°2, Avril-juin 1998. pp. 367-381.
doi : 10.3406/ridc.1998.1167
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1998_num_50_2_1167R.I.D.C. 2-1998
LA RÉPARATION
DU PRÉJUDICE ÉCONOMIQUE
PUR EN DROIT FRANÇAIS
Christian LAPOYADE DESCHAMPS*
Ce thème est particulièrement difficile à traiter ou même à concevoir,
pour un juriste français, car celui-ci, a priori, ne connaît ni le problème,
ni même l'expression !
D'un point de vue terminologique, la littérature juridique emploie
indifféremment des termes tels que « perte financière », « manque à
gagner », « perte de profit ou de bénéfices », « perte d'exploitation »
(notamment dans les contrats d'assurance), mais l'équivalent de l'expres
sion « pure economic loss » ne figure dans aucun ouvrage.
La raison en est sans doute que le système français impose de tenir
compte de toutes les conséquences que le dommage a pu engendrer au
détriment de la victime, sans que tel ou tel chef de préjudice connaisse
un sort particulier. Tout au plus parlera-t-on parfois de « dommage acces
soire ».
Nous pouvons donc nous rallier à la signification la plus large qui
semble retenue par la doctrine anglo-saxonne et germanique, c'est-à-dire
l'atteinte à un intérêt patrimonial, à titre principal, ou par répercussion
d'un dommage à la personne ou d'un dommage aux biens, en soulignant
que cette définition ne prête pas, en droit français, à des conséquences
comparables à celles qui inquiètent les juristes d'autres pays.
Il faut dire que le droit français qui, pourtant, ne connaît pas de
dispositions générales spécifiques au dommage, permet de tout indemniser
ou presque : tout d'abord, et sur le plan de la théorie juridique, l' indemnisa-
Professeur à l'Université Montesquieu Bordeaux IV. 368 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 2-1998
tion généralisée des dommages résulte des termes très larges de l'arti
cle 1382 du Code civil, texte qui ne distingue pas selon telle ou telle
catégorie de préjudice ; ensuite, et sur le plan de la politique juridique,
d'un côté la jurisprudence condamne d'autant plus facilement le responsa
ble lorsque celui-ci est assuré, de l'autre l'assurance se développe pour
prendre en charge des responsabilités devenues quasiment systématiques.
La responsabilité se nourrit donc de l'assurance, et inversement. Et si,
par cas, il n'y a pas de « responsable », la loi crée des fonds de garantie !
De sorte que l'on peut se demander si, insensiblement, le droit français
de la civile ne devient pas un droit de la réparation.
Certes, l'exigence de réparation y est certainement plus forte pour
les atteintes à la personne que pour les atteintes aux biens et, a fortiori,
les pertes économiques qui en découlent, mais, par principe, la réparation
de ce préjudice est gouverné, tout comme les autres, par la « règle d'or »
de l'équivalence entre la réparation et le dommage, sans qu'interfère en
principe la moindre distinction entre les différentes catégories de préjudi
ces.
Cependant, même si le principe de réparation intégrale demeure un
dogme du droit français, force est de constater que les entorses se multi
plient, à tel point que par un cheminement inverse, semble-t-il, de celui
des droits anglais et germanique notamment, l'on peut se demander si
les exceptions devenues de plus en plus nombreuses ne vont pas mettre
sérieusement en cause l'indemnisation généralisée de tous les préjudices.
Le droit positif français, tout en affichant un libéralisme de façade,
opère donc une jonction fort intéressante avec les droits voisins, sans
pour autant entraîner une multiplication anormale des litiges (ne serait-
ce que parce que le pouvoir discrétionnaire du juge empêche de prédire
ce qui sera jugé).
L'équilibre semble alors pouvoir être réalisé de la manière suivante :
tous les préjudices sont en principe réparés entièrement si le juge estime
que le dommage est direct et certain, mais l'évolution du système juridique
tend à privilégier la réparation des dommages personnels, ou bien interdit
de ne pas les réparer.
Autrement dit, d'un côté, l'exigence de causalité commande le prin
cipe de réparation dans les limites raisonnables tracées par le pouvoir
souverain du juge, de l'autre l'influence de la faute et les exigences
économiques se conjuguent pour multiplier les tempéraments au principe,
même si ce dernier n'est pas près d'être renversé.
I. LE PRINCIPE DE REPARATION
Entre l'impératif de justice qui conduit — idéalement — à compenser
tous les dommages et l'impératif financier, et malgré le particularisme des
pertes purement économiques (aléatoires et éventuellement démesurées), le
droit français indemnise, par principe, ce type de préjudice sans lui faire,
a priori, un sort particulier. C. LAPOYADE-DESCHAMPS : REPARATION DU PREJUDICE ÉCONOMIQUE 369
Cette solution, fondée sur le principe de réparation intégrale, est
subordonnée à des conditions jurisprudentielles très souples liées aux seuls
caractères du dommage.
A. — Le fondement de la réparation
La règle de l'équivalence entre la réparation et le dommage se présente
comme une sorte de principe général du droit ', exprimée de manière
parfois assez poétique par la doctrine (« faire que le mal semble n'avoir
été qu'un rêve », selon M. Carbonnier), formulée par la Cour de cassation
comme une évidence, mais qui peut se réclamer aussi d'un texte : selon
l'article 1149 du Code civil, « les dommages et intérêts dus au créancier
sont, en général, de la perte qu'il a faite et du gain dont il a été privé... ».
Cet article, qui figure au chapitre des contrats mais qui a été étendu
sans peine (comme la force majeure par exemple) au domaine de la
responsabilité délictuelle, a conduit la jurisprudence à proclamer, en une
formule constante, que « le propre de la responsabilité est de rétablir,
aussi exactement que possible, l'équilibre détruit par le dommage et de
replacer la victime dans la situation où elle se serait trouvée si l'acte
dommageable n'avait pas eu lieu».
Ce principe de réparation intégrale («full compensation »), qui appar
aît somme toute comme une évidence et qui est loin d'être inconnu hors
de l'hexagone, n'en constitue pas moins une règle forte et fructueuse :
— fructueuse, puisque ce principe a notamment permis à la jurispru
dence d'évaluer le montant des dommages et intérêts à la date la plus
proche de la décision qui les octroie ; de prendre en compte, au cas de
destruction du bien, la valeur de reconstruction (pour les immeubles, et
sans déduction de vétusté ni des défauts antérieurs 2), ou la valeur de
remplacement (pour les meubles, et non la valeur vénale comme le suggèr
ent volontiers les assureurs auto...) ; d'interdire de prendre en considérat
ion un événement futur ou incertain, tel un remariage possible de la
victime, pour réduire l'indemnisation 3 ; ni de déduire les impôts au cas
de perte de revenus 4.
Toutes ces conséquences entraînent d'ailleurs à penser que, parfois,
l'indemnisation procure un enrichissement à la victime, celle-ci étant au
surplus totalement libre d'employer ou non les dommages et intérêts pour
réparer son préjudice 5.
Sous un autre angle, il est possible aussi de déceler dans cette « resti-
tutio in integrum » l'impuissance de notre système juridique, réduit à
guérir plutôt qu'à prévenir, mais il faut tout de même noter un effort
doctrinal 6 et législatif (action en suppression des clauses abusives intro-
1 Peut-êtr

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