Baccalauréat Philosophie 2016 - Série S - Sujet 2

Sujets

• BAC

Informations

• Publié par: lewebpedagogique
• Publié le: 15 juin 2016
• Nombre de lectures: 5 501
• Langue: Français

Extrait

Corrigé : Baccalauréat 2016 Philosophie série S sujet 2 Faut‐il démontrer pour savoir ?

Le sujet interroge ici le rapport du savoir à la démonstration nonpas en demandant si la démonstrationpermet d'aboutir à un savoir mais en demandant si tout savoir nécessite une démonstration.

En d'autres termes : pour qu'on puisse parler de "savoir" faut-il nécessairement être passé par une démonstration ? Des mathématiciens penseront peut-être spontanément que la réponse estpositive,pourtant n'ya-t-ilpas beaucoupde chosesque nous savons sans être passés par une démonstration, à commencer par notre identité ?

Il faut veiller cependant à ne pas partir dans une confusion entre savoir et croyance en disant que l'on "sait" ce dont on est juste convaincu.

Partie I

On peut penser d'abord que la démonstration est le plus sûr moyen de savoir, par opposition à la simple opinion, aux croyances fondées sur des impressions ou des préjugés.

C'est à la démarche de Descartes que l'on peut penser ici, du moins lorsqu'il expose dans leDiscours de la méthodeson souci de construire de "longues chaînes de raison" dont il faut vérifier soigneusement chaque maillon.

La démonstration fait, en effet, appel à la raison. Lorsqu'elle est claire, elle peut être comprise et refaite par tout esprit de bonne foi, elle peut donc permettre un assentiment universel, comme on le voit dans les mathématiques.

Le théorème de Pythagore, parce qu'il est démontré, est toujours vrai malgré les siècles écoulés et il est utilisé dans le monde entier. Cependant, s'il faut démontrer pour savoir, les propositions dont nous nous servons pour démontrer doivent-elles aussi être démontrées ?

Partie II

Dès l'antiquité les sceptiques avaient remarqué que nos démonstrations nécessitaient des propositions admises sans démonstration.

Montaigne les reprend dans le chapitre XII du livre II desEssais,Apologie de Raymond Sebond. Il dit ainsi "Nous nous promenons sur nos pas". Il pense sans doute aux

syllogismes hérités d'Aristote comme "Tous les hommes sont mortels, Socrate est un homme, donc Socrate est mortel". On voit facilement ici que la démonstration suppose d'admettre la première proposition.

S’il faut démontrerpour savoir, alors il faut aussi démontrer lespropositionsqui nous servent à démontrer et ainsi jusqu'à l'infini. Ce qui veut dire que la démonstration n'est jamais finie et que, donc, nous ne savons rien. D'où le scepticisme de Montaigne.

Partie III

Descartes, qui connaissait Montaigne, a cherché à échapper à ce problème en donnant l'évidence comme critère de vérité. Ainsi la découverte du cogito : "je pense doncje suis" est une véritable expérience spirituelle vécuepar Descartes à l'issue d'un travail d'analysequi l'a conduit à mettre en doute tout ce que l'on prend habituellement pour vrai, y compris les "vérités mathématiques" avec l'hypothèse d'un "malin génie" qui pourrait le tromper.

Ce critère d'évidence sera reprispar Spinozaqui distingue dans son Éthique, trois modes de connaissance. Lepremier, leplus faible, est celui de l'opinion, le second est celui de la démonstration rationnelle, le troisième celui de la "connaissance du troisième genre" est celui d'une expérience vécue de la vérité.

Démontrer ne suffit pas, il faut vivre la vérité intérieurement.