Langage, imaginaire et réalité - article ; n°1 ; vol.7, pg 787-797
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Description

Annexes des Cahiers de linguistique hispanique médiévale - Année 1988 - Volume 7 - Numéro 1 - Pages 787-797
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié le 01 janvier 1988
Nombre de lectures 31
Langue Français

Extrait

Roch Valin
Langage, imaginaire et réalité
In: Annexes des Cahiers de linguistique hispanique médiévale, volume 7, 1988. Hommage à Bernard Pottier. pp.
787-797.
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Valin Roch. Langage, imaginaire et réalité. In: Annexes des Cahiers de linguistique hispanique médiévale, volume 7, 1988.
Hommage à Bernard Pottier. pp. 787-797.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/cehm_0180-9997_1988_sup_7_1_2169IMAGINAIRE ET RÉALITÉ LANGAGE,
U est de-ci de-là fait allusion chez Gustave Guillaume au rôle de
l'imaginaire dans la construction du langage. Nulle part, cependant,
n'est directement abordé le problème des rapports du langage et de
l'imaginaire, ni non plus, a fortiori, ceux que le langage établit entre
l'imaginaire et la réalité. Poser ce complexe problème, à travers
le rapport substantif/article, est le but, modeste, que l'on se propose
dans le présent essai.
L'abord d'un pareil sujet ne va toutefois pas sans imposer,
d'entrée de jeu, certaines précautions et précisions, appelées par la
plurivocité de chacun des termes retenus pour servir d'intitulé aux
considérations qui vont suivre. Commençons par le mot réalité,
dont nous disons tout de suite qu'il sera ici employé pour désigner
tout ce qui existant sous quelque forme et en quelque lieu que ce
soit (univers physique extra-mental ou univers psychique intra-
mental) est susceptible de constituer un objet de langage, autrement
dit se présente comme une chose dont on puisse parler et dire quelque
chose. En ce sens, les mots imaginaire et langage qu'inclut notre intitulé
recouvrent des réalités au même titre que le mot réalité lui-même.
Le terme imaginaire, lui, appelle un commentaire plus circonstanc
ié, car même si dans son ordre qui est l'univers endopsychique de
l'homme associé à l'intériorité même de sa pensée il évoque bel et
bien, ainsi qu'on vient de le dire, une réalité, l'usage courant l'oppose
sans cesse au réel, donnant par là à entendre que ce à quoi on l'accro
che comme qualificatif n'a pas de réalité en dehors de l'univers en
dopsychique humain, où il apparaît comme un produit de l'imaginat
ion. Mais ainsi entendue, la notion d'imaginaire demeure encore
chargée d'une double ambiguïté, car il peut être satisfait à la situation
mentale qu'elle décrit d'au moins trois manières différentes.
Il existe en effet un premier mode de fonctionnement de l'imagi
nation dans lequel le produit de celle-ci est vu appartenir à un univers
extra-mental fictif dont les éléments constituants ne sont d'aucune
manière astreints à la condition de devoir accuser un rapport de
conformité avec des éléments de l'univers exo-psychique et de se
présenter, à ce titre, comme des réalités percevables susceptibles de
s'intégrer à un vécu expérientiel. Cette situation est celle où nous
place l'imagination artistique, dont les conditions de fonctionnement
sont à l'opposé de celles qui prévalent dans le jeu de l'imagination
scientifique.
Ce qui est en effet demandé à celle-ci, c'est, à partir de faits 788 ROCH VALIN
directement percevables appelant explication, de reconstituer au
regard de la pensée, dans le cadre d'une théorie, le ou les faits expli-
cateurs cachés et, comme tels, non directement percevables qui,
une fois imaginés, apparaissent définir les conditions nécessaires
d'existence de faits directement percevables que la théorie fait voir
comme en étant, en concevabilité, les conséquences non moins nécess
aires. De sorte que ce à quoi nous affronte, en pensée, le contenu
imaginaire d'une théorie, c'est une réalité dont seule la représentation
existe en imagination, le lieu d'existence de cette réalité étant postulé
être l'univers extra-mental, exploré dans des régions de lui-même
qui échappent à toute percevabilité directe. C'est cette situation
épistémique qui a fait dire au philosophe Bachelard qu'« il n'existe
de science que du caché ». A quoi il y a lieu d'ajouter, pour rejoindre
les perspectives qui sont ici les nôtres, que cette partie occulte de la
réalité extra-mentale dont nous entretiennent les sciences, nous n'avons
d'autres voies d'accès à elle que celles de l'imagination, guidée dans
ses départs par l'observation, ce qui fait d'elle, au sens le plus strict
du terme, une réalité imaginaire, en ce sens que seuls peuvent avoir
conscience de son existence ceux dont la pensée est capable de l'ima
giner ou, pour mieux dire, de la concevoir, à défaut de pouvoir direct
ement la percevoir.
Et là ne s'arrête pas, en science, le rôle de l'imagination, ni
le domaine, par conséquent, de l'imaginaire. Les théories scientifiques
seraient impuissantes à expliquer l'univers exo-psychique plus
couramment dit physique objet de nos observations, si elles ne
disposaient, pour construire la concevabilité du monde qu'elles
nous proposent, de l'indispensable instrument de concevabilité qu'est
pour elles l'outil mental des mathématiques. Or, là aussi, nous attend
l'imaginaire, et un imaginaire d'une nature toute particulière.
Pour l'ordinaire, on appelle imaginaire, en mathématiques, tout
nombre et, plus généralement, tout élément de concevabilité
auquel ne saurait être liée, dans l'univers extra-mental, l'image d'une
réalité concrète dotée de percevabilité. On y parle non seulement de
nombres imaginaires, mais aussi de droites imaginaires, d'espaces
imaginaires, etc., et une propriété commune à toutes ces imaginaires
est de n'emporter de référence à aucune réalité dont le lieu d'existence
puisse être conçu autre que l'intériorité même de la pensée, qui est
alors consciente de leur existence en elle et peut, de ce fait, les utiliser,
le moment venu, comme des instruments heuristiques permettant
d'opérer des mesures portant sur l'univers extérieur au psychisme
humain. Autrement dit, ces imaginaires auxquelles il est impossible
de trouver, dans l'univers exo-psychique, des réalités observables
directement ou indirectement qui ontologiquement leur correspondent
sont, comme les théories elles-mêmes auxquelles elles s'intègrent,
des éléments de concevabilité de la réalité dont, précisément, nous
entretiennent les théories, ce par quoi elles deviennent, si l'on peut dire,
des espèces de ponts-levis entre l'esprit et le réel, entre ce que définit
qualitativement le contenu conceptuel des théories et ce que s'avèrent IMAGINAIRE ET RÉALITÉ 789 LANGAGE,
habiles à mesurer, quantitativement, les instruments à l'aide desquels se
vérifie l'exactitude ou la non-exactitude des prévisions déduites à
partir des postulats théoriques posés.
Les imaginaires que met en cause l'existence du langage sont des
imaginaires de ce dernier type : comme les imaginaires mathématiques,
elles sont de purs instruments de concevabilité matérialisant les exigen
ces mêmes de la pensée et, comme telles, n'ayant pas de correspon
dance ontologique directe avec des éléments de l'univers exopsychique
observable. Elles s'en distinguent toutefois en ceci, qui est capital,
que la pensée qui les institue, les porte en elle et les marne, n'a aucune
conscience de leur existence et que leur construction est l'uvre en
imagination, non pas d'une pensée savante opérant sous le regard
et le contrôle de la conscience, mais de la pensée commune obéissant,
dans leur construction, à des impératifs secrets et inconscients que
G. Guillaume a su mettre partiellement en lumière et auxquels il a
donné le nom de mécanique intuitionnelle, les profondeurs de pensée
où s'opère la construction de ces imaginaires étant celles mêmes qui
correspondent à la réalité de ce qu'en psychomécanique du langage
on appelle le langage puissanciel, qui s'identifie à la langue dont
l'existence en nous permanente s'oppose à celle, momentanée, du
discours qui est, lui, du langage effectif.
Au nombre de ces imaginaires qui sont, au sens littéral du te

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