How psychoanalysis evolves ou La psychanalyse au risque du Figaro
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Description


Heckled by various critics, analysts are changing their practices.
It is like an old lady who lived the best ... and the worst. First flattered, especially in our country, and in Argentina, where it is imposed from the beginning of the last century as "the" psychotherapeutic method par excellence, she accused then many shots: qualified "scam "Lacan himself vilified by psychiatrists in cognitive Black Book of Psychoanalysis (The Arena, 2005), before being treated to" Freudian fable "by the philosopher Michel Onfray, psychoanalysis has fallen from its pedestal . But probably should not bury too fast. The product of the last century would be, if we are to believe his followers, doing makeover.
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Langue Français

Extrait

Comment la psychanalyse évolue
Par Pascale Senk - le 18/01/2013
Chahutés par diférentes critiques, les analystes sont en train de modiIer leurs pratiques.
Elle est comme une vieille dame qui aurait vécu le meilleur… Et le pire. D'abord adulée, notamment dans notre pays, ainsi qu'en Argentine, où elle s'est imposée dès le début du siècle dernier comme «la» méthode psychothérapeutique par excellence, elle a accusé ensuite de nombreux coups: qualiIée «d'escroquerie» par Lacan lui-même, vilipendée par les psychiatres cognitivistes dansLe Livre noir de la psychanalyse(Les Arènes, 2005), avant d'êtretraitée d'«afabulation Freudienne» par le philosophe Michel OnFray, la psychanalyse est tombée de son piédestal. Mais sans doute ne faut-il pas l'enterrer trop vite. Ce pur produit du siècle dernier serait, si l'on en croit ses adeptes, en train de faire peau neuve.
«Nous devons désormais adapter notre pratique au XXïe siècle», résume Valérie Blanco, qui appartient à une nouvelle génération de psychanalystes lacaniens et a publiéDits de divan(L'Harmattan). Cette prise de conscience sur le terrain, c'est-à-dire dans la pratique même de leur métier, de nombreux confrères de Valérie Blanco la conIrment. «Nous nous réunissons par petits groupes de praticiens pour évoquer toutes les évolutions que nous constatons dans notre pratique… Et celles que nous devons apporter», témoigne Jean-Michel Hirt, membre de l'APF (Association psychanalytique de rance) qui incarne le courant freudien.
Quand les troubles narcissiques remplacent la culpabilité
Pourquoi une telle remise en cause? Elle est d'abord imposée par les patients eux-mêmes, dont les pathologies changent. «Nous voyons beaucoup moins de névroses classiques, observe Jean-Michel Hirt. Les patients contrits deculpabilitéet d'obsessions se raréIent. Par contre, les troubles narcissiques et les addictions se multiplient.» Une mutation qui confronte les psychanalystes à de nouveaux mécanismes de défense de la part des analysants: «Là où il y avait du refoulement, il y a désormais du clivage et du déni, constate le psychanalyste. Heureusement, comme elle est une méthode dynamique, lapsychanalysesait s'adapter.»
Concrètement, cela revient aussi à s'appuyer sur une autre conception de la structure psychique. «Le trio papa/maman/Œdipe, qui représentait l'axe central de notre analyse, n'a plus autant d'importance, observe Valérie Blanco. Pour les “psychotiques ordinaires” que nous recevons désormais, des personnalités qui ont du mal à s'ancrer et à maintenir des liens, il est surtout important de favoriser, via des échanges qui tiennent plus de la conversation, des “rebranchements” à la réalité, et un décodage du monde.»
«Nous Faisons avec ce culte de l'immédiateté»
On évoquera donc beaucoup moins le passé. Et on parlera davantage des problèmes de l'ici et maintenant dont les patients veulent se débarrasser rapidement. «Nous faisons avec ce culte de l'immédiateté, admet Jean-Michel Hirt, mais il est important aussi que nos patients réalisent que leur temps interne, psychique, n'est pas le même temps que celui des horloges extérieures.» QualiIés «d'impatients», les nouveaux analysants apprennent ainsi que la psychanalyse ne répond pas aux lois de l'ore et de la demande dominantes partout ailleurs.
C'est là sans doute sa spéciIcité, et peut-être sa principale ressource: «nous sommes plus que jamais des artisans qui doivent faire du sur-mesure, et non pas une technique standardisée», résume Valérie Blanco. Conséquences: ce qui faisait le cadre incontournable de la cure, durée des séances et de l'analyse, paiement en argent cash, dispositif sur le divan et silence dominant de l'analyste, sont désormais susceptibles de s'adapter au «cas par cas». Ceux qui sont trop angoissés par l'allongement sur le divan ou au contraire par le regard du psy en face à face peuvent désormais choisir le dispositif qu'ils préfèrent, voire alterner suivant leur état. Ceux qui ne peuvent consacrer un grand budget à leur cure peuvent «négocier» un tarif à la mesure de ce qui leur est possible. Existent même aujourd'hui des lieux de soins psychanalytiques gratuits pour les populations les plus précaires, les CPCT*.
«Dites tout ce qui vous passe par la tête»
Reste comme essentiel de l'analyse la cure par la parole. «Dites tout ce qui vous passe par la tête, c'est cela la règle non modiIable des séances», résume Jean-Michel Hirt. Autre spéciIcité: la psychanalyse demeure avant tout préoccupée par la singularité du sujet. «En ce sens, dans une société de normes et d'évaluations, elle devient certainement gênante», estime Jean-Michel Hirt, qui consacre justement son dernier ouvrage àLa Dignité humaine(Éd. DDB). Mais il se réjouit de voir que le nombre de patients ne faiblit pas, et constate que ceux qui arrivent pour une première demande sont d'un genre nouveau: «Toutes classes sociales confondues - de la femme de ménage au polytechnicien - ils n'ont guère plus de 30 ans.» La vieille dame n'a pas Ini de faire parler d'elle.
* Les centres psychanalytiques de consultation et traitement. Adresses sur le site www.cause-freudienne.net/connexions/les-cpct-1
Tisseron: «ïl faut débarrasser la psychanalyse de ses scories»
Par Pascale Senk - le 18/01/2013
ïNTERVïEW - Serge Tisseron, psychiatre et psychanalyste, considère que lanalysant n'est plus obligé de passer par la soufrance. ïl vient de publier ragments d'une psychanalyse empathique (Éd. Albin Michel).
LE ïGARO . - Dans votre dernier livre, vous osez raconter votre propre analyse avec Didier Anzieu. Pourquoi avoir attendu aujourd'hui pour le Faire?
Serge TïSSERON.-J'ai suivi cette analyse diérente, et d'une certaine manière atypique, entre 1985 et 1995. ïl est vrai que j'aurais pu en parler avant, mais ç'aurait pu être mal accueilli, car la crise de la psychanalyse n'était pas encore perceptible. Aujourd'hui, on voit bien que celle-ci ne peut plus continuer de la même façon. De nouvelles méthodes thérapeutiques montrent qu'on peut être aidé sans sourir autant que dans une psychanalyse classique. Certes, une analyse n'est jamais facile, mais il est inutile de la compliquer par une attitude froide et distante. Et à l'ère d'ïnternet, le désir d'échanges est beaucoup plus grand. EnIn, j'ai écrit ce livre pour conIrmer aux analysants que demander une psychanalyse «autrement» est parfaitement légitime. D'autant plus que la froideur de l'analyste qui s'est installée en France n'est pas une règle universelle.
Pourquoi la psychanalyse Française s'en est-elle emparée?
Cela tient sans doute à l'esprit français, plus rationnel qu'empathique, mais surtout à l'histoire de la psychanalyse dans notre pays. Freud parlait beaucoup pendant les cures. Ses premiers disciples, la deuxième génération des psychanalystes, étaient donc très bavards. Ceux de la génération suivante, lassés de tant de paroles, ont décidé, Lacan à leur tête, de ne plus rien dire. L'idée d'un silence absolu de l'analyste s'est installée. Aujourd'hui, les troisième et quatrième générations d'analystes découvrent que la «neutralité bienveillante» préconisée par Freud s'est tout simplement transformée en froideur. ïls doivent donc inventer une «autre» psychanalyse et débarrasser l'ancienne des scories qui l'encombrent.
Quelles sont ces scories?
De nombreuses idées fausses circulent sur l'analyse. Par exemple, croire qu'on ne devrait y parler que des drames terribles de la vie. En réalité, la séance est faite pour parler de tout ce qui nous déroute, et les expériences positives nécessitent elles aussi que nous les intégrions dans notre vie intérieure pour nous voir, et voir le monde diéremment, et aronter les diîcultés autrement le jour où elles surviendront. Une autre idée fausse est qu'il faudrait retrouver dans son passé une vérité cachée. Mais le passé est souvent inaccessible. En analyse, on se construit une histoire personnelle et familiale plausible, et avec laquelle il devient possible de se réconcilier.
Qu'est-ce qui Fait donc la spéciIcité de la psychanalyse?
C'est un type de relation particulier, une forme de compagnonnage. ïl implique entre l'analyste et l'analysant une empathie réciproque et mutuelle, mais pas symétrique: quand on raconte sa vie intime à un analyste, lui, contrairement aux
gens avec qui nous échangeons dans la vie courante, ne nous parle pas de la sienne. Parce qu'il a lui-même fait une analyse, il a simplement un peu d'avance sur nous. Mais, comme le matre compagnon avec son apprenti, il peut toujours apprendre.
Le procès fait à Freud
Par Paul-François PaoliMis à jour le 29/04/2010 à 11:08 | publié le 21/04/2010 à 09:36Réactions(63)
Sigmund Freud à Londres en 1938. Crédits photo : AFP
Michel OnFray passe en revue la vie et l'œuvre de Sigmund reud. Le philosophe plaide avec brio, mais son livre soufre des excès du polémiste.
Le crépuscule d'une idole,l'aabulation freudienne. de Michel Onfray. Graset, 612 p., 22 euros.
Cinq ans après la polémique qui avait éclaté au moment de la parution duLivre noir de la psychanalyse, signé par un collectif de psychiatres, de philosophes et de spécialistes des thérapies comportementalistes cognitives (TCC), qui accusaient Freud d'être un imposteur ayant créé une mythologie ascientiIque incapable du moindre résultat clinique, le philosophe Michel Onfray passe à son tour à l'attaque. ïl publie une charge tonitruante qui se veut tout à la fois une sorte de psychanalyse de Freud, un bilan de sa discipline et un jugement sur les supposées implications politiques de sa pensée.
Onfray a à peu près tout lu des 6 000 pages de l'œuvre de Sigmund Freud, notamment sa correspondance avec son ami et conIdent, le médecin allemand Wilhelm Fliess, parue dans son intégralité depuis peu.Dans Le Crépuscule d'une idole, il dresse un portrait au vitriol du théoricien de la psychanalyse. Celui-ci en ressort méconnaissable. L'homme, nous dit Onfray, était cupide et cynique, il ne songeait qu'à devenir célèbre et, après avoir testé diverses techniques pour soigner les maladies nerveuses, dont celle de l'hypnose, il créa la psychanalyse. Celle-ci n'obtint guère de résultat, ce qui n'empêcha pas Freud de «réussir son coup», grâce à son génie de la propagande et de l'intimidation, puisque, selon Onfray, cette théorie est devenue une religion vénérée comme telle. La charge est lourde et le trait épais. Mais le livre fourmille de faits et d'assertions précises. ïl pose des questions comme celle-ci :
- Onfray aîrme que les hagiographes freudiens ont dissimulé certains aspects de sa vie, notamment le fait que Freud avait prétendu avoir soigné un ami de jeunesse dépendant à la morphine, Fleischl-Marxow, en lui conseillant des injections à la cocane, lesquelles auraient achevé de le tuer. Or le livre de FreudSur la cocaïne, qui évoque cet épisode, aurait disparu de la bibliographie du penseur. Pourquoi ?
- La correspondance avec Fliess, théoricien de la bisexualité qui accusa Freud de plagiat, révélerait le caractère utilitariste de celui qui, à Vienne, prenait 25 dollars de l'heure la séance, soit 450 euros aujourd'hui, et éprouvait du mépris pour des patients qu'il aurait qualiIés un jour de «racaille» juste bonne à faire progresser la connaissance des névroses en faisant, au passage, vivre les psychanalystes. Qu'est-ce à dire ?
- Les premiers patients de Freud, notamment le fameux «homme aux loups», Serge Pankeje, sont restés inguérissables. Pourquoi Freud a-t-il prétendu le contraire ?
Arrivé à ce stade, le lecteur peut à bon droit se demander pourquoi une gloire mondiale a été dévolue à un tel personnage ? Pourquoi des esprits tels que Thomas Mann ou Stefan Zweig, qui prononça son éloge funèbre, l'admiraient tant ? C'est ici qu'Onfray développe sa théorie et que son propos s'aaiblit. Selon lui, Freud, qui aurait eu une passion incestueuse pour sa mère, une aversion pour son père ainsi qu'une prédilection pour sa dernière Ille, Anna, aurait habilement
généralisé sa névrose pour en faire un paradigme universel à travers le fameux «complexe d'Œdipe».
Un «idéologue» de la contre-révolution
Le problème du livre d'Onfray, c'est qu'il démontre moins qu'il n'assène. Son argument est plus rebattu qu'il n'en a l'air. Freud en pervers qui verrait de l'inceste partout est une assez vieille antienne. Onfray a certes raison d'insister sur le fait que la théorie de l'Œdipe, comme d'ailleurs l'idée d'inconscient, relèvent de l'intuition, non de la science. Ces notions sont-elles pour autant inutiles ou inopérantes ?
EnIn, dans la dernière partie de son livre, Onfray montre le bout du nez et trahit ce qui le dérange, au fond, chez Freud. Avec sa vision noire d'un genre humain travaillé par la haine et la rivalité, Freud n'était pas un progressiste mais un conservateur. De là à en faire un homophobe, un misogyne ou un raciste, il n'y a qu'un pas…
Onfray l'accuse même d'être un «idéologue» de la contre-révolution, avec le chancelier autrichien Dolfuss et Benito Mussolini en héros présumés ! ïdéologue, Freud ? Peut-être, à ses heures, comme tout un chacun.
PourquoiLe Crépuscule d'une idole, passionnant sur le plan de l'enquête biographique, se révèle-t-il frappé du sceau du parti pris et de la véhémence quand il s'agit d'analyser l'héritage du freudisme ?
Comment en Inir avec son psy
Mots clés :psychanalyse,transfert,patient
Par
Pascale Senk - le 03/04/2011
Mettre In à sa thérapie ou à son analyse n'est pas un parcours balisé. À chacun d'inventer la meilleure manière d'en sortir.
Si entrer en psychothérapie est courageux et parfois complexe, en sortir l'est tout autant. «À chaque fois, c'est toute une histoire émotionnelle», conIe Martine, 52 ans, qui a fait plusieurs «tranches» de thérapie sur une vingtaine d'années et reconnat avoir été aidée dans ses arrêts successifs par la vie elle-même: «J'ai arrêté ma première analyse quand j'ai eu mon premier enfant. Je suis partie accoucher et ne suis pas revenue. Et dernièrement, j'ai proIté d'une importante rupture professionnelle pour quitter dans un même élan le psy qui m'écoutait me plaindre de ce travail depuis quatre ans! Cela m'a évité de discuter pendant des mois de mon envie d'arrêter.»
Pourquoi l'aaire semble-t-elle si compliquée? C'est qu'il existe peu de protocoles précis sur la In de psychothérapie. Les thérapies brèves, notamment de type TCC
(thérapies comportementales et cognitives), en proposent au patient. Nombre de séances, exercices à faire chez soi et objectifs à atteindre constituent dans ces cas une sorte de contrat thérapeutique entre le thérapeute et son client, qui sait dès le début en combien de temps il sera guéri de sa phobie des araignées ou de sa timidité pathologique.
Mais dans les nombreuses autres écoles psychothérapeutiques, une sorte de ou domine quant à l'évidence d'une In. Surtout lorsque ces méthodes font une place essentielle à l'inconscient, alors perçu comme le chef d'orchestre des relations entre un patient et son psy. Freud, père fondateur de ces cures par la parole qui reposent sur la découverte de l'inconscient, n'a en fait laissé aucune consigne précise quant à la manière de les terminer.
Le transFert
Par contre, le père de la psychanalyse a abondamment écrit sur le transfert, ce mécanisme inconscient qui amène le patient à éprouver pour son analyste des sentiments ressentis pour les adultes dans sa toute petite enfance, et à rejouer ainsi dans le présent des relations du passé.
«Si la In d'analyse est un moment si important, c'est bien parce qu'elle remet en scène nos manières de nous séparer, explique la psychanalyste ïsabel Korolitski. En cela, elle est un révélateur des stratégies inconscientes que nous empruntons pour quitter ceux que nous aimons, et dans cette décision même, fuir nos responsabilités ou au contraire, dans une évolution positive, devenir autonomes.»
Aussi, dès lors que l'analysant évoque son envie d'arrêter la cure, un véritable travail commence en réalité pour l'analyste: «Le patient se plaint de ne plus avoir de temps, d'argent pour venir… Si j'observe qu'on est justement en train d'attaquer le “roc de la castration”, cette phase où il lui faut renoncer à certaines illusions, accepter certaines limites, je considère que ce n'est pas du tout le moment d'arrêter, poursuit ïsabel Korolitski. Bien au contraire, nous allons proIter de ce désir qui s'exprime pour un faire une matière de travail vivant.»
Et cette phase d'exploration peut durer… plusieurs mois! Sophie, 47 ans, avoue avoir évoqué l'envie d'arrêter son analyse pendant deux ou trois ans. «À chaque fois, mon analyste me disait “pas maintenant”, je lui en voulais et j'étais même allée voir un de ses confrères pour préparer mon départ et être accueillie sur un autre divan; Inalement, un jour elle m'a dit: “OK, le temps est venu… Nous allons parler de cette In.” Pendant un an, nous avons encore eu des séances alors que je savais que j'allais la quitter. C'était déroutant.» Est-ce pour marquer enIn une vraie séparation que Sophie a choisi d'arriver à sa dernière séance avec un cadeau? «Je lui ai oert une belle pierre. J'avais comme besoin d'un rituel pour lui dire au revoir.»
Au revoir, mais pas adieu
Car, en réalité, le processus d'analyse n'est jamais vraiment Ini. ïsabelle Yhuel, auteur d'un texte sensible et profond qui parat ces jours-ci, Le citronnier a pris (Éd. JC Lattès), en a fait l'expérience. Quelques années après avoir fermé la porte
sur sa dernière séance, elle reçoit un faire-part de décès. Sa psychanalyste est morte.
Cette annonce provoque en elle un bouleversement émotionnel inattendu, une crise intérieure inexplicable. Son récit devient alors une enquête subjective: «Pourquoi ce décès a-t-il un tel retentissement?, se demande-t-elle. En partant, je lui avais dit “merci” mais pas “adieu”. Finalement, était-ce vraiment la In de l'analyse? J'étais partie, mais avais-je conclu?»
Mêlant recherches sur les diérentes théories concernant la In de cure et le recueil de témoignages d'autres analysants, ïsabelle Yhuel comprend qu'elle avait maintenu jusque-là son analyste sur un piédestal bien peu libérateur. Et c'est l'écriture de son livre qui lui permettre d'en Inir.
Même refermée, la porte du psy ne garantit donc pas forcément qu'on aie pris un chemin vraiment libératoire. Autant en être conscient, notamment en poursuivant le travail tout seul. C'est ce que Freud a fait une bonne partie de sa vie, et qu'il appelait l'«auto-analyse».
La guérison psychique, même sur le tard
Par Pascale Senk - le 12/12/2010
L'âge n'est plus un obstacle à l'entrée en thérapie. Les plus de 50 ans sont de plus en plus nombreux à Franchir le pas.
C'est à l'aube de ses 62 ans qu'Hélène a éprouvé «une intense sensation de vide». «Un vertige, autant à l'intérieur qu'à l'extérieur de moi, décrit-elle. En quelques mois, j'étais partie à la retraite, j'avais rompu avec mon compagnon, et mes deux parents sont décédés à quelques semaines l'un de l'autre. Ne voulant pas peser sur mes enfants, je ne savais plus à quoi me raccrocher .» Orientée par une amie, Hélène a commencé une psychothérapie analytique sous forme d'entretiens hebdomadaires d'une heure. Un an après, elle mesure les apports de ces séances : «La thérapie m'a permis de régler une succession très diîcile et de trouver enIn ma place dans ma famille. Mais elle m'a apporté bien plus : moi qui ne cessais de dire “c'est trop tard” dès qu'une opportunité se présentait, je m'étonne de découvrir encore des choses nouvelles sur moi, et sur la vie.»
ïl semble donc bien loin ce temps où Freud* n'hésitait pas à déclarer : «L'âge des malades entre en ligne de compte lorsqu'on veut établir leur aptitude à être traités par la psychanalyse. En eet, les personnes ayant atteint ou passé la cinquantaine ne disposent plus de la plasticité des processus psychiques sur laquelle s'appuie la thérapeutique - les vieilles gens ne sont plus éducables et, en outre, la quantité de matériaux à déchirer augmente indéIniment la durée du traitement.»
Aujourd'hui, peu d'aventures semblent impossibles aux baby-boomers. Et la psychothérapie est une de celles qui les attirent de plus en plus, ainsi que l'observent les professionnels de la psyché. Beaucoup l'aîrment : leur clientèle vieillit sensiblement et il est désormais fréquent de voir arriver pour une demande de première prise en charge hommes et femmes de 55, 60… voire 70 ans.
Pour Gonzague Masquelier, psychothérapeute et directeur de l'École parisienne de Gestalt, plusieurs facteurs expliquent l'arrivée en nombre des quinquas et plus dans les cabinets de psy : «Les médias ont répandu l'idée qu'une psychothérapie n'est plus réservée aux personnes sourant de pathologies lourdes, mais permet aussi de développer du mieux-être ; autre facteur, économique cette fois-ci : les seniors peuvent généralement se permettre la dépense de 60-70 euros par semaine nécessaire au processus.»
Nouveau départ
Un élément déterminant concerne aussi l'ore thérapeutique. ïl y a trente ans, la psychanalyse détenait le monopole du marché et rechignait à accueillir des patients de plus de quarante ans car les années à passer sur le divan s'annonçaient nombreuses. Aujourd'hui, de nombreuses thérapies brèves sont arrivées à maturité et permettent à tout un chacun d'entreprendre un travail sur soi qui n'excédera pas deux ou trois ans. La démarche s'entreprend le plus souvent à la faveur d'une crise familiale ou de couple. «J'accueille des maris et femmes qui, après des décennies de vie bien organisée chacun de leur côté, se retrouvent à la retraite à devoir cohabiter des journées entières et ont du mal à s'y retrouver», explique Éric Trappeniers, directeur de l'ïnstitut d'études de la famille à Toulouse. Mais ce psychothérapeute familial observe aussi la demande d'enfants de plus de 40-50 ans d'entreprendre des séances avec leurs parents âgés. «Le fait de devenir eux-mêmes parents, voire grands-parents, réveille des non-dits ou des rancœurs dont ils veulent désormais se débarrasser.»
Ainsi, dans le cas de Pascale, 57 ans, c'est l'anorexie de sa Ille anée qui a fait déclic : «Le personnel soignant de l'hôpital où elle était prise en charge m'a suggéré de me faire aider. Aujourd'hui, j'ai l'impression d'être morte à 50 ans, puis née une seconde fois grâce à la thérapie. Je vis à présent avec une intensité que je ne soupçonnais pas auparavant.»
Cette possibilité d'une nouvelle intensité de vie attire particulièrement les post-quinquas : l'évidence de pouvoir vivre encore vingt ou trente ans motive même ceux qui auparavant n'auraient pas osé franchir le pas. La psychothérapie moteur d'un nouveau départ ? «ïï est évident que le processus psychothérapeutique permet d'éveiller à un certain nombre d'éléments dormants, constate Éric Trappeniers : une envie de chanter ou de faire du piano refoulée depuis des décennies, la capacité à assumer son passé, et surtout l'urgence de trouver du sens pour le temps à venir. »
Gonzague Masquelier conIe avoir ainsi accompagné une femme de 74 ans pendant quelques années. «Elle voulait rééchir à sa vie. Toujours vierge à cet
âge, elle n'avait jamais pu laisser s'épanouir de nombreuses facettes de sa personnalité. Un jour, je l'ai vu arriver à sa séance avec un grand sourire…, elle avait rencontré un homme et franchi le pas !» Et pour ce psychothérapeute, tel est bien le message délivré par la plupart de ces patients sur le tard : «Tout est toujours possible !»
* «La Technique psychanalytique», Sigmund Freud (1904), Paris, PUF, 1953.
«ïls veulent donner plus de vie aux années devant eux»
Claudine Badey-Rodriguez (DR).
ïNTERVïEW -Claudine Badey-Rodriguez est psychothérapeute et auteur deJ'ai décidé de bien vieillir(Éd. Albin Michel).
LE ïGARO. - Quelle est selon vous la principale motivation de ceux qui entreprennent tardivement une psychothérapie ?
Claudine BADEY-RODRïGUEZ. -Le besoin de faire la paix avec soi. ïls ont vécu plusieurs décennies avec des troubles anxieux, des sentiments dépressifs ou un manque de conIance en eux. ïls s'en sont accommodés tant bien que mal, se sont dit qu'ils n'avaient pas le temps de s'en occuper, ont fait passer leur famille ou leur carrière avant leur mieux-être et un jour, ils arrivent dans nos cabinets en disant : «Stop ! J'ai assez vécu avec mes sourances ! Je ne veux plus supporter tout cela.» ïls espèrent aussi proIter pleinement des trente ou quarante ans qui, selon les statistiques, leur restent. ïls veulent donner plus de vie aux années devant eux.
Quels éléments déclencheurs les conFortent dans cette décision ?
Ce peut être soit une crise de couple ou un problème de santé, de travail… Mais je crois surtout que c'est l'avancée en âge, paradoxalement, qui donne les forces de se remettre en question. À partir de 50 ans, on peut se dire «maintenant, basta, j'ai le courage d'aronter les vieux démons du passé».
Des démons toujours actiFs quel que soit l'âge ?
Oui, car le temps en matière de guérison psychique n'est pas un allié. ïl ne peut arranger que quelques diîcultés de surface. S'il y a eu des traumatismes vécus dans la petite enfance, ceux-ci sont installés depuis cette période et provoquent des blocages et des mémoires émotionnelles dysfonctionnelles. Les dernières
études ont prouvé que ces chocs aectifs sont réellement inscrits biologiquement et neurologiquement en nous. ïl a même été considéré que les traumatismes non résolus favoriseraient la maladie d'Alzheimer, certains délires des personnes atteintes n'étant en fait que des reviviscences de ces expériences refoulées…
L'âge du patient implique-t-il de votre part une manière particulière de travailler ?
ïl est certain que plus le patient est âgé, plus il est nécessaire de procéder dans un premier temps à un étayage rigoureux. ïl faut d'abord travailler à renforcer les ressources dont il dispose pour bien asseoir sa structure intérieure, comme une maison dont on refait les poutres. À ceux qui arrivent depuis peu en thérapie, je demande souvent de me raconter dans un premier temps leurs réussites professionnelles ou amoureuses, de me parler des relations qui ont compté dans leur vie ou représentent toujours des appuis solides… Le but est d'éviter l'un des pièges de l'âge : la tentation du bilan négatif, de considérer toutes les années passées comme un gâchis, une source de remords et de regrets, parce que là on n'avance pas.
Pensez-vous que la psychothérapie aide à mieux vieillir ?
ïmpossible pour moi de dire le contraire ! Mais, outre la psychothérapie qui permet généralement d'en Inir avec des troubles les plus gênants, je pense que des ateliers d'un week-end autour de thématiques telles que «Cultiver son optimisme» ou «Savoir construire des relations à tout âge» constituent une formule très adaptée aux seniors. Je me déplace beaucoup en province et constate que ce public en est très demandeur, car cela va vraiment dans le sens du développement des ressources de chacun. Ce sont des portes d'entrée au travail sur soi, mais plus légères. Et parfois cela amène à des déclics profonds qui donneront envie d'aller plus loin.
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