L exception culturelle est-elle jouable dans le numérique (cahiers du numérique)
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L'exception culturelle est-elle jouable dans le numérique (cahiers du numérique)

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Description

« Yellow » par l’artiste Nathan Sawaya. Photo offerte par brickartist.com Patrick Bloche « Plus l’offre légale se développera,plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! » page 8 Le Big Data Sonne le glas de l’âge industriel page 12 I N N O VAT I O N / B U S I N E S S / P O L I T I Q U E NUMÉRO 4/// MAI 2013/45 € www.lescahiersdunumerique.fr3 NUMÉROS PAR AN L’EXCEPTION CULTURELLE ESTELLE Cocréation Quand le consomm’acteur devient designer page 36 DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Jamal Labed COMITÉ ÉDITORIAL : Patrick Bertrand, Cegid Valérie Ferret, Dassault Systèmes Romain Hugot, Sage Marc Mossé, Microsoft Frederic Masse, SAP Pierre-Marie Lehucher, Berger-Levrault David Monteau, INRIA DIRECTEUR DE LA RÉDACTION: Loïc Rivière RÉDACTEUR EN CHEF : Reynald Fléchaux CHEF DE PROJET : Fabrice Larrue DIRECTRICE ARTISTIQUE : Pilar Cortés SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Dominique Friocourt (Agence Edido) JOURNALISTES : Guillaume Barrières Isabelle Bellin Christophe Cayenne Romain Chabrol Diane Dufoix Emmanuel Lempert Serge Escalé Philippe Richard Jean-Baptiste Su Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation, qu’elle soit intégrale ou partielle, quel qu’en soit le procédé, le support ou le média, est strictement interdite sans autorisation de l’Association Française des Editeurs de Logiciels et Solutions Internet (Afdel), sauf cas prévu par l’article L.

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Publié le 24 juin 2015
Nombre de lectures 20
Langue Français
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Extrait

« Yellow » par l’artiste Nathan Sawaya. Photo offerte par brickartist.com
Patrick Bloche « Plus l’offre légale se développera,plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! »page 8
Le Big Data Sonne le glas de l’âge industriel page 12
I N N O VAT I O N / B U S I N E S S / P O L I T I Q U E NUMÉRO 4///MAI 2013/45 € www.lescahiersdunumerique.fr3 NUMÉROS PAR AN
L’EXCEPTION CULTURELLEESTELLE
Cocréation Quand le consomm’acteur devient designer page 36
DIRECTEUR DE LA PUBLICATION : Jamal Labed
COMITÉ ÉDITORIAL : Patrick Bertrand, Cegid Valérie Ferret, Dassault Systèmes Romain Hugot, Sage Marc Mossé, Microsoft Frederic Masse, SAP Pierre-Marie Lehucher, Berger-Levrault David Monteau, INRIA
DIRECTEUR DE LA RÉDACTION: Loïc Rivière
RÉDACTEUR EN CHEF : Reynald Fléchaux
CHEF DE PROJET : Fabrice Larrue
DIRECTRICE ARTISTIQUE : Pilar Cortés
SECRÉTAIRE DE RÉDACTION : Dominique Friocourt (Agence Edido)
JOURNALISTES : Guillaume Barrières Isabelle Bellin Christophe Cayenne Romain Chabrol Diane Dufoix Emmanuel Lempert Serge Escalé Philippe Richard Jean-Baptiste Su
Toute reproduction, représentation, traduction ou adaptation, qu’elle soit intégrale ou partielle, quel qu’en soit le procédé, le support ou le média, est strictement interdite sans autorisation de l’Association Française des Editeurs de Logiciels et Solutions Internet (Afdel), sauf cas prévu par l’article L.122-5 du Code de la propriété intellectuelle.
LES CAHIERS DU NUMÉRIQUE sont édités par
Association française des éditeurs de logiciels et solutions Internet (Afdel) - Association loi 1901 Siège : 11-17, rue de l’Amiral Hamelin 75016 Paris SIRET : 489305367 00018 ©2013 AFDEL - Tous droits réservés Dépôt légal : à parution Imprimé en France
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PERALDI D.
ÉDITO
NUMÉRIQUE : « MARQUONS UNE PAUSEEN MATIÈRE D’INVENTIVITÉ FISCALE ! »
Vque de nombreuses tentatives d’instauoilà bientôt trois ans, raciblant l’économie numétion de nouvelles taxes sectorielles riIl en résulte à ce jour desque voient régulièrement le jour. propositions de taxes sectorielles dont l’efficience a été géné ravoire dont les effets contreproductifslement mise en doute, sIl est évident que,ur l’économie nationale ont été soulignés. de par son caractère immatériel, l’économie numérique per met plus facilement une localisation optimale de ses actifs sans préjudice pour la qualité de service. Mais, loin d’être l’apanage exclusif de l’économie numérique, les pratiques d’optimisation fiscale sont le fait de grands groupes, tous secteurs confondus, tant le contexte concurrentiel en matière fiscale s’y prête en Europe ou ailleurs, et tant les montants en jeu sont considé rables. Si la préoccupation des pouvoirs publics d’un meilleur recouvrement de l’impôt est, évidemment, tout à fait légitime et qu’elle est en outre logiquement partagée par de nombreuses entreprises du numérique en particulier dans un esprit de juste concurrence, il n’est pas justifié de stigmatiser l’économie numérique sur ce point en particulier.
Bien plus, faire reposer l’explication du succès des entreprises les plus emblématiques de l’économie numérique sur la fisca lité procède d’une myopie dangereuse. Soyons clairs : en dépit de son effet levier sur les investissements, ce n’est pas une fisca lité plus favorable qui explique le succès de ces acteurs mais l’innovation, la puissance d’un écosystème, la taille du marché natif, la culture du risque et la concurrence. En démocratisant l’accès à la culture et au savoir, les outils et services numériques représentent pour beaucoup d’utilisateurs de formidables espaces de liberté d’expression et de création. Ces outils repré sentent aussi pour les entreprises la promesse d’une croissance renouvelée et d’une ouverture à l’international.
Les chaînes de valeur en sont donc bousculées et c’est à une véritable transformation de la valeur qu’on assiste. Ce mou vement est ressenti de façon particulièrement forte en France où les usages sont, dans certains secteurs, enserrés dans des cadres de régulation. La mission dévolue à Pierre Lescure vise notamment à résoudre cette contradiction qui déstabilise le modèle française de l’exception culturelle. Il faut considérer avec attention que pour les usagers, la mobilité, la flexibilité ou encore le partage sont devenus aujourd’hui des valeurs essen tielles qui vont parfois audelà de la propriété des biens… Les acteurs du numériques sont ceux qui peuvent conférer cette nouvelle « valeur » aux biens.
C’est pourquoi, quand le projet européen dévoile ses faiblesses comme en matière de recouvrement de l’impôt sur les sociétés, les solutions nationales doivent être écartées a priori, au profit des concertations internationales en cours comme c’est le cas à l’OCDE. C’est pourquoi les acteurs qui confèrent de la valeur aux réseaux et aux biens culturels ne peuvent se voir opposer de nouvelles taxes spécifiques qui créerait un internet à péage et dont les effets de bords ne seraient pas maîtrisés.
LOÏCRIVIÈRE Directeur de la rédaction
03
8.
«Plusloffrelégalesedéveloppera,plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! » Patrick Bloche, Député de Paris (PS) et Président de la Commission des Affaires culturelles et de l’Éducation
SOMMAIRE NUMÉRO 4 /// MAI 2013
04
LE GRAND ENTRETIEN
L’ESSENTIEL
LA VIE DES PÉPITES
12.
Quarter Back Le Big Data sonne le glas de l’âge industriel
06BILLET D’HU . MEUR Arrêtons d’opposer préservation de la vie privée et développement du numérique par Patrick Bertrand
07. Ils ont dit, ils ont twitté, ça a buzzé
08. « Plus l’offre légale se développera, plus le téléchargement illégal verra son attrait diminuer ! » Patrick Bloche, Député de Paris (PS) et Président de la Commission des Affaires culturelles et de l’Éducation
12.Quarter BackLe Big Data sonne le glas de l’âge industriel 16.L’événement TechDays,« Nous avons créé un forum de la transformation numérique » 17.Best of blogs Big Data : arrêtez les maths, passez à la sociologie ! Par Cédric Deniaud 18.Cent jours : la France digitaleTROIS QUESTIONS À... Benoît Thieulin, président du Conseil national du numérique « Placer très haut le principe de neutralité du Net »
20.Trophées des start-up, STS Group 22. Start Up, what’s upSculpteo, Jérôme, Featurit
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24.
Le dossierLexceptionculturelleest-ellesolubledansle numérique ?
LE DOSSIER
INNOVATION
COMMUNAUTÉS
FINANCEMENT
Illustrations iStockphoto
32.
Un business model à la loupe Joueurs de poker : Au-delà du bluff
24. L’exception culturelle estelle soluble dans le numérique ? 25.Usages : la culture enfin démocratisée 27.Exception culturelle française : stop ou encore ? 29.Des p’tites taxes, des p’tites taxes, encore des p’tites taxes ! 30.Une industrie dont le disque est rayé
32.Un business model à la loupe Publicité comportementale : « mais si, reprends un cookie… » 34.Business 2.0 Gérer ses fournisseurs en restant sur un nuage 36.La parole à l’innovation Cocréation : quand le consomm’acteur devient designer 38.EGov Facture électronique : Une étape cruciale dans la transition numérique des entreprises 39.Chronique juridique « Patriot Act » : des droits d’investigation strictement encadrés Par Kami Haeri
40. Communautés Joueurs de poker : Au-delà du bluff 42. Culture Némo : les arts numériques sur orbite ? 45.Idées Internet ou le retour de l’instinct de coopération Par Godefroy Dang Nguyen
46. TendancesLa laborieuse adaptation de l’industrie IT au cloud 48. BourseLes éditeurs français font mieux que le Nasdaq ! 49.Les échos de la Valley Comment les robots vont créer des emplois 50. Tableau de bordL’essentiel de l’économie du numérique en chiffres
05
06
BILLETD’HUMEUR
ARRÊTONS D’OPPOSERPRÉSERVATION DE LAVIE PRIVÉEETQURIEUDÉMUNEPPOTNEMVÉLED
Internet est une formidable aventure collective qui ouvre des champs infinis. Ce nouveau monde porte aussi en luimême ses dangers pour le citoyen, dangers dont la nature n’a pas vraiment changé, mais dont l’impact et les conséquences peuvent être dramatiques : cyberlynchage, cyberterrorisme, intégrité des enfants, fraudes au paiement électronique, espionnage à des fins politiques et/ou mercantiles… Les plus grands acteurs économiques de l’Internet se sont développés en donnant la possibilité à des milliards d’êtres humains d’avoir accès à ce nouveau monde, gratuitement mais avec des contreparties : les données que l’on communique, consciemment ou inconsciemment, sur notre vie et sur qui nous sommes. Cette forme moderne de troc est un progrès tant elle a permis, en un temps record à chacun et chacune d’entre nous d’avoir accès à ce formidable potentiel. Encore fautil que ce troc ne soit pas tronqué et que les « termes de l’échange » soient établis sur des bases claires, non discutables et équilibrées, car il porte, du côté de l’utilisateur, sur une donnée essentielle : sa vie personnelle – ce qu’il est, ce qu’il pense, ce qu’il fait… La clarté et la transparence des conditions de ce troc constituent D. R. donc un élément essentiel de l’équilibre LEPRIVACY PARADOX de cet « échange ». C’est une aspiration de plus en plus marquée des internautes, APPELLE UN COMPROMIS particulièrement chez les parents de nos digital natives. Internet a conduit à laINNOVANT. création d’une véritable « économie de la donnée », structurée autour des moteurs de recherche et des réseaux sociaux qui analysent finement ces profils et ces données pour les monétiser. Côté utilisateurs, des millions de personnes n’hésitent pas à exhiber leur vie privée sur Internet… mais à la stricte condition – tacite – de garanties élevées de confidentialité. Ceprivacy paradox appelle donc un compromis innovant qui permettrait de dessiner une nouvelle frontière du numérique. L’accélération du développement du numérique passe ainsi nécessairement par un équilibre entre ces aspirations en apparence contradictoires, car un internaute « sécurisé » sera le meilleur vecteur de diffusion de ces nouvelles formes de vie. Cette confiance numérique implique des règles et des instances reconnues, modernes, conscientes des enjeux de ce nouveau monde, pour les définir et les contrôler. C’est en progressant sur ce chemin de l’équilibre que le numérique se développera. Le salut de la révolution numérique, avec ses effets sur le développement de nos économies, ne viendra pas, comme le suggère certains, de l’abandon de tout contrôle sur l’utilisation des données personnelles collectées. Ce sophisme prêterait à sourire, s’il n’était gravissime. Que deviendrait, en effet, la démocratie dans un monde où l’internaute, dépossédé de luimême, serait à la merci de toutes les déviances, notamment politiques ? PATRICKBERTRAND Directeur général de Cegid
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DIGUE ANTI LOWCOST
18:40
twitté ils ont ça a buzzé
FRENCH FRIES
piou
11:57
@montebourg Arnaud Montebourg, 19-02-13 @DelphineCuny Delphine Cuny, 08-04-13 MINISTRE DU REDRESSEMENT PRODUCTIFJOURNALISTE LATRIBUNE.FR La friteuse sans huile Actifry La 4G seratelle l’arme anti lowcost des vantée par Oprah Winfrey est une opérateurs mobiles après le tsunami Free ? innovation made in France de Seb, fabriquée à Is-sur-Tille (21) BLURAY, C’EST OPEN ET GRATUIT ? en Bourgogne. @gchampeau Guillaume Champeau JOURNALISTE À NUMERAMA Donc en gros VideoLAN pourra 08-04-13 lire les BluRay, mais faudra08:07 payer et peut etre pas publier la source #Hadopi.
DROIT À PAS L’OUBLIER @Archivistes_AAF AAF, 30-03-13 ASSOCIATION DES ARCHIVISTES FRANÇAIS 20:51 Plus de 34 000 signatures pour la pétition AAF contre projet réglement européen sur données personnelles # EudataP.
LOGIQUE IMPLACABLE
10:52
FRENCH PARADOX ?
1:47 @grainnemcc Grainne McCarthy, 5-04-13 CHEF DU BUREAU PARISIEN DU WALL STREET JOURNAL ET DE DOW JONES
à Davos, Fleur Pellerin : «Jespère que nous pourrons rappeler à tous qu’entrepreneur est un mot d’origine française. »
:iscalité.
@Nicolas_Colin Nicolas Colin, 23-01-13 INSPECTEUR DES FINANCES, CO-AUTEUR DU RAPPORT SUR LA FISCALITÉ DU NUMÉRIQUE PIRATABLES Ce n’est pas surprenant qu’une transformation radicale de @reesmarc Marc Rees 14-11-12 l’économie appelle une adaptationRErDAaCTdEiUcR EaNlCeHEFdPCeINlPaACTf 16:06 Seulement un million de DVD d’Intouchables vendus ? La faute au piratage.
07
LE GRAND ENTRETIEN
D. R.
DÉPUTÉ DE PARIS (PS) ET PRÉSIDENT DE LA COMMISSION DES AFFAIRES CULTURELLES ET DE L’ÉDUCATIONDE L’ASSEMBLÉE NATIONALE PATRICKBLOCHE « PLUS L’OFFRE LÉGALE SE DÉVELOPPERA, PLUS LE TÉLÉCHARGEMENT ILLÉGAL VERRA SON ATTRAIT DIMINUER ! »
Propos recueillis par Loïc Rivière
Le numérique a profondément modifié les usages culturels et démultiplié les possibilités d’accès aux contenus. N’estce pas pour vous un moyen inédit d’encourager la démocratisa tion de l’accès à la culture ?
Il est évident que les modalités d’accès à la culture sont bou-leversées par le développement du numérique. La dématéria-lisation des supports et la communication par voie électro-nique ouvrent déjà au niveau mondial des possibilités inéga-lées d’accès aux savoirs et aux patrimoines, de formation de réseaux et de plateformes de débat, de libre expression, de diffusion et d’échange des informations et des œuvres dans leur plus grande diversité. Mais ce qui fait la différence, ce ne sont jamais les technologies mais ce qu’elles permettent et le projet de société au service duquel elles sont mises.
08
Il faut d’ailleurs se méfier du terme parfois galvaudé de« démocratisation de l’accès à la culture ». Le simple accès facilité ne suffit pas. On le voit notamment avec les politiques tarifaires qui profitent malheureusement trop souvent à ceux qui fréquentaient déjà les lieux culturels et ne créent pas for-cément l’effet escompté de les ouvrir au plus grand nombre. Internet apporte indéniablement une exceptionnelle facilité d’accès à la culture mais encore faut-il donc amener le public vers les œuvres et susciter la curiosité et l’envie. Je crois beau-coup à la nécessité d’accompagner notamment les plus jeunes dans cet apprentissage. C’est pourquoi je compte beaucoup sur les opportunités offertes à court terme par la mise en place du parcours d’éducation artistique et culturelle tout au long de la scolarité des enfants, prévu dans le projet de loi de refonda-tion de l’école de la République.
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LOREM IPSUM
LA MISSION LESCURE DOIT RÉFLÉCHIR À DE NOUVEAUX MODÈLES DE FINANCEMENT SUBSTITUTIFS.
Entre risque et opportunité, comment voyezvous l’exception culturelle s’adapter au développement des usages numé riques ?
L’actualité de l’exception culturelle est brûlante avec le pro-jet d’accord de libre-échange entre l’Union européenne et les Etats-Unis. Les autorités françaises se mobilisent actuellement pour exclure complétement les services audiovisuels du champ de cette négociation. C’est aussi le sens de la proposition de résolution européenne que nous avons rédigée avec ma col-lègue Danielle Auroi, Présidente de la Commission des affaires européennes à l’Assemblée nationale. Celle-ci a été adoptée le 9 avril dernier par la Commission des Affaires européennes et le 17 avril par la Commission des Affaires culturelles et de l’éducation que je préside. C’est un signal fort qu’a souhaité donner le Parlement. Je crois fondamentalement que la pré-servation de la diversité culturelle est un enjeu économique, culturel et d’influence essentiel pour tous les pays européens qui la promeuvent par leurs aides et leur régulation.
A l’ère du numérique, peuton parler de politique culturelle sans parler de politique industrielle ? Comment générer l’in novation dans les industries culturelles ?
L’univers du numérique est un univers très ouvert donc très permissif pour le créateur. Il permet le développement d’une société créative, qui donne à chacun la chance et la capacité,
non seulement de conduire son propre destin, mais aussi d’agir pour le bien commun. Mais parallèlement nous le voyons bien, nous avons besoin d’acteurs économiques qui puissent être à la dimension de l’univers numérique. C’est pourquoi nous menons aussi une politique visant à aider nos opérateurs au sein de ce marché mondialisé. Il reste qu’il ne faut pas comme nous l’avons déploré ces dernières années donner une trop grande prééminence aux industries culturelles, indexant la valeur artistique à la valeur marchande et le travail de l’art à la rentabilité du divertissement.
Qu’attendezvous du rapport de la mission Lescure ?
J’espère que ce rapport permettra enfin de poser les vraies questions. Les lois Dadvsi et Hadopi, contre lesquelles le groupe socialiste auquel j’appartiens s’est mobilisé ces der-nières années n’étaient que des lois de retardement qui ne proposaient malheureusement aucun modèle alternatif de financement de la création. J’attends de la mission Lescure qu’elle pose les questions essentielles et propose un certain nombre de pistes permettant ensuite au législateur de trouver les moyens de concilier financement pérenne de la création et accès élargi aux contenus culturels. La mission doit réfléchir à de nouveaux modèles de finance-ment substitutifs. En effet, il faut en chaque domaine trouver des modèles de financement qui soient adaptés aux modèles économiques sectoriels.
09
LE GRAND ENTRETIEN
JE SUIS CONVAINCU QUE LA COPIE PRIVÉE PEUT S’ADAPTER AUX ÉVOLUTIONS TECHNOLOGIQUES D’AUJOURD’HUI.
Ainsi, la question du prix unique du livre est majeure pour le livre numérique. Pour la musique, secteur le moins aidé par les pouvoirs publics et le premier touché par la révolution technologique, des dis-positifs nouveaux sont à trouver et il conviendra de redéfinir le périmètre et les missions du Centre National de la Musique victime temporaire du souci majeur de réduction des déficits publics. Enfin, s’agissant du cinéma, celui-ci dispose d’un dis-positif vertueux alimenté par trois taxes affectées au compte de soutien et les obligations des chaînes.
Le respect de la propriété intellectuelle ne semble pas être une évidence pour les jeunes générations. Pédagogie ou répression, comment y remédier ?
Cette question rejoint la précédente. Nous sommes au-delà de la problématique générationnelle. Il est temps de poser les questions essentielles et de ne plus opposer les auteurs et leurs publics qu’ils soient jeunes ou moins jeunes. Une politique juste et cohérente a plus de chance d’être acceptée qu’une loi inutile et inefficace.
10
Hadopi a été un enjeu de campagne sur les sujets numé riques et culturels. D’aucuns relèvent désormais même « un climat de modération ». Vous restez cependant un fervent opposant de la Haute Autorité ?
Je constate aussi un climat de modération mais ce n’est pas, de mon point de vue, la conséquence de l’acceptation sourde de cette autorité mais plutôt du constat partagé de son inutilité.
C’est par son maigre bilan et dès lors son inutilité, que l’Hadopi est sortie du débat public. Mais, je crois toujours, en effet, que la loi, de par des dispositions pénales que nous jugeons exor-bitantes eu égard au droit des personnes, doit être abrogée au bénéfice d’un retour au droit commun. Je crois également toujours que le budget alloué à la Hadopi serait bien mieux utilisé au service de l’aide à la création. Il s’agit de développer aujourd’hui une approche positive et de prendre en compte la réalité des usages des internautes en libérant les catalogues et en rendant l’accès aux œuvres recherchées plus facile. En effet, plus l’offre légale se développera, plus le télécharge-ment illégal verra son attrait diminuer.
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D. R.
Tandis que l’accès à ses contenus en tout lieu, à tout moment et depuis n’importe quel termi nal est en passe de devenir la norme de l’usage culturel, l’application de la copie privée au Cloud computing ne seraitelle pas une aberration ?
La question centrale autour de la copie privée n’est pas, pour moi aujourd’hui, de savoir si elle peut ou doit s’appliquer au Cloud computing mais celle de sa propre survie, alors qu’un certain nombre de contentieux et de contestations viennent la fragiliser. Si elle doit sans conteste être amenée à évoluer, je vous avoue que j’ai un attachement particulier pour la copie privée au regard de ce qu’elle représentait lors de sa création.
C’EST PAR SON MAIGRE BILAN ET DÈS LORS SON INUTILITÉ, QUE L’HADOPI EST SORTIE DU DÉBAT PUBLIC.
 En effet, la loi Lang de 1985 avait créé une exception au droit d’auteur dont la redevance pour copie privée constituait la contrepartie.
D’un côté le législateur a pris en compte les usages de nos concitoyens sans vouloir les empêcher, de l’autre, il a trouvé un moyen nouveau de rémunérer le droit d’auteur. C’est cette philosophie que nous avons défendue et je suis convaincu qu’elle peut s’adapter aux évolutions technolo-giques d’aujourd’hui. Il ne s’agit pas de plaquer la solution à tout mais de poursuivre l’idée même qui était à l’origine de la copie privée. Le droit d’auteur a toujours su s’adapter aux évo-lutions technologiques au fil des années, je suis certain que cela perdurera.
BIO EXPRESSPATRICK BLOCHE,qui a commencé sa carrière politique comme assistant parlementaire en 1981, est président (PS) de la Commission des Affaires culturelles et de l’Education de l’Assemblée nationale. Député de Paris depuis 1997, il est aussi maire du 11ème arrondissement de Paris depuis 2008. Dans le cadre de ses différents mandats, il s’est impliqué sur les questions relatives à l’économie numérique, notamment en tant que co-président du groupe d’études sur Internet, les technologies de l’information et de la communication et le commerce électronique (1997-2012). Il est également administrateur de différents espaces de programmation culturelle.
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