Le Cabinet des Antiques
134 pages
Français

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Description

La Comédie humaine - Études de moeurs. Deuxième livre, Scènes de la vie de province - Tome III. Septième volume de l'édition Furne 1842. Extrait : Chesnel fut au désespoir de s’être laissé séduire par le sieur du Croisier. Depuis ce jour, il ne retrouva plus dans les manières ni dans les paroles du marquis d’Esgrignon cette caressante bienveillance qui pouvait passer pour de l’amitié. Désormais, le marquis eut pour lui de la reconnaissance. Cette reconnaissance noble et vraie causait de perpétuelles douleurs au notaire. Il est des cœurs sublimes auxquels la gratitude semble un payement énorme, et qui préfèrent la douce égalité de sentiment que donnent l’harmonie des pensées et la fusion volontaire des âmes. Maître Chesnel avait goûté le plaisir de cette honorable amitié 

Informations

Publié par
Nombre de lectures 19
EAN13 9782824709994
Langue Français

Extrait

HONORÉ DE BALZA C
LE CABI N ET DES
AN T IQU ES
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LE CABI N ET DES
AN T IQU ES
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0999-4
BI BEBO OK
w w w .bib eb o ok.comLicence
Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
Except where otherwise noted, this work is licensed under
h tt p : / / c r e a ti v e c o m m on s . or g / l i c e n s e s / b y - s a / 3 . 0 /
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Cee œuv r e est publié e sous la licence CC-BY -SA, ce qui
signifie que v ous p ouv ez lég alement la copier , la r e
distribuer , l’ env o y er à v os amis. V ous êtes d’ailleur s
encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.LE CABI N ET DES AN T IQU ES
MONSI EU R LE BARON DE HAMMER-P U RGST ALL,
Conseiller aulique , auteur de l’*Histoir e de l’Empir e ooman* .A Cher bar on,
V ous v ous êtes si chaudement intér essé à ma longue et vaste histoir e des
mœur s françaises au dix-neuvième siè cle , et v ous av ez accordé de tels
encourag ements à mon œuv r e , que v ous m’av ez ainsi donné le dr oit
d’attacher v otr e nom à l’un des fragments qui en fer ont p artie . N’êtes-v ous
p as un des plus grav es r eprésentants de la consciencieuse et studieuse
Allemagne  ? V otr e appr obation ne doit-elle p as en commander d’autr es et
pr otég er mon entr eprise  ? je suis si fier de l’av oir obtenue que j’ai tâché
de la mériter en continuant mes travaux av e c cee intrépidité qui a
caractérisé v os études et la r e cher che de tous les do cuments sans lesquels le
monde liérair e n’aurait p as eu le monument éle vé p ar v ous. V otr e sy
mp athie p our des lab eur s que v ous av ez connus et appliqués aux intérêts de
la so ciété orientale la plus é clatante , a souv ent soutenu l’ardeur de mes
v eilles o ccup é es p ar les détails de notr e so ciété mo der ne  : ne ser ez-v ous
p as heur eux de le sav oir , v ous dont la naïv e b onté p eut se comp ar er à
celle de notr e La Fontaine  ?
Je souhaite , cher bar on, que ce témoignag e de ma vénération p our v ous
1Le Cabinet des Antiques Chapitr e
et v otr e œuv r e vienne v ous tr ouv er à D obling, et v ous y rapp elle , ainsi
qu’à tous les vôtr es, un de v os plus sincèr es admirateur s et amis.
DE BALZA C.
n
2   moins imp ortantes Préfe ctur es de France , au centr e
de la ville , au coin d’une r ue , est une maison  ; mais les nomsD de cee r ue et de cee ville doiv ent êtr e cachés ici. Chacun
appré ciera les motifs de cee sag e r etenue e xig é e p ar les conv enances. Un
é crivain touche à bien des plaies en se faisant l’annaliste de son temps  !. . .
La maison s’app elait l’hôtel d’Esgrignon  ; mais sachez encor e que
d’Esgrignon est un nom de conv ention, sans plus de ré alité que n’ en ont les
Belval, les F loricour , les D er ville de la comé die , les A dalb ert ou les Monbr euse
du r oman. Enfin, les noms des princip aux p er sonnag es ser ont ég alement
chang és. Ici l’auteur v oudrait rassembler des contradictions, entasser des
anachr onismes, p our enfouir la vérité sous un tas d’inv raisemblances et
de choses absurdes  ; mais, quoi qu’il fasse , elle p oindra toujour s, comme
une vigne mal ar raché e r ep ousse en jets vig our eux, à trav er s un vignoble
lab ouré .
L’hôtel d’Esgrignon était tout b onnement la maison où demeurait un
vieux g entilhomme , nommé Charles-Marie- Victor- Ang e Car ol, mar quis
d’Esgrignon ou des Grignons, suivant d’anciens titr es. La so ciété
commer çante et b our g e oise de la ville avait épigrammatiquement nommé son
logis un hôtel, et depuis une vingtaine d’anné es la plup art des habitants
3Le Cabinet des Antiques Chapitr e
avaient fini p ar dir e sérieusement l’hôtel d’Esgrignon en désignant la
demeur e du mar quis.
Le nom de Car ol ( les frèr es ier r y l’ eussent orthographié K arawl)
était le nom glorieux d’un des plus puissants chefs v enus jadis du Nord
p our conquérir et fé o daliser les Gaules. Jamais les Car ol n’avaient plié la
tête , ni de vant les Communes, ni de vant la Ro yauté , ni de vant l’Église , ni
de vant la Finance . Char g és autr efois de défendr e une Mar che française ,
leur titr e de mar quis était à la fois un de v oir , un honneur , et non le
simulacr e d’une char g e supp osé e  ; le fief d’Esgrignon avait toujour s été
leur bien. V raie noblesse de pr o vince , ignoré e depuis deux cents ans à
la cour , mais pur e de tout alliag e , mais souv eraine aux États, mais r
esp e cté e des g ens du p ay s comme une sup er stition et à l’ég al d’une b onne
vier g e qui guérit les maux de dents, cee maison s’était conser vé e au
fond de sa pr o vince comme les pieux charb onnés de quelque p ont de
César se conser v ent au fond d’un fleuv e . Pendant tr eize cents ans, les filles
avaient été régulièr ement marié es sans dot ou mises au couv ent  ; les
cadets avaient constamment accepté leur s légitimes mater nelles, étaient
dev enus soldats, é vê ques, ou s’étaient mariés à la cour . Un cadet de la
maison d’Esgrignon fut amiral, fut fait duc et p air , et mour ut sans p ostérité .
Jamais le mar quis d’Esgrignon, chef de la branche aîné e , ne v oulut
accepter le titr e de duc.
― Je tiens le mar quisat d’Esgrignon aux mêmes conditions que le r oi
tient l’État de France , dit-il au connétable de Luy nes qui n’était alor s à
ses y eux qu’un très-p etit comp agnon. Comptez que , durant les tr oubles,
il y eut des d’Esgrignon dé capités. Le sang franc se conser va, noble et
fier , jusqu’ en l’an 1789. Le mar quis d’Esgrignon actuel n’émigra p as  : il
de vait défendr e sa Mar che . Le r esp e ct qu’il avait inspiré aux g ens de la
camp agne préser va sa tête de l’é chafaud  ; mais la haine des v rais
SansCuloes fut assez puissante p our le fair e considér er comme émigré , p
endant le temps qu’il fut oblig é de se cacher . A u nom du p euple souv erain,
le District déshonora la ter r e d’Esgrignon, les b ois fur ent nationalement
v endus, malgré les ré clamations p er sonnelles du mar quis, alor s âg é de
quarante ans. Mademoiselle sa sœur , étant mineur e , sauva
quelques p ortions du fief p ar l’ entr emise d’un jeune intendant de la
famille , qui demanda le p artag e de présuccession au nom de sa cliente  : le
4Le Cabinet des Antiques Chapitr e
châte au, quelques fer mes lui fur ent aribués p ar la liquidation que fit la
République . Le fidèle Chesnel fut oblig é d’acheter en son nom, av e c les
denier s que lui app orta le mar quis, certaines p arties du domaine aux quelles
son maîtr e tenait p articulièr ement, telles que l’église , le pr esb ytèr e et les
jardins du châte au.
Les lentes et rapides anné es de La T er r eur étant p assé es, le mar quis
d’Esgrignon, dont le caractèr e avait imp osé des sentiments r esp e ctueux
à la contré e , v oulut r e v enir habiter son châte au av e c sa sœur
mademoiselle d’Esgrignon, afin d’amélior er les biens au sauv etag e desquels s’était
emplo yé maîtr e Chesnel, son ancien intendant, de v enu notair e . Mais,
hélas  ! le châte au pillé , démeublé , n’était-il p as tr op vaste , tr op coûteux p our
un pr opriétair e dont tous les dr oits utiles avaient été supprimés, dont les
forêts avaient été dép e cé es, et qui, p our le moment, ne p ouvait p as
tir er plus de neuf mille francs en sac des ter r es conser vé es de ses anciens
domaines  ?
and le notair e ramena son ancien maîtr e , au mois d’ o ctobr e 1800,
dans le vieux châte au fé o dal, il ne put se défendr e d’une émotion pr
ofonde en v o yant le mar quis immobile ,

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