Remontrance aux femmes et filles de la France
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Variétés historiques et littéraires, Tome IVRemonstrance aux femmes et filles de la France. Extrait du Prophète Esaye, au chapitre III de sa prophetie.1599Remonstrance aux femmes et filles de la France. Extraitdu Prophète Esaye, au chapitre III de sa prophetie.Femmes, filles de France, escoutez la tempesteDont le ciel esclatant menace vostre teste,Et, s’il y a encores lieu de conversion,Quittez vos vanités et vos bobances folles,C’est à vous qu’Esaye adresse ces parolles,Si vous estes au moins des filles de Sion.1Bourgeoises de Salem au superbe parageQui marchez le col droict, l’œil brillant et volage,Et les pieds fretillans maniez par compas,Comme le baladin quand la harpe fredonne,Ou le jeune poulain que l’escuyer fassonne,Les cordes au jarret, aux ambles et au pas,Voicy que le grand Dieu vous mande par ma bouche :La teigne rongera, dict-il, jusqu’à la souche,Ces rameaux esgarez de vos perruques d’or ;Et, de vostre poictrine allongeant l’ouverture,Je mettray tout à nud, jusque soubs la ceinture,Vostre honte au soleil, s’il vous en reste encor.Le temps, le temps viendra, changement bien estrange !Qu’on vous verra trotter pieds deschaux par la fange,Pour ces grands eschaffaulx de patins hault montez ;2Et lors, sous vos lassis à mille fenestrages ,3Raiseuls et poincts couppés , et tous vos clairs ouvrages,Ne se boufferont plus vos gros seins eshontez.Je vous arracheray de la teste pelée4Ces lunettes d’esmail à l’oreille emperlée ,Qui vous ...

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Variétés historiques et littéraires, Tome IV Remonstrance aux femmes et filles de la France. Extrait du Prophète Esaye, au chapitre III de sa prophetie. 1599
Remonstrance aux femmes et filles de la France. Extrait du Prophète Esaye, au chapitre III de sa prophetie.
Femmes, filles de France, escoutez la tempeste Dont le ciel esclatant menace vostre teste, Et, s’il y a encores lieu de conversion, Quittez vos vanités et vos bobances folles, C’est à vous qu’Esaye adresse ces parolles, Si vous estes au moins des filles de Sion.
1 Bourgeoises de Salemau superbe parage Qui marchez le col droict, l’œil brillant et volage, Et les pieds fretillans maniez par compas, Comme le baladin quand la harpe fredonne, Ou le jeune poulain que l’escuyer fassonne, Les cordes au jarret, aux ambles et au pas,
Voicy que le grand Dieu vous mande par ma bouche : La teigne rongera, dict-il, jusqu’à la souche, Ces rameaux esgarez de vos perruques d’or ; Et, de vostre poictrine allongeant l’ouverture, Je mettray tout à nud, jusque soubs la ceinture, Vostre honte au soleil, s’il vous en reste encor.
Le temps, le temps viendra, changement bien estrange ! Qu’on vous verra trotter pieds deschaux par la fange, Pour ces grands eschaffaulx de patins hault montez ; 2 Et lors, sous vos lassis à mille fenestrages, 3 Raiseuls et poincts couppés, et tous vos clairs ouvrages, Ne se boufferont plus vos gros seins eshontez.
Je vous arracheray de la teste pelée 4 Ces lunettes d’esmail à l’oreille emperlée, Qui vous font rayonner le front de toutes parts ; Je rompray vos estuis, vos boettes, vos fioles ; Et la cendre et les pleurs, dont serez toutes molles, 5 Seront vos eaux de nafe, vos poudres et vos fards.
L’or qui vous roule ès bras en cent tours de chaisnettes, 6 Et qui volle sur vous en mille papillettes, 7 Chassé par la cadène, à Babel s’enfuira ; Vos atours les suivront, et vos pendans d’oreilles, Et ce qui à Thamar vous faict sembler pareilles : Vostre laydeur pour masque assez vous suffira.
Bourrelets, affiquets, et toutes ces machines À ceindre vostre poil et le mettre en crespines, Seront pour le vieux fer et pour le vieux drapeau ; Et, pour l’assortiment de tant d’habits si braves, À grand’ peine aurez-vous, miserables esclaves, Un lambeau deschiré qui vous couvre la peau.
Ces mantelets garnis d’un pied de broderie, Bourses et espingliers, flambans de pierreries, Seront pour le butin des soldats triomphans ; Et ces miroirs polis, dont la trompeuse glace Brusle si sottement vos cœurs de vostre face, Serviront deouets à leursetits enfans.
Ces cofrets diaprez et ces fatras de chambre, Toilettes et peignoirs, soufflant le musq et l’ambre, Couvre-chefs de fin lin, dentelés alentour, Et ces coiffes de nuict faictes en diadesme, Orgueil demesuré ! s’en yront tout de mesme : Auriez-vous plus la nuict de faveur que le jour ?
Somme, au lieu de parfums, vous aurez pour escorte L’horrible puanteur d’une charogne morte ; Pour ces beaux ceinturons qui vous serrent les reins, Le ventre desbraillé comme pauvres bargères ; Vous suivrez le bagaige à grands coups d’estrivières, 8 L’injure et le mespris des goujardsinhumains.
Ces tresses, par surtout, sources de vos detresses, Qui m’ont tant irrité, trouveront des maistresses 9 Qui, raclant jusqu’au test, m’en sçauront bien venger ; Ces robes à plain fonds à gros bouffons et manches 10 Ne feroient qu’entrapperet vos bras et vos hanches : Un sac, pour bien courir, vous sera plus leger.
Ce visage poupin, qui met en jalousie Le lis accompaigné de la fleur cramoisie, Si bien contregardé, si frais, si en bon poinct, Sera plus laid qu’un More à la couleur tannée, Plus ridé qu’une peau seiche à la cheminée, Et plus rouillé qu’un pot que l’on n’escure point.
Bref, le hasle abattra la fleur de la jeunesse, Et, pour tant de muguets qui vous faisoient caresse, Brigans à qui auroit le bonheur d’estre à vous, Je jure en mon courroux, ce sera bien de grace Si à sept d’entre vous, pour en avoir la race, Le barbare relasche un captif pour espoux.
1. Jérusalem.
2. Lelacisétoit une espèce d’ouvrage de fil ou de soie fait en forme de filet ou dereseuil (réseau), dont les brins étoient entrelacez les uns dans les autres. (Dict. de Furetière.) Un certain Frédéric Vinciolo, Vénitien, avoit patente spéciale de la reine, en 1585, pour enseigner aux dames l’art de fabriquer ces tissus. On a de lui un livre curieux et devenu rare :Les singularités et nouveaux pourtraicts pour les ouvrages de lingerie... par le sieur Frederic de Vinciolo, Venitien. Paris, 1587, in-4.
3. V., sur cette sorte de dentelle à jour, notre t. 3, p. 246.
4. Petites rondelles d’émail, pierreries ou camées, dont on s’ornoit le front en les attachant avec un fil garni de perles. C’est ce que nous appelons uneFeronnière. V. notre t. 3, p. 40, note.
5. Sorte d’eau de senteur dont on ne connoît pas au juste la composition. Il en est parlé er dans Boccace (Décameron, chap., journée VIII, nouvelle 10), dans Rabelais (livre 1 55) ; et, selon Malherbe, dans sa lettre à Pereisc du 19 décembre 1626, il paroîtroit que la disgrâce de Baradas vint de ce qu’il se fâcha trop fort pour quelques gouttes de cette eau que Louis XIII lui avoit jetées au visage.
6. Paillettes.
7. C’est-à-dire ignominieusement.Être à la cadène(a la chaîne), c’étoit être à la peine, à la honte.
8. Pour goujat, valet d’armée.
9. Detesta, tesson, pot cassé.
10. C’est-à-dire tomber droits et roides comme les pans d’un pignonentrapeté, suivant l’expression des architectes.
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