Roland (Peyrat)
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Description

— Napol le PyrénéenRolandÀ P.T. Vous allez donc partir, cher ami, vous allezFuir vers notre soleil, comme les vents ailés ;Déjà la berline jalouseFrissonne sous le fouet, inquiète, en éveil,Belle et fière d'aller bondir sous le soleilOù s'endort la brune Toulouse.Que Dieu vous garde, ami ! — Mais lorsque vous aurezFranchi monts et vallons, et fleuves azurés,Villes et vieilles citadelles,La vermeille Orléans, et les Apres rochersD'Argenton, et Limoge aux trois sveltes clochers,Pleins de cloches et d'hirondelles,Et Brive et sa Corrèze, et Cahors et ses vins,Ou naquit Fénelon, le cygne aux chants divins,Qui nageait aux sources d'Homère : —Arrêtez un moment votre char agitéPour voir la belle plaine où le More a jetéLa blanche cité, votre mère ;Ces plaines de parfums, cet horizon fleuri,L'Aveyron murmurant, des pelouses chéri,Le Tescoud aux grèves pensives,Le Tarn fauve et bruyant, la Garonne aux longs flots,Qui voit navires bruns et verdoyants îlotsNager dans ses eaux convulsives ;Et puis, voyez là-bas, à l'horizon, voyezCes grands monts dans l'azur et le soleil noyés ;On dirait l'épineuse arêteD'un large poisson mort entre les océans,Ou bien quelque Babel, ruine de géants,Dont la foudre ronge la crête.Non, ce mur de granit qui clôt ce bel Éden,C'est Charlemagne, c'est Roland le PaladinQui lui fit ces grandes entailles ;Qui tronqua le Valier, blanc et pyramidal,En faisant tournoyer sa large DurandalContre les Mores, aux batailles,Les ...

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Langue Français

Extrait

À P.T.
Napol le Pyrénéen Roland
Vous allez donc partir, cher ami, vous allez Fuir vers notre soleil, comme les vents ailés ; Déjà la berline jalouse Frissonne sous le fouet, inquiète, en éveil, Belle et fière d'aller bondir sous le soleil Où s'endort la brune Toulouse.
Que Dieu vous garde, ami ! — Mais lorsque vous aurez Franchi monts et vallons, et fleuves azurés, Villes et vieilles citadelles, La vermeille Orléans, et les Apres rochers D'Argenton, et Limoge aux trois sveltes clochers, Pleins de cloches et d'hirondelles,
Et Brive et sa Corrèze, et Cahors et ses vins, Ou naquit Fénelon, le cygne aux chants divins, Qui nageait aux sources d'Homère : — Arrêtez un moment votre char agité Pour voir la belle plaine où le More a jeté La blanche cité, votre mère ;
Ces plaines de parfums, cet horizon fleuri, L'Aveyron murmurant, des pelouses chéri, Le Tescoud aux grèves pensives, Le Tarn fauve et bruyant, la Garonne aux longs flots, Qui voit navires bruns et verdoyants îlots Nager dans ses eaux convulsives ;
Et puis, voyez là-bas, à l'horizon, voyez Ces grands monts dans l'azur et le soleil noyés ; On dirait l'épineuse arête D'un large poisson mort entre les océans, Ou bien quelque Babel, ruine de géants, Dont la foudre ronge la crête.
Non, ce mur de granit qui clôt ce bel Éden, C'est Charlemagne, c'est Roland le Paladin Qui lui fit ces grandes entailles ; Qui tronqua le Valier, blanc et pyramidal, En faisant tournoyer sa large Durandal Contre les Mores, aux batailles,
Les Mores ont haché les rois goths à Xérès, Leurs bataillons fauchés sont là dans les guérets Comme des gerbes égrenées ; L'Arabe, sur les pas de Musa el Kevir, Fait voler son cheval du bleu Guadalquivir Jusques aux blanches Pyrénées.
Mais un jour que Musa el Kevir a voulu Traquer, sur leurs sommets, un vieil ours chevelu, Grimpant de pelouse en pelouse, Il monte au pic neigeux du Valier... Ébloui, Il voit un horizon en fleurs épanoui, Où, comme une perle, est Toulouse.
« Fils d'Allah, dégainez vos sabres ! fils d'Allah, Montez sur vos chevaux ! La France est au delà, Au delà de ces rocs moroses !
L'olive y croit auprès du rouge cerisier ; La France est un jardin fleuri comme un rosier, Dans la belle saison des roses. »
L'Arabie, en nos champs, des rochers espagnols S'abattit ; le printemps a moins de rossignols Et l'été moins d'épis de seigle. Blonds étaient les chevaux dont le vent soulevait La crinière argentée, et leur pied grêle avait Des poils comme des plumes d'aigle,
Ces Mores mécréants, ces maudits Sarrasins Buvaient l'eau de nos puits, et mangeaient nos raisins Et nos figues et nos grenades, Suivaient dans les vallons les vierges à l'œil noir, Et leur pariaient d'amour, à la lune, le soir, Et leur faisaient des sérénades.
Pour eux leurs grands yeux noirs, pour eux leurs beaux seins bruns. Pour eux leurs longs baisers, leur bouche aux doux parfums, Pour eux leur belle joue ovale ; Et quand elles pleuraient, criant : « Fils des démons ! » II les mettaient en croupe, et, par-dessus les monts, Ils faisaient sauter leur cavale.
« Malheur aux mécréants ! Malheur aux circoncis ! « Malheur ! » dit Charlemagne, en fronçant ses sourcils Blancs et jetant des étincelles. « Sire, disait Turpin, ne souffrez pas ainsi Qu'un Africain maudit vienne croquer ici A votre barbe vos pucelles. »
Charlemagne, Roland, Renaud de Montauban, Sont à cheval ; le gros Turpin, en titubant Sur sa selle, les accompagne : Ils ont touché les os de saint Rocamadour ; Mais du Canigou blanc aux saules de l'Adour, Les Mores ont fui vers l'Espagne.
Non, ils sont sur les monts, menaçant à leur tour ; Ils coiffent chaque pic, comme une ronde tour, De leur bannière blanche et bleue ; Hérissent le granit des crêtes du rempart, Et crient : « Chiens, ne mordez l'oreille au léopard, Du lion n'épluchez la queue ! »
Et Roland rugissait, et des vautours géants, Des troupeaux d'aigles bruns volaient en rond, béants, Faisant claquer leurs becs sonores ; Et Roland leur disait : « Mes petits oiselets, Un moment, vous allez avoir bons osselets Et belles carcasses de Mores ! »
Un mois il les faucha, sautant de mont en mont, Jetant leurs corps à l'aigle et leur âme au démon Qui miaule et glapit par saccades ; Les âmes chargeaient l'air comme un nuage noir, Et notre bon Roland, en riant, chaque soir, S'allait laver dans les cascades.
Mais tu tombas, Roland ! — Les monts gardent encor Tes os, tes pas, ta voix, et le bruit de ton cor, Et, sur leurs cimes toujours neuves, Ont, comme un Sarrasin, une nue en turban ; La cascade les ceint et les drape, en tombant, De l'écharpe d'azur des fleuves.
Nos pères, du soleil et du canon bronzés, Sont morts aussi, mordant leurs vieux sabres usés Sur tous ces rochers de l'Espagne,
Dis-moi, toi qui les vis, quand ils tombaient ainsi, Étaient-ils grands, et grand notre empereur aussi, Comme ton oncle Charlemagne ?
Ah ! si vers l'Èbre, un jour, passaient par Roncevaux, Nos soldats, nos canons, nos tambours, nos chevaux, Et nos chants tonnant dans l'espace, Lève-toi, pour les voir, lève-toi, vieux lion : Plus grande que ton oncle et que Napoléon, Viens voir la Liberté qui passe.
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