Lettres à Nina est un roman épistolaire de destins et d’amours croisés. Alexandre, protagoniste principal, écrit son amour pour une jeune fille vue dans un couloir du lycée. La belle inconnue se nomme Nina et ces deux-là s’aimeront d’un amour absolu. Alexandre déclare ses sentiments dans des dizaines de lettres qu’il n’envoie jamais à sa dulcinée. Mais un jour sans prévenir, Nina disparait de sa vie. Alexandre s’accroche à la vie malgré son amour perdu. Bientôt, il rencontre une femme dont il tombe amoureux. Mais il continue à écrire à Nina tout au long de sa vie, comme à une confidente, un alter ego. Les affres de la vie le tourmentent et Nina est le temoin invisible de son mal-être. Alexandre Climent nous livre l’histoire d’une existence bouleversée par un amour de jeunesse, d’un homme qui s’est construit autour de cette relation courte mais absolue. Les lettres se suivent et s’entrecroisent pour traduire les bouleversements occasionnés par les rencontres d’un homme.
Je dédie ce livre à Marine Qui réunit ces trois facettes de L’Amour Je t’aime
2. Beauté
1er janvier 1966 Alexandre, Ma consolation de tous les jours, la sève de mon espoir, aujourd’hui je dus m’en détacher. J’ignore le jour où nous pourrons nous revoir. Ton bonheur est si grand et ma tristesse est si profonde que je n’ai pas pu te l’annoncer autrement que par cette mal-heureuse lettre qui est à présent la lame qui transpercera ton cœur après avoir déchiré le mien.Mon premier départ aurait dû être le seul mais mon corps n’était pas prêt à se séparer du tien. Le second sera malheu-reusement le dernier. À l’heure où tu lis ces quelques mots, je serai déjà loin de toi. Quelque part en Irlande pour passer des conférences avec plusieurs producteurs de nouveaux talents que ma mère a rassemblés dans l’espoir que l’un d’eux me rende célèbre. Nous pourrons nous écrire mais ma mère m’interdit de re-venir comme je l’avais fait la première fois. Elle dit que mon talent est comme une fleur que je ne dois pas laisser faner. Je te souhaite à toi aussi beaucoup de succès parce que je sais que tu le mérites. Comme tu l’as fait pour moi, je pein-drai pour toi et nous pourrons à chaque fois nous retrouver à travers notre art. À jamais tienne. Nina
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1er janvier 1966 Chère Nina Sans bruit, sans le moindre baiser d’adieu, tu t’en allas. Nous avions partagé notre amour à travers nos rêves, blot-tis l’un contre l’autre. Mais ce matin, ce ne fut pas à tes côtés que je m’éveillai mais d’une lettre posée sur ton oreiller. Je l’ouvris et la lus tout haut pour me donner l’ssreniompi d’entendre ta voix. Alexandre
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16 mars 1966 Nina Cette lettre est la première que je t’envoie mais pas la première que je t’écris parce que je rédigeais secrètement des lettres à jamais perdues d’un présent désormais bien trop loin pour pouvoir me consoler. Ta voix ne sonne plus que dans mes rêves et ton sourire me parvient comme unelarme. La maison est vidée de toute âme sans ta présence chaleu-reuse. Le bain m’est plus froid, le lit m’est plus dur. Même le son du piano ne parvient plus à toucher mon pauvre cœur qui s’est transformé en pierre sans ta douce flamme pour le ré-chauffer. Je ne trouve désormais plus la volonté de me lever de notre lit devenu mon tombeau de désespoir. Je sens ce déses-poir entrer en moi sans que je ne puisse rien faire pour l’en empêcher. Plus les jours passent, plus mes proches s’inquiètent de ma santé. Mon teint est pâle et mon âme est sombre. Mes voisins s’inquiètent de n’entendre plus que des airs sinistres joués sur le clavier par mes mains harmonieuses. Mes concerts se font de moins en moins souvent et le pu-blic se fait de plus en plus rare. Mon producteur m’a lâché et les contrats ont été annulés. Me voici devenu pianiste de bar vivant une vie marginale, l’artiste incompris du coin. Cela fait seulement trois mois que tu es partie et me voici devenu un autre homme. Je n’ai pas réussi à t’écrire plus tôt parce que mon cœur n’était pas encore prêt. Souvent, mes proches me conseillent de rencontrer d’autres femmes et d’oublier cet amour n’ayant duré que quelques mois.
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La raison pour laquelle je t’écris aujourd’hui est que c’est le jour de mon anniversaire et que devoir le passer loin de toi le rend pire encore qu’il ne l’est déjà. Alexandre
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9 août 1966 Mélancolique, perdu à jamais dans un monde où le bien n’est qu’une pauvre espérance de cet être oublié entre les siens et qui continue à marcher sans vraiment savoir où aller. Mon espérance à moi n’est plus qu’un souvenir, une sen-sation, une émotion enfouie au plus profond de mon âme errante par-delà mon corps. Tu excuseras ma mélancolie mais je ne peux m’empêcher de croire que tu m’as oublié. Voici maintenant plus de huit mois que tu es partie et je n’ai encore eu aucune nouvelle. Rien qui puisse m’indiquer que tu vis ni où tes toiles sont exposées. N’aurais-je été qu’un simple amour, un homme parmi tant d’autres à aimer ? Je m’efforce de me le dire mais mon amour pour toi ne fait plus qu’un avec mon cœur et puisqu’il est désormais aussi dur et froid que la pierre, cet amour se voit enfermé à tout jamais. Quiconque tenterait de me l’enlever me tuerait. Mais toi, avec ta peau si douce, ton âme si tendre, ton re-gard si chaleureux caché derrière tes bouclettes dorées, je ne m’étonnerais pas de te voir déjà blottie dans les bras d’un nouvel amant. Cette pensée qui me harcèle, je l’exprime dans mes mélo-dies en souvenir de nos valses joyeuses et qui me font pleurer à chaudes larmes. Quelquefois, je me retrouve entre des bras inconnus, dans des draps qui ne sont pas les miens à faire l’amour à des vi-sages autres que le tien et que je rencontre un soir au bar. Je ne suis plus qu’un homme couchant avec qui le désire. Le garçon rayonnant que j’étais avant a sombré avec ta lettre. Alexandre