La fortune des Rougon
315 pages
Français

La fortune des Rougon

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Description

La Fortune des Rougon est le premier volume de la série Les Rougon-Macquart. Le cadre est une petite ville appelée Plassans, qui correspond à Aix-en-Provence, où Zola a passé son enfance et une partie de sa jeunesse, et à Lorgues, dans le Var, où se sont déroulés en décembre 1851 les événements insurrectionnels décrits dans le roman. Extrait : Ce fut surtout l'année suivante que ce groupe de réactionnaires prit dans la ville une influence décisive, grâce au mouvement rétrograde qui s'accomplissait à Paris. L'ensemble de mesures antilibérales qu'on nomma l'expédition de Rome à l'intérieur, assura définitivement à Plassans le triomphe du parti Rougon. Les derniers bourgeois enthousiastes virent la République agonisante et se hâtèrent de se rallier aux conservateurs. L'heure des Rougon était venue. La ville neuve leur fit presque une ovation le jour où l'on scia l'arbre de la liberté planté sur la place de la Sous-Préfecture. Cet arbre, un jeune peuplier apporté des bords de la Viorne, s'était desséché peu à peu, au grand désespoir des ouvriers républicains qui venaient chaque dimanche constater les progrès du mal, sans pouvoir comprendre les causes de cette mort lente.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 136
EAN13 9782824702438
Langue Français

Extrait

ÉMI LE ZOLA
LA FORT U N E DES
ROUGON
BI BEBO O KÉMI LE ZOLA
LA FORT U N E DES
ROUGON
1897
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0243-8
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.P RÉF A CE
   comment une famille , un p etit gr oup e d’êtr es, se
comp orte dans une so ciété , en s’ép anouissant p our donner nais-J sance à dix, à vingt i ndividus, qui p araissent, au pr emier coup
d’ œil, pr ofondément dissemblables, mais que l’analy se montr e
intimement liés les uns aux autr es. L’héré dité a ses lois, comme la p esanteur .
Je tâcherai de tr ouv er et de suiv r e , en résolvant la double question des
temp éraments et des milieux, le fil qui conduit mathématiquement d’un
homme à un autr e homme . Et quand je tiendrai tous les fils, quand j’aurai
entr e les mains tout un gr oup e so cial, je ferai v oir ce gr oup e à l’ œuv r e ,
comme acteur d’une ép o que historique , je le cré erai agissant dans la
comple xité de ses efforts, j’analy serai à la fois la somme de v olonté de chacun
de ses membr es et la p oussé e g énérale de l’ ensemble .
Les Roug on-Macquart, le gr oup e , la famille que je me pr op ose
d’étudier , a p our caractéristique le déb ordement des app étits, le lar g e
soulè v ement de notr e âg e , qui se r ue aux jouissances. P hy siologiquement,
ils sont la lente succession des accidents ner v eux et sanguins qui se
déclar ent dans une race , à la suite d’une pr emièr e lésion or g anique , et qui
déter minent, selon les milieux, chez chacun des individus de cee race , les
sentiments, les désir s, les p assions, toutes les manifestations humaines,
1La fortune des Roug on Chapitr e
natur elles et instinctiv es, dont les pr o duits pr ennent les noms conv enus
de v ertus et de vices. Historiquement, ils p artent du p euple , ils s’ir
radient dans toute la so ciété contemp oraine , ils montent à toutes les
situations, p ar cee impulsion essentiellement mo der ne que r e çoiv ent les
basses classes en mar che à trav er s le cor ps so cial, et ils racontent ainsi
le se cond empir e , à l’aide de leur s drames individuels, du guet-ap ens du
coup d’État à la trahison de Se dan.
D epuis tr ois anné es, je rassemblais les do cuments de ce grand
ouv rag e , et le présent v olume était même é crit, lor sque la chute des
Bonap arte , dont j’avais b esoin comme artiste , et que toujour s je tr ouvais
fatalement au b out du drame , sans oser l’ esp ér er si pr o chaine , est v enue me
donner le dénouement ter rible et né cessair e de mon œuv r e . Celle-ci est,
dès aujourd’hui, complète  ; elle s’agite dans un cer cle fini  ; elle de vient le
table au d’un règne mort, d’une étrang e ép o que de folie et de honte .
Cee œuv r e , qui for mera plusieur s épiso des, est donc, dans ma p
ensé e , l’Histoir e natur elle et so ciale d’une famille sous le se cond empir e .
Et le pr emier épiso de  : la Fortune des Rougon , doit s’app eler de son titr e
scientifique  : les Origines .
ÉMILE ZOLA.
Paris, le 1ʳ Juillet 1871
n
2CHAP I T RE I
’    P lassans p ar la p orte de Rome , situé e au sud
de la ville , on tr ouv e , à dr oite de la r oute de Nice , après av oirL dép assé les pr emièr es maisons du faub our g, un ter rain vague
désigné dans le p ay s sous le nom d’air e Saint-Mir e .
L’air e Saint-Mir e est un car ré long, d’une certaine étendue , qui
s’allong e au ras du tr ooir de la r oute , dont une simple bande d’herb e usé e
la sép ar e . D’un côté , à dr oite , une r uelle , qui va se ter miner en cul-de-sac,
la b orde d’une rang é e de masur es  ; à g auche et au fond, elle est close p ar
deux p ans de muraille r ong és de mousse , au-dessus desquels on ap er çoit
les branches hautes des mûrier s du Jas-Meiffr en, grande pr opriété qui a
son entré e plus bas dans le faub our g. Ainsi fer mé e de tr ois côtés, l’air e est
comme une place qui ne conduit nulle p art et que les pr omeneur s seuls
trav er sent.
Anciennement, il y avait là un cimetièr e placé sous la pr ote ction de
Saint-Mir e , un saint pr o v ençal fort honoré dans la contré e . Les vieux de
3La fortune des Roug on Chapitr e I
P lassans, en 1851, se souv enaient encor e d’av oir v u deb out les mur s de
ce cimetièr e , qui était r esté fer mé p endant des anné es. La ter r e , que l’ on
g or g e ait de cadav r es depuis plus d’un siè cle , suait la mort, et l’ on avait dû
ouv rir un nouv e au champ de sépultur es à l’autr e b out de la ville .
Abandonné , l’ancien cimetièr e s’était épuré à chaque printemps, en se couv rant
d’une vég étation noir e et dr ue . Ce sol gras, dans le quel les fosso y eur s ne
p ouvaient plus donner un coup de bê che sans ar racher quelque lamb e au
humain, eut une fertilité for midable . D e la r oute , après les pluies de mai
et les soleils de juin, on ap er ce vait les p ointes des herb es qui déb ordaient
les mur s  ; en de dans, c’était une mer d’un v ert sombr e , pr ofonde , piqué e
de fleur s lar g es, d’un é clat singulier . On sentait en dessous, dans l’ ombr e
des tig es pr essé es, le ter r e au humide qui b ouillait et suintait la sè v e .
Une des curiosités de ce champ était alor s des p oirier s aux bras
tordus, aux nœuds monstr ueux, dont p as une ménagèr e de P lassans n’aurait
v oulu cueillir les fr uits énor mes. D ans la ville , on p arlait de ces fr uits av e c
des grimaces de dég oût  ; mais les g amins du faub our g n’avaient p as de
ces délicatesses, et ils escaladaient la muraille , p ar bandes, le soir , au
crépuscule , p our aller v oler les p oir es, avant même qu’ elles fussent mûr es.
La vie ardente des herb es et des arbr es eut bientôt dé v oré toute la
mort de l’ancien cimetièr e Saint-Mir e  ; la p our ritur e humaine fut
mang é e avidement p ar les fleur s et les fr uits, et il ar riva qu’ on ne sentit plus,
en p assant le long de ce clo aque , que les senteur s p énétrantes des gir oflé es
sauvag es. Ce fut l’affair e de quelques étés.
V er s ce temps, la ville song e a à tir er p arti de ce bien communal, qui
dor mait inutile . On abait les mur s long e ant la r oute et l’imp asse , on
arracha les herb es et les p oirier s. Puis on déménag e a le cimetièr e . Le sol fut
fouillé à plusieur s mètr es, et l’ on amoncela, dans un coin, les ossements
que la ter r e v oulut bien r endr e . Pendant près d’un mois, les g amins, qui
pleuraient les p oirier s, jouèr ent aux b oules av e c des crânes  ; de mauvais
plaisants p endir ent, une nuit, des fémur s et des tibias à tous les cordons
de sonnee de la ville . Ce scandale , dont P lassans g arde encor e le
souv enir , ne cessa que le jour où l’ on se dé cida à aller jeter le tas d’ os au
fond d’un tr ou cr eusé dans le nouv e au cimetièr e . Mais, en pr o vince , les
travaux se font av e c une sag e lenteur , et les habitants, durant une grande
semaine , vir ent, de loin en loin, un seul tomb er e au transp ortant des débris
4La fortune des Roug on Chapitr e I
humains, comme il aurait transp orté des plâtras. Le pis était que ce
tomb er e au de vait trav er ser P lassans dans toute sa longueur , et que le mauvais
p avé des r ues lui faisait semer , à chaque cahot, des

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