La muse du département
165 pages
Français

La muse du département

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Description

La Comédie humaine - Études de moeurs. Deuxième livre, Scènes de la vie de province - Tome II. Sixième volume de l'édition Furne 1842. Extrait : Il existe dans l’admiration qu’on inspire, ou dans l’action d’un rôle joué je ne sais quelle griserie morale qui ne permet pas à la critique d’arriver à l’idole. Une atmosphère produite peut-être par une constante dilatation nerveuse fait comme un nimbe à travers lequel on voit le monde au-dessous de soi. Comment expliquer autrement la perpétuelle bonne foi qui préside à tant de nouvelles représentations des mêmes effets, et la continuelle méconnaissance du conseil que donnent ou les enfants, si terribles pour leurs parents, ou les maris si familiarisés avec les innocentes roueries de leurs femmes ? Monsieur de La Baudraye avait la candeur d’un homme qui déploie un parapluie aux premières gouttes tombées : quand sa femme entamait la question de la traite des nègres, ou l’amélioration du sort des forçats, il prenait sa petite casquette bleue et s’évadait sans bruit avec la certitude de pouvoir aller à Saint-Thibault surveiller une livraison de poinçons, et revenir une heure après en retrouvant la discussion à peu près mûrie. S’il n’avait rien à faire, il allait se promener sur le Mail d’où se découvre l’admirable panorama de la vallée de la Loire, et prenait un bain d’air pendant que sa femme exécutait une sonate de paroles et des duos de dialectique.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 21
EAN13 9782824709949
Langue Français

Extrait

HONORÉ DE BALZA C
LA MUSE DU
DÉP ART EMEN T
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
LA MUSE DU
DÉP ART EMEN T
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-0994-9
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.  F , si les hasards ( hab ent sua fata lib elli) du
monde liérair e font de ces lignes un long souv enir , ce seraM certainement p eu de chose en comp araison des p eines que
v ous v ous êtes donné es, v ous le d’Hozier , le Chérin, le Roi d’ar mes des
ÉT U DES DE MŒU RS  ; v ous à qui les Navar r eins, les Cadignan, la
Lang e ais, les Blamont-Chauv r y , les Chaulieu, les d’ Arthez, les d’Esgrignon,
les Mortsauf, les V alois, les cent maisons nobles qui constituent
l’aristo cratie de la COMÉDI E H UMAI N E doiv ent leur s b elles de vises et leur s
ar moiries si spirituelles. A ussi L’ ARMORIAL DES ÉT U DES DE MŒU RS
I N V EN T É P AR F ERDI NAN D DE GRAMON T , GEN T I LHOMME, est-il
une histoir e complète du blason français, où v ous n’av ez rien oublié , p as
même les ar mes de l’Empir e , et que je conser v erai comme un monument
de p atience béné dictine et d’amitié . elle connaissance du vieux
lang ag e fé o dal dans le  : Pulchrè se dens, meliùs ag ens  ! des Be ausé ant  ? dans
le  : D es p artem le onis  ! des d’Esp ard  ? dans le  : Ne se v end  ! des V
andenesse  ? Enfin, quelle co queerie dans les mille détails de cee savante
iconographie qui montr era jusqu’ où la fidélité sera p oussé e dans mon
entr eprise , à laquelle v ous, p oète , v ous aur ez aidé
V otr e vieil ami,
1La muse du dép artement Chapitr e
DE BALZA C.
n
2   du Ber r y se tr ouv e au b ord de la Loir e une ville qui
p ar sa situation air e infailliblement l’ œil du v o yag eur . Sancer r eS o ccup e le p oint culminant d’une chaîne de p etites montagnes,
der nièr e ondulation des mouv ements de ter rain du Niv er nais. La Loir e
inonde les ter r es au bas de ces collines, en y laissant un limon jaune qui les
fertilise , quand il ne les ensable p as à jamais p ar une de ces ter ribles cr ues
ég alement familièr es à la Vistule , cee Loir e du Nord. La montagne au
sommet de laquelle sont gr oup é es les maisons de Sancer r e , s’élè v e à une
assez grande distance du fleuv e p our que le p etit p ort de Saint-ibault
puisse viv r e de la vie de Sancer r e . Là s’ embar quent les vins, là se débar que
le mer rain, enfin toutes les pr o v enances de la Haute et de la Basse-Loir e .
A l’ép o que où cee histoir e eut lieu, le p ont de Cosne et celui de
Saintibault, deux p onts susp endus, étaient constr uits. Les v o yag eur s v enant
de Paris à Sancer r e p ar la r oute d’Italie ne trav er saient plus la Loir e de
Cosne à Saint-ibault dans un bac, n’ est-ce p as assez v ous dir e que le
Chassez-cr oisez de 1830 avait eu lieu  ; car la maison d’Orlé ans a p artout
cho yé les intérêts matériels, mais à p eu près comme ces maris qui font
des cade aux à leur s femmes av e c l’ar g ent de la dot.
Ex cepté la p artie de Sancer r e qui o ccup e le plate au, les r ues sont plus
3La muse du dép artement Chapitr e
ou moins en p ente , et la ville est env elopp é e de ramp es, dites les Grands
Remp arts, nom qui v ous indique assez les grands chemins de la ville . A u
delà de ces r emp arts, s’étend une ceintur e de vignobles. Le vin for me la
princip ale industrie et le plus considérable commer ce du p ay s qui p
ossède plusieur s cr us de vins g énér eux, pleins de b ouquet, et assez
semblables aux pr o duits de la Bour g ogne p our qu’à Paris les p alais v ulg air es
s’y tr omp ent. Sancer r e tr ouv e donc dans les cabar ets p arisiens une
rapide consommation, assez né cessair e d’ailleur s à des vins qui ne p euv ent
p as se g arder plus de sept à huit ans. A u-dessous de la ville , sont assis
quelques villag es, Fontenay , Saint-Satur qui r essemblent à des faub our gs,
et dont la situation rapp elle les g ais vignobles de Neufchâtel en Suisse .
La ville a conser vé quelques traits de son ancienne phy sionomie , ses r ues
sont étr oites et p avé es en cailloux pris au lit de la Loir e . On y v oit encor e
de vieilles maisons. La tour , ce r este de la for ce militair e et de l’ép o que
fé o dale , rapp elle l’un des siég es les plus ter ribles de nos guer r es de r
eligion et p endant le quel les Calvinistes ont bien sur p assé les far ouches
Camér oniens de W alter Sco.
La ville de Sancer r e , riche d’un illustr e p assé , v euv e de sa puissance
militair e , est en quelque sorte v oué e à un av enir infertile , car le mouv
ement commer cial app artient à la riv e dr oite de la Loir e . La rapide
description que v ous v enez de lir e pr ouv e que l’isolement de Sancer r e ira cr
oissant, malgré les deux p onts qui la raachent à Cosne . r e , l’ or gueil
de la riv e g auche , a tout au plus tr ois mille cinq cents âmes, tandis qu’ on
en compte aujourd’hui plus de six mille à Cosne . D epuis un demi-siè cle ,
le rôle de ces deux villes assises en face l’une de l’autr e a complétement
chang é . Cep endant l’avantag e de la situation app artient à la ville
historique , où de toutes p arts l’ on jouit d’un sp e ctacle enchanteur , où l’air est
d’une admirable pur eté , la vég étation magnifique , et où les habitants en
har monie av e c cee riante natur e sont affables, b ons comp agnons et sans
puritanisme , quoique les deux tier s de la p opulation soient r estés
calvinistes.
D ans un p ar eil état de choses, si l’ on subit les inconvénients de la vie
des p etites villes, si l’ on se tr ouv e sous le coup de cee sur v eillance
officieuse qui fait de la vie privé e une vie quasi publique  ; en r e vanche , le
p atriotisme de lo calité , qui ne r emplacera jamais l’ esprit de famille , se
dé4La muse du dép artement Chapitr e
ploie à un haut degré . A ussi la ville de Sancer r e est-elle très-fièr e d’av oir
v u naîtr e une des gloir es de la Mé de cine mo der ne , Horace Bianchon, et
un auteur du se cond ordr e , Étienne Louste au, l’un des feuilletonistes les
plus distingués. L’ Ar r ondissement de Sancer r e , cho qué de se v oir soumis
à sept ou huit grands pr opriétair es, les hauts bar ons de l’Éle ction, essaya
de se couer le joug éle ctoral de la D o ctrine , qui en a fait son b our g-p our ri.
Cee conjuration de quelques amour s-pr opr es fr oissés é choua p ar la
jalousie que causait aux co alisés l’élé vation futur e d’un des conspirateur s.
and le résultat eut montré le vice radical de l’ entr eprise , on v oulut y r
emé dier en pr enant l’un des deux hommes qui r eprésentent glorieusement
Sancer r e à Paris, p our champion du p ay s aux pr o chaines éle ctions.
Cee idé e était e xtrêmement avancé e p our notr e p ay s, où, depuis
1830, la nomination des notabilités de clo cher a fait de tels pr ogrès que
les hommes d’État de viennent de plus en plus rar es à la Chambr e éle
ctiv e . A ussi ce pr ojet, d’une ré alisation assez hy p othétique , fut-il conçu
p ar la femme sup érieur e de l’ Ar r ondissement, dux femina facti , mais dans
une p ensé e d’intérêt p er sonnel. Cee p ensé e avait tant de racines dans
le p assé de cee femme et embrassait si bien son av enir , que sans un vif
et succinct ré cit de sa vie antérieur e , on

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