Le rose et le vert
91 pages
Français

Le rose et le vert

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Description

Ce court roman inachevé rédigé en un mois, peu avant qu'il ne s'attelle à la rédaction de La chartreuse de Parme, et de publication posthume, conte l'histoire d'une jeune bourgeoise allemande, Mina de Wanghel, que la mort de son père met à la tête d'une immense fortune. Extrait : Maman, dit à son tour Mina d'un air fort sérieux, le bonheur de toute ma vie est attaché à ce mensonge. A cause de ces millions jamais je ne pourrai croire qu'on m'aime. Ainsi je suis plus malheureuse que si j’étais bossue : une malheureuse jeune fille avec ce défaut peut espérer que son bon caractère, que sa patience toucheront quelqu’un, mais je suis marquée de ce sceau fatal par le destin, jamais je ne pourrai croire que je suis l’objet d’une préférence réelle, etc., etc.

Informations

Publié par
Nombre de lectures 37
EAN13 9782824711522
Langue Français

Extrait

ST EN DHAL
LE ROSE ET LE V ERT
BI BEBO O KST EN DHAL
LE ROSE ET LE V ERT
1927
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1152-2
BI BEBO OK
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Le te xte suivant est une œuv r e du domaine public é dité
sous la licence Cr e ativ es Commons BY -SA
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encourag é à le fair e .
V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.CHAP I T RE I
  ¹  la fin de 183ø que le g énéral major comte v on Landek
r e vint à K œnigsb er g sa p atrie  ; depuis bien des anné es il étaitC emplo yé dans la diplomatie pr ussienne . En ce moment, il ar
rivait de Paris. C’était un assez b on homme qui autr efois, à la guer r e , avait
montré de la brav our e , maintenant il avait p eur à p eu près constamment,
il craignait de n’êtr e p as p ossesseur de tout l’ esprit que communément
l’ on cr oit né cessair e au rôle d’ambassadeur , — M. de T alle y rand a gâté
le métier , — et de plus il s’imaginait fair e pr euv e d’ esprit en p arlant sans
cesse . Le g énéral v on Landek avait un se cond mo y en de se distinguer ,
c’était le p atriotisme  ; p ar e x emple , il de v enait r oug e de colèr e toutes les fois
qu’il r encontrait le souv enir d’Iéna. D er nièr ement, à son r etour à K
œnigsb er g, il avait fait un détour de plus de tr ente lieues p our é viter Br eslau,
p etite ville où un cor ps d’ar mé e pr ussien avait mis bas les ar mes de vant
quelques détachements de l’ar mé e française , jadis, à l’ép o que d’Iéna.
Pour ce brav e g énéral, p ossesseur légitime de sept cr oix et de deux
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crachats, l’amour de la p atrie ne consistait p oint à cher cher à r endr e la
Pr usse heur euse et libr e , mais bien à la v eng er une se conde fois de la
dér oute fatale que déjà nous av ons nommé e .
Les ré cits infinis du g énéral eur ent un succès rapide dans la so ciété de
K œnigsb er g. T out le monde v oulait l’ entendr e raconter Paris. C’ est une
ville d’ esprit que K œnigsb er g, je la pr o clamerais v olontier s la capitale de
la p ensé e en Allemagne  ; les Français n’y sont p oint aimés, mais si on
nous fait l’honneur de nous haïr , en r e vanche on méprise souv
erainement tous les autr es p euples de l’Eur op e , et de préfér ence , à ce que j’ai
r emar qué , ceux dont les qualités se rappr o chent des b onnes qualités des
Allemands.
Per sonne n’ eût é couté un v o yag eur ar rivant de Vienne ou de Madrid
et l’ on accablait de questions le tr op heur eux bavard v on Landek. Les
plus jolies femmes, et il y en a de char mantes en ce p ay s-là , v oulaient
sav oir comment était fait le b oule vard des Italiens, ce centr e du monde  ;
de quelle façon les T uileries r eg ardent le p alais du Louv r e , si la Seine p orte
des bâtiments à v oiles, comme la Vistule , et surtout si p our aller fair e une
visite le soir , à une femme , il faut absolument av oir r e çu d’ elle le matin
une p etite carte annonçant qu’ elle sera chez elle ce soir-là .
Le g énéral quoique p arlant sans cesse ne mentait p oint, c’était un
bavard à l’allemande . Il ne cher chait p as tant à fair e effet sur ses auditeur s
qu’à se donner le plaisir p o étique de se souv enir av e c élo quence des b elles
choses qu’il avait v ues autr efois dans ses v o yag es. Cee habitude de ne
jamais mentir p our fair e effet préser vait ses ré cits de la monotonie si
souv ent r epr o ché e à nos g ens d’ esprit, et lui donnait un g enr e d’ esprit.
Il était tr ois heur es du matin, le bal du banquier Pier r e W anghen, le
plus riche de la ville , était encombré p ar une foule énor me  ; il n’y avait
aucune place p our danser , et cep endant tr ois cents p er sonnes au moins
valsaient en même temps. La vaste salle , é clairé e de mille b ougies et
orné e de deux cents p etits mir oir s, présentait p artout l’imag e d’une g aîté
franche et b onne . Ces g ens-là étaient heur eux et p our le moment ne
song e aient p as uniquement comme chez nous à l’ effet qu’ils pr o duisaient
sur les autr es. Il est v rai que les plaisir s de la musique se mêlaient à l’
entraînement de la danse  : le fameux Hartb er g, la pr emièr e clarinee du
monde , avait consenti à jouer quelques valses. Ce grand artiste daignait
2Le r ose et le v ert Chapitr e I
descendr e des hauteur s sublimes du concerto ennuy eux. Pier r e W anghen
avait pr esque pr omis, à l’inter cession de sa fille Mina, de lui prêter les
cent louis né cessair es p our aller à Paris se fair e une réputation, car dans
les arts on p eut bien av oir du mérite ailleur s, mais ce n’ est qu’à Paris qu’ on
se fait de la gloir e . T out cela uniquement p ar ce qu’à Paris l’ on dit et l’ on
imprime ce qu’ on v eut ² .
Mina W anghen, l’unique héritièr e de Pier r e et la plus jolie fille de
K œnigsb er g comme lui en était le plus riche banquier , avait été prié e
à danser p ar huit ou dix jeunes g ens d’une tour nur e p arfaite , à
l’allemande s’ entend, c’ est-à-dir e av e c de grands che v eux blonds, tr op longs,
et un r eg ard aendri ou ter rible . Mina é coutait les ré cits du g énéral. Elle
laissa p asser le p etit av ertissement de l’ or chestr e  ; Hartb er g commençait
sa se conde valse qui était ravissante . Mina n’y faisait aucune aention.
Le jeune homme qui avait obtenu sa pr omesse se tenait à deux p as d’ elle ,
tout étonné . Enfin, elle se souvint de lui et un p etit signe de la main l’av
ertit de ne p as inter r ompr e  ; le g énéral dé crivait le magnifique jet d’ e au de
Saint-Cloud qui s’élance jusqu’au ciel, la chute v er s le vallon de la Seine
de ces char mants cote aux ombrag és de grands arbr es, site délicieux et qui
n’ est qu’à une p etite heur e du théâtr e de l’Op éra Buffa. Oser ons-nous le
dir e , c’était cee der nièr e imag e qui faisait tout oublier à Mina. En Pr usse
on a bien de vastes forêts, forêts très b elles et fort pior esques, mais à une
lieue de ces forêts-là , il y a de la barbarie , de la misèr e , de la pr udence
indisp ensable , sous p eine de destr uction. T outes choses tristes, gr ossièr es,
inguérissables, et qui donnent l’amour des salons dorés.
Le se cond valseur ar riva bientôt tout r oug e de b onheur  ; il avait v u
p asser tous les couples, Mina ne dansait p as  ; quelque chose s’était
opp osé à ce qu’ elle donnât la main à son pr emier p artner  ; il avait quelque
esp oir de danser av e c elle , il était iv r e de joie . Mina lui apprit p ar quelques
p ar oles brè v es et distraites qu’ elle était fatigué e et ne danserait plus. D ans
ce moment le g énéral disait b e aucoup de mal de la so ciété française
comp osé e d’êtr es se cs chez lesquels le plaisir de montr er de l’ir onie étouffe le
b onheur d’av oir de l’ enthousiasme et qui ont bien osé fair e une b
ouffon2. Cee der nièr e phrase est bar ré e d’un trait de cray on et Stendhal au-dessus a é crit  :
Pédant. N.D .L.E.
3Le r ose et le v ert Chapitr e I
nerie du sublime r oman de W erther , le chef-d’ œuv r e allemand du X V I I I ᵉ
siè cle . En pr ononçant ces p ar oles le g énéral r ele vait la tête fièr ement.
«  Ces Français, ajoutait-il, ne sortent jamais d’une ir onie dégradante p our
un homme d’honneur . Ces g ens-là ne sont p as nés p our les b e aux
sentiments qui éle ctrisent l’âme , p

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