Les chants de Maldoror
196 pages
Français
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Description

Les Chants de Maldoror sont un ouvrage en prose, composé de six parties (« chants ») et publié en 1869 par Isidore Ducasse sous le pseudonyme de Comte de Lautréamont. Le livre ne raconte pas une histoire unique et cohérente, mais est constitué d'une suite d'épisodes dont le fil conducteur est la présence de Maldoror, personnage maléfique doué de pouvoirs surnaturels. Le texte est fondé sur une esthétique de la rupture : chaque strophe peut être lue comme un fragment poétique autonome et aucun fil linéaire, qu'il soit narratif, descriptif ou discursif, n'est suivi bien longtemps. Il s'agit d'un brûlot, «politiquement incorrect», qui ne fut pas du goût des bien-pensants de l'époque. Nourri de violences, d'idées morbides et de délire - peste, pus et poux... - ce texte énigmatique et fascinant, ce texte de la démesure donne le vertige, et parfois un peu la nausée...

Informations

Publié par
Nombre de lectures 720
EAN13 9782824710846
Langue Français

Extrait

LE COMT E DE LA U T RÉAMON T
LES CHAN TS DE
MALD OROR
BI BEBO O KLE COMT E DE LA U T RÉAMON T
LES CHAN TS DE
MALD OROR
1874
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1084-6
BI BEBO OK
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V ous de v ez aribuer l’ o euv r e aux différ ents auteur s, y
compris à Bib eb o ok.I
CHAN T P REMI ER
    que le le cteur , enhardi et de v enu momentanément
fér o ce comme ce qu’il lit, tr ouv e , sans se désorienter , son che-P min abr upt et sauvag e , à trav er s les maré cag es désolés de ces
p ag es sombr es et pleines de p oison  ; car , à moins qu’il n’app orte dans
sa le ctur e une logique rig our euse et une tension d’ esprit ég ale au moins
à sa défiance , les émanations mortelles de ce liv r e imbib er ont son âme
comme l’ e au le sucr e . Il n’ est p as b on que tout le monde lise les p ag es qui
v ont suiv r e  ; quelques-uns seuls sav our er ont ce fr uit amer sans dang er .
Par consé quent, âme timide , avant de p énétr er plus loin dans de p ar eilles
landes ine xploré es, dirig e tes talons en ar rièr e et non en avant. Écoute
bien ce que je te dis  : dirig e tes talons en ar rièr e et non en avant, comme
les y eux d’un fils qui se détour ne r esp e ctueusement de la contemplation
auguste de la face mater nelle  ; ou, plutôt, comme un angle à p erte de v ue
de gr ues frileuses mé ditant b e aucoup , qui, p endant l’hiv er , v ole
puissamment à trav er s le silence , toutes v oiles tendues, v er s un p oint déter miné
1Les chants de Maldor or I
de l’horizon, d’ où tout à coup p art un v ent étrang e et fort, pré cur seur de
la tempête . La gr ue la plus vieille et qui for me à elle seule l’avant-g arde ,
v o yant cela, branle la tête comme une p er sonne raisonnable , consé
quemment son b e c aussi qu’ elle fait claquer , et n’ est p as contente (moi, non
plus, je ne le serais p as à sa place ), tandis que son vieux cou, dég ar ni de
plumes et contemp orain de tr ois g énérations de gr ues, se r emue en
ondulations ir rité es qui présag ent l’ orag e qui s’appr o che de plus en plus. Après
av oir de sang-fr oid r eg ardé plusieur s fois de tous les côtés av e c des y eux
qui r enfer ment l’ e xp érience , pr udemment, la pr emièr e ( car , c’ est elle qui a
le privilég e de montr er les plumes de sa queue aux autr es gr ues inférieur es
en intellig ence ), av e c son cri vigilant de mélancolique sentinelle , p our r
ep ousser l’ ennemi commun, elle vir e av e c fle xibilité la p ointe de la figur e
g é ométrique ( c’ est p eut-êtr e un triangle , mais on ne v oit p as le tr oisième
côté que for ment dans l’ esp ace ces curieux oise aux de p assag e ), soit à
bâb ord, soit à trib ord, comme un habile capitaine  ; et, manœuv rant av e c des
ailes qui ne p araissent p as plus grandes que celles d’un moine au, p ar ce
qu’ elle n’ est p as bête , elle pr end ainsi un autr e chemin philosophique et
plus sûr .
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Le cteur , c’ est p eut-êtr e la haine que tu v eux que j’inv o que dans le
commencement de cet ouv rag e  ! i te dit que tu n’ en r enifleras p as,
baigné dans d’innombrables v oluptés, tant que tu v oudras, av e c tes narines
or gueilleuses, lar g es et maigr es, en te r env er sant de v entr e , p ar eil à un
r e q uin, dans l’air b e au et noir , comme si tu compr enais l’imp ortance de
cet acte et l’imp ortance non moindr e de ton app étit légitime , lentement
et majestueusement, les r oug es émanations  ? Je t’assur e , elles réjouir ont
les deux tr ous infor mes de ton muse au hideux, ô monstr e , si toutefois tu
t’appliques aup aravant à r espir er tr ois mille fois de suite la conscience
maudite de l’Éter nel  ! T es narines, qui ser ont démesurément dilaté es de
contentement ineffable , d’ e xtase immobile , ne demander ont p as quelque
chose de meilleur à l’ esp ace , de v enu embaumé comme de p arfums et d’
encens  ; car , elles ser ont rassasié es d’un b onheur complet, comme les ang es
qui habitent dans la magnificence et la p aix des agré ables cieux.
2Les chants de Maldor or I
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .
J’établirai dans quelques lignes comment Maldor or fut b on p endant
ses pr emièr es anné es, où il vé cut heur eux  ; c’ est fait. Il s’ap er çut ensuite
qu’il était né mé chant  : fatalité e xtraordinair e  ! Il cacha son caractèr e tant
qu’il put, p endant un grand nombr e d’anné es  ; mais, à la fin, à cause de
cee concentration qui ne lui était p as natur elle , chaque jour le sang lui
montait à la tête  ; jusqu’à ce que , ne p ouvant plus supp orter une p ar eille
vie , il se jeta résolûment dans la car rièr e du mal. . . atmosphèr e douce  ! i
l’aurait dit  ! lor squ’il embrassait un p etit enfant, au visag e r ose , il aurait
v oulu lui enle v er ses joues av e c un rasoir , et il l’aurait fait très-souv ent,
si Justice , av e c son long cortég e de châtiments, ne l’ en eût chaque fois
empê ché . Il n’était p as menteur , il av ouait la vérité et disait qu’il était
cr uel. Humains, av ez-v ous entendu  ? il ose le r e dir e av e c cee plume qui
tr emble  ! Ainsi donc, il est une puissance plus forte que la v olonté . . .
Malé diction  ! La pier r e v oudrait se soustrair e aux lois de la p esanteur  ?
Imp ossible . Imp ossible , si le mal v oulait s’allier av e c le bien. C’ est ce que je
disais plus haut.
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .
Il y en a qui é criv ent p our r e cher cher les applaudissements humains,
au mo y en de nobles qualités du cœur que l’imagination inv ente ou qu’ils
p euv ent av oir . Moi, je fais ser vir mon g énie à p eindr e les délices de la
cr uauté  ! D élices non p assagèr es, artificielles  ; mais, qui ont commencé
av e c l’homme , finir ont av e c lui. Le g énie ne p eut-il p as s’allier av e c la
cr uauté dans les résolutions se crètes de la Pr o vidence  ? ou, p ar ce qu’ on
est cr uel, ne p eut-on p as av oir du g énie  ? On en v er ra la pr euv e dans
mes p ar oles  ; il ne tient qu’à v ous de m’é couter , si v ous le v oulez bien. . .
Pardon, il me semblait que mes che v eux s’étaient dr essés sur ma tête  ;
mais, ce n’ est rien, car , av e c ma main, je suis p ar v enu facilement à les
r emer e dans leur pr emièr e p osition. Celui qui chante ne prétend p as
que ses cavatines soient une chose inconnue  ; au contrair e , il se loue de
ce que les p ensé es hautaines et mé chantes de son hér os soient dans tous
les hommes.
3Les chants de Maldor or I
. . . . . . . . . . . . . . . . . . .
J’ai v u, p endant toute ma vie , sans en e x cepter un seul, les hommes,
aux ép aules étr oites, fair e des actes stupides et nombr eux, abr utir leur s
semblables, et p er v ertir les âmes p ar tous les mo y ens. Ils app ellent les
motifs de leur s actions  : la gloir e . En v o yant ces sp e ctacles, j’ai v oulu
rir e comme les autr es  ; mais, cela, étrang e imitation, était imp ossible . J’ai
pris un canif dont la lame avait un tranchant acéré , et me suis fendu les
chair s aux endr oits où se réunissent les lè v r es. Un instant je cr us mon but
aeint. Je r eg ardai dans un mir oir cee b ouche meurtrie p ar ma pr opr e
v olonté  ! C’était une er r eur  ! Le sang qui coulait av e c ab ondance des deux
blessur es empê chait d’ailleur s de distinguer si c’était là

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