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Publié par | bibebook |
Nombre de lectures | 34 |
EAN13 | 9782824710297 |
Langue | Français |
Extrait
HONORÉ DE BALZA C
MASSIMI LLA D ON I
BI BEBO O KHONORÉ DE BALZA C
MASSIMI LLA D ON I
Un te xte du domaine public.
Une é dition libr e .
ISBN—978-2-8247-1029-7
BI BEBO OK
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compris à Bib eb o ok.MASSIMI LLA D ON I
JA CQU ES ST RU NZ.
Mon cher Str unz, il y aurait de l’ingratitude à ne p as aacherA v otr e nom à l’une des deux œuv r es que je n’aurais pu fair e sans
v otr e p atiente complaisance et v os b ons soins. T r ouv ez donc ici un
témoignag e de ma r e connaissante amitié , p our le courag e av e c le quel v ous av ez
essayé , p eut-êtr e sans succès, de m’initier aux pr ofondeur s de la science
musicale . V ous m’aur ez toujour s appris ce que le g énie cache de difficultés
et de travaux dans ces p oèmes qui sont p our nous la sour ce de plaisir s
divins. V ous m’av ez aussi pr o curé plus d’une fois le p etit div ertissement de
rir e aux dép ens de plus d’un prétendu connaisseur . A ucuns me tax ent
d’ignorance , ne soup çonnant ni les conseils que je dois à l’un des meilleur s
auteur de feuilletons sur les œuv r es musicales, ni v otr e consciencieuse
assistance . Peut-êtr e ai-je été le plus infidèle des se crétair es ? S’il en était
ainsi, je serais certainement un traîtr e traducteur sans le sav oir , et je v eux
né anmoins p ouv oir toujour s me dir e un de v os amis.
n
1 les connaisseur s, la noblesse vénitienne est la
pr emièr e de l’Eur op e . Son Liv r e d’ or a pré cé dé les Cr oisades,C temps où V enise , débris de la Rome imp ériale et chrétienne qui se
plong e a dans les e aux p our é chapp er aux Barbar es, déjà puissante , illustr e
déjà , dominait le monde p olitique et commer cial. A quelques e x ceptions
près, aujourd’hui cee noblesse est entièr ement r uiné e . Par mi les g
ondolier s qui conduisent les Anglais à qui l’Histoir e montr e là leur av enir , il
se tr ouv e des fils d’anciens dog es dont la race est plus ancienne que celle
des souv erains. Sur un p ont p ar où p assera v otr e g ondole , si v ous allez à
V enise , v ous admir er ez une sublime jeune fille mal vêtue , p auv r e enfant
qui app artiendra p eut-êtr e à l’une des plus illustr es races p atriciennes.
and un p euple de r ois en est là , né cessair ement il s’y r encontr e des
caractèr es bizar r es. Il n’y a rien d’ e xtraordinair e à ce qu’il jaillisse des
étincelles p ar mi les cendr es. D estiné es à justifier l’étrang eté des p er
sonnag es en action dans cee histoir e , ces réfle xions n’ir ont p as plus loin,
car il n’ est rien de plus insupp ortable que les r e dites de ceux qui p arlent
de V enise après tant de grands p oètes et tant de p etits v o yag eur s.
L’intérêt du ré cit e xig e ait seulement de constater l’ opp o sition la plus viv e de
l’ e xistence humaine : cee grandeur et cee misèr e qui se v oient là chez
2Massimilla D oni Chapitr e
certains hommes comme dans la plup art des habitations. Les nobles de
V enise et ceux de Gênes, comme autr efois ceux de Pologne , ne pr enaient
p oint de titr es. S’app eler irini, D oria, Brignole , Mor osini, Sauli, Mo
cenig o , Fieschi ( Fiesque ), Cor nar o , Spinola, suffisait à l’ or gueil le plus haut.
T out se cor r ompt, quelques familles sont titré es aujourd’hui. Né anmoins,
dans le temps où les nobles des républiques aristo cratiques étaient ég aux,
il e xistait à Gênes un titr e de prince p our la famille D oria qui p ossé dait
Amalfi en toute souv eraineté , et un titr e semblable à V enise , légitimé p ar
une ancienne p ossession des Facino Cane , princes de V arèse . Les
Grimaldi, qui de vinr ent souv erains, s’ emp arèr ent de Monaco b e aucoup plus
tard. Le der nier des Cane de la branche aîné e disp ar ut de V enise tr ente
ans avant la chute de la république , condamné p our des crimes plus ou
moins criminels. Ceux à qui r e v enait cee princip auté nominale , les Cane
Memmi, tombèr ent dans l’indig ence p endant la fatale p ério de de 1796 à
1814. D ans la vingtième anné e de ce siè cle , ils n’étaient plus r eprésentés
que p ar un jeune homme ayant nom Émilio , et p ar un p alais qui p asse
p our un des plus b e aux or nements du Canale Grande . Cet enfant de la
b elle V enise avait p our toute fortune cet inutile p alais et quinze cents
liv r es de r ente pr o v enant d’une maison de camp agne situé e sur la Br enta,
le der nier bien de ceux que sa famille p ossé da jadis en T er r e-Fer me , et
v endue au g ouv er nement autrichien. Cee r ente viagèr e sauvait au b el
Émilio la honte de r e ce v oir , comme b e aucoup de nobles, l’indemnité de
vingt sous p ar jour , due à tous les p atriciens indig ents, stipulé e dans le
traité de cession à l’ A utriche .
A u commencement de la saison d’hiv er , ce jeune seigneur était encor e
dans une camp agne situé e au pie d des Alp es T y r oliennes, et acheté e au
printemps der nier p ar la duchesse Catane o . La maison bâtie p ar Palladio
p our les Tiep olo consiste en un p avillon car ré du style le plus pur . C’ est
un escalier grandiose , des p ortiques en marbr e sur chaque face , des p
éristyles à v oûtes couv ertes de fr esques et r endues légèr es p ar l’ outr emer du
ciel où v olent de délicieuses figur es, des or nements gras d’ e x é cution, mais
si bien pr op ortionnés que l’é difice les p orte comme une femme p orte sa
coiffur e , av e c une facilité qui réjouit l’ œil ; enfin cee gracieuse noblesse
qui distingue à V enise les pr o curaties de la Piazea. D es stucs
admirablement dessinés entr etiennent dans les app artements un fr oid qui r end
3Massimilla D oni Chapitr e
l’atmosphèr e aimable . Les g aleries e xtérieur es p eintes à fr esque for ment
abat-jour . Partout règne ce frais p avé vénitien où les marbr es dé coup és
se chang ent en d’inaltérables fleur s. L’ameublement, comme celui des p
alais italiens, offrait les plus b elles soieries richement emplo yé es, et de
précieux table aux bien placés : quelques-uns du prêtr e g énois dit il Capucino ,
plusieur s de Lé onard de Vinci, de Carlo D olci, de Tintor eo et de Titien.
Les jardins étag és présentent ces mer v eilles où l’ or a été métamor phosé
en gr oes de r o cailles, en cailloutag es qui sont comme la folie du travail,
en ter rasses bâties p ar les fé es, en b osquets sé vèr es de ton, où les cy près
hauts sur p ae , les pins triangulair es, le triste olivier , sont déjà
habilement mélang és aux orang er s, aux laurier s, aux my rtes ; en bassins clair s
où nag ent des p oissons d’azur et de cinabr e . oi que l’ on puisse dir e
à l’avantag e des jardins anglais, ces arbr es en p arasols, ces ifs taillés, ce
lux e des pr o ductions de l’art marié si finement à celui d’une natur e
habillé e ; ces cascades à gradins de marbr e où l’ e au se glisse timidement et
semble comme une é char p e enle vé e p ar le v ent, mais toujour s r enouv
elé e ; ces p er sonnag es en plomb doré qui meublent discrètement de
silencieux asiles : enfin ce p alais hardi qui fait p oint de v ue de toutes p arts
en éle vant sa dentelle au pie d des Alp es ; ces viv es p ensé es qui animent
la pier r e , le br onze et les vég étaux, ou se dessinent en p arter r es, cee
p o étique pr o dig alité se yait à l’amour d’une duchesse et d’un joli jeune
homme , le quel est une œuv r e de p o ésie fort éloigné e des fins de la br
utale natur e . iconque compr end la fantaisie , aurait v oulu v oir sur l’un
de ces b e aux escalier s, à côté d’un vase à bas-r eliefs cir culair es, quelque
négrillon habillé à mi-cor ps d’un tonnelet en étoffe r oug e , tenant d’une
main un p arasol au-dessus de la tête de la duchesse , et de l’autr e la queue
de sa longue r ob e p endant qu’ elle é coutait une p ar ole d’Émilio Memmi.
Et que n’aurait p as g agné le V énitien à êtr e vêtu comme un de ces
sénateur s p eints p ar Titien ? Hélas ! dans ce p