Allocution d'ouverture - article ; n°5 ; vol.32, pg 317-319

R. Zazzo

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Enfance - Année 1979 - Volume 32 - Numéro 5 - Pages 317-319
3 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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• Médecine

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• Publié par: ENFANCE0
• Publié le: 01 janvier 1979
• Nombre de lectures: 21
• Langue: Français

Extrait

René Zazzo
Allocution d'ouverture
In: Enfance. Tome 32 n°5, 1979. pp. 317-319.
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Zazzo René. Allocution d'ouverture. In: Enfance. Tome 32 n°5, 1979. pp. 317-319.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/enfan_0013-7545_1979_num_32_5_2679ENFANCE 1979, N°5
Centenaire d'Henri Wallon.
Allocution d'ouverture
par
René ZAZZO
A mi-temps de nos travaux, au cœur de notre Congrès International de
Psychologie de l'Enfant, cette journée du 5 juillet 1979 est totalement consacrée
à Henri Wallon pour le centenaire de sa naissance.
Henri Wallon est né à Paris le 15 juin 1879. Il est mort à Paris le 2 décemb
re 1962.
1879-1962. Presque un siècle. Plus qu'un siècle, si l'on entend par là une
période considérée dans son unité historique.
Au cours de ces 83 années le monde s'est transformé. Nos valeurs les
plus sûres ont été ébranlées, les hommes ont vécu l'alternance d'espoirs fous
et de cruelles déceptions.
Il n'est sans doute pas possible de comprendre l'œuvre de Wallon sans tenir
compte de ce que fut son temps.
Les événements auxquels il a été mêlé par ses engagements, les causes
qu'il a défendues, (l'affaire Dreyfus à la fin du siècle, l'Espagne républicaine,
la lutte contre le fascisme, la Résistance, les guerres de libération coloniale)
ont toujours été pour lui matière à réflexion pour mieux comprendre l'homme
et l'enfant de l'homme.
Wallon n'est pas un homme serein, Wallon n'est pas un penseur confort
able.
Wallon est un psychologue de la contradiction dans un monde de
contradictions, dans une société, dans un univers aux conflits de plus en plus
aigus, de plus en plus explosifs.
A l'histoire politique et sociale s'en ajoute une autre pour lui : l'histoire
d'une science nouvelle, la naissance de la psychologie de l'enfant.
On a tendance à oublier que cette science est toute jeune, qu'elle est née
à la fin du siècle dernier.
Quand Wallon atteint l'âge d'homme, cette science est à peine reconnue.
Le fameux ouvrage de Baldwin qui inaugure vraiment cette science, Le
développement mental chez l'enfant et dans la race date de la fin du siècle.
Sa traduction en français est de 1897.
Or, les penseurs de ce temps se gaussent de Baldwin qu'ils traitent de
psychologie de nurserie.
Henri Wallon sera l'un des savants qui donneront à cette psychologie de
nurserie ses lettres de noblesse. C'est lui qui créera en France, en 1923, le
premier laboratoire de psychologie de l'enfant. 318
// se réclame alors de William Stem et d'Alfred Binet pour dénoncer
l'étude de fonctions impersonnelles, l' expérimentation purement scolastique,
l'ignorance des êtres réels.
Il préconise une psychologie des conduites en rapport avec une analyse des
milieux et des situations dans lesquelles l'enfant se trouve. Il préconise un
va-et-vient entre l'analyse du laboratoire et l'observation sur le terrain.
Je ne dirai rien de plus sur l'œuvre de Wallon.
C'est à nos amis, à nos invités, qu'il conviendra d'en parler.
L'honneur qui m'échoit de présider cette journée n'est, de toute évidence,
que la conséquence directe et lointaine d'avoir succédé à Wallon en 1950 à la
direction de son laboratoire, le laboratoire de psychobiologie de l'enfant.
Cet honneur, je ne sais si j'en suis digne. Ce que je sais par contre, c'est
que Wallon n'appartient à personne, que personne - et moi pas plus qu'un
autre- n'a le droit de le revendiquer, d'invoquer son autorité et sa caution.
Si Wallon nous a appris quelque chose, c'est l'esprit de risque et de liberté
dans la recherche, c'est la méfiance à l'égard de tout système et de toute école.
Pour les articles que nous donnions à Enfance, // n'acceptait pas défaire suivre
nos noms du label du laboratoire. Nous ne sommes pas une chapelle, disait-il,
ou une écurie de courses, mais des individualités.
Il est probable d'ailleurs que cette absence de système explique en partie
que son œuvre ait été si lentement, si tardivement comprise.
Mais l'absence de système n'exclut pas, évidemment, la vigueur de pensée,
avec ses lignes de force, son orientation, et des options méthodologiques très
fermes.
En organisant cette journée, j'ai souhaité que nous nous interrogions sur
ces lignes de force.
Au delà de ce qu'il y a éventuellement de caduque dans l'œuvre de Wallon
que reste-t-il?
Et quelle est son actualité? En quoi le mouvement qu'il a imprimé à la
psychologie de son temps se prolonge-t-il dans la science d'aujourd'hui même
à l'insu des psychologues eux-mêmes ?
En quoi et comment Wallon est-il vivant parmi nous ?
A qui m' adresser pour tenter de répondre à ces questions, pour organiser
cette journée d'hommage ?
J'ai hésité entre deux formules.
Ou bien m' adresser à ceux qui furent les élèves, les collaborateurs
d'Henri Wallon, à ceux qui chacun selon son génie propre poursuivent son
œuvre. Bref, à ses héritiers. Ils se comptent en France par dizaines.
Ou bien m' adresser à d'autres. 319
Wallon vu de l'extérieur. Wallon vu par des collègues étrangers. Par des
collègues Français, aussi, mais qui pour la plupart ne sont pas des élèves
directs de Wallon, et même qui se considèrent comme assez éloignés de lui.
Une seule exception à cette règle: Jacqueline Nadel. Elle est la seule
représentante du Laboratoire de Psychobiologie de l'Enfant, qu'entre nous nous
désignons comme Wallon. Elle fut la dernière en date des collabo
rateurs d'Henri Wallon. J'ai donc fait appel à la benjamine de ceux qui ont
travaillé avec lui.
Ses plus anciens élèves, Hélène Gratiot-Alphandery, Cécile
Beizmann et moi-même, nous ne parlerons pas aujourd'hui de l'œuvre de
notre maître.
Je souhaite qu'un jour les élèves de Wallon se réunissent et confrontent
leurs expériences. Qu'ils disent ce que est devenu à travers leurs
propres œuvres.
Aujourd'hui nous voulons saisir la présence de Wallon hors du cercle de
ses disciples.
Je me réjouis que cet hommage à Henri Wallon soit rendu dans cet
amphithéâtre.
Non seulement parce qu'il est le lieu le plus prestigieux de notre vieille
Sorbonne. Mais aussi, mais surtout, parce que le souvenir de Wallon hante
ce haut lieu.
C'est avec Wallon, avec Langevin, Joliot-Curie et le recteur Roussy que
nous étions ici après la libération de Paris pour fêter notre Université renais
sante.
C'est ici que Wallon inaugurait lui-même il y a un quart de siècle, exacte
ment le 21 Avril 1954, le premier Congrès International de Psychologie de
l'enfant.
Le deuxième Congrès salue aujourd'hui et sa mémoire et sa présence.