"NE PEUT ETRE VENDU"
265 pages
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1 1 2 "NE PEUT ETRE VENDU" Christian Hivert Ces différents textes ne sont pas destinés à l'édition commerciale, ils ne seront donc pas repris, ni échangés ; leur diffusion se fera avec l'assentiment de ceux qui y auront trouvé suffisamment d'intérêt à le faire. Si un quelconque marchand faisait fi de ce choix anti-commercial et s'avisait de transformer ce samizdat en activité lucrative, toute personne en accord avec ces lignes serait en droit de lui régler son compte. L'histoire de ce livre qui ne se veut qu'un simple moyen d'échange et de communication est entre vos mains anonymes, lecteurs ! Si vous le transmettez ou non, reproduisez ou non, échangez, lisez, jetez, brûlez ou non est de votre ressort, l'auteur et moi-même nous en déchargeons absolument, ce n'est pas notre histoire, nous nous en foutons. De vous seuls dépend la sauvegarde effective de ces lignes et du respect du choix anti-commercial de leur diffusion. Démerdez-vous ! Nous sommes dans nos pensées. Nous ne voulons plus en entendre parler . 2 3 èreI PARTIE RENCONTRES ET INCONNUS DIVERS « Le hasard n’est pas une destinée » 3 5 CHAPITRE I Où l'indécision de l'auteur et sa paresse sont telles, que le lecteur est invité à choisir sa propre intro, et dans un subtil jeu dialectique entre le rêve et la réalité, découvrira le rôle éminent de la pénétration du subjectif dans toute objectivité.

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Publié le 16 juillet 2014
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Langue Français

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"NE PEUT ETRE VENDU" Christian Hivert
Ces différents textes ne sont pas destinés à l'édition commerciale, ils ne seront donc pas repris, ni échangés ; leur diffusion se fera avec l'assentiment de ceux qui y auront trouvé suffisamment d'intérêt à le faire.
Si un quelconque marchand faisait fi de ce choix anti-commercial et s'avisait de transformer ce samizdat en activité lucrative, toute personne en accord avec ces lignes serait en droit de lui régler son compte. L'histoire de ce livre qui ne se veut qu'un simple moyen d'échange et de communication est entre vos mains anonymes, lecteurs !
Si vous le transmettez ou non, reproduisez ou non, échangez, lisez, jetez, brûlez ou non est de votre ressort, l'auteur et moi-même nous en déchargeons absolument, ce n'est pas notre histoire, nous nous en foutons. De vous seuls dépend la sauvegarde effective de ces lignes et du respect du choix anti-commercial de leur diffusion. Démerdez-vous ! Nous sommes dans nos pensées. Nous ne voulons plus en entendre parler .
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ère I PARTIE
RENCONTRES ET INCONNUS DIVERS
« Le hasard n’est pas une destinée »
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CHAPITRE I
Où l'indécision de l'auteur et sa paresse sont telles, que le lecteur est invité à choisir sa propre intro, et dans un subtil jeu dialectique entre le rêve et la réalité, découvrira le rôle éminent de la pénétration du subjectif dans toute objectivité. S'il le souhaite, il pourra, enfin, lui fournir une suite qui pourra être appelée alors : "Chapitre II".
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Il faisait chaud, le village était tranquille. Le jeune homme qui venait d'émerger au travers des buissons bordant les premières maisons, se trouvait maintenant au milieu de la place à regarder ce café où il ne se passait jamais rien. D'ailleurs, depuis le processus, plus rien ne se passait dans aucun café, dans aucun village, les grands appelaient cela le Niveau Idéal d'Equilibre (N.I.E.), il s'en dégageait, selon eux un état de béatitude et d'épanouissement total pour l'individu devenu insouciant, ludique et complètement dégagé de toute obligation matérielle, en un mot, selon leurs conceptions, libre ! Il resta là, mâchonnant un moment son tabac. Cela faisait des jours qu'il marchait au hasard. Tout à l'heure, à l'orée du bois, il avait attendu le lever du jour, à l'aube les réverbères s'éteignaient silencieusement, commandés par des capteurs de luminosité. Les basses cours caquetaient à nouveau. Alors survenait au loin le sale ronronnement des tracteurs industriels, véritables usines roulantes. C'était un "village libre" assurément.
L'après-midi de ce dimanche là finissait et le stylo continuait de courir sur la feuille. Par sa fenêtre, celui qui se prenait pour un écrivain pouvait, sans même cesser d'écrire, se pencher et observer tous les mouvements du village qui nécessairement s’effectuaient en passant par cette place en bas de chez lui. La vie était calme depuis le processus et souvent il s'ennuyait, alors il tentait d'inventer la vie, noircissait des pages, tenant plus que tout autre à cette forme de communication périmée qu'était l'écriture en ce milieu de XXIème siècle. Il aurait pu, comme tout un chacun, dans sa condition «d’Assisté Permanent», fournir le télécom d'élucubrations binaires qui auraient été diffusées dans tout le réseau européen, avoir de l'audience et des pourcentages de réception, mais cela ne l’intéressait pas. Il voulait écrire à la main, sur une feuille, et préserver au maximum l'authenticité antique de sa fonction sociale, créateur de rêves et de mystères, proposeur de réflexion, bouilleur d'idées, enfin, ce qui en faisait pour lui l'authenticité, tant dans son image que dans son corps lui-même. L'image pouvait ressembler à celle de tous les scribes des siècles passés, à quelques détails près, le corps, c'était lui-même, sa chair, son alchimie, et, puisque né homme, sa pensée.
Il faisait chaud et cela faisait un moment déjà qu’il était devant sa feuille , à la noircir, les idées se mettaient lentement en place dans sa tête, s'alambiquaient, cherchaient une forme pour s'exprimer, un bec de Cornue pour couler. Le titre s'était imposé de lui-même:
"Eloge à la médiocrité" Il coulait telle la première goutte d'un long breuvage, celle qui donne la première l'information générale au palais, qui avertit l'organisme tel un "héraut" annonçant un invité : le flot, la parole écrite: "De fait la non vie offre trop d'avantages pour se faire chier à se poser des questions dont on ne connaît pas la réponse. Pourquoi vouloir à tout prix se sortir de l'aliénation ambiante alors qu'il est si bon de se laisser emporter par l'état naturel des choses, la fatalité des vérités établies, l'immuabilité des rapports humains. D'aucuns voudraient nous forcer les méninges, nous pousser à la réflexion, que nous soyons responsables, autonomes ; voudraient chambouler la terre, modifier nos habitudes, déraciner nos fondements ; voudraient que nous soyons dignes de l'évolution de notre espèce, que nous sortions de l'ombre, que nous échangions nos doutes, nos angoisses. Ils rêvent qu'un jour nous soyons à même de nous élever contre notre condition de bêtes laborieuses anesthésiées par la misère, que nous découvrions nos possibilités faramineuses de compréhension et de prise en charge de notre
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destin humain. Ils fantasment sur nos capacités de nous unir et de nous concerter, de découvrir nos intérêts communs et de lutter ensemble, d'être solidaires de nos erreurs et de nos actes, de ne plus être soumis ni dominés ; en un mot ils nous voudraient libres pour être libres eux-mêmes et que nous développions nos facultés d'enrichir nos vies par l'épanouissement entier de toutes nos ressources. Mais que croient-ils ?
Avons nous tant d'énergie à dépenser là-dedans et perdre ainsi la tranquillité que nous offre notre immobilisme et notre soumission aux conditions existantes ? Qu'avons-nous besoin de nous mettre en mouvement et de nous fatiguer, de nous exténuer à sortir de notre domination? Qu'échangerions-nous contre cette tranquillité, si ce n'est la difficulté de maîtriser nous même notre devenir et l'accession douloureuse à l'existence véritable et incertaine d'une conscience que nous remettrions sans cesse en cause pour progresser ? Alors restons calmes et insouciants, mais sachons être pervers, méchants et sournois, et défendre avec haine la certitude de notre sommeil légumineux ! Passons en aux moyens d'auto défense !
Car face à ces menaces grandissantes d'atteinte à notre paisibilité bovidienne, sachons nous garantir. Différents moyens simples et ayant fait leurs preuves au fil des années peuvent nous faire échapper à ces tourments. Tout d'abord, si possible est, ignorons le problème, nions l'existence de ces excités, restons chacun dans notre trou, écartons le danger en méprisant leurs discours, en réfutant sans raison leurs idées. Jouons-nous-la fatalistes et bornés, voir sous informés (Ah bon ! Je ne savais pas mais comment donc...) voir encore analphabètes ou moitiés idiots. Si malgré tout certains s'obstinent et qu'il faille se prémunir d'avantage de leurs propositions libératrices, passons mollement à l'acte et répondons par moqueries diverses, ragots personnalisés, diffamations déguisées, insultes réductrices, portons le débat sur l'artificiel et le détail, la virgule plutôt que le texte. Débat de ponctuation n'est pas réflexion mais divertissement agréable et facile. Beaucoup en seront écoeurés, déstabilisés, démobilisés, apercevant l'effroyable difficulté de poursuivre par la raison, baisseront les bras et nous rejoindront aisément. Pour les plus virulents, d'autres moyens ne demandant que peu d'investissement personnel peuvent être étudiés. Si malgré calomnies et railleries, discrédit et insulte, ils persistent et font preuve de détermination, voir d'obstination, laissons les s'agiter, se tuer à la tâche, s'unir et se regrouper.
Profitons de leur esprit d'ouverture et de leur volonté de dialogue pour nous infiltrer parmi eux et leur laisser croire que nous sommes tous-unis-tous-solidaires, établissons des rapports fraternels et affectifs, et profitons perfidement de tous les moyens qu'ils mettront en oeuvre en se gardant bien de les aider en quoi que ce soit. Là, deux attitudes possibles, toutes deux aussi nauséabondes et ne demandant aucun effort.
L'attitude paumée et approbatrice, autocentrée sur de fumeux problèmes existentiels nous rendra sympathiques et, tout en préservant les moyens d'éclate individuelle qui sont les leurs, nous permettra de pomper leur énergie à notre bénéfice exclusif ; coqs en pâte, consommant tout mais ne produisant rien, nous aurons la légitimité des misérables et le nid douillet. Autre attitude, plus perverse et plus excitante, mettons nous en avant des luttes, non par les actes, mais par la tchatche, soyons plus que plus, proposons sans cesse hors réalité, critiquons vertement les plus sincères et soutenons les plus mégalos, foutons notre merde en divisant, toujours de mauvaise foi, libérons nos fantasmes les plus fous, prenons les uns pour les autres et mélangeons tout, la dislocation n'est pas loin. Il n'est pas superflu à ce niveau d'intervention là, de se doter d'une sur conscience auto proclamée et d'une autorité morale obtenue par toutes sortes de pressions, chantages affectifs, violences verbales, prises
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omniprésentes de paroles, contestation systématique de toute proposition autonome. Le must reste encore de prendre sournoisement la tête de collectifs constitués, voir d'en constituer nous-mêmes, de soulever toutes les contradictions existantes, d'en inventer s'il le faut, montrer les uns contre les autres tout ceux qui pourraient s'apercevoir un jour de leurs intérêts communs, rendre inconciliable ce qui pourrait l'être, faire de divergences des oppositions, d'oppositions des guerres sans fondement et sans fin, refuser toute discussion réelle sur le fond et aviver au maximum les rancoeurs personnelles accumulées. Et si malgré tout cela une quelconque conscience progresse, la décréter médiocrité, si un quelconque individu résiste, le briser moralement et physiquement !
"Tous ensemble nous resterons moyens ! Sachons profiter pour bloquer toute évolution ! Dominus Domina Dominum Dominis Domini Domine "
Il faisait chaud ; mais ce n'était pas cette impression qu'il retiendrait. Non, la première impression qui lui reviendrait en mémoire serait la vision de la tranquillité, de la paisibilité, de la clarté immobile et insouciante de son village. Un jeune homme regardait le café au coin de la place ; peut-être était-ce lui et il se voyait lui-même comme dans un rêve où tout est plus réel que la réalité. Son baluchon aux pieds, il roulait une cigarette, était-il l'écrivain qui tentait laborieusement de décrire l'atmosphère par des mots d'encre ; l'écrivain roulerait-il sa clope, comme lui avec lassitude et envie, envie de la fumer ? Comment concevoir un homme, une histoire, une vie par des mots, et quel intérêt malsain de tenter de voir ce que l'on ne voit pas, de décrire ce qui n’existe pas, en employant les mots même qui servent à raconter ce qui existe? Cela faisait des jours qu'il marchait à l'écart des habitations et des paysages humains. La fatigue jouait avec lui, sans le mener, lui diluant son énergie, diminuant sa joie en plaisir, le fragilisait juste à point pour entrer dans ce village où le soleil même semblait suspendu, arrêté, immuable, définitif.
Autour du village, hormis ce bois qu'il venait de traverser, la plaine et les collines s'étendaient géantes et dépouillées de toutes espèces d'arbres qui eût pu gêner la circulation linéaire des rouleaux compresseurs agro-alimentaires. Depuis des décennies que les banques vertes contrôlaient tout, ne subsistaient que quelques zones franches, la loi sur ces terres se résumait à peu de choses : interdiction de circuler sur les territoires sauf autorisation spéciale pour une mission hors ville ou pour travailler sur les énormes machines sans jamais connaître l'étape suivante. Au démarrage de cet empire, les luttes avaient été terribles, les exploitants agricoles, s'étaient unis contre les trusts, mais chaque région s'était parée de luttes spécifiques, par secteurs d'activités, par régions ou par pays et les différentes coordinations transnationales européennes n'étaient parvenues à une unité et une harmonisation qu'alors qu'il était trop tard. Le processus était trop fortement implanté et protégé. Des concessions avaient été faites, les dernières régions rebelles avaient été déclarées par l'Ubavère (Union des Banques Vertes Européennes) "zones franches de circulation". Mais comme tout les territoires hors ces zones lui appartenait, les gens qui habitaient là avaient vite compris que leur liberté s'arrêtaitaux limites de leur demeure. Un certain esprit de résistance y était, malgré tout, toujours entretenu. Les techniques les plus avancées étaient apprises dés le plus jeune âge et permettaient aux jeunes qui le souhaitaient de réintégrer le processus selon des accords spéciaux avec les banques. Dans la plupart des zones franches, tous les moyens d'exploitation des produits terriens et toutes les structures de transformation de ces produits avait été mis en commun. Une sorte d'aristocratie composée des éléments les plus imaginatifs s'étaient peu à peu mise en place.
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Au début, une génération plus tôt, les jeunes qui finissaient leurs études étaient tous envoyés en stage pratiquesur les différents terrains économiques et technologiques des zones. Certains cadres de l'Ubavère y avaient envoyé leurs fils rebelles ou contestataires au processus afin de leur faire un complément de formation avant de les réintégrer. Beaucoup d'échanges se nouaient, les imaginatifs avaient cédé le pas aux innovateurs, puis aux rénovateurs, puis à de petites baronnies capitalisées sous le regard bienveillant des banquiers et des psychopolitiques du processus. Par la suite ceux des étudiants qui faiblissaient se trouvaient intégrés sans problème et se voyaient offrir le poste éminent qui correspondait à leurs longues études, leur conscience achetée par le confort aéré qui régnait dans les villes. Ceux plus rares, qui conservaient le souvenir de la résistance passée, soit s'intégraient pour "attaquer de l'intérieur", soit allaient dans les campagnes et les villes-bidons tenter de transmettre les moyens de résistance les plus évolués. Certaines têtes en informatique avaient formulé un projet conspiratif dont la première phrase avait partiellement réussi. Les puissants ordinateurs de l'Ubavère avaient été muselés durant près de vingt-quatre heures et beaucoup de clandestins et de bannis s'étaient réinstallés en annulant les poursuites nominales qui les concernaient. Beaucoup avaient été découverts et envoyés mettre leur savoir au service des banques dans une des Stations d'Etudes et de Recherches Orbitales (S.E.R.O.). Ils étaient ravitaillés une fois par an et n'avaient quasiment aucun moyen d'évasion ni aucun moyen de connaître la globalité des recherches sur lesquels ils travaillaient. Chaque calcul était parcellisé à l'extrême, une équation biologique trouvait son application dans mille et uns secteurs différents, les puces biologiques se combinant toutes entre elles. Malgré ces avanies diverses un réseau avait été constitué qui aurait échappé aux investigations bancaires...
Le mégot brûlant de sa cigarette sur le bout de ses doigts le fit sortir de sa réverie. Un homme assez âgé sortait du café, son ombre s'allongeait sur la place. Le soir arrivait... Il dévisagea un moment cette nouvelle tête qui, à la réflexion, ne lui paraissait pas si nouvelle. Un air de famille! Mais la famille à qui ? Voyons voir ? Par la fille de la voisine Amélie. Mais son fils est plus âgé ! Attends, voilà, ça y est, bien sûr, la ressemblance ! Oui, c'est cela ! Les mêmes manies du vieux, à rester à épier le monde en roulant un clope ! Vu l'âge c'était au moins le petit fils, remarques, non, c'était pas un enfant de vieux mais il était né tard, oui, ça ne peut être que lui, l'étudiant, la quarantaine, trente ans qu'il était parti avec sa mère vivre en "zone franche" comme ils appelaient maintenant. Oui, c'est bien cela, le fils à Gaston qui venait de mourir, roué par les ans, l'endettement à la banque et la perte de son monde. Un têtu celui-là, à vouloir rester indépendant et ne rien devoir à personne. C'est la banque qui l'avait eu, corps et âme. Peut-être bien, s'il avait voulu composer, faire un peu comme tout le monde, se plier peu à peu, il y aurait moins perdu. C'est vrai que vers la fin des luttes, au début de la restitution partielle des terres, tout le monde s'était détourné du vieux, sa femme elle-même était partie tenter sa chance avec son jeune fils, c'était pour l'avenir du môme bien sûr ! Ah ! Mais qu'est-ce donc qu'il venait foutre là ! S'il tenait du père, c'était pour fout'le bordel et attaquer la banque, si c'était la mère qui avait gagné, il apparaîtrait fort des valeurs anoblies par les luttes passées mais tergiversant sans cesse pour ne pas prendre ses responsabilités, et fuyant enfin. Et si c'était autre chose encore ! Oh ! Ben ça c'est trop compliqué ! J'aurais plus à m'en mêler dans ce cas, ça sera plus mon problème ! Ruminant ses pensées, le vieux s'était mis à trottiner sur le chemin parsemé de réverbères qui le mènerait jusqu'à sa vieille bicoque. Il allait se faire un magnétoscope, ou bien un jeu électronique. Ses fils l'avaient tout aménagé en moderne, il n'avait plus qu'à jouer avec des boutons, et il s'ennuyait. Mais voilà de quoi revivre un peu, qui sait ?
Il avait vu le vieux le soupeser sournoisement. Tivlet , il se le rappelait parfaitement , il aurait pu le saluer , mais il ne le fit pas , il avait décidé de ne pas provoquer la rencontre de
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suite. Il voulait voir d'abord plus de têtes. Evaluer le degré de N.I.E. . Repérer la faille, le levier. Si les gens étaient curieux, il y aurait peut-être de quoi faire ! Il fallait d'abord être prudent et se présenter de suite, afin de ne pas laisser cours aux extrapolations spéculatives de l'ignorance. Il fallait qu'il révèle qu'il était banni, qu'il joue franc-jeu, qu'il souligne ses origines. Un banni n'était pas forcément envoyé en orbite sur le S.E.R.O., seuls les meilleurs d'entre eux. Les autres, comme lui-même, une fois leurs affaires instruites, et les mesures prises pour faire contrer leurs capacités par les banques, pouvaient s'en retourner "végéter" comme le disaient les gens de l’union : soit dans les ghettos-villes appelés aussi villes-bidons, soit dans les zones franches, soit comme lui le faisait, à circuler au travers des territoires bancaires. Même s'ils étaient pris sur ces territoires interdits, en tant que bannis; ils ne risquaient pas grand-chose, sauf aux moments de départ des navettes de bannis satellisés. Chose qui demeurait rare. Mais lui continuait de circuler clandestinement, car les contrôles pouvaient durer des mois et étaient réellement éprouvants. De plus, ils te relâchaient à des centaines de kilomètres du point de capture, et pas question d'utiliser les roulantes-agro.
Ces machines n'avaient le droit de ralentir sans s'arrêter, et d'échanger des produits, qu'à la jonction de leur ligne d'exploitationavec soit une zone, soit un village. En dehors de cela, on ne pouvait que faire signe par les hublots, les quantités de survie n'étant calculées que pour les mécanisés, aucun mécanisé n'aurait monté un libre pour le circuler. D'autant plus que tout était extrêmement compté, y compris le temps et la productivité, dans le calcul de libération des hommes, chaque homme étant très pressé d'obtenir ses rentes de survie dans la "ville aérée" de son choix, vous comprenez !
Pour sa dernière étape, il avait bricolé une cyclette à alcool de betterave, et avait pu faire une bonne distance derrière les sillons des usines. Mais il valait mieux ne pas circuler trop longtemps en ligne droite. La cyclette se faisait repérer par les traces d'échappées de gaz constantes facilement analysables par les satellites d'observations (S.O.). Quant aux transports inter-villes, nul engin ne pouvait s'arrêter, sauf cas de panne, secouru dans les dix minutes par une navette dépanneuse agrée. Impossible à incruster. Un autre moyen, plus sophistiqué, rarement utilisé par les bannis, qui n'avaient que peu de connections avec les féodaux des zones, était de mic-maquer une identité informatique, chose faisable, mais demandant la complicité d'un comput de classe B, tous aux mains de l'union et des féodaux amis.
Mais il savait fabriquer un comput de classe B, et personne ne le savait. Normalement, à l'heure actuelle, ils devaient être un certain nombre dans ce cas. Et c'est pour cela qu'il avait eu besoin de ce village qui lui rappelait tellement de souvenirs d'enfance. Tous les ingrédients normalement devaient se trouver là. C'était à lui de finement jouer sa partie. Ici il n'y avait pas de féodaux, le village, quoiqu'assimilé à la loi sur les zones franches et parrainé par l'une d'elles, n'était pas assez vaste ou riche pour intéresser les féodaux. L'union le laissait "végéter". Cela avait toujours contenté tout le monde, et dés que le N.I.E. était respecté, ne présentait aucun danger potentiel. Il avait six mois devant lui ! Six mois pour faire naître une lutte conspirative et l'utiliser à bon escient. De quoi prendre le temps de se payer une bonne bière fraîche et de repenser lentement aux moyens d'abattre ces foutus furieux puritains !
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CHAPITRE II
"Où l'on se demande légitimement s'il s'agit bien de la suite du chapitre I, où l'on s'aperçoit qu'en fait oui, bien évidement, où le mystère s'épaissit et l'intérêt demeure, espérons-nous, où l'on se demande où tout cela va nous mener, où l'écriture d'un chapitre III s'impose avec tout le poids de la fatalité requise, mais qui, à part l'auteur, sera assez fou pour l'écrire? ".
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