Le sens des apories métaphysiques de Théophraste - article ; n°29 ; vol.33, pg 40-49
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Revue néo-scolastique de philosophie - Année 1931 - Volume 33 - Numéro 29 - Pages 40-49
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Publié le 01 janvier 1931
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Langue Français

Extrait

A. M. Festugière
Le sens des apories métaphysiques de Théophraste
In: Revue néo-scolastique de philosophie. 33° année, Deuxième série, N°29, 1931. pp. 40-49.
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M. Festugière A. Le sens des apories métaphysiques de Théophraste. In: Revue néo-scolastique de philosophie. 33° année,
Deuxième série, N°29, 1931. pp. 40-49.
doi : 10.3406/phlou.1931.2604
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/phlou_0776-555X_1931_num_33_29_2604II
Le sens des apories métaphysiques
de Théophraste
Qu'on les regarde comme un fragment (Usener) *)*
ou comme un traité achevé (Ross) 2), les Métaphysiques de
Théophraste offrent un intérêt extrême. Car elles ne sont,
à vrai dire, qu'une suite d'apories, et qui se comportent,
envers le Stagirite, tout de même que les apories aristoté
liciennes 3) envers Platon. Confrontées les unes aux autres,
les progrès de la pensée touchant l'être et son dernier fond
en reçoivent quelque lumière. A mesurer ainsi les difficultés
majeures qui se posent pour un disciple d'Aristote, au point
où l'on en est venu, peut-être a-t-on meilleure chance
d'entendre, dans le sens authentique, la démarche méta
physique du maître lui-même.
Car il y a chez lui une aporie considérable, et de la
manière dont on la résout dépend en bonne part l'exégèse
de l'aristotélisme. Elle tient toute dans l'amphibologie du
terme oùola, appliqué tantôt à l'individu concret, réalité pre
mière, TtpwxY] oàala., et qui seul en vérité mérite au propre
le nom de substance *), et tantôt à l'universel abstrait,
') Bonn, 1890.
3) Ro88-Fobes, Oxford, 1929. Cette édition, la dernière, est un modèle de
science, de clarté et de ce goût exquis d'où vient le charme des « Oxford Books ».
Peut-être eût-on pu ajouter, dans l'apparat critique, les corrections souvent plausibles,
toujours ingénieuses, de Zeller, Ph. à. Gt., Il3, 822 n. 3 etc.
3) Met. B.
4) C'est plus particulièrement le point de vue de Met. A. apories métaphysiques de Thêophraste 41 Les
premier intelligible, lequel, pourvu aussi du nom
avec le sens premier d'essence, n'en semble pas moins
regardé comme substance, objet propre de la métaphysique *).
Quels seront donc les rapports de ces deux oôafa ?
Manifestement, c'est Callias qui est sujet premier (ou der
nier) puisqu'il est le dernier terme, « celui qui ne peut être
attribué d'aucun et à quoi tout le reste s'attribue ». C'est
Callias qui se meut, de quelque mouvement qu'il s'agisse.
Ainsi, sujet de toutes les catégories, y compris celle de la
substance 2), sujet aussi de tous les changements, inclus ce
premier changement qui le fait être, c'est Callias, de l'aveu
commun, qui est sujet de l'être. Et c'est donc de Callias
que j'ai à rechercher les causes, en remontant jusqu'aux
premières.
Mais Callias m'est-il connaissable ? Si je ne saisis dire
ctement en que sa forme sensible, si l'objet direct de
mon intellect n'est et ne peut être qu'un intelligible qui n'est
plus Callias, mais l'homme, ne sera-ce pas là le véritable
sujet de l'être, et ne faut-il pas, nécessairement, qu'il en
soit ainsi ? Car si cet intelligible n'est qu'un pur concept,
sans réalité, l'objet premier de la science n'étant plus réel,
celle-ci perd, à son tour, raison d'être.
Et nous voici revenus, M. Robin l'a fermement marqué3),
aux difficultés mêmes du platonisme. Obligés de réaliser les
') C'est le point de vue, semble-t-il, de Met. ZHft. Il est malaisé d'établir le
rapport chronologique de ces traités à A. Pour plusieurs raisons, l'on croit ce dernier
postérieur. '
3) qui est, elle aussi, un attribut, le premier. Cf. les justes remarques du Prof.
Ross, Aristotle's Metaphysics, Oxford, 1924, 1, Introd., p. LXXXII sq., contre Bonitz,
Ueber die Categorien des Arist., Vienne 1853.
') La théorie platonicienne des Idées et des Nombres d'après Aristo'e, Paris, 1908, 1. 1,
2e p.,fch. 3, p. 98 sq., en particulier les critiques extrêmement fortes des pp. 102-103,
104-106. « La vérité est que, dans l'usage aristotélicien du mot substance, il y a une
amphibologie... qui touche au fond même de la pensée. C'est fort bien de remarquer,
comme le fait souvent Ari3tote, que le mot oôfffac peut signifier également la substance
formelle ou quiddité et, enfin, la substance concrète individuelle ou le composé des
deux. Encore faudrait-il... (ne pas) confondre la quiddité et la chose, la substance
formelle et l'individu », op. cit., p. 102. 42 A. M. Festugière
Idées ou les Formes, il ne sert de rien de dire immanent ce
qui était, là, transcendant. En l'un et l'autre cas le rapport
de l'essence à l'individu demeure aussi bien mystère. Et
il s'y ajoute, chez Aristote, une grave difficulté du fait que
l'individu concret, nullement ouata dans les dialogues, devient
ici non seulement substance, mais, au vrai, la substance.
Faut-il, renonçant à cette philosophie de la substance
concrète, situer toutes les formes, par définition éternelles,
dans l'Intellect en Acte lieu des formes, lui-même assimilé
au Premier Moteur ? Doit-on réduire ainsi le Stagirite au
rang d'élève d'ailleurs médiocre, inconséquent, de Platon ?
Trop de textes s'y opposent, ne fût-ce que le livre À.
Et Rodier ') a bien montré que le centre de la pensée
aristotélicienne reste bien la substance proprement dite, le
sujet qui n'est que sujet, dès lors l'individu. Cet individu,
objet premier de la Métaphysique, c'est la substance tot
alement intelligible, sans matière aucune, dès lors Pensée
pensante, l'Acte pur. C'est, secondairement, la substance
sensible mobile non périssable, l'astre. C'est enfin la sub
stance sensible* mobile périssable. Ce ne peut être un uni
versel réalisé, lors même qu'on le restreint à l'espèce der
nière. Tout le mouvement de la pensée aristotélicienne
s'oppose à un tel transfert. L'œuvre entière se présente
comme une explicitation en toutes ses causes, ses «raisons»,
de la substance individuelle. D'où vient que, passant à la
philosophie première ordonnée non pas à l'être en tant
qu'être pris comme tel mais toujours à la même substance
considérée sous ce point de vue de l'être seul, d'où vient
qu'on attribuerait la réalité dernière à l'espèce intelligible,
1) Quelques remarques sur la conception aristotélicienne de la substance, in Études de
philosophie grecque, Paris, 1926, p. 165 sq., en particulier pp. 174-175. Au fond, et
M. Robin, op. cit., pp. 100-101, et Rodier en ce passage, du fait qu'ils voient dans
l'individuation par la forme et dans la subordination de la hiérarchie des substances
« aux variations progressives de l'intelligibilité » le cœur même de L'aristotélisme,
s'accordent implicitement à suivre l'ordre établi dans A qui reste ainsi, malgré Jaeger,
le témoignage authentique de la pensée du maître. apories métaphysiques de Théophraste 43 Les
à l'homme par exemple et non à Callias, par cette seule
raison que notre intellect n'atteint que l'homme et non pas
Callias lui-même ? Il est clair que l'essence ainsi réalisée,
ou bien il faut dénier toute réalité première à l'individu
Callias et l'on revient aux difficultés du platonisme : com
ment l'individu Callias participe-t-il à la réalité de l'homme,
immanence ou transcendance ne font rien à l'affaire ; —
ou bien Callias demeure réalité première et l'on arrive à
cette absurdité de deux substances inhérant l'une en l'autre.
Il n'y a donc qu'une substance réelle, l'individu. Mais,
en ce cas, l'intelligible est pur concept. Et la Science, dont
cet intelligible est l'objet propre, jamais n'atteint au réel.
L'on est donc forcé d'assurer quelque réalité à la forme
seule, et tout le problème est d'entendre la nature propre
du lien entre cette forme et le composé.
Or, si l'on y

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