L’Artiste, 15 mars 1862 (T1, p. 132) Stéphane Mallarmé
Le Sonneur. Le Sonneur (L’Artiste)
Cependant que la cloche enivre sa voix claire De l’air plein de rosée et jeune du matin Et fait à la faucheuse entonner, pour lui plaire, UnAngelusqui sent la lavande et le thym ;
Le sonneur essouflé, qu’un cierge pâle éclaire, Chevauchant tristement en geignant du latin, Sur la pierre qui tend la corde séculaire, N’entend descendre à lui qu’un tintement lointain.
Je suis cet homme. Hélas ! dans mon ardeur peureuse, J’ai beau broyer le câble à sonner l’idéal, Depuis que le Mal trône en mon cœur lilial
La Voix ne me vient plus que par bribes et creuse. — Si bien qu’un jour, après avoir en vain tiré, Ô Satan, j’ôterai la pierre et me pendrai !