Egyptianité et panarabisme - article ; n°4 ; vol.46, pg 813-822
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Description

Politique étrangère - Année 1981 - Volume 46 - Numéro 4 - Pages 813-822
Egyptianité et panarabisme, par Philippe Rondot
La disparition tragique d'Anouar al-Sadate pose, entre autres questions, celle de l'avenir immédiat de l'Egypte, celle du sort de la paix égypto-israélienne et enfin celle relative aux chances d'un règlement proche-oriental plus étendu. Les réponses à ces questions découleront de celle qui sera apportée, dans les mois qui viennent, à l'interrogation que chacun se pose : l'Egypte peut-elle, et va-t-elle, retrouver sa place au sein de la communauté arabe ? La conscience nationale égyptienne est ancienne. Elle a été alimentée par les diverses révoltes contre la présence étrangère, française puis britannique. Le Caire, ville accueillante pour les intellectuels arabes de toutes origines, devint naturellement la capitale du nationalisme et de l'arabisme. Gamal Abdel Nasser utilisa cette conjoncture pour satisfaire ses ambitions de faire du Caire la métropole du monde arabe, et ses desseins de panarabisme. Cette volonté hégémonique fut cependant mise en échec par la déconfiture de juin 1967. Son successeur, Anouar al-Sadate, poursuivit quelque temps dans la même voie jusqu'au moment où, ayant obtenu par la guerre d'octobre 1973, un minimum d'avantages pour s'engager dans un processus de règlement négocié avec Israël, il put se consacrer à des tâches plus spécifiquement nationales. La primauté donnée à l'égyptianité s'accentue au fur et à mesure que s'élaborait la paix égypto-israélienne et que, par réaction, s'organisait contre l'Egypte une communauté arabe qui avait décidé de l'en exclure. Ce repli sur soi, imposé par les circonstances, et finalement bien accepté par un peuple fier de son égyptianité, n'exclut pas un retour à l'arabisme auquel beaucoup d'Egyptiens sont attachés.
Egyptianity and Panarabism, by Philippe Rondot
After Anouar al-Sadate's tragic death, appear, among other questions, those of Egypt's immediate future, of the future of the Egypto-Israelian peace and of a larger settlement of the middle-eastern problem. The issues depend on whether Egypt can and wants - or not - to take its place again in the Arab community. National counsciousness has been vivid for a long time in Egypt, fed by the revolts against foreign domination, first French, then British. Cairo, a hospitable town for Arab intellectuals of all origins, became naturally the capital of nationalism and arabism. Gamal Abdel Nasser took opportunity of that conjoncture to satisfy his panarabic dream and his ambition of making of Cairo the metropolis of the Arab world. This hegemonic will had been frustrated by the defeat of June 1967. His successor, Anouar al-Sadate followed for some time the same way, until the war of October 1973, after which, with a minimum of advantages, he started negociating with Israel. He could, after that, dedicate himself to more specific national undertakings. The priority given to egyptianity went growing while the Egypto-Israelian peace process was progressing and while, by reaction, an Arab community was organized against Egypt and excluding her. This self-focusing, imposed by the circumstances and finally well accepted by a people proud of its egyptianity, does not exclude a come back to arabism to which many Egyptians are attached.
10 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 21
Langue Français

Extrait

Général Philippe Rondot
Egyptianité et panarabisme
In: Politique étrangère N°4 - 1981 - 46e année pp. 813-822.
Citer ce document / Cite this document :
Rondot Philippe. Egyptianité et panarabisme. In: Politique étrangère N°4 - 1981 - 46e année pp. 813-822.
doi : 10.3406/polit.1981.3085
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1981_num_46_4_3085Résumé
Egyptianité et panarabisme, par Philippe Rondot
La disparition tragique d'Anouar al-Sadate pose, entre autres questions, celle de l'avenir immédiat de
l'Egypte, celle du sort de la paix égypto-israélienne et enfin celle relative aux chances d'un règlement
proche-oriental plus étendu. Les réponses à ces questions découleront de celle qui sera apportée, dans
les mois qui viennent, à l'interrogation que chacun se pose : l'Egypte peut-elle, et va-t-elle, retrouver sa
place au sein de la communauté arabe ? La conscience nationale égyptienne est ancienne. Elle a été
alimentée par les diverses révoltes contre la présence étrangère, française puis britannique. Le Caire,
ville accueillante pour les intellectuels arabes de toutes origines, devint naturellement la capitale du
nationalisme et de l'arabisme. Gamal Abdel Nasser utilisa cette conjoncture pour satisfaire ses
ambitions de faire du Caire la métropole du monde arabe, et ses desseins de panarabisme. Cette
volonté hégémonique fut cependant mise en échec par la déconfiture de juin 1967. Son successeur,
Anouar al-Sadate, poursuivit quelque temps dans la même voie jusqu'au moment où, ayant obtenu par
la guerre d'octobre 1973, un minimum d'avantages pour s'engager dans un processus de règlement
négocié avec Israël, il put se consacrer à des tâches plus spécifiquement nationales. La primauté
donnée à l'égyptianité s'accentue au fur et à mesure que s'élaborait la paix égypto-israélienne et que,
par réaction, s'organisait contre l'Egypte une communauté arabe qui avait décidé de l'en exclure. Ce
repli sur soi, imposé par les circonstances, et finalement bien accepté par un peuple fier de son
égyptianité, n'exclut pas un retour à l'arabisme auquel beaucoup d'Egyptiens sont attachés.
Abstract
Egyptianity and Panarabism, by Philippe Rondot
After Anouar al-Sadate's tragic death, appear, among other questions, those of Egypt's immediate
future, of the future of the Egypto-Israelian peace and of a larger settlement of the middle-eastern
problem. The issues depend on whether Egypt can and wants - or not - to take its place again in the
Arab community. National counsciousness has been vivid for a long time in Egypt, fed by the revolts
against foreign domination, first French, then British. Cairo, a hospitable town for Arab intellectuals of all
origins, became naturally the capital of nationalism and arabism. Gamal Abdel Nasser took opportunity
of that conjoncture to satisfy his panarabic dream and his ambition of making of Cairo the metropolis of
the Arab world. This hegemonic will had been frustrated by the defeat of June 1967. His successor,
Anouar al-Sadate followed for some time the same way, until the war of October 1973, after which, with
a minimum of advantages, he started negociating with Israel. He could, after that, dedicate himself to
more specific national undertakings. The priority given to egyptianity went growing while the Egypto-
Israelian peace process was progressing and while, by reaction, an Arab community was organized
against Egypt and excluding her. This self-focusing, imposed by the circumstances and finally well
accepted by a people proud of its egyptianity, does not exclude a come back to arabism to which many
Egyptians are attached.POLITIQUE ÉTRANGÈRE I 813
ÉGYPTIANITÉ
Philippe RONDOT
ET PANARABISME
Jean et Simone Lacouture écrivaient, en 1956, dans leur grand
livre sur l'Egypte [1] : « Ce n'est pas en tant que ville propre
ment arabe que Le Caire est devenue la capitale de l'arabisme,
mais parce qu'elle est le lieu géométrique de protestations dont l'ar
abisme est l'une des formes les plus vives». C'était le temps de
l'« Egypte nassérienne », cœur et cerveau de cette République arabe
unie qui allait être fondée, le 1er février 1958, par l'adjonction de la
Syrie puis du Yémen. L'Egypte brandissait depuis une dizaine d'an
nées déjà l'étendard de l'arabisme tombé entre ses mains dans le
brouhaha qui avait suivi la dernière guerre. La clef de l'« arabité
égyptienne » se trouve dans cette émergence d'une communauté de
revendications d'où naquit la révolte qui secoua le monde arabe.
Parvenus au terme de leur ouvrage écrit dans la fièvre de la cam
pagne de Suez, nos deux auteurs concluaient : « L'Egypte a besoin
des autres. C'est d'au-delà de ses frontières que doivent lui parvenir
les moyens de sauver, chaque jour, près de deux mille enfants. Son
destin est avant tout une affaire de solidarité. Tout ce qui porte
atteinte à celle-ci nuit à l'Egypte ».
En allant proposer la paix à l'ennemi à Jérusalem même, en novemb
re 1977, puis en menant une négociation longue et difficile qui devait
aboutir à une certaine normalisation des relations entre l'Egypte et
Israël par la signature du traité de paix du 26 mars 1979, Anouar al-
Sadate se coupa de la Nation arabe dont il avait négligé les aver
tissements et enfreint les règles. Du même coup, le processus de paix
laborieusement mis au point à Camp David paraissait dangereusement
bloqué à quelques mois du délai imparti pour la restitution totale du
Sinaï et avant même que s'entament, plus sérieusement sur le fond,
les négociations de la seconde phase prévue par les accords-cadres du
17 septembre 1978 : le sort des Palestiniens. La disparition tragique
du Raïs égyptien, le 6 octobre dernier, pose, entre autres questions,
celle de l'avenir immédiat de l'Egypte, celle du sort de la paix égypto-
* Chargé de mission au Centre des hautes études sur l'Afrique et l'Asie modernes
(CHEAM), conseiller auprès du directeur de l'IFRI. 814 I POLITIQUE ÉTRANGÈRE
israélienne et enfin celle relative aux chances d'un règlement proche-
oriental plus étendu. Mais une partie des réponses qui seront appor
tées à cette triple interrogation tient elle-même dans une dernière
question : l'Egypte peut-elle et va-t-elle retrouver sa place au sein de
la communauté arabe ?
On a coutume de dire que l'Egypte est une oasis en forme de fleuve
joignant la forêt tropicale à la mer du milieu. C'est la plus peuplée, la
plus fertile et la plus puissante oasis du monde. C'est la seule aussi à
être devenue un Etat qui compte, aujourd'hui, près de cinquante mil
lions d'habitants. Si l'isolement y favorise, avec une juste fierté, les
sentiments particularistes, la sécurité, qui impliquait, autrefois, le
contrôle des déserts environnants exige, aujourd'hui, l'entente avec
ceux qui possèdent leurs prolongements. L'histoire et la culture ont
fait que ce pays, si particulier et si isolé, occupe dans le monde arabe
une place centrale, voire souveraine [2]. Qui souhaite évaluer les
chances de sa réinsertion politique dans celui-ci, doit se souvenir de
quelques périodes significatives de l'histoire d'une Egypte toujours
partagée entre l'affirmation de son caractère propre — l'égyptianité —
et les aspirations d'un panarabisme dont Le Caire serait l'âme.
Une véritable conscience nationale
II serait trop long d'entrer ici dans le détail de la naissance exaltante
du nationalisme égyptien. Pour beaucoup d'intellectuels égyptiens
contemporains, « l'égyptianité est une réalité quasi mystique » dont
ils retrouvent les traces et les œuvres à travers les âges [3]. Ils
pensent qu'il n'y a jamais eu rupture dans la personnalité égyptienne
depuis le temps des Pharaons et que celle-ci a pu survivre sous le
couvert des dynasties étrangères. Colonie de l'Empire romain, puis
de l'Empire byzantin, l'Egypte fut aisément conquise par les Arabes,
accueillis en libérateurs par une population qui avait appris à détester
ses maîtres grecs. En moins d'une centaine d'années la langue arabe
passa au rang d'idiome officiel du pays et une majorité d'Egyptiens se
convertirent à l'Islam. Les califes successifs organisèrent le pays en
un Empire i

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