La décentralisation du pouvoir local - article ; n°1 ; vol.16, pg 17-31
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Description

Annuaire des collectivités locales - Année 1996 - Volume 16 - Numéro 1 - Pages 17-31
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 33
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Claude Thoenig
2. La décentralisation du pouvoir local
In: Annuaire des collectivités locales. Tome 16, 1996. pp. 17-31.
Citer ce document / Cite this document :
Thoenig Jean-Claude. 2. La décentralisation du pouvoir local. In: Annuaire des collectivités locales. Tome 16, 1996. pp. 17-31.
doi : 10.3406/coloc.1996.1210
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/coloc_0291-4700_1996_num_16_1_1210LA LOCAL DECENTRALISATION DU POUVOIR
2
Jean-Claude THOENIG1
La cause paraît entendue. Un milieu restreint d'instances délibératives gouverne
les affaires publiques des collectivités locales. Que ce soit dans le cadre de la commune,
du département ou de la région, un conseil, et un seul, décide de la conduite des poli
tiques. Certes ses membres sont élus au suffrage universel. Mais il n'a pas à composer
avec des contre-pouvoirs institutionnellement légitimes au sein de son territoire de res
ponsabilité. Cette concentration du pouvoir est renforcée par la prolifération d'orga
nismes fonctionnels : syndicats intercommunaux, districts urbains, offices publics
d'HLM, agences de bassin, etc. Leurs dirigeants échappent à la sanction démocratique
directe et sont cooptés par les collectivités locales ou par l'État.
La question des contre-pouvoirs mérite attention. Elle est posée dans le sens soit
d'une participation des habitants soit du pluralisme de canaux légitimes reflétant l'ex
pression démocratique. Il s'agira d'en examiner la portée et la pertinence. Pour le dire
de façon abrupte, la participation s'avère, sur le terrain, une approche plutôt limitée et
décevante. Quant à la séparation progressive des pouvoirs, elle reste un sujet tabou. On
s'en étonnera, surtout lorsque, confrontant la lettre des institutions à la pratique quoti
dienne, on constatera combien la concentration du pouvoir est forte. Car l'arbre du
conseil cache la forêt du maire. Le poids de la majorité de l'assemblée locale reste
modéré. En fait, en son sein, une personne centralise sur elle-même une part très import
ante du pouvoir : le président du conseil ou le maire.
On pourra redessiner l'horlogerie institutionnelle des collectivités locales.
Quelques pistes seront esquissées en termes de «check and balance», dans une
perspective de différenciation et d'élargissement de l'accès au pouvoir légitime
(BIDEGARAY et EMERI, 1994). Restera à poser une question : la situation est-elle
mûre pour un débat sur ce thème ? On en doutera à certains égards, à partir de la froide
considération des pratiques quotidiennes de l'action publique. Car si, sur le registre de
la légitimité, l'accès à l'autorité institutionnelle demeure sélectif et restrictif, sur le
registre de l'influence, en revanche, et de manière silencieuse, la situation s'est élargie
vers un peu plus de concertation-négociation englobant des acteurs autres que les seuls
élus du peuple.
1. Christian BIDEGARAY, Patrice DURAN et Catherine PARADEISE ont émis des suggestions et des
conseils qui ont permis d'écrire ce texte. Qu'ils en soient remerciés. Ceci dit, la responsabilité des analyses
demeure le fait exclusif de l'auteur.
17 DÉCENTRALISATION DU POUVOIR LOCAL LA
1. Le présidentialisme centralisateur
De quelle façon la polarisation du pouvoir opère-t-elle ?
Formellement, les actes des collectivités locales procèdent d'une logique parle
mentaire. Le conseil choisit les enjeux à traiter, élabore des solutions et légitime les
décisions. La majorité tranche, chaque membre élu pesant du même poids dans le vote.
Dans la pratique, il en va autrement. Une personne domine : celle qui préside le conseil.
La commune illustre cette personnalisation du pouvoir. Le maire en est, en règle
générale, la pièce maîtresse. Il sert de figure emblématique. Mais il constitue surtout et
d'abord l'intégrateur des affaires de la collectivité. Il dispose d'un quasi-monopole de
la coordination et de l'impulsion. Il représente la source suprême de la légitimité et de
la répartition des tâches. Il forme l'épicentre de la politique et des politiques.
Le maire se situe en effet à l'intersection de quatre sphères d'actions, de natures
différentes et relativement spécialisées : la sphère du conseil municipal, avec sa logique
politique ; celle des services municipaux qui obéit à une logique bureaucratique ; celle
des rapports à la population, où domine la notion de service rendu aux clients et aux
assujettis ; celle des relations avec des décideurs extra-communaux, caractérisée par des
jeux de réseaux institutionnels et d'influences personnelles. Le maire est à la fois un
intervenant décisif dans chacune de ces sphères et le principal sinon l'unique point de
passage pour assurer les interfaces entre elles. Signe de son pouvoir, il se comporte par
fois comme une source de cloisonnement entre ces univers, interdisant de fait que des
relations directes s'opèrent entre eux qui ne passent pas par sa médiation et son
contrôle.
Au sein du conseil municipal, le maire joue un rôle prédominant même si, fo
rmellement, il n'est que le président. La majorité politique s'incarne en lui quand elle ne
procède pas de ses choix. Il compose parfois lui-même la liste électorale de son camp.
Les élections municipales favorisent dans les villes une bataille entre candidats à la
mairie aussi bien qu'entre blocs partisans ou listes. Le maire énonce le contenu de
l'agenda institutionnel du conseil, les orientations à choisir, les enjeux à traiter, les
réponses à mettre en oeuvre. Pour ce faire, il peut s'appuyer sur ses accès privilégiés
aux services municipaux, auprès du préfet et de la population. Bref, le maire régule
socialement, politiquement et fonctionnellement le conseil municipal. Rares sont les
situations qui voient cette propriété lui échapper et sa majorité lui refuser ses priorités.
Le maire est le «patron» de la bureaucratie municipale. Les services mettent en
oeuvre les décisions du conseil, ils assurent également la préparation des projets sou
haités par le maire. Ce dernier s'appuie sur un ou plusieurs fonctionnaires qu'il nomme,
de façon discrétionnaire, à la tête des bureaux. Le secrétaire général s'avère être un col
laborateur essentiel. Il dirige au quotidien l'ensemble de la pyramide hiérarchique,
assurant une bonne intégration entre les bureaux, en même temps que, par son accès
direct au maire, il porte et garantit la légitimité politique dans laquelle s'insère l'action
du fonctionnaire. Le couple maire-secrétaire général tend à se constituer une capacité
quasi hégémonique de coordination entre le conseil municipal et les services munici
paux. Lorsque des adjoints au maire bénéficient d'une délégation de signature, il est
18 DECENTRALISATION DU POUVOIR LOCAL LA
fréquent que leur intervention directe dans les services municipaux soit surveillée de
près par le maire et par son collaborateur de façon à être contenue au maximum.
Le maire joue un rôle actif dans les rapports avec la population. Il paie de sa per
sonne. Sa figure est largement valorisée par des techniques de communication. Il reçoit
le public. Il écoute et se charge de dossiers individuels, même lorsque leur traitement
relève d'autres autorités que les services municipaux. Il favorise une logique de ser
vices rendus de manière personnalisée. Et, s'il est absent, il délègue son rôle d'accès et
de courtier à des collaborateurs municipaux qui ne soient pas susceptibles de le concur
rencer politiquement. Fort de son contrôle du terrain local, il pèse sur le conseil et sur
les services au nom d'exigences de réalisme apolitique et d'urgences à satisfaire au
bénéfice de ressortissants individuellement désignés.
Entretenir des entrées auprès d'autorités publiques tierces constitue un autre
volet décisif pour une bonne gestion municipale. Car la commune est dépendante de
ressources, d'agréments, d'informations, de concours divers qui sont alloués par les
services de l'État, par la région, par le département ou par d'autres communes voisines.
Dans la réalité, ces affaires étrangères de la municipalité sont directement assurées par
le maire, et par lui se

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