La France a-t-elle changé de politique extérieure? - article ; n°4 ; vol.4, pg 387-400
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Description

Politique étrangère - Année 1939 - Volume 4 - Numéro 4 - Pages 387-400
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1939
Nombre de lectures 27
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Alfred Fabre-Luce
La France a-t-elle changé de politique extérieure?
In: Politique étrangère N°4 - 1939 - 4e année pp. 387-400.
Citer ce document / Cite this document :
Fabre-Luce Alfred. La France a-t-elle changé de politique extérieure?. In: Politique étrangère N°4 - 1939 - 4e année pp. 387-
400.
doi : 10.3406/polit.1939.5639
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1939_num_4_4_5639LA FRANCE A-T-ELLE CHANGÉ
DE POLITIQUE EXTÉRIEURE?1
Certains pensent qu'en mars 1939 le gouvernement français, revenant
sur une longue suite d'erreurs, a brusquement renié et renversé sa politique
extérieure de 1938. Au premier abord, les faits justifient cette opinion.
L'an dernier, la diplomatie française s'efforçait de limiter (ou d'interprét
er prudemment) ses engagements envers les états de l'Est. Depuis mars,
elle les a étendus ou précisés. Le souci de chercher l'accord avec tous
les pays sans distinction de régime cède à la nécessité d'organiser la résis
tance contre l'impérialisme de l'Axe. Si déplorable qu'elle soit, la division
du monde en deux blocs est un fait qu'on ne peut plus ignorer. La décla
ration franco-allemande du 6 décembre 1938 peut encore fournir un
argument utile dans la controverse diplomatique, mais l'esprit qui l'ani
mait semble s'être évaporé...
Le changement est donc indéniable. Mais pour en apprécier la signifi
cation il s'agit de savoir s'il provient du seul éclaircissement des cerveaux
ou dune transformation réelle des données du problème; si la politique
de conciliation pratiquée à Munich retardait ou au contraire préparait la
politique de fermeté qu'on célèbre aujourd'hui; enfin si, considérées l'une
et l'autre à leur place dans la suite des années, elles n'apparaissent pas
comme deux moyens différents mais également efficaces et appropriés aux
circonstances d'assurer le maintien de la paix, but suprême de la politique
française.
A notre avis, la diplomatie française dispose aujourd'hui d'atouts nou
veaux qui lui permettent de parler plus ferme sans encourir par là même
plus de risques. La France est moralement et matériellement mieux préparée
à une guerre éventuelle. Elle peut désormais compter avec certitude sur
le concours armé de l'Angleterre en cas de nouvelle agression allemande ou
1 . N. D. L. R. A la suite de la publication dans notre dernier numéro de la chronique
des ouvrages sur Munich par M. René Maheu, M. A. Fabre-Luce nous a adressé cet arti
cle, résumant ses vues sur la politique extérieure de la France à l'époque de Munich et
son évolution actuelle. LA POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA FRANCE 388
italienne 1. Enfin la décision prise à Washington d'autoriser d'importantes
livraisons d'avions à la France, l'adoption à Londres de la conscription,
la dénonciation du pacte germano-polonais, l'amélioration des relations
de l'U. R. S. S. avec la Pologne et la Roumanie ont posé les bases matér
ielles d'un Front de la Paix capable de contenir l'offensive des pays tota
litaires.
A l'énoncé de ces progrès, l'opposition répond qu'ils eussent été réalisés
plus tôt si le Quai d'Orsay avait été plus ferme et qu'il n'y a donc pas lieu
de les inscrire à l'actif de la politique de Munich. Elle précise qu'il ne tenait
qu'à notre gouvernement d'opérer à temps le redressement moral et le
réarmement du pays; qu'en prenant une position plus nette dans l'affaire
tchécoslovaque Paris eût entraîné Londres; que cette solidarité active eût
à son tour galvanisé la sympathie américaine, ramené la Pologne dans notre
camp, décidé l'U. R. S. S. à nous donner son concours sans réserve et sans
arrière-pensées.
La préparation de la France
Essayons de serrer le problème. — Parler des insuffisances et des
lenteurs de notre réarmement, c'est faire le procès de la gestion du
Front Populaire. Sans doute pouvons-nous passer rapidement sur ce
point, car les critiques de M. Georges Bonnet, qui se recrutent surtout
dans les partis d'extrême-gauche, ne se soucient pas de considérer les
lacunes d'une politique intérieure qu'ils ont menée et à laquelle, au
contraire, le ministre des Affaires Etrangères n'a eu aucune part. Il nous
suffira de répondre à deux remarques spécieuses par lesquelles ils tentent
de faire dévier le débat.
La non-préparation de la France, disent-ils, n'était guère invoquée
dans les discussions de l'automne 1 938. On se flattait plutôt d'avoir rendu
possible une paix durable avec un Reich rassasié par la satisfaction de
sa « dernière revendication territoriale ». Aujourd'hui, cet espoir ayant dis
paru, on découvre après coup une autre excuse. Si la crainte de la défaite
n'était pas ouvertement mentionnée en septembre, c'est parce qu'on ne
pouvait la formuler sans encourager l'adversaire. En vérité, la situation de
nos gouvernants était cruelle. Ils disposaient d'un argument décisif, qui eût
I . Sauf dans les cas douteux des pays baltes et de la Yougoslavie. POLITIQUE EXTÉRIEURE DE LA FRANCE 389 LA
suffi à clore le débat, ma» il» ne pouvaient l'utiliser sans commettre une
sorte de trahison. Leurs critiques le savaient et en profitaient... Aujourd'hui,
grâce au redressement opéré, il est possible d'aborder plus franchement
le sujet. Quand l'heure sera venue de lç traiter à fond, on reconnaîtra sans
doute que M. Daladier n'a rien exagéré en disant le 12 mai à la Chambre :
« Aueun chef du Gouvernement français* dans les conditions où se posait
le problème, ne pouvait envisager cette folie d'une guerre... »
Autre objection : « Sans doute, nous avons réarmé depuis septembre 1938.
Mais l'Allemagne a continué à armer (et à fortifier ses frontières) sur un
rythme encore plus rapide. Nous n'avons donc rien gagné. » II est possible,
en efïet, que l'Allemagne ait accru sur certains points son avance antérieure.
Mais si elle continue à gagner du terrain, c'est de plus en plus lentement
et l'on peut déjà prévoir le jour où elle en perdra : dès maintenant sa diplo
matie doit tenir compte de cette menace. Surtout, en comblant les lacunes
de notre organisation défensive, nous avons rendu impossible la victoire
par une guerre-éclair, chère aux théoriciens de Berlin et de Rome. Or
c'était la seule chance de l'Allemagne. L'ayant perdue, elle doit se résigner
au blocus qui la réduira à merci en un temps d'autant plus court qu'elle
aura elle-même, par son surarmement, rendu la consommation de guerre
plus intense.
Quant à la préparation morale, elle devait, pour être efficace, commencer
par une démonstration éclatante de l'impossibilité de la conciliation. On ne
pouvait en convaincre l'opinion sans mener l'expérience loyalement et
jusqu'au bout. En 1938, M. Hitler affirmait que sa seule ambition était
de réunir au Reich les Allemands qui vivaient sur ses frontières ; et la
doctrine raciste, qui désapprouvait l'annexion de populations étrangères,
donnait une certaine vraisemblance à son propos. Or une telle revendication,
même si elle devait être pleinement satisfaite, ne heurtait pas nos inté
rêts directs et ne suffisait pas à assurer l'hégémonie allemande en Europe.
On pouvait, par ailleurs, donner sans guerre — - peut-être même sans
remaniement territorial — un débouché oriental à l'industrie et à la popul
ation allemandes. Il y avait donc des éléments d'accord... L'occupation
de Prague a détruit le minimum de confiance qui eût été nécessaire à leur
mise en œuvre. Elle a ruiné dans l'opinion mondiale le fondement de la
politique national-socialiste, tel qu'il avait été défini par son inventeur. Au
même moment, les revendications italiennes en Afrique du Nord, soutenues
par Berlin, et la menace allemande sur les Dardanelles à travers la Roumanie
manifestaient aux yeux de tous l'interdépendance de nos intérêts impériaux
et continentaux, que certains avaient cru pouvoir séparer. Il est difficile
de croire qu'un

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