Le neutralisme yougoslave - article ; n°4 ; vol.26, pg 327-342
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Description

Politique étrangère - Année 1961 - Volume 26 - Numéro 4 - Pages 327-342
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1961
Nombre de lectures 72
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Philippe Aubert de La Rue
Le neutralisme yougoslave
In: Politique étrangère N°4 - 1961 - 26e année pp. 327-342.
Citer ce document / Cite this document :
Aubert de La Rue Philippe. Le neutralisme yougoslave. In: Politique étrangère N°4 - 1961 - 26e année pp. 327-342.
doi : 10.3406/polit.1961.2365
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1961_num_26_4_2365LE NEUTRALISME YOUGOSLAVE
Les avis peuvent se partager sur la portée pratique, à longue
échéance, de la conférence de Belgrade, dite des « non enga
gés». La réunion de septembre 1961, la première de cette im
portance en territoire yougoslave, a en tout cas apporté à la
Yougoslavie un gain de prestige considérable, fût-il passager.
Elle a d'autre part remis en vedette le caractère extrêmement
nuancé — d'aucuns diront ondoyant — de la politique exté
rieure yougoslave. L'attitude de la Yougoslavie durant la con
férence — moins d'ailleurs son intransigeance, historiquement
explicable, sur la question allemande, que son désir évident de
ménager outre mesure l'U.R.S.S. — a désappointé, voire agacé
ou irrité les alliés occidentaux. Le président Kennedy a ainsi
déclaré son intention de réexaminer l'assistance que les U.S.A.
avaient envisagé d'accorder à Belgrade dans le proche avenir.
La froideur plus ou moins accentuée que les Etats de l'Est, emb
oîtant le pas à Moscou, continuent à témoigner à la Yougo-
lavie, en a-t-elle été pour autant atténuée ? On ne dénote jus
qu'à présent guère de signes dans ce sens, même si l'on fait
abstraction de l'opposition doctrinale toujours irréductible des
ultras du bloc soviétique, la Chine et l'Albanie, au titisme de
Belgrade.
La Yougoslavie risquera-t-elle, à force de pratiquer le non
engagement, « de s'asseoir entre deux chaises » et, en voyant
les choses sous l'optique des grandes puissances, de mécontent
er les uns sans pour cela satisfaire les autres ? Assiste-t-on au
contraire à un savant et volontaire louvoiement ? Pour étudier
plus à fond le comportement yougoslave, il importe tout
d'abord de circonscrire la notion de « coexistence active » , f on- DE LA RUE 328
dement conceptuel sur lequel s'appuie la Yougoslavie dans ses
relations extérieures : c'est la synthèse ou la rationalisation de*
impératifs divers dont le gouvernement de Belgrade doit tenir
compte.
« Notre conception de la coexistence », a dit le maréchal Tito.,
qui s'est à maintes reprises employé à la définir, « c'est, d'une
part, la possibilité et la nécessité de l'existence commune d'états
ayant des systèmes différents, et c'est d'autre part la réaffirmat
ion du droit de chaque pays de s'organiser et de se développer
comme il l'entend » (1). Transposée dans la pratique interna
tionale, la co-existence signifie donc le non-alignement sur les
camps Est et Ouest, cette attitude servant, selon les porte-
paroles yougoslaves, non seulement les intérêts de leur pays,
mais également la paix mondiale en favorisant le bon vois
inage et les relations pacifiques de pays dont les moyens et les
régimes diffèrent.
Cette caractéristique appelle immédiatement deux correctifs.
Non engagement (ou neutralisme dans le sens de la non parti
cipation à des blocs ou alliance) ne signifie pas, les Yougos
laves tiennent à le souligner, neutralité (dans le sens de la re
nonciation à toute prise de position concrète). La Yougoslavie
n'est donc pas neutre à l'égard des grands problèmes interna
tionaux (2). Elle se considère parfaitement habilitée à faire va
loir son opinion dans telle ou telle question (par exemple, le
Congo, Bizerte), non seulement platoniquement, mais pratique
ment. Elle n'hésite pas, le cas échéant, à adopter une attitude
catégorique, sans ménager les grandes puissances (surtout si
elles sont occidentales), et même s'il s'agit d'affaires où ses in
térêts ne sont pas directement en jeu.
D'autre part, la Yougoslavie s'est toujours défendue d'aspi
rer à la constitution d'un « troisième bloc t> . Elle a explicit
ement reconnu l'hétérogénéité des pays non engagés, « cette vé
ritable mosaïque » (3) sociale, géographique, politique. Ses amb
itions se limitent donc à inciter les « non alignés » (en prati-
(1) Cité dans : Joze Smole, « La conception yougoslave de la coexistence », éd. fram-
çaise, Belgrade 1961, p. 33. M. Smole est rédacteur en chef de la «Borba».
(2) Ibid. p. 34. Les Yougoslaves préfèrent le terme de coexistence à celui de neu
tralisme.
(3) Discours prononcé par le Président Tito, le 4-7-61 à Titovo Uzice, éd. fr., Bal-
grade 1961, p. 18. YOUGOSLAVIE 329
que les afro-asiatiques) à synchroniser leurs attitudes et à ren
forcer ainsi leur position dans l'arène internationale, notam
ment à l'ONU, où l'importance numérique du Tiers-Monde pèse
lourd dans les votes. Naturellement la Yougoslavie ne néglige
rien pour accroître son incontestable prestige parmi les états
non engagés. La conférence de Belgrade comme les voyages que
le maréchal Tito entreprend volontiers dans le vaste Tiers-
Monde le démontrent.
Ainsi conçue, la politique yougoslave de co-existence ne man-
f ue pas de logique. Pourtant, en étudiant les déclarations gou
vernementales ou les commentaires qui lui sont consacrés en
Yougoslavie, on éprouve un certain malaise. Elles sonnent parf
ois un peu creux. Si louables que soient leurs fins, elles don
nent l'impression d'un certain irréalisme. Que l'on considère
la vie sociale sur le plan international ou national, on rencontre
toujours des entités inégales en importance, en puissance, en
responsabilité. L'addition des petits ou même des moyens donne
généralement, par suite de leur manque d'homogénéité, une
somme et non une intégration. Toute construction politique qui
voudrait escamoter de la vie internationale les effets de l'iné
vitable structure hiérarchisée serait échafaudée dans le vide.
Les Yougoslaves eux-mêmes éprouvent le besoin de se dé
fendre contre le reproche d'être des « idéalistes incorrigibles
ne tenant aucun compte des réalités du monde actuel » (4). Le
maréchal Tito lui-même disait récemment : « On se demande
souvent : ces Yougoslaves, dont le pays est petit et dont la force
économique n'est pas particulièrement grande, pourquoi font-
ils les importants et se mêlent-ils de tout ?» (5). Le président
de la R.F.P.Y. (6) faisait ainsi allusion à la médiocrité des d
imensions géographiques et économiques. La Yougoslavie dé
passe en superficie (255.870 km2) la République Fédérale All
emande et est le plus grand des états balkaniques (suivie de près
par la Roumanie), mais elle n'atteint ni en population ni en
surface un état moyen comme la Pologne. Coincée entre l'Italie
«t la Grèce, membres de l'OTAN, d'une part, la Hongrie, la Rou
manie et la Bulgarie d'autre part, qui ont adhéré au pacte de
(4) Smole, op. cit., p. 10.
$) Discours prononcé à Belgrade le 27-4-61, éd. fr., Belgrade 1961.
(4) Abréviation officielle pour : République Federative Populaire de Yougoslavie. DE LA ROE 330
Varsovie, sa position stratégique est inconfortable. La planifica
tion prévoit pour l'avenir une structure relativement équilibrée,
mi-industrielle, mi-agricole. On n'en est pas encore là. La popul
ation qui comptera dans quelques années environ 20 millions
d'habitants (aujourd'hui 18 millions et demi), présente, outre
sa diversité nationale, de grandes disparités de développement.
Malgré de gros efforts et d'impressionnantes réalisations en
matière d'instruction publique, elle est encore loin de répondre
aux exigences de précision et de rendement que pose l'écono
mie moderne. Pourrait-il d'ailleurs en être autrement étant
donné le niveau très bas à partir duquel la Yougoslavie, dé
vastée par la guerre, ayant subi d'énormes pertes humaines, a
dû, dès 1945, reconstituer son existence. Reste qu'aujourd'hui
encore, par l'insuffisance de sa p

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