Le souvenir de Sun Yat-sen et la République populaire de Chine (1886-1960) - article ; n°5 ; vol.25, pg 491-516
27 pages
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Le souvenir de Sun Yat-sen et la République populaire de Chine (1886-1960) - article ; n°5 ; vol.25, pg 491-516

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Description

Politique étrangère - Année 1960 - Volume 25 - Numéro 5 - Pages 491-516
26 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1960
Nombre de lectures 63
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Roger Lévy
Le souvenir de Sun Yat-sen et la République populaire de Chine
(1886-1960)
In: Politique étrangère N°5 - 1960 - 25e année pp. 491-516.
Citer ce document / Cite this document :
Lévy Roger. Le souvenir de Sun Yat-sen et la République populaire de Chine (1886-1960). In: Politique étrangère N°5 - 1960 -
25e année pp. 491-516.
doi : 10.3406/polit.1960.2395
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1960_num_25_5_2395LE SOUVENIR DE SUN YAT-SEN
ET LA REPUBLIQUE POPULAIRE DE CHINE
(1866-1960)
Passage et transfiguration — Colporteur de la Ré
volution, sur trois continents — Le Triple démisme
— Un diplomate chinois mécontent — Sun Yat-sen,
1960 — Fidélité de la veuve — Un musée Sun-Mao —
Sept lustres.
Passage et transfiguration
L'image de Sun Yat-sen, « père de la Révolution chinoise »,
a été, au cours des trente-cinq années qui se sont écoulées depuis
sa mort, tour à tour vénérée, transfigurée, un peu négligée ; et
maintenant rétablie dans un panthéon national.
Il m'était donné de contempler les traits du révolutionnaire,
dans les années 1920, à la Légation de Chine, rue de Babylone,
sous les espèces d'une haute photographie qui ornait ostensible
ment la queue du piano, parmi les cloisonnés et les porcelaines.
Ainsi, l'attention de l'Européen était-elle attirée sur Sun Yat-sen,
il y a quarante ans, par les tenants officiels d'un gouvernement
fantôme, soi-disant parlementaire . et démocratique, domicilié à
Pékin.
Sun Yat-sen décédait, le 12 mars 1925. En avril, une cérémonie
commemorative était organisée par la colonie chinoise de Paris,
à l'Institut Océanographique, rue St-Jacques.
J'y assistais. Amphithéâtre tendu d'étoffes blanches — le blanc
est en Chine la couleur du deuil — de banderoles où les étudiants
avaient tracé, d'une main fervente, les caractères à l'encre ; homm
ages, versets dédiés à celui qui, sa vie durant, avait connu lés
évasions, l'exil, les succès éphémères, l'adversité, mais avait tou
jours pressenti les temps nouveaux. La Chine se vaincrait elle-
même et tendrait à son unification. ROGER LEVY 492
Quatre ans passaient : 1929. Les journaux d'Occident présen
taient les illustrations de l'inhumation définitive : train spécial,
de Pékin à Nankin ; wagon converti en chapelle ; locomotive
ornée des drapeaux ensoleillés de la Révolution ; l'arrivée à Nan
kin ; le cortège des membres du gouvernement ; le corps dipl
omatique ; le peuple en marche vers le mausolée déployé aux pentes
de la colline de pourpre. Autre Lénine — les cortèges organisés
à Nankin seront analogues à ceux dirigés vers la chapelle de la
Place Rouge — Sun Yat-sen dort un sommeil embaumé, sous les
tuiles faîlières qui, tournées vers le ciel, ont cessé d'écarter les
démons. Sa momie n'est point visible ; mais le buste, sculpté à
Paris par Landowski, dresse au centre du monument une tête
énergique, hors d'un blouson mandarin ; l'artiste-français (avec
un trait d'union, s'il vous plaît) ayant réussi à imposer ce vêt
ement vieux style, malgré les objurgations des modernistes chinois
qui réclamaient que fussent fixés dans la pierre le faux-col droit,
le petit nœud de cravate dont usait Sun Yat-sen, à la fin de sa
vie.
En cette année 1929, je publiais dans une revue de politique
étrangère, l'Europe Nouvelle, un essai intitulé « Passage et trans
figuration de Sun Yat-sen ». J'en citerai des extraits, avant de pré
senter les apports, superposés aux connaissances incomplètes, que
l'on pouvait avoir à l'époque, de l'existence et des œuvres du dis
paru. On verra comment la présence de Sun se prolonge ; com
ment sa veuve, toujours vivante, Song Ching-ling, affiche sa fidé
lité à l'esprit et à la lettre du mort ; mais aussi comment elle
infléchit ses admirations selon les circonstances. Un pèlerinage
à la source — à la maison natale (ou soi-disant natale) de Sun — -
permettra de constater que le Parti communiste chinois annexe
le précurseur plutôt que l'initiateur de l'actuelle Révolution.
Colporteur de la Révolution sur trois continents
« Si j'avais dix ans de moins, écrit Renan, j'apprendrais le
chinois. » Le passé de la Chine sollicitait la curiosité de l'orien
taliste qui comprenait quel serait le rôle du Pays du Milieu sur
une planète rétrécie. Sun Yat-sen aurait pu ranger Renan parmi
ces « pré-voyants », ou penseurs, qu'il élève au sommet de la
hiérarchie sociale.
Dédiée à la vie et aux œuvres de Sun Yat-sen, une littérature
américaine et britannique existait en 1929. Un modeste rayon
suffisait à disposer les biographies, traductions et commentaires, YÀT-SEN 493 SUN
rédigés en langue française. Pourtant la traduction de l'œuvre
capitale, « les Trois Principes du Peuple », par le R.P, Pascal
M. d'Elia, de l'Université « l'Aurore » de Changhaï et les mémoires
de Sun, ceux-ci en langue anglaise, adaptés du russe, permett
aient de tenter l'esquisse d'un portrait.
Sun Wen ou Sun Yat-sen, appelé encore Sun Tchong-chan et
au Japon Yi-sien (esprit vagabond), — Yi-sien, c'est Yat-sen dans
la prononciation de Canton — naquit d'une famille de pauvres
fermiers, le 12 novembre 1866, au village de Choy-hung (prospér
ité bleue) dans la sous-préfecture de Hiang-chan (collines parfu
mées), à égale distance entre Canton et Macao. Plus tard, quelques
disciples essayeront, pour le soustraire aux poursuites de la police
impériale, qui le filait jusqu'à Londres, d'en faire un sujet amér
icain. Ils répandront le bruit qu'il était né à Honolulu.
La tradition, la légende, le montrent questionneur, raisonneur,
dès l'enfance ; rebelle aux méthodes de la vieille pédagogie : les
élèves psalmodiaient le long des heures, face à la classe, le dos
tourné au tableau, sans voir les caractères inscrits que le maître
négligeait d'expliquer.
Un jour, le frère aîné, Sun Te-tchong, surnommé Ah Mei, est
revenu de Honolulu où il s'était employé aux cultures de rizières ;
ses récits captivent le petit Sun qui rêve de s'embarquer, de con
naître des pays où il ne lui soit plus répondu à propos de tout :
« On a toujours fait ainsi, c'est donc très bien. » Le grand frère
repart. Sun entreprend seul, en 1879, la traversée dans un bateau
d'émigrants. Il s'étonne devant une poutre de fer qui soutient le
pont de bout en bout : « Comment a-t-on pu trouver assez d'hom
mes pour transporter cette poutre et la placer ici ?» Il admire
le système postal ; l'ordre, les lois instaurés par l'Amérique aux
Hawàï. Trois ans il fréquentera des écoles protestantes (il ne
recevra le baptême qu'en 1884, à Canton) ; il fera des progrès
rapides en langue anglaise ; lira, étudiera la Bible, au dam du
frère aîné, traditionaliste et agnostique, qui s'inquiétera du goût
trop vif que témoigne son cadet au monde extérieur et l'obligera
à rentrer au village.
1883-1884, « année perdue », dit Sun. Peut-être pour les études ;
non pour les idées de réforme que les contrastes entre traditions
chinoises et mœurs américaines, observées à Honolulu, avaient
éveillées en lui.
Les anecdotes, vraies ou fausses, sont ressassées. Des lettres
« barbares » et non des caractères, gravées sur une monnaie de
•cuivre, exaspèrent le jeune homme : « La Chine est gouvernée 494 ROGER LEVY
par l'étranger ! » Accompagné de Lou Ho-tong, jeune chrétien
fervent, son « ami doctrinaire », il casse dans un pagodon le bras
d'une idole de plâtre, devant des camarades ahuris, puis scan
dalisés. « Voyez quel dieu protège votre village ! » Iconoclaste,
obligé de fuir, Sun passe à Hongkong où il poursuivra ses études
au Queen's College. Il a dix-huit ans. Il devient membre de la
London Missionary Society. En 1885, il épouse une jeune fille
originaire d'un village voisin du si

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