Une nouvelle optique sur la sécurité européenne : le regard de Washington - article ; n°3 ; vol.55, pg 543-557

Michael Brenner

Description

Politique étrangère - Année 1990 - Volume 55 - Numéro 3 - Pages 543-557
New Perspectives on European Security : The View from Washington, by Michael Brenner
American thinking about European security is experiencing a profound transformation as the Bush administration cornes to terms with the full implications of the liberal revolution in East Central Europe and the end of the Cold War. This change entails a progressive shift in emphasis away from a US-led defence effort to a collective management of political security. An incremental adjustment is being made in Washington s views on doctrine, force deployments and even command structures. The situational logic points to more truly multilateral arrangements. But they may be put in jeopardy by a revival of insular attitudes in the US or by the triumph of parochial perspectives among the allies generally.
Les Américains reviennent entièrement sur leurs positions en matière de sécurité européenne, l'Administration Bush acceptant la fin de la guerre froide ainsi que la révolution libérale et tout ce qu'elle suppose en Europe centrale et orientale. Ces bouleversements impliquent une intervention américaine moins importante et une plus grande solidarité de tous. Washington procède donc actuellement à la révision de ses points de doctrine, du déploiement de ses forces militaires et de ses dispositifs de commandement. La logique de situation fait place à des dispositions multilatérales plus grandes qui risquent d'être compromises par le retour du réflexe insulaire des Américains ou la reprise des querelles de clocher chez les alliés.
15 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

• Publié par: POLITIQUE_ETRANGERE
• Publié le: 01 janvier 1990
• Nombre de lectures: 14
• Langue: Français
• Poids de l'ouvrage: 1 Mo

Extrait

Brenner
Une nouvelle optique sur la sécurité européenne : le regard de
Washington
In: Politique étrangère N°3 - 1990 - 55e année pp. 543-557.
Abstract
New Perspectives on European Security : The View from Washington, by Michael Brenner
American thinking about European security is experiencing a profound transformation as the Bush administration cornes to terms
with the full implications of the liberal revolution in East Central Europe and the end of the Cold War. This change entails a
progressive shift in emphasis away from a US-led defence effort to a collective management of political security. An incremental
adjustment is being made in Washington s views on doctrine, force deployments and even command structures. The situational
logic points to more truly multilateral arrangements. But they may be put in jeopardy by a revival of insular attitudes in the US or
by the triumph of parochial perspectives among the allies generally.
Résumé
Les Américains reviennent entièrement sur leurs positions en matière de sécurité européenne, l'Administration Bush acceptant la
fin de la guerre froide ainsi que la révolution libérale et tout ce qu'elle suppose en Europe centrale et orientale. Ces
bouleversements impliquent une intervention américaine moins importante et une plus grande solidarité de tous. Washington
procède donc actuellement à la révision de ses points de doctrine, du déploiement de ses forces militaires et de ses dispositifs de
commandement. La logique de situation fait place à des dispositions multilatérales plus grandes qui risquent d'être compromises
par le retour du réflexe insulaire des Américains ou la reprise des querelles de clocher chez les alliés.
Citer ce document / Cite this document :
Brenner. Une nouvelle optique sur la sécurité européenne : le regard de Washington. In: Politique étrangère N°3 - 1990 - 55e
année pp. 543-557.
doi : 10.3406/polit.1990.3967
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/polit_0032-342X_1990_num_55_3_3967POLITIQUE ÉTRANGÈRE I 543
Une nouvelle optique
Michael BRENNER sur la sécurité européenne
le regard de Washington
Pour « Quid, la première après l'OTAN fois depuis ? » n'est ses quarante plus tout ans à fait d'existence, une boutade la question et peut
être prise au sérieux. La menace militaire de l'URSS, qui a galvanisé
la volonté des pays de l'OTAN d'organiser leur défense commune,
s'estompe à présent que la glasnost envahit la politique de sécurité soviéti
que et qu'un vent de réformes politiques balaye l'Europe de l'Est. La
politique résolument iconoclaste menée par Mikhaïl Gorbatchev au Kremlin
a déclenché des développements qui modifient profondément le contexte
dans lequel s'inscrit la sécurité en Europe et commandent de reconsidérer
les objectifs et la structure de l'Alliance atlantique.
Il s'agit d'un vaste programme d'adaptation qui exige au préalable de
répondre aux questions suivantes :
— Comment une alliance militaire peut-elle remplacer son objectif initial
qui était de se préparer à affronter un ennemi bien défini, par celui de faire
face à une situation confuse, où règne la plus grande incertitude sur la
nature même de la menace ?
— L'Alliance atlantique peut-elle abandonner sa position militaire défensive
pour une position constructive, impliquant un engagement actif avec ses
anciens protagonistes ? Son organisation offre-t-elle la capacité voulue pour
devenir l'instrument politique de la création d'un nouveau système de
sécurité, en collaboration avec des Etats qui appartenaient hier encore au
camp adverse ?
— Quel doit être le rôle exact d'une alliance dont les membres forment
également une communauté économique florissante, véritable aimant pour
les pays d'Europe de l'Est dans leurs efforts de libéralisation ? Sur quelle
base pourrait-on relier ces deux instruments pour affirmer une stratégie
commune ?
La réponse à ces questions passe inévitablement par celle de la place future
des Etats-Unis au sein de l'Alliance. Quelle sera leur capacité et leur
aptitude à en conserver la tête ? Comment pourraient-ils partager ce pre
mier rôle avec leurs alliés européens, voire s'en trouver évincés par eux ?
Principaux architectes des structures de sécurité occidentales et première
puissance militaire étayant ces structures, les Etats-Unis ont un rôle majeur
* Professeur de relations internationales à l'université de Pittsburgh (Etats-Unis). I POLITIQUE ÉTRANGÈRE 544
à jouer dans la réorganisation de l'architecture stratégique de l'Europe.
Pourtant, l'Alliance atlantique est marquée par une anomalie flagrante.
Bien que son champ d'action soit l'Europe et sa première tâche de réconcil
ier désormais les deux pôles du continent européen, ses destinées sont
officiellement présidées par une nation géographiquement distante, qu'un
océan sépare de l'Europe. Cette fâcheuse réalité a été mise en lumière par
l'actualité récente, qui accentue moins la nécessité d'une défense militaire
que celle d'une gestion politique collective. Les Etats-Unis vont devoir
s'accommoder d'une position plus modeste dans les affaires de l'Europe ;
celle-ci demeurera certes importante, mais ils envisagent cette perspective
avec difficulté et même, à certains égards, avec douleur. La période
transitoire qui vient de s'ouvrir permettra de tester la disposition des Etats-
Unis à s'engager diplomatiquement, sans conserver les prérogatives de leur
prédominance passée. Elle permettra également d'éprouver non seulement
l'aptitude de l'Europe occidentale à affirmer une personnalité politique plus
clairement tranchée, mais également sa capacité à collaborer sur un pied
d'égalité avec les Etats-Unis pour la construction d'un nouveau système de
sécurité continentale.
L'internationalisme des Etats-Unis : une réalité immuable ou changeante ?
L'image de superpuissance des Etats-Unis est profondément enracinée dans
notre conscience politique depuis l'après-guerre. Au point que l'on serait
tenté d'affirmer qu'ils sont destinés à suivre une politique d'internationa
lisme responsable — quand bien même ils abandonneraient certains des
pouvoirs et responsabilités inhérents à leur ancienne position tutélaire. On
s'accorde généralement à reconnaître qu'un processus de normalisation est
en cours qui va remodeler les relations des Américains avec leurs alliés (et
partenaires économiques). En revanche, il est moins probable que ce
processus porte également le germe d'une transformation graduelle, mais
profonde, de l'image que les Etats-Unis se font d'eux-mêmes. L'abdication
de son rôle de superpuissance pourrait représenter une expérience pénible
pour ce pays dont l'identité collective est fortement liée à un sens aigu de
sa singularité et qui a une forte tradition d'isolationnisme.
Trois facteurs ont grandement facilité la conciliation de cette tradition
d'orgueilleuse insularité avec les exigences d'un statut de grande puissance.
Le facteur le plus important était la menace que le communisme mondial,
patronné par l'URSS, faisait peser sur la sécurité du monde. La mission de
défendre la cause de la démocratie et les nations libres a été suffisamment
convaincante pour battre en brèche les vieilles mentalités isolationnistes.
Elle n'a pas seulement suscité une pléiade d'actions pratiques, jugées
impérieuses ; elle a également préservé la foi en le caractère exceptionnel
de l'Amérique. Qui plus est, elle a même exalté cette foi en justifiant une
politique étrangère activiste, au nom de l'idéal à défendre.
Un deuxième facteur a contribué à transformer le regard porté par les
Etats-Unis sur le reste du monde : l'abondance des ressources du pays.
Cette richesse a fait naître un puissant sens de la solidarité, en épargnant à
la nation des choix cornéliens sur la manière de répartir des ressources
économiques limitées, ces mêmes choix qui tourmentent tant d'autres
nations. Dernier et troisième facteur, la déférence exceptionnelle que le
leadership américain a inspir