« La Colline inspirée ». Un peu d histoire à propos d un roman - article ; n°21 ; vol.4, pg 225-252
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Description

Revue d'histoire de l'Église de France - Année 1913 - Volume 4 - Numéro 21 - Pages 225-252
28 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1913
Nombre de lectures 13
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Eugène Mangenot
« La Colline inspirée ». Un peu d'histoire à propos d'un roman
In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 4. N°21, 1913. pp. 225-252.
Citer ce document / Cite this document :
Mangenot Eugène. « La Colline inspirée ». Un peu d'histoire à propos d'un roman. In: Revue d'histoire de l'Église de France.
Tome 4. N°21, 1913. pp. 225-252.
doi : 10.3406/rhef.1913.2068
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhef_0300-9505_1913_num_4_21_2068« LA COLLINE INSPIRÉE »
UN PEU D'HISTOIRE A PROPOS D'UN ROMAN
Le pèlerinage de Notre-Dame de Sion, si cher à la piété
des Lorrains, est connu maintenant du monde entier, au
moins du monde lettré, depuis que M. Maurice Barrés*
qui avait déjà témoigné plusieurs fois1 de son culte pour
le sanctuaire lorrain de la Vierge, lui a consacré un roman
tout entier : la Colline inspirée. Sa publication, annoncée
longtemps à l'avance et impatiemment attendue, a été
un événement littéraire et a obtenu un grand succès de
librairie2. Malheureusement, l'illustre académicien, au
lieu de s'inspirer des plus belles époques du pèlerinage de
Sion, sous le règne des ducs de Lorraine de la maison de
Vaudémont, et de développer, par exemple, la légende
populaire du Saut de la Pucelle, a pris pour thème une des
plus tristes pages de son histoire, la défection lamentable
des trois frères Baillard et leur adhésion fanatique à la
secte normande de Vintras. La plupart de ses lecteurs,
peu au courant de l'histoire religieuse de la Lorraine,
n'ont pas compris les allusions qu'y faisait trop discr
ètement le romancier, et plusieurs des nombreux critiques
qui ont loué le roman ont commis de plaisantes bévues.
Au surplus, en écrivant un roman dont le fond est histori
que, M. Barrés a pris à l'égard des faits qu'il racontait une
liberté, qu'on ne peut refuser à un romancier, mais qui a
induit des lecteurs à confondre le réel et l'imaginaire,
la vérité et la fiction. Enfin, soit qu'il ait insuffisamment
consulté toutes les sources écrites, soit qu'il ait cédé incon
sciemment à ses préférences, il n'a pas su toujours appré-
1. Notamment dans Un homme libre ; Amori et dolori sacrum : le Tfnovembre
en Lorraine ; Les amitiés françaises, et peut-être ailleurs encore.
2. La Colline inspirée a paru dans la Revue hebdomadaire, du 23 novembre
4912 au 8 février 1913, puis en un vol. in-12de428p., chez Émile-Paul, Paris.
Analecta, 1913, t. iv. 15 REVUE D'HISTOIRE DE L'ÉGLISE DE FRANCE 226
cier impartialement la conduite des adversaires des Baillard
devenus ses héros, en particulier celle de la « hiérarchie »
ecclésiastique, comme il dit, donc de l'évêque de Nancy,
et celle des Pères oblats, que Mgr Menjaud envoya à
Sion réparer les ruines spirituelles produites par les nou
veaux adeptes de Y Œuvre de la miséricorde.
C'est pourquoi j'ai pensé qu'il était bon de présenter,
des fondements historiques de la Colline inspirée, un
exposé plus complet que celui qu'a donné M. le chanoine
Eugène Martin dans la Croix1. Suivant l'ordre chrono
logique, j'exposerai donc, aussi sommairement que pos
sible, l'œuvre et la chute des Baillard.
Mais auparavant jetons un rapide coup d'œil sur le
théâtre même des événements, la colline de Sion.
A l'ouest de la plaine lorraine, et en avant des esca
rpements rigides qui marquent l'affleurement du calcaire
oolithique, s'élèvent quelques buttes formées à l'époque
secondaire d'un terrain plus récent que celui de la plaine.
De ces buttes, la plus remarquable et la plus élevée2
est la côte de Sion-Vaudémont. Elle a la forme d'un
hémicycle ou d'un fer à cheval. Vaudémont a été bâti
sur l'éperon de l'ouest, et le sanctuaire de Sion s'élève
sur un mamelon détaché, à l'extrémité du nord ; un
plateau de trois à quatre kilomètres sépare les deux
pointes de la colline. Celle-ci domine de très haut la
plaine; elle était donc un excellent observatoire natur
el. Il n'est pas étonnant dès lors que les hommes en
aient fait de bonne heure un lieu d'habitation, un camp
retranché et fortifié, et comme ils sont naturellement
religieux, un lieu de culte et un temple à la divinité.
C'est dans ce sens qu'il faut entendre l'expression de
M. Barrés 3 que la colline de Sion-Vaudémont est un de ces
1. Les 10, 12 et 18 février 1913. Ces articles, les plus substantiels qui aient
encore été écrits sur le sujet, ont été reproduits dans l'Eclair de l'Est, à Nancy,
les 24 février, 6 et 13 mars 1913.
2. Elle a 545 mètres de hauteur.
3. M. Barrés, dont l'imagination est hantée de fantômes, de revenants,
de fées, voit sur la colline des ombres silencieuses, qui accueillent le pèlerin
lorrain, un esprit divin qui souffle sur ces hauteurs, un génie de la colline LA COLLINE INSPIRÉE » 227 «
lieux inspirés où souffle l'esprit. Y voir davantage, y
reconnaître la présence d'un esprit, d'un génie qui serait
l'esprit et le génie de la colline, serait prendre une méta
phore pour une réalité sans consistance.
Sion a été une « station » importante pendant la période
néolithique. On y a retrouvé des haches polies et des
silex taillés. A l'époque celtique, il y avait, entre cette
colline et Vaudémont, un camp retranché et, à Sion
même, on honorait la déesse Rosmerte. Les Romains eurent
des postes fortifiés sur les deux extrémités de la plate
forme, et la tour dite de Brunehaut à Vaudémont est une
construction romaine. A Sion, il y avait un vicus considé
rable, où le culte de Mercure était associé à celui de Ros
merte. C'est au ve siècle, peut-être avant, que le christi
anisme pénétra sur la colline : témoin l'épitaphe du jeune
Nicétius trouvée à Sion même. Le silence se fait ensuite
jusqu'au milieu du dixième siècle. A cette époque,
l'évêque de Toul, saint Gauzelin, échangea avec Achard,
évêque de Langres, l'abbaye de Varennes pour les pro
priétés que ce prélat avait dans trois localités, dont l'une
est nommée Seionz. Saint Gérard, qui remplaça saint
Gauzelin sur le siège episcopal, donna les biens que son
Église avait à Seionz aux chanoines de Saint-Gengoul
de Toul. La tradition locale veut que saint Gérard ait élevé
à Sion, à la suite d'une révélation, une chapelle à la sainte
Vierge et qu'il soit l'initiateur du pèlerinage. Il est con
stant que l'église de Sion, bâtie déjà du temps de saint
Gérard, était l'église-mère du pagus Suggentensis, le Sain-
tois. La Vierge Marie avait donc remplacé, peut-être dès
la conversion des Leuques au christianisme, la déesse
Rosmerte. Le pèlerinage à la chapelle de Sion s'introduis
it progressivement, provoqué par les faveurs que la
Mère de Dieu s'est plu à répandre en ce lieu.
Du xie au xvie siècle, l'histoire de Sion est à peine con
nue : le peu que l'on en sait se rattache aux rapports des
comtes de Vaudémont avec le sanctuaire de Marie, voisin
du chef -lieu de leur comté. Le pèlerinage, fréquenté jus-
qui animait Leopold Baillard. Ce mysticisme de mauvais aloi ne serait-il pas
,un emprunt fait à un occultiste lorrain, Stanislas de Guaita ? Cf. le P. Louis
de Mondadon, dans les Études du 20 mars 1913, p. 829. REVUE D'HISTOIRE DE L'ÉGLISE DE FRANCE
qu'alors par le peuple, devint progressivement le pèleri
nage national de la Lorraine, surtout quand les comtes de
Vaudémont montèrent sur le trône ducal. Comtes et ducs
venaient à Sion en pèlerinage et comblaient de leurs dons
le sanctuaire de Marie. Le culte y était célébré par un
vicaire perpétuel, que les chanoines de Saint-Gengoul
y nommaient régulièrement.
C'est au xvne siècle que la dévotion des ducs de Lor
raine envers Notre-Dame de Sion devint plus vive et plus
efficace. L' affluence des pèlerins croissait d'année en année
et le vicaire ne suffi

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