La vie religieuse dans la colonie de New Plymouth (1620-1691) (troisième et dernier article) - article ; n°1 ; vol.136, pg 58-98
42 pages
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La vie religieuse dans la colonie de New Plymouth (1620-1691) (troisième et dernier article) - article ; n°1 ; vol.136, pg 58-98

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Description

Revue de l'histoire des religions - Année 1949 - Volume 136 - Numéro 1 - Pages 58-98
41 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1949
Nombre de lectures 0
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

M. Giraud
La vie religieuse dans la colonie de New Plymouth (1620-1691)
(troisième et dernier article)
In: Revue de l'histoire des religions, tome 136 n°1, 1949. pp. 58-98.
Citer ce document / Cite this document :
Giraud M. La vie religieuse dans la colonie de New Plymouth (1620-1691) (troisième et dernier article). In: Revue de l'histoire
des religions, tome 136 n°1, 1949. pp. 58-98.
doi : 10.3406/rhr.1949.5667
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1949_num_136_1_5667La vie religieuse
dans la colonie de New Plymouth
(1620-1691)
(Troisième et dernier article)
De l'aveu de Cotton Mather, la persuasion était une arme
souvent utilisée par l'Église de Plymouth1. Elle y avait recours
non seulement, comme nous l'avons vd, dans ses rapports
avec lès sectes dissidentes^ mais aussi à l'intérieur de la congré
gation, lorsqu'elle procédait à l'application de cette discipline
sur laquelle reposaient les Églises congrégationnalistes. Grâce à
cette mentalité conciliante, elle évita, comme autrefois l'Église
de Leyde, la mesquinerie des animosités personnelles qui
avaient vicié le fonctionnement des premières congrégations
brownjstes.
Assurément, la discipline était appliquée dans l'Église de
Plymouth avec une sévérité dont le gouverneur Bradford rend
formellement témoignage2. Aux termes du « covenant "» que
les fidèles s'engageaient à respecter en y entrant, chacun devait
exercer sur son voisin cette « surveillance sacrée », « holy
watchfulness », qui devait prévenir les dérogations à la moral
ité, et chacun était tenu de dénoncer les cas d'intempérance,
les calomnies, les outrages à la pudeur, ou le trafic des bois-,
sons alcoolisées avec les Indiens. Les enfants étaient soumis à
la surveillance de leurs aînés, et la congrégation était saisie
de leurs fautes, comme de celles des adultes3. Dans les deux
1) Magnulia, I, p. 63.
2) Bradford. Op. cit., II, p. 3U8.
3) J. Cotton. An Account..., p. 137-8, VIE RELIGIEUSE DANS LA COLONIE DE NEW PLYMOUTH 59 LA
cas, la procédure était engagée par les anciens. La sentence
était ensuite prononcée par un vote régulier de la congrégat
ion. Lorsque, de loin en loin, l'Église procédait au renouvel
lement de son pacte avec Dieu, elle prenait l'engagement
solennel de renforcer cette surveillance et de relever les écarts
ou les défaillances de ses membres1. En cas d'offense grave,
une sentence d'excommunication pouvait intervenir. Mais
cette mesure extrême était précédée de tous les moyens de
conciliation possibles. Il était rare, au surplus, qu'elle se pro
longeât indéfiniment. Da'ns la plupart des cas, l'excommunié
exprimait son repentir après un délai' variable, un an, deux
ans, tout au plus, et il obtenait alors sa réintégration dans la
communauté des fidèles2. Généralement, l'Église se contentait
d'infliger un avertissement (admonishment) au coupable : et
il suffisait que celui-ci exprimât son repentir pour rentrer en
grâce3. Même dans les cas les plus graves, un aveu public de
repentir permettait de prévenir la sentence extrême ou, du
moins, de la faire différer4. L'Église se conformait par là à la
recommandation que la formule du covenant faisait aux
fidèles de vivre dans, une atmosphère d'« amour et de surveil
lance », « love and watchfulness »5.
L'a procédure était identique avec les enfants, sauf que les
anciens les chapitraient parfois dans une séance privée avant
de les traduire devant la congrégation6. S'ils se montraient
récalcitrants, s'ils se laissaient aller à un accès de mauvaise
humeur et s'exprimaient sur la congrégation en termes déso
bligeants, ou, ce qui aggravait leur cas, s'ils -refusaient de se
présenter devant l'Église, le jour du Sabbat, pour recevoir
notification officielle de la sentence, l'excommunication pou
vait leur être appliquée. C'est ainsi que, le 7 juillet 1689,
l'Église retrancha de ses membres le jeune Nathaniel Clarke."
1) J. Cottoin. An Account..., p. 125, 138.
2) Plymouth Church Records, I, p. 156-7.
3)I, p. 154.
4)Church Records, I, p. 265.
5) J. Cotton. Op. cil., p. 137.
6) Plymouth Church Records, I, p. 147, 154, 156. .
REVUE DE L'HISTOIRE DES RELIGIONS ' • 60
L'ancien déclara que, celui-ci ayant; comme Esaïi, « méprisé
son droit de_ naissance », l'Église le rejetait et le séparait du
tronc comme urie « branche inutile m1.
Pour éviter que ce devoir de surveillance ne devînt une
source d'acrimonie et ne donnât lieu à des dénonciations injus
tifiées, l'Église appliquait des sanctions rigoureuses à qui
conque accusait injustement ou calomniait son voisin2. Cepen
dant, en dépit des précautions imaginées, et bien que l'Église
fût toujours prête à faire confiance à ceux qui donnaient les
signes extérieurs d'un repentir sincère, on conçoit avec quelle
facilité la mission de surveillance risquait de se convertir en
suspicion et en jalo'usie. Si elle évita les querelles et les ani-
mosités qui nous paraissent inséparables de la discipline
congrégationnaliste3, c'est parce que les successeurs de Robin-
son respectèrent, autant que les circonstances le permettaient,-
la mentalité de leur pasteur, et parce que leur sévérité se
tempérait d'une volonté d'harmonie intérieure. Tant qu'il
vécut, John Robinson recommanda aux exilés de sauvegarder
le bon accord de leur congrégation : « Que Dieu me préserve
« d'avoir besoin de vous exhorter à la paix », leur écrivait-il le
30 juin 1621. « La paix est le lien de la perfection. Tout bien
s'unit par elle, tout bien se dissout sans elle »4. Or, l'Églis'e de'
Plymouth, pendant plus de vingt ans, eut la bonne fortune
d'être. régie par William Brewster qui, légataire immédiat de
l'idéal de Robinson, était, en sa qualité de « ruling elder », plus
spécialement préposé à son gouvernement. Les devoirs de sa
fonction lui permirent de prévenir les abus auxquels l'oubli des
enseignements de Robinson eût immédiatement exposé ses "
fidèles, tout en veillant sur l'intégrité de leur foi et sur la
pureté de leur moralité5. L'hostilité d'Edward Winslow envers
le pasteur Chauncy est d'ailleurs symptomatique de l'état
d'esprit qui animait les éléments dirigeants de la, ville.
1) Plymouth Church Records, I, p. 160, 164, 265-7.
2) Ibid., I, p. 195-6.
3) Fenn. John Robinson's Farewell Address, p. 246-8.
4) Mayflower Descendant, 1903, p. 170-171.
5) Bradford. Op. cit., II, p. 348-9. о v LA VIE RELIGIEUSE DANS LA COLONIE DE NEW PLYMOUTH 61
Winslow savait que la rigueur de son séparatisme n'admettait
aucune concession sur le principe de la discipline. Chauňcy
professait en effet que l'Église devait rejeter impitoyablement
quiconque différait de l'opinion de la majorité, soit qu'il
s'agît d'élire un dignitaire de la congrégation, soit qu'il s'agît
de prononcer une admission ou une exclusion. La discipline
ainsi comprise, répliquait Winslow, risquait de provoquer le
rejet d'une dizaine de membres pour en admettre un seul. Et
il ajoutait : « Mais Dieu seul peut savoir à quoi mènerait
pareille situation1. » Non moins symptomatique de cette
volonté de conciliation et de paix intérieure est la position
qu'adopta l'Église de Plymouth lorsque, à la demande de celle
de Boston, elle fut appelée à se prononcer sur les châtiments
destinés à punir les cas d'adultère et de sodomie. Au lieu d'ap
prouver sans réticence la suggestion de la peine de mort que
présentait l'Église de Boston, elle se borna à constater que ce
châtiment extrême était prévu par la Bible2. C'est de la même
pensée d'éviter les dissensions intérieures que procédait enfin
l'habitude des anciens de consulter les membres de la congré
gation et d'obtenir leur accord avant le vote de l'Église.
Lorsque celui-ci intervenait, toute division se trouvait donc
automatiquement prévenue. Le vote se faisait généralement à

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