Les dévotions populaires d après les visites pastorales : un exemple, le diocèse de Vence au début du XVIIIe siècle - article ; n°164 ; vol.60, pg 85-100
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Les dévotions populaires d'après les visites pastorales : un exemple, le diocèse de Vence au début du XVIIIe siècle - article ; n°164 ; vol.60, pg 85-100

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Description

Revue d'histoire de l'Église de France - Année 1974 - Volume 60 - Numéro 164 - Pages 85-100
16 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1974
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Madame Marie-Hélène
Froeschlé-Chopard
Les dévotions populaires d'après les visites pastorales : un
exemple, le diocèse de Vence au début du XVIIIe siècle
In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 60. N°164, 1974. pp. 85-100.
Citer ce document / Cite this document :
Froeschlé-Chopard Marie-Hélène. Les dévotions populaires d'après les visites pastorales : un exemple, le diocèse de Vence au
début du XVIIIe siècle. In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 60. N°164, 1974. pp. 85-100.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhef_0300-9505_1974_num_60_164_1523MÉLANGES 85
LES DÉVOTIONS POPULAIRES
D'APRÈS LES VISITES PASTORALES :
UN EXEMPLE, LE DIOCÈSE DE VENCE
AU DÉBUT DU XVIIIe SIÈCLE
II est inutile de rappeler, après les travaux de G. Le Bras 1, l'importance
de la visite pastorale pour l'étude de la vie religieuse. Bien que le document
émane de l'évêque ou de son secrétaire, il reste essentiel pour qui s'intéresse
aux dévotions populaires. Dans le diocèse de Vence, les visites des années
1680-1730 sont les plus riches sur un ensemble qui s'étend de 1584 à 1779.
C'est à la fin du xvne siècle que l'on trouve des descriptions systématiques
d'églises et de chapelles, alors que les visites antérieures sont incomplètes.
Au début du xvme siècle, on fait des allusions fréquentes aux pratiques
populaires, alors que par la suite la visite tend à devenir un document admin
istratif. Ce profil général semble se confirmer dans les diocèses proches de
Vence : ceux de Grasse et de Senez. Ainsi, ce n'est que tardivement que
les évêques se préoccupent des pratiques des fidèles : retard
à appliquer les résolutions du concile de Trente certes, mais aussi priorité
donnée à la réforme du clergé avant tout autre effort. A la fin du siècle, la
lutte contre l'hérésie est achevée, et le combat se porte vers une autre hérés
ie : la religion populaire. A l'école de la spiritualité française qui a voulu
épurer la doctrine, à l'école de rigueur du jansénisme qui s'est étendu bien
au-delà de l'hérésie déclarée, comme le montre E. Appolis 2, face aux cr
itiques anciennes des protestants, et à celles, nouvelles, du cartésianisme,
les évêques condamnent les dévotions affectives du peuple. C'est une att
itude générale en Provence au début du siècle : du janséniste Soanen, évêque
de Senez, à d'Antelmy qui, à Grasse, prend de sévères mesures contre les
jansénistes, à Bourchenu qui se démet de son évêché de Vence en 1728 aux
lendemains du concile d'Embrun 3. Ce sont les visites de ce dernier 4, part
iculièrement celles qu'il fit au début de son épiscopat en 1715, et en 1719
qui permettent de brosser un tableau des dévotions populaires dans les
vingt paroisses de ce petit diocèse.
La visite pastorale permet de distinguer deux types de dévotions : celles
que le clergé admet et celles qu'il combat.
1. G. Le Bras, Études de sociologie religieuse, 2 vol., Paris, 1955-1956.
2. E. Appolis, Le « tiers parti » catholique au XVIIIe siècle, Paris, 1960.
3. Le concile d'Embrun s'est réuni du 16 août au 20 septembre 1727 pour con
damner Soanen. Celui-ci a été suspendu de toutes ses fonctions épiscopales jusqu'à
ce qu'il se rétracte. Soanen mourut en 1740 renouvelant son appel.
4. Série G 1255 et G 1268 des Archives départementales des Alpes-Maritimes
(651 feuillets). Les cotes d'archives indiquées dans les notes suivantes renvoient
toutes à ce même dépôt. BÔ MELANGES
Celles qui sont approuvées et sur lesquelles on s'étend le plus sont au
nombre de quatre : dévotion au Saint-Sacrement, au Rosaire, à saint Joseph,
aux âmes du purgatoire. Elles ont été suscitées par le clergé au siècle précé
dent, en particulier par l'évêque Godeau qui a érigé la première confrérie
du Saint- Sacrement à Vence en 1658, et qui établit, dans tous les villages
où elle n'existe pas encore, celle du Rosaire. L'initiative du clergé a rencontré
l'accord populaire : au début du xvme siècle ces dévotions sont généralisées 5.
Parties du monde des lettrés et des clercs 6, elles ont su canaliser des aspi
rations populaires. L'évêque semble avoir le sentiment d'un plein accord
entre orthodoxie et religion vécue par les fidèles. Il trouve normale la hiérar
chie que présentent les autels de toute église paroissiale : d'une part des
autels riches, placés en haut de la nef, consacrés à ces dévotions, d'autre
part les autels pauvres, relégués au bas de l'église, dédiés à des cultes plus
anciens. Aussi ne trouve-t-on jamais dans les ordonnances la volonté de
rétablir une certaine égalité entre toutes les chapelles d'une même église,
bien qu'il soit toujours recommandé d'embellir encore l'autel du Rosaire,
pourtant le plus décoré. L'aspect triomphant de ces dévotions récentes dans
l'église paroissiale renvoie à l'évêque l'image même de ses propres hiérar
chies.
Devant cet accord, si parfait en apparence, entre dévotion du clergé et
dévotion populaire une question se pose : cette hiérarchie que présente toute
église paroissiale est-elle vœu populaire ou vœu du clergé ? Vœu du clergé,
cela est certain : l'évêque veut avant toute chose des lieux de culte « décents »
et fait interdire tout ce qui est trop pauvre, trop délabré pour la majesté
du service divin. Vœu populaire, cela semble aussi certain dans la mesure
où chacun a contribué à l'achat du retable récent qui orne magnifiquement
ces autels. Cependant, ce vœu populaire n'est pas directement exprimé. Ce
n'est pas la population qui décide du sujet du retable, de l'achat de chand
eliers, mais la confrérie, guidée elle-même par le clergé ; confrérie dont les
membres sont peu nombreux et font partie de l'élite villageoise. De cela,
plusieurs indices : la visite pastorale, qui donne souvent le nombre des péni
tents, ne le donne pas pour les autres confréries, elle n'emploie jamais le
terme de confrères, mais celui de recteurs. Ce vocabulaire prend toute sa
signification rapproché du texte suivant où l'évêque réglemente une élec
tion à la confrérie des âmes du purgatoire :
« Sur la fin de l'année, les officiers de la communauté s'assembleront en présence
du sieur vicaire pour nommer un ou deux recteurs de la dite confrérie qui sera pris
comme les autres confréries du nombre des consuls qui sortent de charge ou des
auditeurs de comptes, ou bien ils prendront tels autres qu'ils trouveront à pro
pos » 7.
Ainsi, gestion de la communauté, gestion des confréries sont aux mains des
mêmes familles. A Saint-Jeannet, le premier recteur du Saint- Sacrement
5. Sur les 20 paroisses, on trouve 17 confréries du Saint-Sacrement, 15 du Rosaire,
10 de saint Joseph, 10 des âmes du purgatoire (ces dernières étant en train de se
développer).
6. H. Bremond, Histoire littéraire du sentiment religieux en France, particu
lièrement le tome IX : La vie chrétienne sous l'Ancien Régime; l'auteur s'étend
longuement sur l'adoration du Saint-Sacrement et le culte mariai rénové par l'huma
nisme dévot et la dévotion bérullienne.
7. G 1255, visite de Gréolières. MÉLANGES 87
est obligatoirement le premier consul sortant de charge 8. D'après les dél
ibérations de la communauté de Saint-Paul, prieurs et recteurs des confrér
ies sont choisis ou confirmés par le conseil ordinaire de la communauté ;
les mêmes noms se retrouvent dans ce qu'on est tenté d'appeler ces deux
« administrations » : les cadets des plus apparents du lieu, recteurs des confrér
ies, se préparent dans ce rôle religieux, à accéder plus tard aux charges
municipales 9. Les comptes et les revenus de ces confréries, également donnés
dans la visite pastorale, font apparaître des ressources indépendantes de
toute popularité immédiate. C'est le cas des confréries du Saint- Sacrement
et du Rosaire qui reçoivent

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