Patronages et œuvres de jeunesse dans la France contemporaine - article ; n°181 ; vol.68, pg 235-256
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Description

Revue d'histoire de l'Église de France - Année 1982 - Volume 68 - Numéro 181 - Pages 235-256
22 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 12
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Gérard Cholvy
Patronages et œuvres de jeunesse dans la France
contemporaine
In: Revue d'histoire de l'Église de France. Tome 68. N°181, 1982. pp. 235-256.
Citer ce document / Cite this document :
Cholvy Gérard. Patronages et œuvres de jeunesse dans la France contemporaine. In: Revue d'histoire de l'Église de France.
Tome 68. N°181, 1982. pp. 235-256.
doi : 10.3406/rhef.1982.1700
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhef_0300-9505_1982_num_68_181_1700PATRONAGES ET ŒUVRES DE JEUNESSE
DANS LA FRANCE CONTEMPORAINE
Traitant de « L'Enfant et l'atelier » en 1881 au Cercle du Luxembourg,
le jeune avocat Louis Fliche, après avoir appelé à seconder l'action
du législateur (loi de 1874), cherche à entraîner son auditoire d'étu
diants dans la voie qu'il a suivie lui-même quatre ans plus tôt en
fondant avec l'abbé Pisani le patronage de Saint-Pierre de Ménil-
montant :
« Si l'ouvrier ne vient pas à nous, il faut aller à lui, Messieurs. Si nous voulons
lui faire du bien, est-il encore une fois plus sûr moyen que de s'occuper des
jeunes générations ? C'est là qu'est la solution pacifique de la question
sociale ».
Ce que les Letaillandier, Ozanam ou Bailly n'avaient qu'entrevu en
1833 lorsqu'ils fondaient une Conférence de charité destinée à affermir
les étudiants dans leur foi, était devenu pour les Confrères de Saint-
Vincent de Paul, une cinquantaine d'années après, une invitation à
engager les œuvres dans un effort particulier en faveur de la jeu
nesse.
Le patronage des adolescents n'est en effet qu'un aspect au déve
loppement relativement tardif d'une vaste action institutionnelle
visant à organiser la charité. Il faut la replacer dans le cadre du lent
mouvement de restauration religieuse au sein des notables qui affecte
la France surtout après 1830. Il survient avec un temps de retard sur
l'action des élites éclairées qui, parle canal delà philanthropie, pro
longent dans le xixe siècle le souci de la propagation des Lumières dans
le peuple : et l'excellent exemple est ici celui de la Société pour l'instruc
tion élémentaire fondée en 1814. Mais si l'école est l'un des moyens
d'élever l'enfance, elle ne saurait à elle seule occuper tout le terrain,
alors qu'en toile de fond la lente montée de l'urbanisation et les consé
quences du machinisme sur le travail industriel ont pour effet de pro
létariser une fraction plus ou moins considérable des populations
ouvrières. Le rôle éducatif de la famille régresse avec la dispersion
des enfants en surnombre, le travail de la femme et de l'enfant, la
montée des naissances illégitimes. Ces premiers éléments d'ordre socio
culturel sont essentiels. Les seconds sont d'ordre technique, ils concer
nent la crise de l'apprentissage lié à la concentration du travail dans les
manufactures, les usines ou la mine, donc au déclin de l'artisanat.
R.H.É.F., t. LXVIII, 1982. 236 G. CHOLVY
Des uns et des autres il résulte une démoralisation sur laquelle les témoi
gnages abondent K
Les remèdes proposés visent, pour remplacer la famille, à renforcer
le rôle de l'institution scolaire ; lutter « contr la rue avec ses
spectacles pervers, le journal, l'atelier corrupteur avec ses blasphèmes
et ses propos obscènes » 8 à créer des œuvres de préservation de l'ado
lescence et de la jeunesse.
Convergent alors, sans qu'il y ait préméditation et souvent concer
tation, les efforts du clergé et l'action de pieux laïcs. Les uns et les
autres sont fondés sur un constat, celui de l'abandon de la pratique
religieuse régulière, sitôt la première communion faite. Cet abandon
est massif dans la plupart des villes et dans de nombreuses régions
rurales. Qu'ils aient ou non fréquenté l'école, les garçons de 12-13 ans,
les filles un peu plus tard, et particulièrement quand ils appartiennent
aux classes populaires, ne fréquentent plus guère l'église. Or, au moins
jusqu'au milieu du siècle, lorsqu'elle n'est pas liée à la scolarisation,
— on n'oubliera pas que jusqu'en 1882 l'instituteur contribue à l'in
itiation religieuse — l'influence des catéchismes est le plus souvent
superficielle, limitée parfois à quelques séances au cours d'une unique
année de préparation entre la Toussaint et le temps pascal. Obtenir
la présence des enfants pendant deux ans fut déjà une première et
difficile étape. Le clergé s'attacha aussi à favoriser le renouvellement
de la première communion et c'est dans cette intention que des « Persé
vérances » furent ouvertes, qui étaient rares encore en 1850 et plus
rares pour les garçons. L'accent étant mis presque uniquement sur la
piété, seule une élite s'y maintenait. Pour retenir les adolescents, nul
doute que bien des clercs n'aient ajouté aux « instructions » « d'honnêtes
récréations ». On glissait ainsi vers le patronage. Pour les filles, les
Persévérances, toujours mieux fréquentées dégagèrent souvent une
élite, les Enfants de Marie, congrégations qui, lorsqu'elles sont nées
dans la mouvance des Filles de la Charité — elles tenaient des écoles
gratuites — ont eu un recrutement exclusivement populaire 8. Mais
ce qui était exigé des Enfants de Marie, en particulier la renonciation
au bal, éloigna d'elles le grand nombre, du moins en certaines régions.
Or les orientations ultramontaines qui triomphaient parmi les clercs
poussaient à l'encadrement des masses. C'est pourquoi un nombre
grandissant de prêtres ont adopté la formule du patronage : aux yeux
1. Renvoyons à J.-B. Duroselle, Les débuts du catholicisme social en Francs
(1822-1870), Paris, 1951, ainsi qu'à l'orientation bibliographique publiée dans
c Christianisme et monde ouvrier », dans Cahier du Mouvement Social, n° 1, Paris,
éditions ouvrières, 1976, p. 301.
2. Charles Saint-Pierre, rapport sur le patronage du Sacré-Cœur fondé par la
Conférence de Sainte-Eulalie à Montpellier, 1880, Archives de la Société de Saint-
Vincent-de-Paul, Montpellier.
3. Ces « Associations mariales des Enfants de Marie Immaculée » sont à distinguer
des « Congrégations de la Sainte Vierge » rattachées à la Prima Primaria de Rome
dont les groupes étaient soit paroissiaux, soit rattachés à un pensionnat, et, dans
ce oas, de recrutement plus bourgeois ou aristocratique. PATRONAGES ET ŒUVRES DE JEUNESSE 237
de Pévêque d'Arras, Mgr Parisis, « le patronage des jeunes gens est
l'œuvre la plus importante et la plus difficile » (1865).
L'initiative des laïcs s'enracine, elle, dans la conscience de plus en
plus claire du devoir social qui incombe aux élites. D'une part, beaucoup
sont convaincus, comme Ferdinand de Bertier 4, que « les prêtres ne
peuvent plus être les apôtres les plus efficaces » (1820). D'autre part,
l'engagement sur le terrain social révèle d'emblée, lors des premières
visites aux pauvres, le problème de l'ignorance religieuse et celui de
l'apprentissage des adolescents. L'inégalité sociale n'étant pas remise
en cause, l'idéologie du patronage — qui n'avait jamais cessé d'exister,
liée au rôle traditionnel de protection du château dans la France rurale —
reprit une vigueur nouvelle. Une bonne définition en est donnée dans
La Quotidienne en 1844 : le patronage est
< un échange d'affection et de reconnaissance qui tempère et qui consacre
en l'adoucissant l'inégalité providentielle des conditions humaines ».
Au propriétaire, au patron, au notable chrétien, il appartient de
donner le bon exemple et de se préoccuper du devenir moral et éternel
de ceux dont il est responsable. De cette conviction découle un foiso
nnement d'initiatives qui, bien que contestées dès l'origine, représentent
le moyen privilégié de l'intervention des laïcs dans la vie des Églises :
celui des « œuvres ».
1. Les commencements
C'est à M. Allemand (1772-1836), prêtre de Marseille, surnommé
c le père de la jeunesse », que revient sans doute un rôle pionnier en
la matière. Enfant chétif et tim

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