L’apotropaïque abaskantos en Égypte - article ; n°1 ; vol.199, pg 23-36
15 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

L’apotropaïque abaskantos en Égypte - article ; n°1 ; vol.199, pg 23-36

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
15 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Revue de l'histoire des religions - Année 1982 - Volume 199 - Numéro 1 - Pages 23-36
En réunissant les témoignages de la documentation papyrologique grecque du nom d'homme Abaskantos, et de l'emploi de l'épithète dans les formules de politesse de la correspondance privée, l'A. montre que ce mot, apparu dans la vallée du Nil à l'époque romaine (à partir de 30 avant notre ère), a vraisemblablement été introduit par des éléments de l'armée romaine, de la cavalerie en particulier, et faisait partie du vocabulaire de bon ton d'une société de niveau assez élevé.
14 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Sujets

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 11
Langue Français

Extrait

Danielle Bonneau
L’apotropaïque "abaskantos" en Égypte
In: Revue de l'histoire des religions, tome 199 n°1, 1982. pp. 23-36.
Résumé
En réunissant les témoignages de la documentation papyrologique grecque du nom d'homme "Abaskantos", et de l'emploi de
l'épithète dans les formules de politesse de la correspondance privée, l'A. montre que ce mot, apparu dans la vallée du Nil à
l'époque romaine (à partir de 30 avant notre ère), a vraisemblablement été introduit par des éléments de l'armée romaine, de la
cavalerie en particulier, et faisait partie du vocabulaire de bon ton d'une société de niveau assez élevé.
Citer ce document / Cite this document :
Bonneau Danielle. L’apotropaïque "abaskantos" en Égypte. In: Revue de l'histoire des religions, tome 199 n°1, 1982. pp. 23-36.
doi : 10.3406/rhr.1982.4752
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rhr_0035-1423_1982_num_199_1_4752« ABASKAOTOS » L'APOTROPAÏQUE
EN EGYPTE*
En réunissant les témoignages de la documentation papyrolo-
gique grecque du nom d'homme Abaskantos, et de l'emploi de
l'épithète dans les formules de politesse de la correspondance
privée, l'A. montre que ce mot, apparu dans la vallée du Nil à
l'époque romaine (à partir de 30 avant notre ère), a vraisembla
blement été introduit par des éléments de l'armée romaine, de
la cavalerie en particulier, et faisait partie du vocabulaire de
bon ton d'une société de niveau assez élevé.
Le mot àpàaxocvToç est traduit, dans les dictionnaires du
grec ancien, par « préservé des maléfices », « à l'abri du mauv
ais œil s1. Disons tout de suite que la seconde de ces traduc
tions est commode, mais qu'il n'y a pas d' « œil », bon ou
mauvais, dans la composition de ce mot grec ; elle correspond
à une notion d'œil maléfique dont je n'ai pas trouvé qu'on
connût l'origine linguistique. Le mot grec est composé de
a- privatif et de baskantos, lié pour le sens à baskania, « le
* Cette petite étude est le développement, annoté et complété des documents
parus postérieurement, d'une communication faite à la Société Ernest-Renan
le 25 mai 1978 (résumé paru dans le Bulletin de la Société Ernest-Renan 27 (1978),
p. 116-117).
1. Voir LSJ, 8.v. Voir en général Sainte-Fare Garnot, Défis au destin,
BIFAO 59 (1959), p. 1-28 et particulièrement p. 5, n. 1, la remarque d'O. Gué-
raud ; voir aussi la citation donnée dans le Dictionnaire français de Robert :
« Fatale influence que les superstitions italienne, espagnole et asiatique ont
nommée le mauvais œil » (Balzac, Maître Cornelius, Œuvres, t. IX, p. 914).
Revue de l'Histoire des Religions, cic-1/1982 24 Danielle Bonneau
sort jaloux ». Les mots fiàaxavoç, pacrxavyjTixôç, (iaaxàviov
sont nombreux en grec, particulièrement dans les textes
littéraires du Ier au me siècle, et dans les œuvres patristiques2,
mais non dans les documents papyrologiques3, dans lesquels
j'essaierai de déterminer ce que l'emploi d'abaskantos a de
spécifique.
Les dictionnaires étymologiques du grec ancien4 présentent
deux origines possibles et les écartent : d'une part la racine
baskein, « parler », et dans ce cas, il s'agirait de mauvaises paroles
envoûtantes5; d'autre part, le latin fascinus (b devenant /)6,
avec le sens de « attaché » qui se dit de la victime qu'on va
offrir en sacrifice7. Les travaux philologiques plus récents n'ont
rien à proposer. Donc pas d'origine grecque connue.
Dans les papyrus, peu d'exemples, en dehors d'abaskantos :
un seul exemple de 7rpo6a<rxavfa, « ensorcellement »8 dans
un papyrus magique grec du vie siècle, contenant une prière
chrétienne destinée à écarter le « démon de l'ensorcellement » ;
un seul également de baskanos dans un papyrus littéraire
d'Egypte, qui a conservé un poème de Dioscore d'Aphrodito,
avocat lettré de la seconde moitié du vie siècle9 ; et un seul
de baskosynè dans une amulette chrétienne du ve-vie siècle10.
Les seuls exemples abondants dans les papyrus pour les mots
de cette racine -baskan- sont ceux d'abaskanlos. De ce fait,
l'emploi de ce mot prend un relief particulier et justifie qu'on
s'interroge à son sujet. Il se présente dans deux fonctions :
2. Voir Lampe, A Patristic Greek Lexicon, 1961, probaskanion, * amulette i
s'y trouve également, mais pas abaskantos.
3. Les abréviations papyrologiques utilisées ici sont celles de O. Mon-
tevecchi, La Papirologia, 1973, p. 407-436, à quelques exceptions près.
4. Frisk, Dictionnaire étymologique, 1973 ; P. Chantraine, Dictionnaire
étymologique, 1968.
5. Frisk repousse cette possibilité.
6. Voir Darembert et Saglio, s.v. fascinum.
7. De cette origine, acceptée par Frisk, Chantraine dit : « Ce n'est guère
possible. »
8. BGU 954, 9 [PGM II 9, p. 217) (Van Haelst, Catalogue des papyrus litt
éraires juifs et chrétiens, n° 720).
9. P. Reinach 82. Ajouter une tablette de plomb portant ce mot, SB 10702
{SE G. 24.1199), iv« siècle.
10. P. Turner 49, 4. L' apotropaïque « abaskanlos » 25
ou bien adjectif accompagnant un substantif, ou encore
nom d'homme. L'un et l'autre emplois ont la même valeur
apotropaïque : « qu'il soit préservé des maléfices ». Comme
l'a souligné récemment un eminent papyrologue11, le mot
a une valeur optative, et est l'expression d'un souhait bien
veillant. Les témoignages papyrologiques de l'emploi de
l'adjectif comme épithète vont du ier au ive siècle12, fourchette
chronologique dans laquelle s'insèrent quelques témoignages
de la forme adverbiale correspondante13 et les attestations
du nom d'homme14. Il est donc clair que, dans les papyrus,
abaskanlos n'est attesté qu'à la période romaine, mais est
encore utilisé par des gens devenus chrétiens15. D'ailleurs la
persistance d'une habitude de même ordre se trouve chez les
convertis qui continuent à utiliser la formule du proscynème16.
Pour abaskanlos, certaines lettres d'Egypte du ive siècle où
il apparaît, émanent de personnes indubitablement chrétiennes
et, à cette même époque, le nom d'homme, bien répandu hors
d'Egypte, est encore porté par des chrétiens, comme en
témoigne une épitaphe d'Anatolie17. Il est hors de doute que
ni l'adjectif, ni le nom d'homme n'ont alors rien perdu de
leur signification apotropaïque, c'est-à-dire magique. Ce que
je chercherai à dégager dans la documentation papyrologique
ne concerne donc pas le sens du mot18, mais les caractères
particuliers de son emploi, qui me paraissent être d'ordre
social.
11. H. C. Youtie, Critical Trifles, VIII, 3 : 0. Florida 15 et 18 {ZPE 36
(1979), p. 75-76).
12. i« Biècle : BGU 811, 4. ive siècle : par ex. PSI 825, 21 (M. Naldini,
II Cristianesimo in Egillo, 1968, p. 202-205 ; cité ci-dessous : Naldini).
13. 'Apocaxàvxttç : P. Oxy. 292, 12 ; c. 25 de notre ère. SB 7660, 13 ; c. 100.
14. De BGU 1614 C i 2, en 69 à P. Michael. 28, 6, en 311/312.
15. P. Oxy. 2276, 28. PSI 972, 4. P. Mich. 519, 6. PSI 825, 21.
16. P. Mich. inv. 346 (Youtie, ZPE 28 (1978), p. 265).
17. E. P. Gibson, A unique Christian Epitaph from the upper Tembris valley,
BASP 12 (1975), p. 151-157.
18. Les notes les plus récentes sur ce mot sont : Gibson (ci-dessus, n. 17),
p. 153 ; R. Bagnall, O. Florida, 1976, p. 15 ; J. et L. Robert, Bull. Epigr.
n° 572 (BEG 1977, p. 440) ; Youtie (ci-dessus n. 11). 26 Danielle Bonneau
* * *
Le nom Abaskantos a une valeur de sobriquet qui a déjà
été soulignée19 ; il est porté, à l'époque impériale, en tous
pays du monde méditerranéen, particulièrement en Anatolie
et en Grèce20. Dans ce dernier pays, ce nom n'était pas toujours
donné à des personnes originaires de Grèce, et, comme le
dit L. Robert, « ce n'est certes pas un de ces noms qui peuvent
servir à fixer l'origine d'un individu ». Toutefois, le sens de ce
mot n'était pas toujours compris en Egypte, car nous le trou
vons traduit par un autre nom porte-bonheur ; en effet, dans
une liste de bénéficiaires de

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents