L Église des pauvres au Nicaragua - article ; n°1 ; vol.13, pg 42-62
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L'Église des pauvres au Nicaragua - article ; n°1 ; vol.13, pg 42-62

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Description

Autres Temps. Les cahiers du christianisme social - Année 1987 - Volume 13 - Numéro 1 - Pages 42-62
21 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 9
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Pablo Richard
L'Église des pauvres au Nicaragua
In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°13, 1987. pp. 42-62.
Citer ce document / Cite this document :
Richard Pablo. L'Église des pauvres au Nicaragua. In: Autres Temps. Les cahiers du christianisme social. N°13, 1987. pp. 42-
62.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/chris_0753-2776_1987_num_13_1_1139L'EGLISE DES PAUVRES
AU NICARAGUA
Pablo Richard
Maudits soyons-nous du Dieu vivant d'être capables d'assis
ter passivement à la douleur de l'Amérique centrale.
Pedro Casaldaliga
évêque du Brésil
Nous voulons par cet article, apporter une information sur la situation
de l'Église des pauvres au Nicaragua. Cela en vous faisant part d'une
analyse qui interprète cette situation afin de susciter la solidarité de tous
envers une réalité chargée de douleur, mais surtout d'espérance. C'est
déjà un concensus théologique acquis et connu, mais qu'il est toujours
nécessaires de rappeler, que l'Église des pauvres n'est pas une autre
Église, ou une Église parallèle, ni le contraire de l'Église hiérarchique.
Elle est simplement un autre manière de vivre et de penser l'Église — un
nouveau modèle d'Église à l'intérieur de son unité institutionnelle; c'est
un mouvement ecclésial de rénovation à l'intérieur de l'Église historiqu
ement existante et en communion avec elle.
C'est une Église qui naît du peuple, comme réponse de foi à l'action de
Dieu dans l'histoire. Nous vivons, certes, un conflit ecclésial, mais nous
essayons toujours que ce conflit mûrisse en communion ecclésiale, dans
un esprit de foi et de patience historique.
Cet article a trois chapitres. Le premier nous donne une vision générale
sur l'Église des pauvres depuis le triomphe de la révolution (1979) jusqu'à
aujourd'hui. Le second chapitre analyse le conflit politique entre le cardi
nal Miguel Obando et le gouvernement révolutionnaire. Le dernier chapit
re, le plus étendu et le plus important pour nous, analyse et interprète la
rénovation de l'Église des pauvres de juillet 1985 jusqu'à aujourd'hui.
Durant cette étape, des faits importants se sont produits pour l'Église au
Nicaragua.
I. Contexte historique global de l'Église nicaraguayenne
Plusieurs analystes de l'Église nicaraguayenne sont d'accord
42 pour diviser l'histoire récente de ce pays en trois grandes étapes :
Première étape : du 19 juillet 1979 (triomphe de la révolution)
jusqu'au 4 mars 1983 (visite du pape Jean Paul II au Nicaragua).
Deuxième étape : du 4 mars 1983 au 7 juillet 1985 (début de « L'Insur
rection évangélique »).
Troisième étape : du 7 juillet 1985 jusqu'à aujourd'hui.
Il est important d'interpréter le mouvement fondamental de l'Église et
le sens des contradictions, en sachant que dans chaque étape se trouvent
mêlés des éléments des autres étapes.
Dans la première, le conflit gouvernement-Église n'est pas encore fon
damental. Au premier plan apparaissent plutôt les conflits internes de
l'Église elle-même; mais ceux-ci ne représentent pas encore une contradic
tion essentielle entre deux modèles d'Église clairement définis. L'Église
des pauvres n'a alors pas encore une physionomie, une structure et une
stratégie bien définies. Il y a des événements clairs et compromettants
comme la participation de prêtres au gouvernement, des déclarations de
communautés de base, etc.. mais un modèle déterminé d'Église comme
alternative au modèle traditionnel de la chrétienté n'apparaît pas encore.
Ce modèle traditionnel n'a pas, lui non plus, défini sa propre manière
d'être Église dans le Nicaragua révolutionnaire. Le Vatican lui-même n'a
pas une politique claire et définie pour l'Église du Nicaragua. C'est peut-
être la direction du CELAM (Conseil latino-américain des Églises) qui est
le premier à cette époque, à présenter un plan stratégique. Mais ce plan est
éloigné de la réalité et échoue. Le CELAM méconnaît terriblement la réal
ité centro-américain. Deux documents de l'Église des pauvres de cette
période sont significatifs : Fidélité chrétienne dans le processus révolu
tionnaire (février 1980) et Temps de crise, temps de discernement et de
grâce G'uin 1981).
La seconde étape commence avec la visite du pape au Nicaragua
(4 mars 1983). Par sa manière d'agir et par ses messages, le pape renforce
un projet d'Église de caractère hiérarchique avec des traits d'absolutisme.
Deux conséquences en découlent : d'un côté, Mgr Obando y Bravo, évê-
que de Managua, se sent légitimé dans son pouvoir ecclésiastique et com
mence une offensive pragmatique contre le gouvernement et la révolut
ion. D'un autre côté, l'Église des pauvres est frappée durement et se
trouve délégitimée. Bien des jeunes et des militants chrétiens abandonnent
l'Église et mettent leur christianisme entre parenthèses (remettant à plus
tard une définition). Les communautés ecclésiales de base se replient sur
elles-mêmes et s'isolent un peu de la masse chrétienne. Ces deux consé
quences produites par la visite du pape (je ne sais si le Saint Père a pris
conscience de l'effet de sa au Nicaragua), ont un effet très net : le
conflit interne entre deux modèles d'Église passera au second plan, tandis
que le conflit politique entre hiérarchie et gouvernement se transformera
en contradiction fondamentale. Il en résulte une situation extrêmement
stérile du point de vue ecclésial et pastoral.
43 Si la visite du pape a renforcé le pouvoir de Mgr Obando et a porté un
coup à l'Église des pauvres, provoquant un conflit entre la hiérarchie et le
gouvernement sans permettre des fruits du point de vue spirituel et pastor
al, cela ne veut pas dire que l'Église des pauvres n'existait pas avant cette
visite, ni qu'elle n'a pas continué de croître ensuite.
S'il était nécessaire qu'un pape vienne au Nicaragua pour délégitimer
l'« Église populaire » (et le pape est venu pour cela en Amérique centrale,
le reste a seulement servi de contexte), nous avons là déjà un signe fort,
chargé de « dangers ». L'attitude du peuple face au pape sur la place du
19 juillet, qui d'un côté défend la révolution en criant « Nous voulons la
paix » et « Pouvoir populaire », et qui, d'un autre côté, adhère à cette
même Église catholique (comme des enquêtes postérieures le démontrer
ont) serait une attitude inexpliquable s'il n'existait pas une alternative
connue et explicite d'une nouvelle manière d'être Église à l'intérieur de la
révolution. Si ce modèle n'existait pas dans la conscience populaire,
même s'il n'existait qu'à l'état d'intuition évangélique, le peuple se serait
divisé : avec le pape contre la révolution ou avec la révolution contre le
pape. Mais cela n'est pas arrivé. Le peuple a continué massivement d'être
catholique et révolutionnaire, spécialement au niveau populaire et pay
san. Cette situation, si typique du tiers-monde et de l'Amérique latine (et
très différente de la réalité polonaise) a fait que le saint Père s'est trompé
à Managua. C'est triste de devoir le reconnaître, mais c'est ainsi. Malheu
reusement cette même attitude se maintient puisque l'archevêque choisi
par le pape pour être cardinal en Amérique centrale est Mgr Obando.
Dans cette seconde étape, l'Église des pauvres, frappée et atteinte dans
sa légitimité, se replie sur elle-même, incapable de s'exprimer publique
ment par un projet pastoral spécifique. Et pourtant, à la base, elle vit un
processus d'affermissement et de maturation interne. C'est une étape très
riche, plus intérieure — et dans ce repliement vont se préparer les événe
ments de l'étape suivante. Un document important de cette étape s'inti
tule : Nous voulons la paix. Réflexion depuis le Nicarag

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