France - article ; n°1 ; vol.45, pg 67-77
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1993 - Volume 45 - Numéro 1 - Pages 67-77
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 53
Langue Français

Extrait

Mme Frédérique Ferrand
Olivier Moreteau
France
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 45 N°1, Janvier-mars 1993. pp. 67-77.
Citer ce document / Cite this document :
Ferrand Frédérique, Moreteau Olivier. France. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 45 N°1, Janvier-mars 1993. pp.
67-77.
doi : 10.3406/ridc.1993.4618
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1993_num_45_1_4618R.I.D.C. 1-1993
L'ENSEIGNEMENT DU DROIT NATIONAL
AUX ÉTUDIANTS ÉTRANGERS EN FRANCE
par
Frédérique FERRAND
Professeur à l'Université Jean Moulin-Lyon III
et
Olivier MORETEAU
Maître de conférences à l'Université Jean Mpulin-Lyon III
Directeur adjoint de l'Institut de droit comparé Edouard Lambert
INTRODUCTION
Comment enseigne-t-on le droit français aux étudiants étrangers ?
La question posée, on l'a dit, est une question moderne, et on peut
légitimement souhaiter que cela devienne une question ancienne. Avant
le temps des codifications, bien peu d'universités eurent jamais l'idée
d'enseigner un droit national. On enseignait surtout un jus commune, le
droit romain, et cela, quelle que fut la mesure dans laquelle celui-ci
inspirait le législateur ou le juge du pays en question. Du Moyen Âge à
l'Époque des Lumières, l'écolier pouvait faire son droit en passant une
année à Tübingen ou en Sorbonne, une autre à Bologne ou Salamanque
et, pourquoi pas, la troisième à Cambridge. L'usage large ou exclusif du
latin, alors lingua franca de l'Europe intellectuelle, facilitait une telle
circulation.
A cette ère d'universalisme en matière culturelle et juridique, succéda
le temps des nationalismes. Depuis les codifications napoléoniennes, le
droit français a valeur de modèle. Modèle qui fut d'abord imposé à toutes
les contrées qui furent alors soumises à la domination française. Modèle
qui s'est ensuite imposé à nombre de pays qui, cédant à la mode du
nationalisme ambiant, voulurent se donner des codes nationaux. Il ne
s'agit pas ici de discuter l'importance relative du modèle français et du 68 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 1-1993
modèle germanique en matière de codification. Le propos est de prendre
toute la mesure de la place centrale occupée par le modèle français dans
l'imaginaire et l'intellect de nos juristes nationaux.
Dans le même temps, la France travailla au développement d'un
empire colonial, auquel elle imposa largement son droit. Terre d'assimila
tion depuis toujours, la France se devait de rester à la hauteur de sa
tradition de pays d'accueil après le temps de la décolonisation. Les étu
diants étrangers venaient alors pour recevoir une formation universitaire
complète, avec l'ambition de retourner dans leur pays avec un diplôme
français. Il appartenait — et il appartient toujours — à l'étudiant étranger
faisant une telle démarche de s'adapter à la méthode et au style de notre
droit.
Car ce phénomène est loin d'avoir disparu et nombreux sont encore
les étrangers, des Africains le plus souvent, qui viennent étudier le droit
en France.
La nouveauté aujourd'hui vient du développement des échanges
internationaux d'étudiants. On sait l'ampleur qu'ils ont pris, au sein de
la Communauté européenne puis avec les pays de l'Association Euro
péenne de Libre Échange, grâce à l'aide précieuse des Communautés
européennes. Et l'on mesure l'effort à accomplir en direction des pays
d'Europe centrale et orientale.
Mais pour nous limiter aux échanges en principe réciproques entrete
nus surtout avec les pays occidentaux, la démarche, de la part de l'étudiant
étranger, n'est plus la même. Il ne cherche pas, dans nos Facultés, une
formation identique à celle que reçoivent les étudiants français, mais un
complément et une ouverture à une formation juridique reçue dans un
autre pays. L'étudiant étranger est un comparatiste en herbe ; il importe
de prendre toute la mesure de l'originalité de sa démarche.
Cet étudiant vient d'une université partenaire, avec laquelle l'univer
sité française traite sur un pied d'égalité. Les accords passés insistent
toujours sur l'effort d'accueil qui doit être accompli et les universitaires
chargés de gérer ces accords au quotidien savent la nécessité d'adapter
les enseignements de manière à les rendre accessibles à ces étudiants.
C'est là une grande nouveauté pour les collègues français, dont cer
tains découvrent parfois avec surprise que notre formalisme légendaire,
et notamment notre vénération pour le plan binaire, en deux parties
et deux sous-parties, n'a pas cours au-delà de nos frontières. Que le
commentaire d'arrêt tel que nous le pratiquons est un exercice purement
français.
A ces différences de méthode s'ajoutent celles de contenu. Les droits
nationaux sont très divers. Celui qui étudie la gestion au Danemark n'aura
pas de problème pour suivre un cours de marketing à Barcelone ou à
New York. Mais celui qui étudie le droit à Florence peut rencontrer de
grandes difficultés s'il vient suivre un cours de droit des biens à Cambridge,
sans connaître les bases de la common law.
Plus peut-être que dans d'autres pays, cette situation nouvelle est
pour les Facultés de droit françaises un défi et une chance.
— Un défi lancé à un système qui a toujours exagéré à ses propres
yeux sa position de phare des nations. La place trop souvent dérisoire DU DROIT NATIONAL AUX ETUDIANTS ETRANGERS 69 ENSEIGNEMENT
laissée à la littérature juridique étrangère dans nos bibliothèques et dans
nos travaux est à cet égard révélatrice. A trop se sentir imités et copiés,
on néglige les enseignements que les autres peuvent nous apporter.
— Une chance pour un système universitaire qui sent bien la nécess
ité de descendre de sa tour d'ivoire. La présence d'étudiants étrangers
dans nos cours peut aider à prendre conscience de la relativité des solu
tions que nous enseignons, attitude d'esprit indispensable à toute ouver
ture sur le droit comparé.
Le juriste universitaire français ne devrait pas éviter de se poser la
question : qu'est-ce qu'un étudiant étranger ? Il est tentant de répondre
en paraphrasant le philosophe Michel Serres : c'est un Tiers Instruit. Nous
recevons des étudiants déjà formés. Leur méthode et leur raisonnement
sont autres, et leur présence parmi nous prouve qu'ils sont ouverts. Ils
vont aborder notre système sans préjugé ni hostilité, avec un regard qui
ne peut qu'être différent. Ils nous apportent une perspective tierce,
laquelle peut être un précieux ferment du renouvellement de la pensée.
Ceux d'entre nous qui se posent des questions d'ordre épistémologique
peuvent à partir de là engager une réflexion passionnante sur ce qu'est
notre science et ce que doit être notre pédagogie.
Il ne fait aucun doute que nous sommes encore à cet égard dans une
phase intermédiaire, dans une phase de mise en place. Le défi n'a sans
doute pas été entièrement relevé et la chance pas totalement saisie.
L'intérêt de cette journée n'est-il pas de dresser un bilan provisoire et de
tracer des perspectives ?
Pour ce faire, nous avons eu recours à la méthode du questionnaire.
Méthode certes imparfaite, qui ne remplace pas le contact avec la réalité
et l'observation directe. Cependant, notre regard n'est pas celui du statisti
cien : même si elle est locale, notre expérience du terrain nous permet
de mesurer de façon réaliste les données du problème et les solutions
proposées.
L'observation porte sur un échantillon limité : envoyé à quelques
vingt-cinq universités partenaires du Centre français de droit comparé, le
questionnaire a reçu une quinzaine de réponses. Cela serait gênant s'il
s'agissait d'établir un palmarès. Mais il n'est pas du tout question de cela,
et les universités citées ne le seront qu'à titre d'exemple. Les problèmes
étant les mêmes partout

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