Le devoir de négocier de bonne foi en droit du travail américain - article ; n°4 ; vol.34, pg 1123-1152
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Description

Revue internationale de droit comparé - Année 1982 - Volume 34 - Numéro 4 - Pages 1123-1152
30 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1982
Nombre de lectures 85
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Sophie Jauffret-Epstein
Le devoir de négocier de bonne foi en droit du travail américain
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 34 N°4, Octobre-décembre 1982. pp. 1123-1152.
Citer ce document / Cite this document :
Jauffret-Epstein Sophie. Le devoir de négocier de bonne foi en droit du travail américain. In: Revue internationale de droit
comparé. Vol. 34 N°4, Octobre-décembre 1982. pp. 1123-1152.
doi : 10.3406/ridc.1982.3962
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_1982_num_34_4_3962LE DEVOIR DE NEGOCIER DE BONNE FOI
EN DROIT DU TRAVAIL AMÉRICAIN (*)
par
Sophie JAUFFRET-EPSTEIN
Docteur en droit
Les États-Unis offrent un exemple de relations professionnelles
entièrement différent du système français : alors qu'en France, la
protection des salariés découle directement de lois sociales dont les
premières remontent au milieu du xixe siècle, les États-Unis ont adopté
un système de relations professionnelles fondé sur la négociation
collective, l'État s'immisçant le moins possible dans les rapports entre
employeurs et salariés.
En effet, les syndicats américains ont demandé l'aide du gouverne
ment fédéral, au début de ce siècle, dans un but précis : obtenir la
reconnaissance de leurs droits à l'organisation et à la négociation
collective, afin de mettre fin aux décisions unilatérales de l'employeur
dans l'entreprise.
C'est cette idée qui a présidé à l'élaboration du National Labor
Relations Act, qui résulte du Wagner Act de 1935, modifié en 1947 par le
Taft-Hartley Act et en 1959 par le Landrum-Griffin Act : la section 7 de
cette loi reconnaît aux travailleurs le droit de former ou d'adhérer à des
organisations syndicales, de négocier par l'intermédiaire desdites organi
sations, et de s'engager dans des actions collectives pour protéger
l'exercice de ces droits.
Le Congrès a voulu laisser la négociation collective se dérouler selon
les principes de la liberté contractuelle, et la loi prévoit seulement une
procédure mettant face à face les deux parties, à l'échelon de l'entreprise :
* Bibliographie en langue française : Xavier BLANC-JOUVAN, Les rapports collectifs
de travail aux États-Unis, Dalloz, 1957 ; Christian MAUGEY, Les moyens juridiques de la
participation en France et aux États-Unis, L.G.D.J., 1971 ; Donald E. CULLEN,
« Tendances récentes de la négociation collective aux États-Unis », Revue internationale du
travail, juin 1972 ; .Sophie EPSTEIN, Le devoir de négocier de bonne foi en droit du travail
américain, (thèse dactylographiée), Paris, 1979. 1124 DOCTRINE
une fois que les salariés ont manifesté leur intention d'être représentés par
un syndicat, et que ce syndicat apporte la preuve qu'il bénéficie du soutien
de la majorité desdits salariés, il est certifié par le National Labor
Relations Board, commission chargée de surveiller l'application de la loi,
c'est-à-dire qu'il est reconnu comme le représentant exclusif d'un certain
nombre de salariés groupés dans une unité de négociation. C'est la
demande de ce syndicat qui fait naître l'obligation de négocier de
l'employeur.
Le Wagner Act de 1935 s'arrêtait là : le devoir de négocier de bonne
foi n'y était pas mentionné. C'est le NLRB qui l'a imposé, car il lui est
rapidement apparu que si on n'exigeait pas des parties qu'elles négocient
avec l'intention sincère d'arriver à un accord, la négociation collective
serait réduite à une mascarade. Les amendements de la loi Taft-Hartley
de 1947 reprennent l'expression « devoir de négocier de bonne foi », et le
contrôle de la bonne foi exercé par le NLRB aurait pu conduire à un
interventionnisme systématique du gouvernement dans le processus de la
négociation collective. Il n'en a rien été : le contrôle de la bonne foi des
parties a été limité à leur comportement, les droits découlant du principe
de la liberté contractuelle ont été maintenus, et en particulier le droit de
ne faire aucune concession.
L'application faite par le NLRB et les tribunaux du devoir de
négocier de bonne foi révèle la recherche d'un équilibre entre une totale
liberté laissée aux parties, impossible étant donné le caractère particulier
de la négociation collective et son enjeu, et un contrôle du NLRB,
nécessaire pour que la loi soit appliquée.
Il apparaît donc que l'étude du devoir de négocier de bonne foi doive
se dérouler en trois temps : considérer, dans un premier temps, le devoir
de négocier de bonne foi appliqué au comportement des parties ; puis,
dans un second temps, analyser la façon dont un équilibre a été instauré
entre une totale liberté contractuelle et un dirigisme gouvernemental
pesant, pour enfin, dans un troisième temps, examiner si la loi est
respectée par les parties concernées, et donc mesurer l'efficacité de
l'action du NLRB.
I. LE DEVOIR DE NÉGOCIER DE BONNE FOI
ET LE CONTRÔLE DU COMPORTEMENT DES PARTIES
Selon l'article 8(d) du NLRA, « par négociation collective, on entend
l'obligation mutuelle de l'employeur et des représentants des salariés de se
rencontrer à des moments mutuellement acceptables, et de discuter de
bonne foi des salaires, horaires et des autres termes et conditions
d'emploi, de la négociation d'un contrat collectif et des divergences qui
peuvent s'élever pendant l'exécution de ce contrat... ; mais une telle
obligation ne contraint pas les parties à accepter une proposition ni à faire
une concession ».
Par là, le Congrès américain a consacré le principe d'une négociation
libre fondée sur un rapport de forces, aucune partie n'étant obligée à faire DEVOIR DE NÉGOCIER DE BONNE FOI 1125 LE
une concession ou à accepter un accord, à une seule condition : que leur
comportement soit conforme à la bonne foi.
A. La bonne foi : essai de définition
a) Volonté d'arriver à un accord.
La bonne foi a été définie par le NLRB comme l'expression d'une
volonté d'arriver à un accord, volonté que l'on déduit du comportement
suivi par les parties au cours des négociations : la conduite des parties doit
être analysée par rapport aux réactions qu'on pourrait attendre d'un
homme raisonnable placé dans la même situation (1) . Afin de permettre
cette comparaison, différents indices sont dégagés, confrontés les uns avec
les autres afin de découvrir une tendance à la bonne ou à la mauvaise foi.
Sont considérés comme autant d'indices de mauvaise foi l'utilisation de
tactiques dilatoires, une réaction de l'employeur contre le syndicat après
sa certification, l'imposition de conditions à la négociation, ou bien encore
le refus de toutes les propositions sans qu'aucune offre soit faite en
contrepartie.
Reprenons ces différents points :
1. Les tactiques dilatoires : aussi efficaces qu'un refus brutal de
négocier dans la mesure où elles empêchent les négociations d'aboutir,
elles sont difficiles à prouver. Peut-être considéré, par exemple, comme
une tactique dilatoire un prolongement excessif de l'intervalle entre les
sessions de négociation (2), ou bien le fait de changer brusquement ses
positions au moment où un accord est sur le point d'être conclu (3), ou
bien encore de prolonger les négociations sur des détails formels pour
retarder la discussion des points essentiels (4). Le but de cette
accumulation de retards est simple : discréditer le syndicat auprès des
salariés et obtenir qu'il perde la majorité.
2. L'attitude de l'employeur envers le syndicat constitue également un
indice important quand il se lance, dès la certification de ce dernier par le
NLRB, dans une campagne de diffamation auprès des salariés (5).
3. Poser des conditions est généralement considéré comme incompat
ible avec le devoir de négocier de bonne foi : le devoir de négocier de
bonne foi supposant que chaque partie ait l'esprit ouvert et l'intention
d'arriver à un accord, il est incompatible avec l'insistance de l'une ou
l'autre partie sur des conditions dont l'effet serait de f

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