Le vieux rêve de Saleilles et Lambert revisité. A propos du cente­naire du Congrès international de droit comparé de Paris - article ; n°4 ; vol.52, pg 733-751
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Le vieux rêve de Saleilles et Lambert revisité. A propos du cente­naire du Congrès international de droit comparé de Paris - article ; n°4 ; vol.52, pg 733-751

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Revue internationale de droit comparé - Année 2000 - Volume 52 - Numéro 4 - Pages 733-751
Saleilles et Lambert contribuent à la critique virulente de la doctrine exégétique à la fin du XIXe siècle. Ils tentent de lui substituer une nouvelle méthode qui s'affranchisse de la seule lecture des textes. Saleilles la trouve dans ce qu'il appelle la méthode historique dont le droit comparé, destiné à pénétrer et vivifier l'évolution du droit national, constitue l'un des aspects. Lambert est plus ambitieux : il voit dans l'étude du droit comparé un véritable substitut à la libre recherche scientifique défendue par Gény. La recherche d'un droit commun législatif qui dépasse les seules frontières nationales est pour lui le seul moyen de parvenir à dégager des solutions objectivement justes. L'étude du droit comparé est ainsi mobilisée au service d'une véritable révolution méthodologique qui a pour effet de façonner durablement une théorie des sources du droit en train de se constituer, car la doctrine est désormais la seule en mesure de réaliser des constructions juridiques suffisamment élaborées susceptibles d'intégrer l'étude des droits étrangers qu'il s'agit de regrouper en familles homogènes. Au moment où la doctrine adopte une posture modeste, en refusant d'être qualifiée de source du droit, elle devient donc la principale source d'inspiration du législateur et du juge, qui trouveront dans ses constructions des principes certains de solutions que les textes seuls ne sont plus en mesure de fournir. L'invention du droit comparé moderne au début du XXe siècle devient ainsi un instrument de prise du pouvoir doctrinal.
Saleilles and Lambert tookpart in the scathing criticism ofthe classical exegetic method (Ecole de l'Exegese) at the end of the 19h Century. They tried to replace its doctrine by a new method that would not be limited to the sole interpretation of legislation. Saleilles discovered it in what he called the historical method (la methode historique) of which comparative law, intended to penetrate and invigorate the evolution of national law, represented one aspect. Lambert was more ambitious : in his view, the study of comparative law was a genuine surrogate to the free and objective search for a rule (la libre recherche scientifique), the method advocated by Geny. Searchingfor a generally applicable legislative set of rules which extended beyond strict national boundaries was, in his opinion, the only way to discern objectively fair solutions. So the study of comparative law was summoned in support of a real methodological revolution which, in the resuit, was to shape durably the then emerging theory of sources of law. From now on, learned authors were able to build up legal constructs (constructions juridiques) sufftciently sophisticated to incorporate the study of foreign laws, which would now be taxonimised into homogeneous classes. Accordingly, at the same time learned authors (la doctrine) tended to assume a self-effacing position by declining to be called a source of law, their theories were becoming the main source of inspiration for lawmakers and judges who saw in them determinate problem-solving principles no longer to be found in legislation alone. The invention of modem comparative law at the beginning of the 2(fh Century thus served as an instrument in laying the foundations of the authors' hegemony.
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 2000
Nombre de lectures 44
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

M. Christophe Jamin
Le vieux rêve de Saleilles et Lambert revisité. A propos du
cente­naire du Congrès international de droit comparé de Paris
In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 52 N°4, Octobre­décembre 2000. pp. 733­751.
Citer ce document / Cite this document :
Jamin Christophe. Le vieux rêve de Saleilles et Lambert revisité. A propos du cente­naire du Congrès international de droit
comparé de Paris. In: Revue internationale de droit comparé. Vol. 52 N°4, Octobre­décembre 2000. pp. 733­751.
doi : 10.3406/ridc.2000.18626
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/ridc_0035-3337_2000_num_52_4_18626Résumé
Saleilles et Lambert contribuent à la critique virulente de la doctrine exégétique à la fin du XIXe siècle.
Ils tentent de lui substituer une nouvelle méthode qui s'affranchisse de la seule lecture des textes.
Saleilles la trouve dans ce qu'il appelle la historique dont le droit comparé, destiné à pénétrer
et vivifier l'évolution du droit national, constitue l'un des aspects. Lambert est plus ambitieux : il voit dans
l'étude du droit comparé un véritable substitut à la libre recherche scientifique défendue par Gény. La
recherche d'un droit commun législatif qui dépasse les seules frontières nationales est pour lui le seul
moyen de parvenir à dégager des solutions objectivement justes. L'étude du droit comparé est ainsi
mobilisée au service d'une véritable révolution méthodologique qui a pour effet de façonner
durablement une théorie des sources du droit en train de se constituer, car la doctrine est désormais la
seule en mesure de réaliser des constructions juridiques suffisamment élaborées susceptibles d'intégrer
l'étude des droits étrangers qu'il s'agit de regrouper en familles homogènes. Au moment où la doctrine
adopte une posture modeste, en refusant d'être qualifiée de source du droit, elle devient donc la
principale source d'inspiration du législateur et du juge, qui trouveront dans ses constructions des
principes certains de solutions que les textes seuls ne sont plus en mesure de fournir. L'invention du
droit comparé moderne au début du XXe siècle devient ainsi un instrument de prise du pouvoir
doctrinal.
Abstract
Saleilles and Lambert tookpart in the scathing criticism ofthe classical exegetic method (Ecole de
l'Exegese) at the end of the 19h Century. They tried to replace its doctrine by a new that would
not be limited to the sole interpretation of legislation. Saleilles discovered it in what he called the
historical method (la methode historique) of which comparative law, intended to penetrate and
invigorate the evolution of national law, represented one aspect. Lambert was more ambitious : in his
view, the study of comparative law was a genuine surrogate to the free and objective search for a rule
(la libre recherche scientifique), the method advocated by Geny. Searchingfor a generally applicable
legislative set of rules which extended beyond strict national boundaries was, in his opinion, the only
way to discern objectively fair solutions. So the study of comparative law was summoned in support of a
real methodological revolution which, in the resuit, was to shape durably the then emerging theory of
sources of law. From now on, learned authors were able to build up legal constructs (constructions
juridiques) sufftciently sophisticated to incorporate the study of foreign laws, which would now be
taxonimised into homogeneous classes. Accordingly, at the same time learned authors (la doctrine)
tended to assume a self­effacing position by declining to be called a source of law, their theories were
becoming the main source of inspiration for lawmakers and judges who saw in them determinate
problem­solving principles no longer to be found in legislation alone. The invention of modem
comparative law at the beginning of the 2(fh Century thus served as an instrument in laying the
foundations of the authors' hegemony.R.I.D.C. 4-2000
LE VIEUX RÊVE DE SALEILLES
ET LAMBERT REVISITÉ *
A PROPOS DU CENTENAIRE DU CONGRÈS INTERNATIONAL
DE DROIT COMPARÉ DE PARIS
Christophe JAMIN **
Saleilles et Lambert contribuent à la critique virulente de la doctrine
exégétique à la fin du XIXe siècle. Ils tentent de lui substituer une nouvelle
méthode qui s'affranchisse de la seule lecture des textes. Saleilles la trouve
dans ce qu'il appelle la méthode historique dont le droit comparé, destiné
à pénétrer et vivifier l'évolution du droit national, constitue l'un des aspects.
Lambert est plus ambitieux : il voit dans l'étude du droit comparé un
véritable substitut à la libre recherche scientifique défendue par Gény. La
recherche d'un droit commun législatif qui dépasse les seules frontières
nationales est pour lui le seul moyen de parvenir à dégager des solutions
objectivement justes. L'étude du droit comparé est ainsi mobilisée au service
d'une véritable révolution méthodologique qui a pour effet de façonner
durablement une théorie des sources du droit en train de se constituer, car
la doctrine est désormais la seule en mesure de réaliser des constructions
juridiques suffisamment élaborées susceptibles d'intégrer l'étude des droits
étrangers qu'il s'agit de regrouper en familles homogènes. Au moment où
la doctrine adopte une posture modeste, en refusant d'être qualifiée de
source du droit, elle devient donc la principale source d'inspiration du
législateur et du juge, qui trouveront dans ses constructions des principes
certains de solutions que les textes seuls ne sont plus en mesure de fournir.
* Ce texte constitue la version française d'une conférence prononcée lors du colloque
intitulé « Comparative Legal Studies : Traditions and Transitions. A conference at the
Millenium » qui s'est tenu à Cambridge (Angleterre) du 26 au 30 juillet 2000. Je remercie
vivement les organisateurs de cette manifestation, Roderick MUNDAY et Pierre LEGRAND,
d'avoir autorisé sa publication avant celle des actes du colloque.
** Professeur et directeur du Centre René-Demogue de l'Université Lille 2. 734 REVUE INTERNATIONALE DE DROIT COMPARE 4-2000
L'invention du droit comparé moderne au début du XXe siècle devient ainsi
un instrument de prise du pouvoir doctrinal.
Saleilles and Lambert took part in the scathing criticism of the classical
exegetic method (École de l'Exégèse) at the end of the 19h Century. They
tried to replace its doctrine by a new method that would not be limited
to the sole interpretation of legislation. Saleilles discovered it in what he
called the historical method (la méthode historique) of which comparative
law, intended to penetrate and invigorate the evolution of national law,
represented one aspect. Lambert was more ambitious : in his view, the
study of comparative law was a genuine surrogate to the free and objective
search for a rule (la libre recherche scientifique), the method advocated
by Gény. Searching for a generally applicable legislative set of rules which
extended beyond strict national boundaries was, in his opinion, the only
way to discern objectively fair solutions. So the study of comparative law
was summoned in support of a real methodological revolution which, in
the result, was to shape durably the then emerging theory of sources of
law. From now on, learned authors were able to build up legal constructs
(constructions juridiques) sufficiently sophisticated to incorporate the study
of foreign laws, which would now be taxonimised into homogeneous classes.
Accordingly, at the same time learned authors (la doctrine) tended to assume
a self-effacing position by declining to be called a source of law, their
theories were becoming the main source of inspiration for lawmakers and
judges who saw in them determinate problem- solving principles no longer
to be found in legislation alone. The invention of modern comparative law
at the beginning of the 20th Century thus served as an instrument in laying
the foundations of the authors' hegemony.
Au moment où se tient à Paris le premier Congrès international de
droit comparé entre le 31 juillet et le 4 août 1900 durant l'Exposition
universelle, Raymond Saleilles (1855-1912) et Edouard Lambert (1866-
1947), qui n'appartiennent pas à la même génération, n'ont pas la même
renommée au sein de la communauté universitaire.
Le premier est déjà un professeur reconnu et un auteur important.
Docteur en droit depuis 1883, il est reçu cinquième à l'agrégation des
Facultés de en 1884. Ayant d'abord enseigné l'histoire du droit à

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