Une alternative pour les firmes multinationales : exportations intra-firme ou directes
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Pourquoi les entreprises optent-elles pour des échanges intra-firme et en quoi ce choix influence-t-il leur volume d'exportations ? En France, par exemple, ils représentent le tiers des exportations industrielles et près d'un quart des exportations agro-alimentaires en 1997. L'importance croissante des ces échanges met au premier plan, dans l'analyse de la compétitivité externe, différents aspects de la mondialisation des firmes. Pour les produits agro-alimentaires, les économies d'échelle, la protection de la marque et des savoir-faire et l'existence de barrières à l'échange motivent le choix des firmes multinationales de recourir au marché interne. Une analyse économétrique de l'enquête sur les échanges intra-firme confirme le fonctionnement spécifique du marché interne des entreprises multinationales de ce secteur. Ces firmes auraient, dans la détermination du prix interne, la possibilité d'annuler l'effet de la charge fiscale qui grève la compétitivité des exportations directes. D'autre part, le volume des exportations intra-firme serait plus particulièrement influencé par l'expérience du groupe sur les marchés internationaux et la protection de la marque. Enfin, les effets-prix, couplés au comportement de gestion par la firme multinationale des différentiels de fiscalité, suggèrent une recherche d'optimisation de sa compétitivité globale dans laquelle le marché interne joue un rôle privilégié.

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Langue Français

Extrait

ÉCHANGES EXTÉRIEURS
Exportations intra-firme
ou directes : une alternative
pour les firmes multinationales
Emmanuelle Pourquoi les entreprises optent-elles pour des échanges intra-firme et en quoi
Chevassus-Lozza, ce choix influence-t-il leur volume d’exportations ? En France, par exemple,
Jacques Gallezot ils représentent le tiers des exportations industrielles et près d’un quart des
et Danielle exportations agro-alimentaires en 1997. L’importance croissante des ces échanges
Galliano* met au premier plan, dans l’analyse de la compétitivité externe, différents aspects
de la mondialisation des firmes.
Pour les produits agro-alimentaires, les économies d’échelle, la protection
de la marque et des savoir-faire et l’existence de barrières à l’échange motivent
le choix des firmes multinationales de recourir au marché interne. Une analyse
économétrique de l’enquête sur les échanges intra-firme confirme
le fonctionnement spécifique du marché interne des entreprises multinationales
de ce secteur.
Ces firmes auraient, dans la détermination du prix interne, la possibilité d’annuler
* Les auteurs travaillent
à l’Inra-ESR, Emma- l’effet de la charge fiscale qui grève la compétitivité des exportations directes.
nuelle Chevassus-Lozza D’autre part, le volume des exportations intra-firme serait plus particulièrement
au laboratoire LERECO
de Nantes, Jacques influencé par l’expérience du groupe sur les marchés internationaux
Gallezot au laboratoire
et la protection de la marque. Enfin, les effets-prix, couplés au comportementLEIAA d’Ivry sur Seine
et Danielle Galliano au de gestion par la firme multinationale des différentiels de fiscalité, suggèrent
laboratoire ETIQ de
une recherche d’optimisation de sa compétitivité globale dans laquelle le marchéToulouse. Ils remercient
Alban Thomas (Inra) interne joue un rôle privilégié.
pour ses conseils en
économétrie, Carlos
Martinez Monga (DGII
de la Commission euro-
péenne) pour la mise à
disposition des informa-
tions sur l’imposition des
ortées par un développement important de de ces échanges intra-firme (EIF). Leur exis-sociétés et les rappor-
teurs pour leurs P leurs investissements directs à l’étranger, tence met en évidence la nécessité de mieux
remarques constructi- les firmes multinationales (FMN), quelles que connaître les déterminants de l’organisation
ves.
soient leurs activités industrielles, génèrent, au interne de la firme. Elle pose la question fonda-
niveau international, des flux internes de capi- mentale de la capacité des FMN à contourner
taux, de technologies, d’emplois, de services ou les règles du marché et à dépasser les frontières
Les noms et dates entre de marchandises. Ce constat n’est pas particulier des nations, remettant ainsi en question l’ana-
parenthèses renvoient à
aux groupes français et la littérature en économie lyse des fondements de la compétitivité externe
la bibliographie en fin
internationale reconnaît l’importance croissante et celle de l’efficience des politiques publiques.d’article.
ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 326-327, 1999 - 6/7 97protéger et de valoriser ses avantages spécifiquesLes raisons du développement
comme ceux liés aux produits (propriété techno-d’un marché intra-firme
logique, marques, savoir-faire, etc.) ou à ses com-
Deux courants de la littérature se sont particu- pétences organisationnelles (économies d’échelle
lièrement emparés de cette thématique. Un et de compétence, transfert d’expérience, etc.) ;
premier, basé sur la théorie des coûts de trans-
action et porté par Williamson (1975), oppose – l’internalisation est considérée comme le
deux institutions : le marché et la firme. L’in- moyen de créer ou sauvegarder l’avantage mono-
ternalisation répond au souci d’éviter les coûts polistique, voire de créer des barrières à l’entrée
inhérents aux échanges sur le marché. Les sur un marché (Hymer, 1960 ; Mathieu, 1997) ;
défaillances du marché, les obstacles à
l’échange international, et les coûts qui en – enfin, les fondements de l’échange intra-firme
découlent, expliquent l’internalisation du sont à trouver dans la gestion financière globale
marché au sein de la firme multinationale. Le du groupe. La contrepartie de l’échange est le flux
second courant, développé par Dunning financier et le prix interne, et non le prix de mar-
(1981), propose une approche plus « éclecti- ché qui peut disparaître de l’échange intra-firme
que » de la multinationalisation, organisée autour (Coase, 1937). La rationalité des critères de ges-
de trois conditions nécessaires à la réalisation tion du groupe multinational permet, à partir de
de l’internationalisation de la firme : « Avan- ces prix internes, un arbitrage entre des objectifs
tage spécifique, localisation, internalisation ». de parts de marché et des objectifs de marge ainsi
La condition nécessaire et suffisante réside qu’une allocation des activités et des profits entre
dans le fait qu’il doit être impossible à la firme les filiales selon les conditions économiques qui
d’exploiter en même temps ses avantages spé- prévalent dans le pays d’accueil (Harris, 1993 ;
cifiques et ceux liés à la localisation si elle ne Cantwell, 1994) ; ceci tout en tenant compte des
dispose pas d’un marché interne que les inves- problèmes de gestion et d’incitation des mana-
tissements directs à l’étranger permettent de gers (Donnenfeld et Prusa, 1995).
créer. Ainsi, au-delà des explications classi-
ques centrées sur les imperfections du marché, Toutefois, l’analyse empirique des flux inter-
émerge une conception renouvelée du marché nes à l’entreprise multinationale fait encore
interne de la firme, où l’existence et la mise en largement défaut dans la mesure où ces transac-
œuvre de ses avantages spécifiques et compéti- tions sont peu accessibles à l’observateur
tifs jouent un rôle central. externe et où les statistiques du commerce
international ne font pas de distinction entre les
Dans ce cadre, les fondements de l’internalisa- échanges intra-firme et ceux réalisés entre enti-
tion peuvent être regroupés autour de trois tés indépendantes. L’enquête Mondialisa-
grands types de déterminants : tion industrielle, lancée en 1994 par le
ministère de l’Industrie, l’Insee et le ministère
– l’internalisation des échanges permet à la firme de l’Agriculture, est la première enquête sur le
multinationale de réduire l’incertitude et les coûts thème des échanges intra-firme en France. Son
liés aux transactions sur le marché mais aussi de exploitation a permis de réaliser une estimation
Tableau 1
Les échanges extérieurs français de produits agro-alimentaires
En %
Exportations Importations
Valeurs (en milliards de francs) 115,9 Valeurs (en milliards de francs) 92,6
Ventes à des tiers 77 Achats à des tiers 89
Entreprises indépendantes 14 Entreprises indépendantes 59
Groupes 63 Groupes 30
Groupes français 49 Groupes français 19 étrangers 14 étrangers 11
Ventes intra-firme 23 Achats intra-firme 11
Groupes français 14 Groupes français 3 étrangers 9 Groupes étrangers 8
Sources : enquête Mondialisation industrielle, Sessi, Scees et Insee, fichiers des Douanes et base de données Medina de l’Inra, 1993.
98 ÉCONOMIE ET STATISTIQUE N° 326-327, 1999 - 6/7globale du poids de ces échanges dans le connaît, depuis 1980, une croissance impor-
commerce extérieur agro-alimentaire, puis de tante de ses excédents même si, dans une
préciser les déterminants qui affectent le vo- période récente, la tendance s’est inversée en
lume des exportations internes et externes à la raison du décalage conjoncturel entre la France
firme multinationale (1). La question est de sa- et ses partenaires. Cette performance, souvent
voir quels sont les motifs qui influencent le assimilée à la compétitivité externe, s’appuie,
choix du marché interne et de cerner l’impact en fait, plus particulièrement sur les firmes
spécifique de ces ventes internes, comparative- organisées en groupes de sociétés dont l’activi-
ment aux ventes directes, sur le volume des ex- té représente 86 % des exportations de la bran-
portations. che. Leur participation est nettement plus faible
dans les importations (41 %) (cf. tableau 1). Elle
s’explique par le rôle des groupes à capitaux fran-
çais, qui contribuent plus aux exportations que
les group

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