Chapitre 10 - Dix ans dans le CNET des débuts - article ; n°1 ; vol.14, pg 221-233
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Description

Réseaux - Année 1996 - Volume 14 - Numéro 1 - Pages 221-233
13 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 26
Langue Français

Extrait

Dickran Indjoudjian
Chapitre 10 - Dix ans dans le CNET des débuts
In: Réseaux, 1996, Hors Série 14 n°1. pp. 221-233.
Citer ce document / Cite this document :
Indjoudjian Dickran. Chapitre 10 - Dix ans dans le CNET des débuts. In: Réseaux, 1996, Hors Série 14 n°1. pp. 221-233.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0984-5372_1996_hos_14_1_3675\
Chapitre 10
DIX ANS DANS LE CNET DES DÉBUTS
D. Indjoudjian DIX ANS DANS LE CNET DES DEBUTS
Le sujet pour lequel j'ai été invité à témoigner présente par lui-même
un intérêt limité. Aussi ai-je pensé que le type d'expérience que j'ai
m'autorisait à déborder délibérément et à formuler des remarques
très diverses. Et finalement, écoutant les choses fort intéressantes qui
ont été dites ce matin - en restant sur ma faim dans certains cas, mais
ce n'est pas une critique - j'ai pensé qu'il fallait esquisser une sorte
de tableau impressionniste.
Les mauvaises langues pourraient parler de pot pourri, mais peu
importe. Naturellement, cela va être très décousu, et je vous
demande de comprendre que s'il est de temps en temps question de
moi, ce n'est pas parce que je considère mon personnage comme par
ticulièrement intéressant, mais parce que la diversité de ma carrière
me conduit à des remarques qui, rapprochées de ce qui a été dit
aujourd'hui ou rapprochées les unes des autres, peuvent être utiles
entre les mains des historiens et notamment de ceux qui sont ici.
Je crois devoir maintenant me situer devant vous dans le temps et
dans l'espace. Je commence par une brève anecdote, liée au fait que
je sois devenu ingénieur-élève des télécommunications (1) un an
après mes camarades de promotion. Nous avions fait nos études à
l'Ecole polytechnique sous l'occupation ; selon la loi de Vichy,
comme chacun sait, les juifs n'étaient pas les seuls à être classés
dans une catégorie bis et à ne pouvoir devenir fonctionnaires. Il y
avait aussi les gens comme moi qui, tout en étant catholiques, étaient
quand même rejetés a priori, parce que leurs pères -j'avais perdu le
mien bien des années auparavant - n'étaient pas nés français. De
telle sorte que quand je suis sorti de l'École, la guerre n'étant pas
fini, je n'avais droit à aucun corps de l'État.
Quelque temps plus tard, le ministre m'a dit : "On va réparer tout
ça". Naturellement, je m'étais complètement désintéressé du class
ement (2). Finalement, comme j'avais eu à payer les frais d'études,
(1) A la sortie de l'École polytechnique, un certain nombre d'élèves choisis en fonction de leur rang de
sortie entraient dans les "écoles d'application", ici en l'occurence, l'École nationale supérieure des t
élécommunications (ENST).
(2) Le classement de sortie de l'École polytechnique est décisif pour le choix d'affectation dans les
corps de l'Etat. 224
dans sa grande mansuétude, le ministre m'a dit que je serais rem
boursé si je fournissais mes reçus. Comme j'avais eu, comme beau
coup, un certain nombre d'ennuis à la fin de la guerre, il se trouve
que je n'avais pas le reçu numéro trois. Alors on m'a dit :
- "Cela ne va pas, on ne peut pas vous rembourser le troisième semest
re". J'ai répondu par deux remarques : je vous certifie sur l'honneur
que j'ai payé et, si cela ne vous suffit pas, j'ajoute qu'on ne m'aurait
jamais laissé payer le quatrième semestre si je n'avais pas payé le
troisième, parce qu'on m'aurait renvoyé de l'Ecole". En fait, je n'ai
jamais été remboursé du troisième... et j'ai eu un an de décalage.
J'ai pris mes fonctions en octobre 1946, rue Bertrand, au départe
ment "Transmission" du Service des recherches et du contrôle tech
niques (SRCT), puis à celui du CNET, avec les évolutions qui ont
été évoquées plusieurs fois, sous la houlette de René Sueur. Entre
Pierre Marzin et moi, je dois dire qu'il y avait des atomes crochus,
peut-être parce que nous étions extraordinairement différents. Les
rapports entre nous ont toujours été extrêmement libres, car il aimait
beaucoup ma liberté de propos, au moins quand nous étions en tête
à tête. Je voudrais ajouter un mot sur la personnalité de Marzin II ne
s'agit pas ici d'en parler longuement, mais je voudrais me permettre
une mise en garde, probablement superflue pour les historiens de
talent qui sont ici et qui s'occupent de cela.
La tradition de l'histoire, c'est de privilégier, comme on dit dans le
mauvais jargon actuel, les sources écrites. Il est tout à fait naturel
que les historiens s'adressent d'abord et surtout aux documents,
qu'ils scrutent les rapports, etc. Or, il faut bien voir que Marzin
avait une caractéristique, c'est qu'il n'écrivait à peu près jamais ;
c'est surtout quand les choses lui paraissaient intéressantes et import
antes qu'il écrivait le moins. Donc, pour apprécier la valeur histori
que de tous ces documents, il y a un correctif extrêmement import
ant et très difficile. Seul le talent des historiens et la confrontation
entre des témoignages très divers et apparemment épars, permettent
d'apporter ce correctif. Il faut bien voir que dans les documents offi
ciels qui ont été écrits ou censés avoir été écrits par Marzin, en tout
cas qui portent sa griffe, il y a incontestablement une part que, par
euphémisme, je qualifierai de trompeuse. Il faut avoir le courage de
le dire. Sa conception de la stratégie et de la tactique, il ne s'agit pas
de la juger mais de la comprendre. Il faut savoir qu'il était parmi
ceux pour lesquels, entre les écrits officiels et la réalité qui compte,
il y avait parfois un écart considérable. Et c'est la réalité des faits
qui lui importait. 225
J'en reviens au CNET. Je suis resté au département "Transmission"
jusqu'en 1952, date à laquelle j'ai été détaché comme conseiller tech
nique au cabinet du ministre (3). Je suis resté deux ans, toujours
avec le même ministre et j'y suis un peu pour quelque chose, car
chaque fois qu'un gouvernement tombait (c'est arrivé plusieurs fois),
et qu'il me disait :
- "Faut-il que je brigue un ministère plus important ?", je lui répon
dais :
- "Cela dépend. Si vous voulez que les quatre prochains mois soient
mieux pour vous, changez ; mais si vous voulez rester plus de quatre
mois, restez au PTT". Grâce à quoi, il est resté deux ans.
Alors que j'étais conseiller technique du ministre, j'apprends un beau
jour que les Américains avaient obtenu du ministre de la Défense
nationale, René Pleven (4), l'autorisation d'installer sur la terre fran
çaise un faisceau hertzien - je crois qu'il était destiné à relier Paris à
Bordeaux - conçu, fabriqué, installé et exploité par eux.
Je dois dire que mon sang ne fit qu'un tour et je dis au ministre :
- "Ce n'est pas possible, je ne suis pas plus chauvin qu'un autre ;
mais vous ne vous rendez pas compte, vous allez avoir une casserole
à la queue pour le reste de votre carrière politique". Cela lui a fait un
peu peur.
- "Je vous donne carte blanche pour faire rapporter la décision", m'a-
t-il répondu. C'était une position extrêmement courageuse, comme
vous le voyez, et finalement - les détails de l'histoire, quoique anec-
dotiques, sont assez intéressants, mais je n'ai pas le temps - un
samedi soir, le directeur de cabinet de René Pleven me téléphone :
- "le Président vous demande d'être au Quai d'Orsay demain matin à
dix heures moins le quart". Je passe sur les détails et, finalement, le
Président Pleven sort pour m'accueillir :
- "Votre ministre m'a dit que vous aviez les pleins pouvoirs et que
vous étiez très convaincant. J'ai là M. Wilson, le Secrétaire d'Etat
américain, je négocie avec lui au sujet des forteresses volantes pour
!" l'Indochine et d'autres sujets d'importance. Alors allez-y
Et je me trouve mis en face du Secrétaire d'Etat américain, qui avait
présidé General Motors, qui é

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