Décolonisation et réforme agraire en Amérique latine - article ; n°5 ; vol.19, pg 973-981
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Description

Revue française de science politique - Année 1969 - Volume 19 - Numéro 5 - Pages 973-981
Decolonization and the agrarian reform in Latin America, by François Chevalier Two contrary policies are preconIsed in Latin America: on the one hand the desarrollismo or the policy of economic development as an absolute priority and the solution to everything - including political and social tensions; on the other hand the agrarian reform, which remains one of the major political preoccupations in many countries. Inspired by liberal, native, populist, Christian, Marxian movements which have developed in intellectual circles and among students, lower middle and sometimes working classes, the agrarian reform is more or less influenced, according to the countries, by the latent state of dissatisfaction, the aspirations of the rural world - usually in a majority and whose integration within itself and within the nation is increasing. It is as it were a phenomenon of internal decolonization; realised against those who, within and without, have come to replace the former colonial empires. The agrarian reform always seems to be a symbol of nationalism in the hands of politicians and the politically minded.
Décolonisation et réforme agraire en Amérique Latine, par François Chevalier Deux positions antagonistes s'affrontent en Amérique latine : le desarrollismo, ou politique du développement économique considéré comme priorité absolue et solution à tous les problèmes, y compris les tensions sociales et politiques ; la réforme agraire, d'autre part, qui reste une des préoccupations politiques majeures de bien des pays. Inspirée de mouvements de pensée libéraux, indigénistes, populistes, chrétiens, marxistes..., qui se sont développés dans les milieux intellectuels, étudiants, petits-bourgeois, populaires parfois, la réforme agraire est plus ou moins influencée, selon les pays, par les états latents d'insatisfaction, les aspirations du monde rural, ordinairement majoritaire, et dont le processus d'intégration à lui-même comme à la nation s'accélère. Elle s'apparente à un phénomène de décolonisation interne, réalisé contre ceux qui, de l'intérieur ou de l'extérieur, sont venus relayer les anciens empires coloniaux. Partout elle appa raît comme un emblème du sentiment national, brandi par des hommes politiques ou politisés.
9 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1969
Nombre de lectures 10
Langue Français

Extrait

Monsieur François Chevalier
Décolonisation et réforme agraire en Amérique latine
In: Revue française de science politique, 19e année, n°5, 1969. pp. 973-981.
Citer ce document / Cite this document :
Chevalier François. Décolonisation et réforme agraire en Amérique latine. In: Revue française de science politique, 19e année,
n°5, 1969. pp. 973-981.
doi : 10.3406/rfsp.1969.418549
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/rfsp_0035-2950_1969_num_19_5_418549Résumé
Décolonisation et réforme agraire en Amérique Latine, par François Chevalier
Deux positions antagonistes s'affrontent en Amérique latine : le desarrollismo, ou politique du
développement économique considéré comme priorité absolue et solution à tous les problèmes, y
compris les tensions sociales et politiques ; la réforme agraire, d'autre part, qui reste une des
préoccupations politiques majeures de bien des pays. Inspirée de mouvements de pensée libéraux,
"indigénistes", "populistes", chrétiens, marxistes..., qui se sont développés dans les milieux intellectuels,
étudiants, petits-bourgeois, populaires parfois, la réforme agraire est plus ou moins influencée, selon les
pays, par "les états latents d'insatisfaction", les aspirations du monde rural, ordinairement majoritaire, et
dont le processus d'intégration à lui-même comme à la nation s'accélère. Elle s'apparente à un
phénomène de décolonisation interne, réalisé contre ceux qui, de l'intérieur ou de l'extérieur, sont venus
relayer les anciens empires coloniaux. Partout elle appa raît comme un emblème du sentiment national,
brandi par des hommes politiques ou politisés.
Abstract
Decolonization and the agrarian reform in Latin America, by François Chevalier
Two contrary policies are preconIsed in Latin America: on the one hand the desarrollismo or the policy
of economic development as an absolute priority and the solution to everything - including political and
social tensions; on the other hand the agrarian reform, which remains one of the major political
preoccupations in many countries. Inspired by liberal, "native", "populist", Christian, Marxian movements
which have developed in intellectual circles and among students, lower middle and sometimes working
classes, the agrarian reform is more or less influenced, according to the countries, by "the latent state of
dissatisfaction", the aspirations of the rural world - usually in a majority and whose integration within
itself and within the nation is increasing. It is as it were a phenomenon of internal decolonization;
realised against those who, within and without, have come to replace the former colonial empires. The
agrarian reform always seems to be a symbol of nationalism in the hands of politicians and the
politically minded.DÉCOLONISATION ET RÉFORME AGRAIRE
EN AMÉRIQUE LATINE*
FRANÇOIS CHEVALIER
Le développement économique est au premier plan des préoccu
pations de tous les pays du monde, les plus développés comme
ceux qui le sont moins. Il est évident aussi qu'une certaine
priorité est donnée à l'industrialisation comme la plus susceptible de
promouvoir la croissance économique. Dans ces conditions, on pourrait
se demander avec certains économistes et hommes politiques si la
réforme agraire ne représente pas un problème dépassé, alors que
les campagnes paraissent destinées à se vider au profit des villes in
dustrielles, alors que la grande exploitation mécanisée — comme
la grande usine — semble mieux adaptée que le domaine familial
aux nécessités de la production moderne.
Notons d'abord que cette priorité totale au développement de la
production suscite déjà des réactions contre ce qu'on a appelé r
écemment « l'économisme », le point de vue des technocrates, ou, en
Amérique latine, le desarrollismo (de desarrollo, développement)
considéré comme devant résoudre tous les problèmes. Cette tendance,
déjà marquée chez ceux qui insistaient sur les aspects sociaux, hu
mains, des questions économiques, a été dépassée dans des mouvements
comme celui de mai 1968 en France, qui a ramené l'attention sur
les aspects plus particulièrement politiques des problèmes.
En ce qui concerne spécifiquement la réforme agraire, remarquons
qu'elle demeure elle-même au premier plan des préoccupations poli
tiques de bien des pays du continent américain (ceux du Rio de la
Plata mis à part). Dans les villes, les milieux intellectuels et estudiant
ins y sont particulièrement sensibles, mais elle trouve des échos dans
* Introduction à plusieurs travaux que nous orientons dans la section d'Amér
ique latine du Centre d'étude des relations internationales, à la Fondation nationale
des sciences politiques.
973 Chevalier François
de très larges milieux, en dehors des possédants et de quelques
secteurs, il est vrai fort puissants. Rares sont les partis, même
conservateurs, qui n'ont pas leur plan à présenter à cet égard, fût-ce
pour en neutraliser les effets.
Dans un pays comme le Mexique, qui estime avoir réussi sa r
évolution agraire, Vejido qui en est le symbole garde même une im
portance politique essentielle et reste intouchable, quelle que soit
l'orientation des gouvernements qui se sont succédé depuis son insti
tution.
C'est qu'en premier lieu la réforme s'apparente au phénomène
moderne et fondamental de la décolonisation, qui, chez les peuples
dominés, tire elle-même ses origines d'une prise de conscience natio
nale, c'est-à-dire politique, autant et peut-être plus qu'elle ne s'appuie
sur des buts et intérêts d'ordre économique et même social.
Il est intéressant à cet égard de reconnaître et préciser l'image
qu'en chaque pays on se fait de cette réforme agraire dans les milieux
politiques et intellectuels qui la préconisent et s'efforcent de la pro
mouvoir. L'histoire au xxc siècle — sauf pour un cas plus ancien —
nous aidera à en trouver les véritables traits.
Dans les pays à forte population d'origine non européenne, la
grande propriété apparaît, ou apparaissait — à tort ou à raison —
comme une séquelle de la colonisation et de l'exploitation par les
blancs des indigènes, des métis ou des noirs. La distance reste souvent
si grande entre les premiers et les seconds, et même entre les premiers
et les nouvelles classes populaires des villes, qu'on peut parler
d'hommes quasi étrangers les uns aux autres. D'autres fois, les atta
ques sont dirigées contre une situation qu'on juge « néo-coloniale »,
due en l'espèce à l'existence de puissants intérêts étrangers au pays,
surtout nord-américains, implantés sous la forme de grandes centrales
sucrières ou autres entreprises qui « exploitent », dit-on, les nationaux.
Aux yeux de beaucoup de Latino- Américains, il s'agit donc,
après l'indépendance du xixc siècle, comme d'une seconde phase de
décolonisation interne, non plus réalisée contre les anciens empires
coloniaux, mais tentée contre ceux qui, de l'intérieur ou de l'extérieur,
sont venus, en fait, les relayer. Cette action ou cette aspiration a
une valeur symbolique et politique, comme les « nationalisations »
de ressources pétrolières, de services publics ou autres, avec lesquelles
d'ailleurs la réforme agraire va souvent de pair.
Les deux phénomènes, « indépendance » et révolution agraire,
n'apparurent à peu près simultanément que dans un seul pays, l'île
de Saint-Domingue, devenue Haïti, où les colonisateurs français
974 Décolonisation et réforme agraire
s'identifiaient presque exactement avec les maîtres des moulins à
sucre. Ainsi les esclaves détruisirent-ils la grande propriété, en même
temps qu'ils conquéraient leur liberté dès la fin du xvme siècle. Mais
une longue mise en quarantaine du pays allait constituer pour lui
un lourd handicap (L. Manigat).
Ailleurs, certaines réactions populaires orientées dans le même
sens restaient sans lendemain, et il faut arriver au xxe siècle pour
assister à des réformes agraires. Celle du Mexique, qui s'échelonne
de 1910 à 1940, apparaît liée à une réaction nationale co

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