Des usines et des hommes: La société indonésienne face à l industrie - article ; n°1 ; vol.46, pg 153-172
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Des usines et des hommes: La société indonésienne face à l'industrie - article ; n°1 ; vol.46, pg 153-172

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Description

Archipel - Année 1993 - Volume 46 - Numéro 1 - Pages 153-172
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

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Publié par
Publié le 01 janvier 1993
Nombre de lectures 19
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur François Raillon
Des usines et des hommes: La société indonésienne face à
l'industrie
In: Archipel. Volume 46, 1993. pp. 153-172.
Citer ce document / Cite this document :
Raillon François. Des usines et des hommes: La société indonésienne face à l'industrie. In: Archipel. Volume 46, 1993. pp. 153-
172.
doi : 10.3406/arch.1993.2945
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1993_num_46_1_2945François Raillon
Des usines et des hommes:
la société indonésienne face à l'industrie
constituait préalable industrielle La véritable avait pas lancée certes une nouveauté il rupture y permis a vingt de avec une ans. l'Ordre spectaculaire ['«Ordre La restauration nouveau ancien»: révolution tient politico-économique sans malgré verte, doute quelques mais à la celle-ci révolution menée velléités ne au
industrielles, l'Indonésie de Sukarno était restée largement agraire. La différence
du nouvel ordre instauré par le général Suharto, c'est que dans le temps même où
il obtenait l'indépendance vivrière, et en partie grâce à celle-ci, il a pu conduire
une industrialisation rapide et déterminée. La dynamique industrielle, à son tour,
a stimulé l'urbanisation du pays, bouleversant le visage de l'Archipel dont la
tonalité agraire s'atténue progressivement.
Le processus d'industrialisation n'est pas né d'un mouvement spontané, puis
qu'il a été largement impulsé par l'Etat autoritaire et paternaliste de l'Ordre nou
veau, qui perpétuait ainsi la tradition interventionniste de l'Ordre ancien: le style
directif, hérité du passé féodal et colonial puis réinformé par Sukarno, était repris
par ses successeurs. Aux motivations du passé s'ajoutaient des considérations
plus récentes qui rendaient nécessaire la constitution d'une panoplie industrielle,
à savoir le double souci de «donner un contenu» à l'indépendance nationale et
d'édifier un Etat fort et doté de tous les attributs de la souveraineté. L'ambition
industrielle des dirigeants était servie par des facteurs objectifs comme la taille
de l'Archipel, l'abondance de sa population et de ses ressources physiques. Ces
atouts devaient être multipliés par la manne des booms pétroliers de 1973 et
1979. Enfin, l'aspiration à l'industrie était doublée d'un défi à relever: il fallait,
par un effort sur soi-même, dissiper une image renvoyée par l'histoire et reprise
par certains observateurs contemporains, qui doutent encore de l'aptitude des
peuples de l'Archipel à fabriquer. Sont-ils capables de «faire», ou ne savent-ils 154 François Raillon
que «faire faire», à l'instar de ces sultans côtiers de jadis qui faisaient travailler
leurs Chinois et affermaient les divers services de l'Etat y compris la collecte de
l'impôt? De tous temps et «par nature», les «Malais» auraient évité les arcanes
de la production et préféré les délices de la consommation; aujourd'hui même, ils
ne sauraient devenir de vrais industriels et s'en tiendraient aux facilités du com
merce. Au pire, ils se comporteraient en intermédiaires prédateurs et en rentiers
parasites (*). Comme pour dissiper ces graves mises en doute, les dirigeants indo
nésiens se sont ingéniés à susciter une mystique industrielle officielle, symboli
sée par l'image récurrente et emblématique de Suharto inaugurant, avec cérémon
ie et application, des usines, par centaines (2\ Ils se sont investis, dans tous les
sens du terme, dans la constitution d'un vaste appareil industriel.
C'est le dossier de cette transformation spectaculaire que l'on cherche à ins
truire ici, en tenant compte des effets d'image par rapport aux réalités et en
considérant les différentes perceptions de la société indonésienne. Après un bref
état des lieux dressé pour prendre la dimension de l'industrialisation, on examine
les stratégies de l'Etat qui ont porté cette mutation économique, ainsi que les
acteurs qui l'ont mise en œuvre. On cherche ensuite à identifier et à évaluer les
effets pervers de la transformation industrielle sur l'environnement physique et
culturel. Enfin, on rend compte des divers obstacles qui peuvent gêner la pour
suite de cette industrialisation parfois trop rapide: de la façon dont ils seront él
iminés dépend sa consolidation.
L'état des lieux: une transformation industrielle évidente
Quelques chiffres globaux donnent une idée immédiate des modifications
enregistrées par l'économie indonésienne en quelque 25 années: de 1966 à 1991,
la part du secteur manufacturier (3) dans le PNB a augmenté de 8 à 22%; dans le
même temps, la part agricole du PNB tombait de 51% à 19%. Autrement dit, et
c'est là la donnée fondamentale, à partir de 1991, l'économie indonésienne est
plus industrielle qu'agricole. Pour atteindre ce résultat, il a fallu un taux de crois
sance du secteur manufacturier très élevé, avec une accélération ces dernières
années — on est passé de 9,1% à 12,2% par an entre 1989 et 1991.
Une autre façon de mesurer le phénomène consiste à regarder le commerce
extérieur: en 1991, les exportations des seuls biens manufacturés ont presque
doublé (+ 94%) par rapport à 1990, et ont dépassé, pour la première fois dans
l'histoire de l'Indonésie, la moitié du total des exportations. En 1992, malgré la
stagnation mondiale, la performance indonésienne se confirme: les exportations
de biens manufacturés augmentent encore de 30% pour atteindre un montant de
19,6 milliards de dollars, soit 58,8% du total des exportations.
Structure du secteur industriel
Pour une vision plus détaillée de la performance industrielle, on est obligé de
se référer en partie à des séries statistiques un peu plus anciennes, telles que le
Recensement économique de 1986 (4\ alors même que le rythme du changement
s'est encore accéléré depuis. La société indonésienne face à l'industrie 155
En termes de production, les principales branches sont, dans l'ordre, celles de
la transformation du pétrole et du gaz, les industries du tabac, du textile, du bois
(contre-plaqué et scieries), des produits alimentaires, et des métaux de base
(acier et aluminium) (voir tableau 1). Toutefois, l'industrie n'emploie que 9 mil
lions de personnes, soit 11% de la population active (5), en raison de sa productiv
ité très supérieure à celle des autres secteurs: les services et l'agriculture restent
les principaux pourvoyeurs d'emplois. Alors qu'elles assurent la majeure partie
de la production (en volume et en valeur), les Grandes et Moyennes Industries <6)
sont relativement peu créatrices d'emplois; au contraire, les Petites
(textile, confection, tabac et agro-alimentaire, chaussure, meuble, minerais non
métalliques) et l'artisanat (industri rumahtangga) ont recruté la moitié de la
force de travail industrielle.
Tableau 1
STRUCTURE DE LA PRODUCTION INDUSTRIELLE EN 1986 (%)
ISIC Désignation Valeur ajoutée Emploi
311-2 Produits alimentaires 9,8 21,2
313 Boissons 1,0 0,7
12 314 Tabac 11,7
321 Textiles 8,1 14,3
322 Confection 1,7 5,1
323 Produits du cuir 0,3 0,4
324 Chaussure 0,5 1
331 Produits du bois 7,2 9,1
332 Meubles 0,6 2,5
341 Papier et dérivés 1,0 1,1
342 Imprimerie et édition 1,6 2,3
351 Chimie de base 3,6 1,6
352 fine 3,6 3
353/4 Transformation du pétrole et du gaz 25,9 0,9
355 Dérivés du caoutchouc 2,1 3,8
356 Plastiques 1,0 2,3
361 Poterie et faïence 0,3 0,5
362 Produits en verre 0,9 0,4
363 Ciment 2,3 2,7
364 Produits argileux 0,4 3,5
Autres minéraux non métalliques 369 0,2 0,4
37 Métaux de base 5,8 0,7
381 Produits métalliques 2,9 3,5
382 Machines non électriques 0,6 0,8
383 Equipement électrique 2,1 1,7
384 Matériel de transport 4,2 2,9
385 professionnel n 0,1
39 Divers 0,5 1,4
Total 100,0 100
Source: Bureau Central des Statistiques François Raillon 156
Parallèlement à son expansion générale, le secteur manufacturier a vu sa
structure interne se modifier de façon substantielle. Alors qu'en 1963, l'agro-ali-
mentaire, les boissons, le tabac et le caoutchouc représentaient 70% de la

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