Éducation et enseignement monastique dans le Haut Moyen Age - article ; n°13 ; vol.6, pg 131-141
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Description

Médiévales - Année 1987 - Volume 6 - Numéro 13 - Pages 131-141
11 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1987
Nombre de lectures 30
Langue Français

Extrait

Monsieur Pierre Riché
Éducation et enseignement monastique dans le Haut Moyen
Age
In: Médiévales, N°13, 1987. pp. 131-141.
Citer ce document / Cite this document :
Riché Pierre. Éducation et enseignement monastique dans le Haut Moyen Age. In: Médiévales, N°13, 1987. pp. 131-141.
doi : 10.3406/medi.1987.1087
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/medi_0751-2708_1987_num_6_13_1087Pierre RICHE
ÉDUCATION ET ENSEIGNEMENT MONASTIQUE
DANS LE HAUT MOYEN AGE
Dans un livre qui fit dans son temps autorité : « L'enfant et la vie
familiale sous l'Ancien Régime », Paris 1973, Philippe Ariès écrivait : « La
civilisation médiévale avait oublié la Paideia des Anciens et elle ignorait
encore l'éducation des Modernes. Tel est le fait essentiel : elle n'avait pas
l'idée de l'éducation ». Une telle affirmation dénuée de tout fondement
peut surprendre mais elle a quelques excuses. En effet tous les manuels
traitant de l'histoire de l'éducation font peu de cas du Moyen Age. Dans
son Histoire de la Pédagogie parue en 1949, Henri Hubert consacre treize
pages sur trois cent soixante-quinze à ce qu'il appelle « l'éducation
théologique et scholastique du Moyen Age ». J. Château (Les grands
pédagogues, Paris 1973) ignore totalement le Moyen Age. Ou bien lorsque
le « Traité des sciences pédagogiques » consacré à - l'histoire de la
pédagogie (1971) parle du Moyen Age, il s'intéresse surtout à l'évolution
de l'enseignement et de la culture plus qu'à la pédagogie dans ce qu'il
appelle « l'interminable millénaire ». Ainsi l'histoire de l'éducation
médiévale ne mérite pas une étude approfondie. Il est habituel lorsque
l'on veut faire le procès des méthodes condamnables de les traiter avec
mépris de « médiévales ». Il en est ainsi pour désigner un maître qui use
d'arguments d'autorité et qui emploie quelques moyens énergiques pour
imposer son savoir. L'expression « d'obscurantisme médiéval » est même
passée dans le langage courant lorsque l'on veut opposer le Moyen Age
aux époques des lumières et de la raison.
Pourquoi tant d'ignorance et partant de mépris ? C'est sans doute que
l'on juge cette éducation médiévale comme le faisaient les humanistes de
la Renaissance qui considéraient les époques qui les avaient précédées
comme des siècles grossiers et qui estimaient incompétents les maîtres dont
ils avaient eu à souffrir. Présentant un nouvel idéal de formation, Rabelais,
Erasme et bien d'autres ont fait le procès de l'école médiévale. En fait,
ils ont surtout critiqué l'école de la fin du Moyen Age qui rendait les enfants
« niais, tout rêveux et rassotés ».
Juger l'éducation médiévale à partir des écoles du XVe siècle ne peut
que fausser les idées. Le Moyen Age ne se limite pas à son « automne » 132
si beau soit-il puisqu'il se déroule sur mille ans d'histoire. De la fin du
monde antique à la Renaissance, existent plusieurs moyens-âges qui ont
connu divers courants de pensée et divers types d'enseignement.
Nous nous contenterons d'exposer les problèmes concernant le haut
Moyen Age, c'est-à-dire cette période comprise entre le Ve et le xne siècle
qui a été déterminante pour la mise en place du système éducatif médiéval.
C'est alors que l'Église remplace un État romain défaillant pour organiser
les écoles et prendre en charge l'éducation des enfants. Les principaux
éducateurs sont les moines et il convient d'abord de rappeler quelques
principes de la pédagogie monastique.
Au départ, rien n'oblige les moines à être des maîtres d'école et des
pédagogues : les premiers monastères sont créés hors du monde, ce sont
des familles religieuses adonnées au travail manuel et à la prière. Les moines
n'ont pas comme les Jésuites du xvie siècle vocation d'éduquer la jeunesse.
Pourtant le monastère doit amener ceux qui y demeurent à une
nouvelle vie à partir de la pauvreté, de la chasteté, de l'obéissance, plus
on s'engage tôt dans cette voie, plus on a de chance d'accéder à la
perfection. C'est à bon droit que saint Benoît, écrivant sa règle au milieu
du VIe siècle, dit que son monastère est une « école au service du
Seigneur ». Les moines sont des élèves sous l'autorité de l'abbé qui
représente le Christ : « Écoute mon fils les préceptes du Maître et prête
l'oreille de ton cœur ». En entrant dans le monastère le jeune moine doit
être éprouvé sous la direction d'un maître « comme l'or dans la
fournaise ». « L'abbé, dit saint Benoît, doit varier sa manière suivant les
circonstances, mêlant douceur et menaces, montrant tantôt la sévérité d'un
maître, tantôt la tendresse d'un père. Ainsi encore reprendra-t-il plus
durement les indociles et les turbulents tandis qu'il se contentera d'exhorter
au progrès ceux qui sont obéissants, doux et patients. Quant aux négligents
et aux rebelles, nous l'avertissons de les corriger et de les réprimander ».
Plus loin après avoir rappelé l'exemple du grand-prêtre Heli qui ne sut
pas élever ses enfants (I Sam. II, 12), Benoît demande que l'abbé sache
adapter sa conduite aux différents caractères des moines : l'un a besoin
d'être conduit par des caresses, un autre par des remontrances, tel autre
par la persuasion. Il doit corriger les jeunes moines avec prudence et sans
excès de peur qu'en essayant d'enlever la rouille et en frottant, il ne brise
le vase. Songeant à sa propre faiblesse, il doit se souvenir qu'on ne peut
broyer le roseau déjà éclaté. Il se rappellera que la vertu principale de
tout maître est la discretio et fera sienne la devise qui vient de la sagesse
antique : « rien de trop » (ne quid nimis). Les enfants indisciplinés doivent
être corrigés par des jeûnes et le fouet jusqu'à ce qu'ils soient en mesure
de comprendre, mais cela doit se faire avec mesure, intelligence et
discrétion. D'autre part, Benoît prévoit un régime alimentaire particulier
pour les enfants : « Qu'on ait toujours égard à leur faiblesse et qu'on ne
les astreigne pas à la rigueur de la règle dans la nourriture ». 133
Tout en étant l'objet d'un statut spécial, les enfants doivent pourtant
participer à la vie du monastère et en particulier au chapitre, c'est-à-dire,
au conseil que l'abbé convoque lorsqu'il y a quelque affaire importante
à traiter. Ils ont même « voix au chapitre ». En effet, saint Benoît écrit :
« Or si nous avons réglé que tous doivent être appelés au conseil, c'est
que souvent le Seigneur révèle aux plus jeunes ce qu'il y a de mieux à
faire ». Et ailleurs il donne l'exemple dèSSamuel et de Daniel qui « encore
enfants ont jugé les Anciens ». Ces deux passages nous conduisent à penser
que Benoît, contrairement à la tradition antique, reconnaît la valeur de
la personnalité de l'enfant et qu'il estime que l'enfant est une sorte
d'intermédiaire entre Dieu et les hommes. Le Christ n'avait-il pas proclamé
que pour entrer dans le royaume, il fallait imiter les enfants, et que leur
innocence était un modèle à suivre ? Au milieu du Ve siècle, le pape Léon
le Grand avait magnifiquement commenté ce passage de l'Évangile en
rappelant que « le Christ aime l'enfance, maîtresse d'humilité, règle
d'innocence, modèle de douceur » {Sermon 7). Alors que les Romains ne
s'intéressaient pas à l'enfant et cherchaient à le faire passer le plus
rapidement possible à l'âge d'homme, les moines bénédictins considèrent
avec bienveillance la nature enfantine. C'est là une nouveauté qui devait
avoir un grand retentissement sur la pédagogie médiévale.
Les moines du haut Moyen Age sont fidèles aux principes de saint
Benoît. Nous trouvons sous la plume d'Isidore de Seville, de Colomban,
de Bède le Vé

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