Epiphanies photographiques. Sur l apparition publique des entités collectives - article ; n°94 ; vol.17, pg 87-128
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Epiphanies photographiques. Sur l'apparition publique des entités collectives - article ; n°94 ; vol.17, pg 87-128

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Description

Réseaux - Année 1999 - Volume 17 - Numéro 94 - Pages 87-128
II s'agit dans cet article d'interroger l'opérativité de la photographie au plan ontologique. Nous explorons une possibilité paradoxale ouverte par cette propriété remarquable de la photographie qu'est l'attestation d'existence, et effectivement exploitée par nombre de ses usages sociaux : l'apparition photographique d'une réalité jusqu'alors et par ailleurs invisible. L'analyse porte sur trois dispositifs de communication à caractère public - du type « campagne d'affichage » - où le recours à l'image photographique est associé à la thématisation d'une réalité réputée invisible parce que logée dans une intériorité.
In this article the author questions the operativity of photography from an ontological point of view. He explores a paradoxical possibility - the photographic appearance of a formerly invisible reality - opened by the remarkable property that photography has of attesting to an existence. He notes that this possibility has been effectively exploited by many of the social uses of photography. The analysis focuses on three forms of public communication - of the poster campaign type - where use of photographic images is associated with the thematization of a reality generally considered to be invisible because set in an interiority.
42 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1999
Nombre de lectures 15
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Michel Peroni
Epiphanies photographiques. Sur l'apparition publique des
entités collectives
In: Réseaux, 1999, volume 17 n°94. pp. 87-128.
Résumé
II s'agit dans cet article d'interroger l'opérativité de la photographie au plan ontologique. Nous explorons une possibilité
paradoxale ouverte par cette propriété remarquable de la qu'est l'attestation d'existence, et effectivement exploitée
par nombre de ses usages sociaux : l'apparition photographique d'une réalité jusqu'alors et par ailleurs invisible. L'analyse porte
sur trois dispositifs de communication à caractère public - du type « campagne d'affichage » - où le recours à l'image
photographique est associé à la thématisation d'une réalité réputée invisible parce que logée dans une intériorité.
Abstract
In this article the author questions the operativity of photography from an ontological point of view. He explores a paradoxical
possibility - the photographic appearance of a formerly invisible reality - opened by the remarkable property that photography has
of attesting to an existence. He notes that this possibility has been effectively exploited by many of the social uses of
photography. The analysis focuses on three forms of public communication - of the "poster campaign" type - where use of
photographic images is associated with the thematization of a reality generally considered to be invisible because set in an
interiority.
Citer ce document / Cite this document :
Peroni Michel. Epiphanies photographiques. Sur l'apparition publique des entités collectives. In: Réseaux, 1999, volume 17
n°94. pp. 87-128.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0751-7971_1999_num_17_94_2141EPIPHANIES PHOTOGRAPHIQUES
Sur l'apparition publique des entités collectives
Michel PERONI
© Réseaux n° 94 - CNET/Hermès Science Publications - 1999 On le sait, entre « image » et « sciences sociales », comme il est
convenu de dire, soit entre deux entités génériques, le rapport est ô
combien problématique. Périodiquement, l'épineux dossier est
rouvert, réinstruit ; mais c'est toujours la même pensée dialectique qui est de
mise, celle de l'unité des contraires, de la différence et de l'identité.
Examinons, pour s'en convaincre, deux pièces de choix qui figurent au
dossier.
Dans un article de 1985, qui aura fait date1, J.P. Terrenoire commence par ce
constat : « Des images par milliers, naissent, se répondent les unes les autres
et meurent dans un flot puissant et généreux qui submerge tout sur son
passage, laissant chacun ébahi, fasciné ou confondu. Il est pourtant
aujourd'hui des îlots qui résistent à l'invasion, confinant encore le flux
icônique dans leurs marges. Les sciences sociales sont un de ces sites
protégés. » Vient ensuite la raison de cette (in)différence : « les habitudes
ont été prises de travailler pour l'essentiel sur des écrits disponibles
(archives, documents, publications...) ou sur des provoqués
(questionnaires d'enquête, formulaires, tests...), ou encore sur des « quasi-
écrits », qu'il soient suscités (transcription d'entretiens) ou qu'ils soient
dérivés (description de pratiques se donnant à voir). » Troisième temps,
l'identité : « L'image porte quelque part en elle, explicitement ou non, les
marques du regard dont elle est l'aboutissement. En d'autres termes, l'image
est un « montré » qui porte en lui le point de vue particulier de celui qui Га
créée. L'image est plus encore car elle est toujours destinée à quelqu'un. Elle
est faite pour solliciter un regard, et pas n'importe lequel. Non seulement
« montré », l'image est « monstration ». Disons avec R. Barthes qu'elle est le
chant alterné d'un « Voici » et d'un « Voyez », qu'elle pointe un certain vis-à-
vis. L'image n'échappe pas à ce langage déictique : peu ou prou, elle
construit en elle le regard auquel elle se destine. Elle lui réserve une place,
lui suggère une position, lui offre un point de vue. Dans l'image comme dans
1. TERRENOIRE, 1985. S'il s'agit bien là d'un article précurseur, dans l'espace même de cette
revue, il n'en sera pas moins demeuré sans postérité. Réseaux n° 94 90
le discours, destinateur, message et destinataire sont co-présents. L'image se
donne comme matrice d'un rapport social et, de ce fait, tombe tout entière
dans le champ des sciences sociales ». Et enfin, l'injonction
programmatique à l'exploration méthodique de l'horizon que vient d'ouvrir la
résolution dialectique : « les sciences sociales doivent construire les images-
outils qui leur permettront de saisir, d'analyser et d'expliquer la réalité dans
ce qu'elle a et par ce qu'elle a de visible » et, les deux vont de pair, elles
doivent également « rendre compte des images-objets, ordinaires ou extra
ordinaires, quotidiennement produites dans l'univers social ». Autrement dit,
dans un premier temps, la différence est durcie en faisant jouer l'opposition
image/écrit, plan icônique/plan scriptural ; comme si l'image ne pouvait être
transcrite ou décrite ; comme si les images ne pouvaient être, par elles-
mêmes, « description de pratiques se donnant à voir », si ce n'est directement
ces « pratiques se donnant à voir » ! Cette même opposition peut alors être
surmontée par l'argument sémiologique approprié, qui déspécifie l'image en
la confondant avec le discours ; l'affirmation de l'identité des contraires se
payant alors au prix fort d'une relative indifférence pour la diversité des
genres d'image et de leurs propriétés constitutives respectives.
On retrouve le même projet de résolution dialectique d'une contradiction
posée au plan générique dans l'ouvrage récent de S. Maresca2 ; alors même
que l'ouvrage porte pourtant sur une variété d'image spécifique : la
photographie documentaire, et s'engage par la reconnaissance d'une identité
originelle entre celle-ci et les sciences sociales. Ce projet s'accomplit alors
dans un parcours scandé par une succession de mises en équivalence, entre la
photographie et l'image puis l'art et enfin une pensée « visuelle », ainsi que
cela apparaît dans le texte figurant sur la quatrième de couverture, qui
expose la structure logique de l'argumentation. «Au tournant des années
trente, plusieurs photographes ont commencé à utiliser les portraits dans une
optique documentaire (...) Or, dans le même temps où la photographie
documentaire s'inspirait plus ou moins librement des sciences sociales, ces
dernières se détournaient de l'image pour mieux s'affirmer dans les
enceintes académiques. De ce divorce, sont issues les disciplines que nous
connaissons aujourd'hui, armées du seul discours écrit et fermées aux
données visuelles et, plus largement, sensorielles. Constater la rupture est
une chose, la dépasser en est une autre. Ce livre se propose d'explorer
quelques pistes ouvertes par la confrontation de la démarche artistique, celle
2. MARESCA, 1996. Epiphanies photographiques 91
des photographes en particulier, et de la démarche scientifique. Pour peu, en
effet, que l'on prête intérêt à la manière dont l'art et la science se font, et non
plus seulement dont ils se pensent, il devient pertinent de décloisonner les
différents regards qui se croisent sur les mêmes réalités et, au risque de
bousculer les hiérarchies intellectuelles, de s'appliquer à réfléchir les
sciences sociales dans le miroir des images. Au bout du compte, l'enjeu
serait de réussir à penser aussi avec les yeux ». Ainsi, de part et d'autre, c'est
bien de réhabilitation de l'image qu'il s'agit ; que ce soit sur fond de sciences
sociales aveugles, ou sur fond de photographie miroir des sciences sociales3.
Mais de part et d'autre, c'est la même essentialisation de l'image. D'une part,
il est question de « flux icônique » en appelant à une « icônicisation » des
objets et des méthodes ; la pureté de l'image tenant à la radicalité de sa
différence avec l'écrit. D'autre part, c'est comme « représentation muette
(que) l'image fait pe

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