Esquisse d une ontologie des faits sociaux. La posologie proposée par John Searle - article ; n°79 ; vol.14, pg 123-161
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Esquisse d'une ontologie des faits sociaux. La posologie proposée par John Searle - article ; n°79 ; vol.14, pg 123-161

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Description

Réseaux - Année 1996 - Volume 14 - Numéro 79 - Pages 123-161
A partir des propositions contenues dans le dernier livre de John Searle (The Construction of Social Reality), les auteurs synthétisent le projet ambitieux du philosophe qui entend offrir aux sciences sociales un répertoire minimal de concepts communs, comme la théorie des actes de langage, l'intentionnalité, l'intentionnalité collective et le « comportement gouverné par des règles ». Il s'agit d'établir une « grammaire » capable de relier diverses démarches sociologiques.
Based on the propositions made in John Searle 's latest book (The Construction of Social Reality), the authors synthesize the philosopher's ambitious project aimed at giving the social sciences a minimal repertoire of common concepts such as the theory of language acts, intentionality, collective intentionality and rule-governed behaviour. Their goal is to establish a « grammar » linking diverse sociological approaches.
39 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1996
Nombre de lectures 31
Langue Français
Poids de l'ouvrage 3 Mo

Extrait

Fabrice Clément
Laurence Kaufmann
Esquisse d'une ontologie des faits sociaux. La posologie
proposée par John Searle
In: Réseaux, 1996, volume 14 n°79. pp. 123-161.
Résumé
A partir des propositions contenues dans le dernier livre de John Searle (The Construction of Social Reality), les auteurs
synthétisent le projet ambitieux du philosophe qui entend offrir aux sciences sociales un répertoire minimal de concepts
communs, comme la théorie des actes de langage, l'intentionnalité, l'intentionnalité collective et le « comportement gouverné par
des règles ». Il s'agit d'établir une « grammaire » capable de relier diverses démarches sociologiques.
Abstract
Based on the propositions made in John Searle 's latest book (The Construction of Social Reality), the authors synthesize the
philosopher's ambitious project aimed at giving the social sciences a minimal repertoire of common concepts such as the theory
of language acts, intentionality, collective intentionality and rule-governed behaviour. Their goal is to establish a « grammar »
linking diverse sociological approaches.
Citer ce document / Cite this document :
Clément Fabrice, Kaufmann Laurence. Esquisse d'une ontologie des faits sociaux. La posologie proposée par John Searle. In:
Réseaux, 1996, volume 14 n°79. pp. 123-161.
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/reso_0751-7971_1996_num_14_79_3785ESQUISSE D'UNE ONTOLOGIE
DES FAITS SOCIAUX
La posologie proposée par John Searle
Fabrice CLÉMENT
Laurence KAUFMANN
Réseaux n° 79 CNET - 1996
123 — losophie analytique : la parution récente du
livre de John Searle, The Construction of
Social Reality, en est une manifestation
évidente (1).
Searle se propose en effet de venir à la
rescousse des sciences sociales qui, selon
lui, manquaient jusqu'à présent des outils
nécessaires tels que la théorie des actes de
langage, l'intentionnalité, l'intentionnalité
collective et le comportement gouverné par
des règles (« rule-governed behavior »)
pour mettre en évidence « l'ontologie invi
sible » des faits sociaux. C'est à la synthèse
de ce projet ambitieux - et, avouons-le,
quelque peu arrogant - que s'attelle cet
article. Pour comprendre son analyse, nous
aurons tout d'abord à retracer la généalogie
des concepts utilisés par Searle dans son
analyse de la réalité sociale ; sans une telle
Après l'affrontement des grands para présentation systématique, le « mode d'emp
loi » qu'il propose pour la construction du digmes à visée totalisante, le champ
sociologique est aujourd'hui marqué social resterait incompréhensible. La pre
par la profusion des hybrides théoriques. Si mière partie vise donc à retracer cette archi
cette inventivité est à saluer, l'hermétisme des tecture théorique et à mettre en évidence les
écoles rivales remet cependant en cause la « pièces de construction » ("building
discipline sociologique qui, faute d'un min blocks") qui permettent ensuite à Searle de
imum de consensus conceptuel, multiplie les « déduire » le social des capacités mentales
terminologies et les niveaux de description. propres aux individus. Dans une deuxième
Dépourvues d'une fondation théorique qui partie, nous ferons une analyse critique de
permettrait d'articuler les apports empiriques, ce que nous appellerons l'expérience de
les diverses recherches tendent à générer leur pensée de la « scène sociale primitive » que
propre typologie et à faire coexister des in Searle semble présupposer tout au long de
struments d'analyse qui, à force de se régler son travail et nous tenterons de mettre en
sur leur objet, deviennent de « simples » outils évidence les simplifications et les oublis qui
descriptifs. Cette abondance théorique va à sont liés au type d'analyse du monde social
rencontre du principe analytique de parcimon qu'il préconise. En conclusion, nous ver
ie - le fameux « rasoir d'Occam » - selon rons que le modèle de Searle, une fois
lequel il ne faut pas élaborer inutilement de réagencé, peut malgré tout rendre de grands
nouveaux concepts pour expliquer des phé services aux sciences sociales en permettant
nomènes si ceux-ci peuvent être ramenés à de réconcilier des démarches souvent
des entités dont l'existence est avérée. Une conçues comme radicalement antagonistes.
telle « économie » conceptuelle a l'avantage de
permettre le rapprochement de phénomènes
apparemment incommensurables au sein LA DEMARCHE NATURALISTE
d'une même armature logique et de discrimi DE SEARLE :
ner précisément les entités qui sont suscept COMMENT RENDRE RAISON
ibles d'avoir une portée explicative. Or, la DE LA NATURE DU MENTAL ?
construction d'un tel répertoire minimal de
concepts communs peut fort utilement mettre Les réflexions de Searle se situent dans
à contribution les recherches menées en une perspective résolument naturaliste
(1) SEARLE, 1995.
125 — selon laquelle les êtres humains sont essen peuvent être saisis qu'en tant que caractéris
tiques de ce système. Il propose à cet égard tiellement des systèmes physico-chimiques
qui peuvent être étudiés de la même une analogie éclairante : si l'eau n'est pas
manière que le reste du monde physique. une réalité extérieure et indépendante des
molécules qui la composent, sa liquidité ne Sa démarche philosophique, tout en se
nourrissant de la méthode et des résultats peut cependant s'expliquer par la
de la science contemporaine, remet en des molécules d'h^O qui la constituent ;
cause le dualisme qui, depuis Descartes, elle est une caractéristique qui émerge de
exclut de la nature la "res с о gitans" . Il l'agencement formé par ses molécules. De
vise ainsi à réintégrer les sujets de prédilec la même manière, la conscience est une
tion des « sciences de l'esprit » - essentie propriété émergente issue de l'agencement
llement la psychologie, la sociologie et la et de Г activation de certains systèmes de
philosophie - qui étaient jusqu'alors défi neurones, un état global « de haut niveau »
nies par la négative au sein même des du système cérébral qui résulte d'interac
sciences « positives ». Pour Searle, cette tions neuronales complexes. Les états ment
réhabilitation ne peut que s'appuyer sur les aux conscients du niveau supérieur sont
entièrement « causés par les opérations du deux théories scientifiques aujourd'hui
unanimement acceptées : la théorie at cerveau et réalisés dans la structure du cer
omique de la matière, selon laquelle le veau » (3) : en tant que macrophénomène,
la conscience peut être expliquée causale- monde est entièrement constitué par des
collections de particules physiques qui ment par le comportement de microphéno
forment des systèmes munis de propriétés mènes et n'est ainsi rien d'autre qu'un phé
causales, et la théorie biologique de l'évo nomène neurophysiologique.
lution, qui explique comment ont pu émerg
er, au cours de l'histoire du monde, des L'autonomie du mental
systèmes vivants dotés de capacités qui
facilitent leur adaptation à l'environne Cette perspective naturaliste qui effec
ment. Dans ce cadre d'analyse, la tue une réduction causale de ce type n'en
conscience est un des traits sélectionnés par traîne pas pour autant la réduction ontolo
certains organismes qui, munis de capacités gique souvent associée à une position
représentationnelles, ont désormais le pou matérialiste qui vise à éliminer les phéno
voir de gérer et d'organiser d'une manière mènes mentaux, discrédités en raison de
plus flexible leurs relations avec le milieu. leurs propriétés non physiques. Car pour
Autrement dit, les phénomènes mentaux Searle, ces états mentaux, loin de n'être
participent de l'histoire de notre nature bio que de simples épiphénomènes, ont une
logique car « d'un point de vue évolution- existence matérielle effective et peuvent,
naire, l'esprit conscient fonctionne causale- de ce fait, avoir une efficacité causale.
ment pour contrôler le comportement » (2). Ains

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