Et l acier créa l Europe - article ; n°1 ; vol.47, pg 29-36
9 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

Et l'acier créa l'Europe - article ; n°1 ; vol.47, pg 29-36

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
9 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Matériaux pour l'histoire de notre temps - Année 1997 - Volume 47 - Numéro 1 - Pages 29-36
8 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1997
Nombre de lectures 136
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Monsieur Philippe Mioche
Et l'acier créa l'Europe
In: Matériaux pour l'histoire de notre temps. 1997, N. 47. pp. 29-36.
Citer ce document / Cite this document :
Mioche Philippe. Et l'acier créa l'Europe. In: Matériaux pour l'histoire de notre temps. 1997, N. 47. pp. 29-36.
doi : 10.3406/mat.1997.404263
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/mat_0769-3206_1997_num_47_1_404263Et l'acier créa l'Europe...
mécaniques dans la région marseillaise. En Ligurie, la
Dans produit production les années de l'industrie atteint 1880, l'échelle se sidérurgique, développe industrielle. l'acier un nouveau Il se dont subla Ferriera di Bolzaneto débute en 1888 une production de
tôles galvanisées avec des ouvriers anglais. Du Nord au
stitue au fer de la révolution industrielle. Il devient un Sud du continent, l'Europe se met à l'école anglaise.
produit phare de la deuxième industrialisation. Mais alors que les convertisseurs Thomas et dans une
L'objectif de cet article est de montrer comment ce pro moindre mesure, Bessemer, essaiment sur le continent,
duit est au cœur d'un fait social fondamental dans l'hi la sidérurgie britannique met en œuvre principalement
stoire contemporaine, l'émergence d'une société un procédé d'origine continentale, le Martin-Siemens
européenne et la mise en oeuvre concrète du rappr mis au point entre 1861 et 1867 Ce procédé à l'électricité
ochement des nations européennes dans ce qui est à permet de limiter les importations de minerai et surtout
partir des années 1950, l'Europe communautaire, et d'utiliser la ferraille qui est refondue dans les fours. Or,
aujourd'hui l'Union européenne. L'approche sera chro compte tenu de l'antériorité de l'industrialisation br
nologique : la grande mutation de la sidérurgie euro itannique, la ferraille est déjà abondante dans l'île. La
péenne (1880-1914), l'acier acteur des déchirures généralisation du procédé Martin-Siemens s'accom
(1914-1945), l'acier objet du rapprochement (1945-1967). pagne d'une modification de l'organisation spatiale de
l'industrie sidérurgique. Les usines littorales sont favori
sées au détriment des anciens centres de production.
La grande mutation L'Ecosse qui produisait 26 % de la fonte britannique en
1854 ne fournit plus que 18,4 % de l'acier anglais en 1913. de la sidérurgie européenne (1880-1914)
Inversement, la côte nord-est passe de 9 % à 26,5 %.
On savait faire de l'acier avant les années 1880, mais en Le taux de croissance moyen annuel de la production
petite quantité et à un prix élevé. Le Britannique Henry d'acier est de 7 % de 1871-1874 à 1909-1913, ce qui est
Bessemer (1813-1898) met au point en 1856 un convert remarquable. Pourtant la croissance est encore plus vive
isseur de la fonte en acier qui permet d'obtenir à bon aux États-Unis et en Allemagne qui dépassent la sidé
marché des quantités industrielles. Cette innovation rurgie britannique en tonnage produit. Le Royaume-Uni
confirme la supériorité anglaise en matière d'innovation produisait 36 % de l'acier mondial en 1875-1879 et 10 %
technique. en 1910-1913, tandis que l'Allemagne passe de 17 % à
Mais le procédé Bessemer nécessite l'emploi de 23 % pendant la même période. Après avoir été le cœur
minerai riche en fer que les Anglais font alors venir de l'Europe sidérurgique, le Royaume-Uni est en 1914 à
d'Espagne. Pour utiliser les immenses gisements de sa marge. Les Britanniques ont entamé l'épopée indust
minerai phosphoreux et de faible teneur qui s'étendent rielle et ceux qui viennent après tirent avantage de ce
en Europe continentale, en Lorraine et au Luxembourg, précédent tout en s'équipant de façon plus moderne.
il faut attendre une seconde innovation. C'est l'Anglais La mise en œuvre du procédé Thomas provoque un
Sydney Thomas (1850-1885) qui met au point un profond remodelage de la sidérurgie ancienne du
convertisseur dont le revêtement intérieur absorbe le continent et un essor prodigieux de l'activité dans cette
phosphore. Il dépose le brevet en 1878. Dès lors, la géo partie de l'Europe. Le procédé Thomas est l'occasion
graphie de la sidérurgie européenne est radicalement d'une grave déconvenue pour les Allemands. La partie
modifiée et le contrôle du minerai devient une préoc occidentale du bassin lorrain dont le minerai de fer est
cupation majeure des États. considéré comme trop pauvre est laissée à la France par
Ces innovations qui permettent une production mass le traité de Francfort de 1871. Mais avec le nouveau pro
ive d'acier sont attendues avec avidité par le marché. cédé, elle se révèle être un gisement très important. Les
En effet, l'essor du chemin de fer demande en particul sidérurgistes allemands, mécontents de cette bévue,
ier de très grandes quantités d'acier qui remplace le fer feront de la conquête de l'ensemble du bassin lorrain
trop fragile des anciens rails. C'est ainsi que les entre un but de guerre essentiel.
prises sidérurgiques entrent dans la deuxième indust Le brevet Thomas est déposé en France le 19 mars
rialisation en développant de nouveaux produits en 1878. La très ancienne famille de sidérurgistes, les de
acier, en accédant à de nouveaux marchés et en Wendel, ont leurs usines en territoire annexé par
connaissant d'importantes transformations de leurs l'Allemagne. Ils veulent se rétablir sur le marché français.
organisations internes. Ils choisissent Jœuf en 1876 pour construire une nouv
Au tournant du siècle, une nouvelle géographie elle usine. La mise au point du procédé Thomas les
émerge où l'on peut distinguer l'aima mater britan incitent à investir, ils acquièrent le monopole du brevet
nique, la Lotharingie industrielle du centre du continent pour la Meurthe-et-Moselle. La première coulée à Jœuf
et, par défaut, les sidérurgies périphériques. a lieu en 1883. Dès 1881, l'usine n'est pas achevée, et la
Entre les années 1880 et 1914, parfois bien avant, les direction construit 150 logements hors du vieux village.
technologies britanniques rayonnent sur le continent. On retrouve là l'influence du sociologue Frédéric Le Play.
Des Britanniques assurent eux-mêmes une partie de Il s'agit en particulier d'attirer les immigrés italiens car les
cette diffusion. Le fils de William Cockerill, John, crée en besoins de main-d'œuvre sont considérables. Un
1817 un atelier de construction mécanique, des fonder prospectus vante délie abitazioni sane e commode aile
ies et des hauts-fourneaux à Seraing. Il acquiert ensuite famiglie et affirme que les célibataires trouveront
des charbonnages. C'est ainsi que naît une des plus dell'aqua potabile in abondanza. Les usines de Lorraine
grandes entreprises sidérurgiques belges, Cockerill. utilisent les services de l'Opéra Bonomelli pour recruter
dans les villages italiens avec l'aide des curés et des ins- Philip Taylor développe les industries sidérurgiques et 30 Matériaux pour l'histoire de notre temps, n°47 (juillet-septembre 1997)
tituteurs. En 1907, il y a 8 500 ouvriers dans le bassin de fondée en 1888 par Karl Spaeter, marchand de fer à
Briey. Mais, en dépit de ces politiques, chez Wendel Coblence. En 1913, c'est une usine complète, le premier
comme ailleurs, l'instabilité ouvrière reste considérable. producteur de la Moselle. Le village de Rombas passe
de 1 318 habitants en 1880 à 7 000 en 1915. Le patriarca- En année moyenne, le flux des entrants correspond au
double des effectifs de chaque usine. lismus, le paternalisme, se traduit par la construction en
Quand le procédé est tombé dans le domaine 1903 de trois cités de 15 000 habitants. Les fondateurs
public, les sidérurgistes lorrains l'adoptent massivement encouragent la venue d'Allemands. En 1918, ils sont 39 %
et il y a 59 % de germanophones (Luxembourgeois, (Micheville, Pompey, Frouard, Homécourt, Neuves-
Maisons, Senelle, Rehon, La Chiers). Les Français qui Alsaciens, etc.). La ville est dotée d'équipement admin
avaient des usines dans la partie annexée veulent istratif allemand, prison, gare (1888), hôpital (1899). En
conserver l'accès aux deux marchés et entreprennent Sarre aussi, le gisement de fer favorise un grand essor de
de construire de nouvelles usines dans la partie fran cette région où la métallurgie est très ancienne
çaise. C'est le cas de

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents