Gardez le contact! L industrie du téléphone découvre la sociabilité - article ; n°2 ; vol.6, pg 5-24
21 pages
Français

Gardez le contact! L'industrie du téléphone découvre la sociabilité - article ; n°2 ; vol.6, pg 5-24

-

Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres
21 pages
Français
Le téléchargement nécessite un accès à la bibliothèque YouScribe
Tout savoir sur nos offres

Description

Flux - Année 1990 - Volume 6 - Numéro 2 - Pages 5-24
The promoters of the telephone decided once and for all that since the apparatus was the direct descendent of the telegraph, its use would naturally be identical. The telephone was not designed to be an instrument of gossip. This study of the history of telephone advertising in the United States will demonstrate that this erroneous initial conception of the utilization of new technology was to be countered by the natural reactions of the users and that in the end, in spite of resistance from the telephone industry and its commercial agents, the consumers alone were responsible for transforming the telephone into an instrument of sociability. And they did it in a world in which greater mobility has ironically rendered pleasure trips more and more difficult The promoters of nex techniques cannot always foresee how they will eventually be used, and salesmen out in the field are often prisoners of preconceived, well-established notions, which are so many cultural constraints obstructing innovation.
Les promoteurs du téléphone déterminèrent une fois et pour toutes pendant les quatre premières décennies de la diffusion de cet appareil dans la population, qu'étant le fils du télégraphe, son usage était naturellement le même: il n'était donc surtout pas fait pour le papotage. A travers l'histoire de la publicité pour le téléphone aux U.S.A., on démontrera que cette appréciation erronée de l'usage d'une technique nouvelle fut contrée immédiatement par les réactions des usagers et qu'au bout du compte, malgré les réticences des industriels de Bell et de leurs vendeurs, ce sont les consommateurs, et eux seuls, qui ont fait du téléphone un instrument de sociabilité dans ce monde moderne, où, malgré une plus grande mobilité, les déplacements d'agrément sont devenus difficiles. Les promoteurs d'une technologie nouvelle ne savent donc pas nécessairement ce que sera l'utilisation finale de celle-ci, tandis que les équipes de vente, sur le terrain, sont parfois prisonnières d'idées préconçues: ce sont autant de freins à l'expansion d'une innovation.
20 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1990
Nombre de lectures 49
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Claude S. Fischer
"Gardez le contact!" L'industrie du téléphone découvre la
sociabilité
In: Flux n°2, 1990. pp. 5-24.
Abstract
The promoters of the telephone decided once and for all that since the apparatus was the direct descendent of the telegraph, its
use would naturally be identical. The telephone was not designed to be an instrument of gossip. This study of the history of
telephone advertising in the United States will demonstrate that this erroneous initial conception of the utilization of new
technology was to be countered by the natural
reactions of the users and that in the end, in spite of resistance from the telephone industry and its commercial agents, the
consumers alone were responsible for transforming the telephone into an instrument of sociability. And they did it in a world in
which greater mobility has ironically rendered pleasure trips more and more difficult The promoters of nex techniques cannot
always foresee how they will eventually be used, and salesmen out in the field are often prisoners of preconceived, well-
established notions, which are
so many cultural constraints obstructing innovation.
Résumé
Les promoteurs du téléphone déterminèrent une fois et pour toutes pendant les quatre premières décennies de la diffusion de cet
appareil dans la population, qu'étant le fils du télégraphe, son usage était naturellement le même: il n'était donc surtout pas fait
pour le papotage. A travers l'histoire de la publicité pour le téléphone aux U.S.A., on démontrera que cette appréciation erronée
de l'usage d'une technique nouvelle fut contrée immédiatement par les réactions des usagers et qu'au bout du compte, malgré
les réticences des industriels de Bell et de leurs vendeurs, ce sont les consommateurs, et eux seuls, qui ont fait du téléphone un
instrument de sociabilité dans ce monde moderne, où, malgré une plus grande mobilité, les déplacements d'agrément sont
devenus difficiles. Les promoteurs d'une technologie nouvelle ne savent donc pas nécessairement ce que sera l'utilisation finale
de celle-ci, tandis que les équipes de vente, sur le terrain, sont parfois prisonnières d'idées préconçues: ce sont autant de freins
à l'expansion d'une innovation.
Citer ce document / Cite this document :
Fischer Claude S. "Gardez le contact!" L'industrie du téléphone découvre la sociabilité. In: Flux n°2, 1990. pp. 5-24.
doi : 10.3406/flux.1990.1136
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/flux_1154-2721_1990_num_6_2_1136LE CONTACT!" "GARDEZ
L'INDUSTRIE DU TÉLÉPHONE DÉCOUVRE
IA SOCIABILTÉ
à Claude Sociologie Berkeley} S. à Fischer l'Université est Professeur de Californie de lancée pour someone"2 .Le conversations refrain promouvoir par a American fait familier personnelles. partie l'utilisation Telephone "Reach d'une L'industrie grande out, and du reach campagne téléphone Telegraph's du out publicitaire and dans (AT&T's) n'a touch pas les
toujours oeuvré dans ce sens: pendant des lustres, elle en
était plutôt à décourager une telle sociabilité. La
"découverte" de ce marché illustre parfaitement comment les
contraintes structurelles et culturelles et l'attente du public
agissent les unes sur les autres pour modeler la diffusion
d'une technologie. Alors que les historiens ont corrigé les
notions simplistes de "technologie autonome" en montrant
comment les technologies sont produites, nous en savons
beaucoup moins sur celles qui sont nées de l'utilisation des
consommateurs. Nous prenons trop souvent ces utilisations
pour acquises (spécialement pour les produits de
consommation), comme si elles étaient tout droit dérivées
de la nature de la nouvelle technologie ou dictées par ses
inventeurs3.
Dans le cas du téléphone, les utilisations initiales suggérées
par ses promoteurs étaient déterminées - toutes considérat
ions économiques et techniques mises à part - par son
héritage culturel: le téléphone était le fils du télégraphe.
Cependant, les abonnés utilisèrent le téléphone pour
"bavarder" malgré d'inlassables tentatives des compagnies
pour les décourager. Dans les années 20, l'industrie du
téléphone cessa de résister à cette pratique, l'admit comme
un fait accompli et répondit au moins en partie au besoin
de cette utilisation décidée par les consommateurs. Après
avoir retracé l'histoire du téléphone jusqu'en 1940, cet
article décrira les changements dans les utilisations vues par
les promoteurs et les dans l'attitude de ceux-
ci vis à vis des relations sociales encouragées par le
téléphone. Les explications de ces changements seront
ensuite passées en revue.4
FLUX 2 Automne 1990 Bell (plus tard AT&T) en sortit gagnante et établit
Une Brève histoire du Téléphone son monopole sur le pays. Le nombre des
souscripteurs augmenta rapidement et celui des
Deux ans après l'attribution de son brevet à A.G. téléphones tripla entre 1880 et 1884. La
Bell en 1876, il y avait environ 10000 téléphones croissance ralentit pendant les années suivantes,
aux Etats-Unis et des disputes féroces au sujet des mais le nombre d'appareils totalisa 266000 en
1893.5 (Voir tableau 1). permis d'exploitation de ceux-ci. La Compagnie
TABLEAU 1
DEVELOPPEMENT DU TELEPHONE, 1880-1940
Nombre de Téléphones % % Indep. % Résident Téléphones par 1000 h. Bell conn. Bell conn. Bell
1880 54000 1 100 0
1885 156000 3 100 0
100 1890 228000 4 0
340000 91 0 1895 5
1900 1356000 18 62 1
1905 4127000 55 6 49
1910 7635000 82 52 26
10524000 104 30 1915 57
1920 13273000 66 68 123 29
1925 16875000 24 67 145 75
1930 20103000 80 20 163 65
1935 17424000 136 82 18 63 1940 21928000 84 16 165 65
1980 180000000 790 81 74 19
SOURCES: U.S. Bureau of the Census, Historical Statistics of the United Suites, Bicentennial Ed., pc 2 (Washington, D.C 1975)
pp. 783-A4; et U.S. Bureau of the Census, Statistical Abstracts of the United States, 1962S3 (Washington, D.C 19S4) p. 557.
Comme moyen de communication à interrégional, surtout dans les grandes villes (le prix à
le téléphone menaça rapidement le télégraphe. En Manhattan était de 10,41 dollars par mois en
effet, au cours des premiers affrontements que 1894)6. A l'expiration de la licence d'origine, en
Bell eut à engager, la compagnie des téléphones 1893-94, des milliers de vendeurs de téléphone,
dut donner des compensations financières à la des sociétés, des coopératives, se lancèrent sur le
marché. Bien qu'ils se développèrent dans des Western Union pour les pertes qu'elle lui faisait
subir. Dans les communications locales, la zones que Bell avait ignoré, il y eut quelques cas
téléphonie supplanta très vite les efforts naissants de compétition acharnée qui entraînèrent les prix
pour créer des systèmes d'échanges par signaux vers le bas et contribuèrent à la diffusion du
(à l'exception des téléscripteurs). téléphone: entre 1893 et 1902, le nombre des
Pendant le monopole Bell, avant 1894, le service appareils fut multiplié par neuf, alors que dans
du téléphone consistait à la base d'une ligne les neuf précédentes années, il n'avait fait que
individuelle pour lequel le client payait un doubler7.
abonnement annuel fixe, lui permettant un
nombre illimité d'appels dans la zone d'échange. Bell se défendit vivement contre la compétition,
Le tarif des abonnements était très variable et utilisant la guerre des prix, les confrontations au
niveau politique et d'autres tactiques agressives, dépendait du volume des échanges. Il chuta au
milieu des années 90, peut-être par anticipation essayant de toucher les clients à moindre
de la compétition à venir. potentiel en installant des téléphones collectifs
En 1895, l'abonnement moyen pour une moins chers, des appareils à sous et un service "à
habitation était de 4,66 dollars (13% du salaire l'appel". Pourtant, Bell avait perdu la moitié du
moyen d'un ouvrier) et demeura assez haut, marché en 1907. Après, une nouvelle direction,
FLUX 2 Automne 1990 sous l'égide de Theodore N. Vail, l'homme qui eut foyers avaient le téléphone aux États-Unis.
le plus d'influence dans l'histoire du téléphone Pendant la Dépression, ce chiffre tomba à 31%
aux U.SA,

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents