Kandinsky: sémiotique d un discours plastique non figuratif - article ; n°1 ; vol.34, pg 135-158
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Description

Communications - Année 1981 - Volume 34 - Numéro 1 - Pages 135-158
24 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1981
Nombre de lectures 23
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

Jean-Marie Floch
Kandinsky: sémiotique d'un discours plastique non figuratif
In: Communications, 34, 1981. pp. 135-158.
Citer ce document / Cite this document :
Floch Jean-Marie. Kandinsky: sémiotique d'un discours plastique non figuratif. In: Communications, 34, 1981. pp. 135-158.
doi : 10.3406/comm.1981.1511
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/comm_0588-8018_1981_num_34_1_1511Jean-Marie Floch
Sémiotique d'un discours plastique non
figuratif
INTRODUCTION.
Cette étude de Composition IV de Kandinsky a été rédigée à partir de notes
de travail destinées à la présentation des problèmes théoriques et méthodologi
ques que pose l'analyse d'un tableau dit « abstrait > . Cette présentation a été
faite plusieurs fois au cours des dernières années dans l'atelier de sémiotique
visuelle du Groupe de recherches sémio-linguistiques. Au départ, il y avait eu
l'idée de s'essayer en groupe à la segmentation d'une image qui résistait à toute
lexicalisation immédiate. On voulut aborder le tableau par l'étude de son
signifiant ; un certain nombre de critères de segmentation, ou plus exactement
d'articulation, furent proposés, mais les résultats auxquels on parvenait ne
manquaient pas d'être aussitôt discutés, voire rejetés. En fait, la critique
d'« impressionnisme > que méritaient ces différents découpages sanctionnait
l'absence d'une justification de leur pertinence sémiotique. On oubliait qu'on
ne peut pas parler de signifiant s'il n'y a pas de signifié et que seule l'analyse de
celui-ci peut faire attribuer quelque statut sémiotique aux unités discrètes
dégagées lors de la première segmentation.
Nous avons continué personnellement à nous intéresser à ce tableau et aux
problèmes qu'il ne laissait pas de poser à notre désir d'éprouver les quelques
acquis de la sémiotique visuelle. Nous avons choisi de replacer Composition IV
dans la production picturale de Kandinsky de la même époque et nous avons
tenté de reconnaître ses unités de manifestation en comparant le tableau aux
autres œuvres, notamment à celles qui étaient figuratives. Mais, comme nous
pouvions nous y attendre, puisque à tout changement de l'expression
correspond un changement du contenu, le traitement des lignes, des couleurs et
de l'espace de Composition IV indiquait qu'un discours autre y était énoncé :
les unités signifiantes du tableau ne se sont pas trouvées réductibles à celles des
œuvres où s'appliquait la « grille de lecture du monde naturel ».
Nous insisterons, pour terminer, sur le fait que l'étude de Composition IV a
été menée sans que la « définition postérieure > qu'en a donnée W. Kandinsky
lui-même (et que nous connaissions, bien sûr) ait été prise en compte. Nous
avons voulu rester à l'intérieur de l'œuvre peint de Kandinsky, en déniant en
quelque sorte toute autorité à l'auteur du tableau. Nous comptons montrer en
conclusion qu'un tel parti pris peut amener, paradoxalement, à éclairer ou
conforter la signification d'un texte grâce à la connaissance acquise d'un tableau.
Nous ferons une dernière remarque préliminaire. Comme le sous-titre
l'indique, c'est d'un abord « sémiotique » de l'œuvre qu'il s'agit dans cette
135 Jean-Marie Floch
étude de Composition IV. Précisons donc que celui-ci se veut conforme à la
théorie sémiotique telle qu'elle est élaborée par A.JV Greimas et les chercheurs
du Groupe de recherches sémio-linguistiques de l'École des hautes études en
sciences sociales. Nous avons cherché à ne pas employer une terminologie trop
spécifique ; néanmoins, pour les termes qu'il nous était difficile de ne pas
utiliser (comme « compétence », « monde naturel » ou « énonciataire »), nous
demandons au lecteur de se rapporter au dictionnaire de sémiotique d'A.J.
Greimas et J. Courtes, Sémiotique, dictionnaire raisonné de la théorie du
langage, (paru chez Hachette-Université, Paris, 1979).
1. UNE PREMIERE SEGMENTATION DU TABLEAU.
Le tableau se présente comme un espace clos qu'articulent à la fois un réseau
de lignes noires et un certain nombre de plages colorées dont quelques-unes
prennent les lignes pour limites et d'autres s'organisent elles-mêmes en unités à
partir de la disposition topologique de leurs constituants. On peut ainsi essayer
de diviser cet espace en unités discrètes provisoires grâce à quelques
oppositions visuelles, prises comme critères de découpage et produisant des
ruptures de continuité dans l'étendue.
Si l'on considère les deux grandes lignes noires qui découpent vertical
ement le tableau en deux parties, droite et gauche, égales, on remarque que les
lignes peu nombreuses de celle de droite sont pour la plupart longues et
relativement distantes les unes des autres et qu'elles ne se coupent jamais. En
revanche, celles de gauche sont, en comparaison, plus nombreuses, plus courtes
et serrées et se coupent souvent. Les surfaces colorées voient leur étendue
restreinte à gauche, alors qu'à droite elles sont pour ainsi dire en expansion :
les coins droits sont vivement colorés par rapport à ceux de gauche que couvre
un blanc rompu.
Si l'on s'intéresse maintenant au dispositif topologique constitué par ces
lignes et ces surfaces colorées, on voit qu'il se caractérise, à droite comme à
gauche, par une organisation binaire des formes. A droite, deux bandes
contiguës de blanc rompu s'étirent obliquement sous la ligne brisée médiane à
partir de laquelle se dressent deux formes accolées. Si nous avons à droite la
reprise de deux formes accolées de part et d'autre de la ligne brisée médiane
légèrement surélevée, à gauche l'organisation binaire se fait par la reprise
d'une symétrie : symétrie des hérissements et des crochets noirs dans la moitié
supérieure et des deux obliques descendantes dans la
inférieure.
Le tableau semble donc s'articuler en deux parties, droite et gauche, qui
s'opposent et selon une saisie paradigmatique (la reconnaissance d'une
co-présence dans le tableau des termes opposés de quelques catégories visuelles
constitue la projection du paradigmatique sur l'axe syntagmatique ; une telle
organisation contrastive permet ainsi de parler de structure textuelle) et selon
une saisie syntagmatique (la mise en relation des formes est toujours binaire
mais elle se fait par une double reprise à droite et par deux symétries à gauche) .
136 Sémiotique d'un discours plastique non figuratif
Mais les mêmes critères de découpage qui justifient cette segmentation du
tableau demandent de considérer la partie centrale comme distincte. En effet,
les lignes noires, par exemple, y sont peu nombreuses et longues, mais les deux
grandes verticales sont, en bas, interrompues chacune par un point ocre et, en
haut, coupées par la ligne brisée. Il y a bien une surface bleue de grande
étendue mais elle reste au centre. D'autre part, les deux verticales voient leur
croisement respectif avec la ligne brisée symétrique l'un de l'autre ; une telle
organisation serait caractéristique, on l'a vu, de la partie gauche. Mais, d'un
autre côté, la longue ligne brisée reprend la flexion du cerne de la masse bleue
centrale et « s'accroche » à lui sans le couper ; leur relation est, cette fois, de
même nature que celles des unités de la partie droite. La singularité du groupe
ternaire des points rouges alternant avec les deux verticales noires et celle du
débordement de la tache verte par rapport à la ligne brisée fermée sont enfin
deux autres raisons de considérer cette partie centrale à part.
Cette première segmentation du tableau à partir d'oppositions et de relations
d'éléments visuels nous a permis d'y reconnaître un certain nombre d'unités
discrètes provisoires de différentes dimensions : une partie gauche, une partie
centrale et une partie droite ; dans chacune de ces parties se distinguent des
unités, elles-mêmes discrètes, qui sont aussi à la fois constituantes et
constituées. La partie droite, par exemple, est constituée, entre autres, par deux
unités caractérisées par leur

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