L espace domestique contemporain à Bali: quelques maisons de Denpasar - article ; n°1 ; vol.49, pg 137-159
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Description

Archipel - Année 1995 - Volume 49 - Numéro 1 - Pages 137-159
23 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1995
Nombre de lectures 14
Langue Français
Poids de l'ouvrage 2 Mo

Extrait

Natahalie Lancret
L'espace domestique contemporain à Bali: quelques maisons de
Denpasar
In: Archipel. Volume 49, 1995. pp. 137-159.
Citer ce document / Cite this document :
Lancret Natahalie. L'espace domestique contemporain à Bali: quelques maisons de Denpasar. In: Archipel. Volume 49, 1995.
pp. 137-159.
doi : 10.3406/arch.1995.3041
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/arch_0044-8613_1995_num_49_1_3041ARCHITECTURES
Nathalie LANCRET
L'espace domestique contemporain à Bali:
quelques maisons de Denpasar
Centre de pouvoir de l'ancien royaume de Badung, la ville de Denpasar
est, depuis 1960, la capitale de la province de Bali. En 1989, elle comptait
12% de la population totale de l'île, soit 314 371 habitants, et plus de 60% de
sa population urbaine W. En moins de trente ans, le nombre de ses habitants a
plus que quintuplé <2) et aujourd'hui, la primauté urbaine de Denpasar est
incontestable. La ville est divisée en 43 villages administratifs; les plus peu
plés, ceux du centre, atteignent des densités supérieures à 20 000 habitants par
kilomètre carré (3\ Dans ce contexte, la «maison traditionnelle» balinaise
connaît nombre de transformations de son organisation spatiale et de ses qual
ités formelles: des adaptations et des effacements du modèle vernaculaire
ainsi que des innovations empruntées à des modèles exogènes à Bali. C'est à
l'étude de ces transformations que vise cette présentation des habitations bali-
naises contemporaines de Denpasar.
Notre travail de terrain nous a convaincue que la maison balinaise doit être
restituée dans les groupes territoriaux et sociaux qui lui sont associés. D'une
part, la maison appartient à un groupement spatial - une rangée, un îlot, un
quartier... -, dont les propriétés sont étroitement correlées aux caractéristiques
architecturales de leur espace domestique. Cette relation est déterminante en
secteur urbain où les contraintes foncières sont très fortes et imposent des
aménagements permanents du territoire, qui ne sont pas sans effet sur l'évolu
tion de l'habitat, de ses typologies et de ses localisations. D'autre part, la mai
son est inscrite dans un contexte social déterminé par l'identité et l'histoire de
ses habitants qui sont les acteurs privilégiés de ses transformations. A Bali, le
rapport habitat-habitant est d'autant plus fort que la résidence est une affilia
tion cultuelle, les familles étant ancrées dans l'espace domestique par un
même culte des ancêtres.
Après avoir présenté brièvement la «maison traditionnelle» de type
umah W, qui est l'habitation des Balinais roturiers, ou sudra, nous tenterons
[Archipel 49 - Paris, 1995 - pp. 137-160.] 138 Nathalie LANCRET
d'analyser un îlot urbain du centre historique de Denpasar. Enfin, nous pré
senterons trois maisons de cet îlot, sélectionnées pour leurs caractéristiques
architecturales et l'itinéraire de leurs habitants.
La «maison traditionnelle» de type umah (PI. 1 )
C'est un vaste enclos rectangulaire de 500 à 1 000 mètres carrés, voire
plus, entouré d'un mur d'enceinte de brique ou de bauge percé d'une porte
théoriquement unique. Cette maison ne se livre pas de l'extérieur. Pourtant le
traitement de l'enceinte, le type de la porte d'entrée et les toits, qui apparais
sent au-dessus du mur, révèlent quelques indices sur ses constructions et ses
habitants. L'espace intra-muros comprend une cour centrale encadrée de plu
sieurs pavillons qui constituent le quartier d'habitation; c'est là que se déroule
la vie quotidienne de la famille. En amont, l'enceinte du temple familial est le
domaine des dieux et des ancêtres divinisés. En aval, la cuisine, le grenier à
riz et les espaces de service sont implantés à la périphérie du quartier d'habit
ation.
La conception et la construction des maisons obéissent à des normes consi
gnées dans les traités d'architecture écrits en langue littéraire, ou kawi, et
compris des seuls lettrés. Ces textes détiennent les règles à la fois précises et
complexes, qui fixent l'implantation et les dimensions de toutes les construc
tions de la maison et de leurs éléments constructifs, du mur d'enceinte aux
poteaux de chaque pavillon et à leurs modénatures. De plus, ils énumèrent les
rituels qui ponctuent le calendrier de la construction. Le manuscrit auquel
nous nous référons, YAsta Kosali de la Gria Taman Sanur Badung (5\ comport
e quatre-vingt-un articles parmi lesquels soixante-trois ont trait aux modes de
structuration de l'espace domestique, sept sont relatifs aux matériaux et onze
concernent les rituels de la construction. Chaque configuration envisagée est
accompagnée de présages bénéfiques, maléfiques ou parfois ambivalents. En
théorie, ce traité pourrait être considéré comme un «cahier des charges symbol
iques» permettant aux futurs habitants de forger leur propre destinée. Il
dénonce les choix néfastes qui exposent aux pires dangers - la mort, la malad
ie, la stérilité, le vice ... -, propose des solutions qui garantissent une exis
tence paisible et des événements heureux - la santé, une descendance nomb
reuse, des animaux dodus, la fortune, ... - et enfin, prévient des configurat
ions ambivalentes dont il faut se méfier. En pratique, les traités sont rarement
consultés pour l'édification d'une maison; la construction étant basée sur la
reproduction d'un modèle originel à dominante symbolique, qui est implicite
ment reconduit d'une génération à l'autre. Ce principe mimétique n'exclut pas
les adaptations et les innovations car les Balinais sont pragmatiques. Confor
mément au précepte du «desa-kala-patra», qui veut que toute chose soit adap
tée «au lieu, au contexte et au moment», ils appliquent les solutions appro
priées aux contraintes qui s'imposent à eux. En revanche, il importe que la
maison ne possède pas de tares susceptibles de troubler le bon déroulement de
la vie domestique. En cas d'ennuis inexpliqués et persistants, les habitants
peuvent avoir recours à un architecte traditionnel ou à une personnalité initiée,
qui fait un diagnostic, prescrit les modifications à effectuer, les procédures à "maison traditionnelle" de type Umah Une
Plan des s toi toitures Plan du bâti
Amont
Kaja
i l MtAgung !
Ouest Kauh' _ Kangin
Un espace orienté vers l'amont Un espace centripète
LEGENDE
A. Porte d'entrée :korianghd- an ghd
B. Pavillon amont : m«/«n sakutus
Cest : baie dang'm sakenem
D. Pavillon ouest : baie dauh
E. Grenier à riz: jineng sakepat
F. Cuisine : paon sakenem
G. Parc à cochons : teba
H. Autel amont : tugu
L Porte du temple familial
J. Pavillon ouest : baie pyasan sakepat
Espace d'entrée Temple familial
Cour centrale Angle consacré
l/500e
La diagonale hiérarchique t ? _L J
25
PL! 140 Nathalie LANCRET
suivre en se référant, pour certains cas difficiles, aux traités d'architecture.
Nous connaissons une famille balinaise de Denpasar qui a fait les frais d'un
vice de construction. Victime de plusieurs cambriolages nocturnes, qui
s'effectuaient sans éveiller les chiens pourtant nombreux et aux aguets, le pro
priétaire de la maison décida d'aller consulter un dukun afin d'élucider l'affai
re. Il apprit alors qu'une malfaçon s'était glissée lors de la restauration de son
temple familial, dont la cérémonie de fin de travaux avait eu lieu la semaine
précédente.
Si le modèle vernaculaire n'est pas figé, force est de constater que l'enjeu
des choix architecturaux est considérable puisqu'il en va de l'existence même
de la maisonnée. Cette relation entre la maison et ses habitants repose sur une
conception dualiste de l'univers où le Balinais est un médiateur chargé de
maintenir un équilibre harmonieux entre les forces divines et démoniaques,
qui s'affrontent dans son microcosme, et d'assurer la communication entre les
trois mondes: ouranien, humain et chthonien (6). Si un défaut de l'espace bâti
vient compromettre cette communication, l'équilibre est rompu et la famille
est projetée au cœur d'un chaos. Dans ce contexte, la maison est considérée
comme un organisme vivant qui doit impérativement le rest

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