L exploitation agricole dans le Maine du XIIIe au XVIe siècle - article ; n°1 ; vol.51, pg 218-229
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Annales de Bretagne - Année 1944 - Volume 51 - Numéro 1 - Pages 218-229
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Publié le 01 janvier 1944
Nombre de lectures 30
Langue Français

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Robert Latouche
L'exploitation agricole dans le Maine du XIIIe au XVIe siècle
In: Annales de Bretagne. Tome 51, numéro 1, 1944. pp. 218-229.
Citer ce document / Cite this document :
Latouche Robert. L'exploitation agricole dans le Maine du XIIIe au XVIe siècle. In: Annales de Bretagne. Tome 51, numéro 1,
1944. pp. 218-229.
doi : 10.3406/abpo.1944.1828
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/abpo_0003-391X_1944_num_51_1_1828Robert LATOUCHE
L'EXPLOITATION AGKICOLE
DANS LE MAINE
DU XIIP AU XVIe SIÈCLE
Le xie et le xne siècle ont vu se former dans le Maine, dans
le Haut-Maine qui correspond approximativement au territoire
du département de la Sarthe comme dans le Bas-Maine, aujour
d'hui le de la Mayenne, de petites exploitations
aux dépens de la forêt et de la lande. Des termes variés ont
servi à désigner ces exploitations : herbergamentum, me&ietaria,
bordggium^ ^_a^sije mot çensiya, car leur caractère essentiel
c'est que ceux qui les cultivaient payaient un cens à leur seigneur.
Le cens était leur obligation fondamentale, « quod débet facere
censivus domino suo ». Nous n'y insisterons pas, ayant montré
ailleurs (1) que dans le Maine le cens était exclusif de l'obligation
à des corvées et qu'il est presque toujours dû en argent.
Ce trait essentiel, il faut le rappeler parce que, le seigneur
de la censive étant un rentier et le cens qui lui est dû ayant été
fixé pour toujours en monnaie de compte (livre, sou, denier)
sans que l'on s'inquiétât de son équivalence métallique, ni de
son pouvoir d'achat, la valeur de la redevance payée par le
censitaire a subi rapidement une baisse qui, pour le seigneur,
a été catastrophique. Un cens de 4 deniers était une réalité
à la fin du xie siècle; ce n'était plus qu'un symbole au xive.
Quelles ont été les conséquences sociales de ce phénomène
économique dans les régions où les obligations du censitaire
consistaient surtout et même souvent exclusivement en pres-
(1) Un aspect de la vie rurale dans le Maine au xi" et au xne siècle ; l'établissement
des bourgs (extrait du Moyen Age, 1937, noe 1-2). DANS LE MAINE 219
tarions monétaires? Elles ont varié selon que les rapports entre
les seigneurs et les censitaires étaient plus ou moins relâchés.
Là où le lien était distendu parce que le mouvement d'émanci
pation était déjà réalisé en grande partie, le phénomène écono
mique a joué en faveur du censitaire, du paysan; il a contribué
à sa libération. Le droit éminent du seigneur a pris un caractère
purement récognitif. Ainsi le censitaire est devenu peu à peu,
en fait, sinon en droit, le véritable propriétaire. Nous avons
observé cette évolution progressive en Bas-Quercy (2). Par
contre, dans le Maine, ce mouvement des censivi semble avoir
été généralement entravé. Les seigneurs ont résisté, se sont
ressaisis et vers le xive siècle de nouveaux types de baux parais
sent qui se superposent aux anciennes censives.
C'est l'une de ces formes nouvelles d'exploitation que nous
nous proposons d'examiner; la baillée à trois vies, type de bail
non perpétuel, mais à longue durée, dont le succès a été prodi
gieux.
Voici deux exemples de ces baillées :
1468, 28 janvier. Gervais le Villain, parroissien de Pruille (4),
confesse avoir prins... pour lui, sa femme et leurs enfans procréez
en mariage et pour le plus vivant d'iceulx des... chappellains
prébendes de l'église collégial de S. Jullien de Pruille Laguillé
les choses heritaux qui s'ensuivent, c'est assavoir le bordage de la
Faize et l'autre nommé Labouciniere... (5) pour le prix et somme
de cinquante solz tournois de ferme ou pension annuelle... réservé
ausdits prébendes leurs droiz seigneuriaux comme a seigneur
de fief.
Le second est écrit en langue latine (6).
1379, 30 septembre. Johannes Luca et Johanna, ejus uxor,...
parrochie de Labasoge (7), recognoverunt et confessi fuerunt
quod venerabiles et discreti viri cappellani... confratrie Cenoma-
(2) La vie en Bas-Qucrcy, du quatorzième au dix-huitième siècle, Toulouse, 1923,
p. 69 et suivantes.
(3) Archives de la Sarthe, G 470.
(4) Cant. du Grand-Lucé (Sarthe).
(5) CDe de PruilIé-l'Eguillé.
(6) G 56. Tous les documents consultés pour cette étude appartiennent aux
Archives de la Sarthe.
(7) La Bazoge, Cne du 2e cant. du Mans. 220 l'exploitation agricole
nensis sibi tradiderunt et concesserunt et ipsi acciperunt pro se
et uno puerorum ipsorum et superviventi ipsorum dumtaxat
unum estragium... pro precio quinquaginta solidorum turonen-
sium annui redditus... Et tenebuntur dicti accipientes facere
deveria consueta racione dictarum rerum insuper et supra dictum
reditum.
Presque toutes les baillées à trois vies contiennent certaines
dispositions identiques : elles sont généralement' conclues par
un preneur qui est un homme ou une femme mariée, et ce pre
neur traite en son nom, au nom de son conjoint et d'un de ses
enfants, en sorte que le bail couvre trois vies, mais seulement
deux générations. L'objet du contrat est tantôt un bordage,
c'est-à-dire une exploitation familiale complète, tantôt seulement
une ou plusieurs pièces détachées. La prestation à fournir par
le preneur, désignée souvent par le mot « pension », est, à quelques
rares exceptions près, une somme d'argent complétée parfois
par des redevances en nature telles que grains, chapons et
fromages de lait de vache, c'est-à-dire par ce qu'on appelle
aujourd'hui dans la Sarthe des subsides. Les baux de métayage
sont très rares.
Les .« baillées » c'est le nom qu'on donne à ces contrats
contiennent souvent une clause relative aux devoirs anciens,
c'est-à-dire aux cens qui sont dus en raison des choses baillées.
Ces cens sont à la charge des preneurs qui sont tenus de les payer
en plus de la « pension » (8). Le seigneur à qui sont dus ces
« devoirs anciens » est souvent, mais pas nécessairement, le
bailleur : « Et poyeront les autres devoirs, lisons-nous dans une
baillée de 1451 (9), se aucuns en sont deuz par raison desdites
choses, et est réservé audit prieur (qui est le bailleur) tout
droit de fié ».
Il est intéressant de comparer le montant du cens, c'est-à-dire
du devoir ancien, à celui de la pension ou ferme,
(8) « Et tenebuntur dicti accipientes facere deverîa consueta racione dictarum
rerum insuper et supra dictum reditum. » (Baillée citée plus haut.)
(9) Bail passé le 22 janvier 1451 (n. st.) entre le prieur de Sceaux dépendant de
l'abbé de Saint-Vincent du Mans et Jean Legourt de la métairie de la Foucherie
(H 32, fe 120e v°). DANS LE MAINE 221
de la rente fixée par la baillée à trois vies. Voici quelques exemp
les. Dans un bail conclu par Pierre Legourt, de Sceaux (10),
avec le prieur de Sceaux-sur-Huisne, en 1448 (11), le cens est de
6 deniers, alors que la rente est de 16 sous. Le sou étant de
12 le rapport est de 6 à 192, en sorte que la pension
est égale au cens x 32. Mais l'écart peut être plus considérable
encore : Macé Heruyer qui a passé avec le même prieur une
baillée en 1460 (12), doit une pension annuelle de 20 sous et
en plus un cens de 2 deniers. Le montant de la pension est
égal au cens x 120. Autre exemple emprunté à une région
différente : en 1489, l'abbé de Vaas (13) baille à Julien Picher
une « pièce en gast » (14); la baillée à trois vies l'oblige au
paiement d'une rente de 22 sous 6 deniers, et il doit en outre,
s'acquitter d'un cens annuel de 12 donc d'un sou.
Les exemples pourraient être multipliés, mais ces quelques
chiffres semblent suffisants pour indiquer que la rente créée
au xve siècle pour les baux à trois vies correspond en moyenne
au cens ancien multiplié par 20, 30 et quelquefois même par
un chiffre beaucoup plus fort. Cette simple constatation démontre
l'intérêt qu'avait un seigneur féodal possédant des censives
dans son fief à conclure de nouveaux baux. Ceux-ci lui rappor
taient des revenus tellement supérieurs aux cens misérables
fixés à perpétuité deux, trois ou quatre siècles plus tôt (15).
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