L infixation réduplicative dans les langages secrets - article ; n°101 ; vol.25, pg 11-29
20 pages
Français

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris

L'infixation réduplicative dans les langages secrets - article ; n°101 ; vol.25, pg 11-29

-

Découvre YouScribe en t'inscrivant gratuitement

Je m'inscris
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus
20 pages
Français
Obtenez un accès à la bibliothèque pour le consulter en ligne
En savoir plus

Description

Langages - Année 1991 - Volume 25 - Numéro 101 - Pages 11-29
19 pages
Source : Persée ; Ministère de la jeunesse, de l’éducation nationale et de la recherche, Direction de l’enseignement supérieur, Sous-direction des bibliothèques et de la documentation.

Informations

Publié par
Publié le 01 janvier 1991
Nombre de lectures 21
Langue Français
Poids de l'ouvrage 1 Mo

Extrait

John Mc Carthy
L'infixation réduplicative dans les langages secrets
In: Langages, 25e année, n°101, 1991. pp. 11-29.
Citer ce document / Cite this document :
Mc Carthy John. L'infixation réduplicative dans les langages secrets. In: Langages, 25e année, n°101, 1991. pp. 11-29.
doi : 10.3406/lgge.1991.1799
http://www.persee.fr/web/revues/home/prescript/article/lgge_0458-726X_1991_num_25_101_1799J. McCarthy John
University of Massachusetts, Amherst
L'INFIXATION REDUPLICATIVE
DANS LES LANGAGES SECRETS
L'étude des langages secrets, des langages ludiques et autres langages de ce
type a contribué sur deux points importants au progrès de la théorie phonolog
ique. Beaucoup de langages secrets montrent que les locuteurs d'une langue ont
accès à des représentations plus abstraites que le niveau phonétique superficiel.
On doit la première discussion explicite de ce point à Chomsky & Halle (1968),
bien qu'on en trouve des préfigurations dans des travaux antérieurs. Ensuite,
presque tous les langages secrets montrent que les représentations phonologi
ques ont une structure articulée, modularisée. Cette idée a été avancée
explicitement pour la première fois par Hombert (1973) ; je m'attacherai ici à en
développer certains prolongements particuliers. Je montrerai notamment
comment l'hypothèse que les représentations phonologiques comportent un
squelette permet d'expliquer un grand nombre de propriétés des langages secrets
fondés sur le principe de l'infixation reduplicative.
Le squelette est le niveau de représentation intermédiaire entre les syllabes
d'un côté et les segments (composés de traits distinctifs) de l'autre. Il fournit une
caractérisation des aspects positionnels et quantitatifs des sons du langage
indépendamment de leurs qualités. Certains des arguments les plus anciens en
faveur d'un niveau squelétal proviennent de la morphologie sémitique (McCart
hy, 1981). Les diverses classes dérivationnelles du verbe arabe présentent une
propriété notable : l'invariance formelle ; on entend par là qu'une forme
morphologique particulière est associée à un schéma canonique déterminé. Ainsi,
le Causatif ou Forme II de l'arabe est-il associé au schéma canonique CVCjCjVC,
lequel demeure inchangé, quelles que soient les modifications (lexicales) apport
ées au consonantisme ou les modifications (flexionnelles) apportées au vocalis
me :
(1) Invariance formelle du Causatif arabe
/ktb/ /îlm/ /sm/ « /drs/ étudier _ » « écrire » « savoir » « empoisonner »
kattab darras Çallam sammam perf. act.
kuttib durris Vullim pass. summim
Cu + kattib darris îallim sammim impf. act.
Cu + kattab darras îallam sammam pass.
Si, dans (1), on passe d'une colonne à l'autre, la racine consonantique — l'unité
lexicale fondamentale de la langue — , change. Malgré cette modification des
consonnes, le schéma canonique demeure le même. De même, si, dans (1), on
passe d'une ligne à l'autre, le vocalisme change : la voix passe de l'actif au passif
ou l'aspect du perfectif à l'imperfectif. Mais encore une fois, le schéma canonique
11 reste le même. On trouve des régularités de cette sorte dans tout le système des
conjugaisons verbales de l'arabe.
Dans McCarthy (1981), il est montré qu'une forme comme kuttib exprime
simultanément trois morphèmes différents : la racine consonantique /ktb/
« écrire », la mélodie vocalique /u — i/ « perfectif passif », et le morphème
squelétal CVCCVC « Forme II » ou « causatif/factitif ». C'est ce dernier
morphème qui explique l'invariance formelle morphologique. La coordination
de ces trois niveaux se conforme aux principes de la phonologie autosegmentale
(Goldsmith, 1976, Clements & Ford, 1979) ; ainsi, la forme kuttib est-elle
représentée de la façon suivante :
(2)
Mélodie vocalique u i « perfectif passif »
Squelette CVCCVC « causatif (Forme II) »
Racine к t b « écrire »
L'arabe possède un type de langage secret qui confirme directement cette
théorie. Une forme comme kuttib y est transformée en l'une quelconque des
formes buttik, kubbit, tukkib, bukkit, et ainsi de suite. Ce langage secret consiste
simplement en une permutation des consonnes de la racine, tous les autres
éléments de la représentation demeurant constants. L'information quantitative
et positionnelle encodée par le squelette n'y est en particulier pas modifiée.
Dans cet article, j'examinerai un autre type de langages secrets : ceux qui
sont formés par infixation et copie (on trouvera des exemples en (3)). Je
montrerai qu'une théorie très simple de ces langages, une théorie qui requiert
d'une façon cruciale un niveau de représentation squelétal, rend compte d'une
large gamme des propriétés qu'on y observe. Afin de focaliser mon attention sur
les faits qui militent en faveur de la théorie squelétale en général, je ne
m'attacherai pas à traiter la question plus technique de la nature exacte du
niveau squelétal ; cette question a été traitée avec fruit ailleurs. Bien que le
squelette en CV de (2) constitue peut-être l'approche la plus naturelle, il s'avère
en fin de compte qu'elle est inadéquate empiriquement. L'adéquation d'autres
modèles de représentation squelétale — éléments terminaux de la structure
syllabique (Levin, 1985, Lowenstamm & Kaye, 1986) ou mores (McCarthy &
Prince, 1986, sous presse) — est actuellement matière à controverse.
Les données réunies en (3) ci-dessous illustrent un type très courant de
langages secrets. Dans ces langages, chaque syllabe reçoit un infixe consistant en
une consonne déterminée et en une copie de la voyelle originale de la syllabe.
(3)
a. Langages allemands en b- et en p- (Bàchtold, 1914) :
Ich habe Priigel erhalten Ibich hababebe Prubiïgebel
« J'ai reçu le fouet » erbehabalteben l
1. L'article original ne commente pas le fait que l'on a erbe là où l'on s'attendrait à trouver eber.
12 Ipich hapabepe Prupugepel
erpehapaltepen
b. Javanais (Sadtano, 1971, cité par Sherzer, 1976) :
aku arep tuku klambi afakufu afarefep tufukufu
« Je veux acheter une robe » klafambifi
с. Cuna (Sherzer, 1976) :
sunmakke « parlure cachée » : i. ottukkuar
merki « américain » mepperkippi
« où » pia pippiappa
ua « poisson » uppuappa
: « tous » pepperkwappapleppe perkwaple
ii.
« américain » mererkiri merki
pe « vous » pere
« où » piriara pia
tanikki « il vient » taranirikkiri
d. Kekchi, jerigonza (Campbell, 1974) :
« jerigonza » xerigonsa xeperipigoponsapa
k'oxob'a:nk « commencer cela » k'opoxopob'apamk
oxob'ak « tousser » opoxopob'apak
pereb'a:nk « mettre la table » peperepeb'apa:nk
e. Tagalog, baliktád « sens dessus dessous » (Conklin, 1956) :
hindi? « non, ne... pas » higíidin digíidi?
tanhaali? «midi» tagáadan hagáada ligíidi?
McCarthy (1982 : 200-202) propose une explication de ce type de langages
secrets dans le cadre de la théorie de la morphologie non-concaténative
introduite dans McCarthy (1981). L'idée fondamentale est que l'infixé consiste
en un squelette contenant une consonne spécifiée et une voyelle non spécifiée. La
spécification de la consonne infixée figure sur son propre plan autosegmental, de
sorte qu'elle est transparente pour la propagation de la voyelle contiguë. Pour
la forme cuna mepperkippi, par exemple, on a l'infixé de (4a), d'où la dérivation
de (4b) :
(4)
a. Infixe cuna :
VCC
I/
P
Peut-être faut-il voir là une influence sur cette forme de la frontière de morphème de erhalten, ou le
résultat d'une prononciation dialectale de er (les données proviennent de Bâle).
13 b- cvccv
MIM
Forme sous-j acente merki
P P
К К
с + vcc + vcc + vcc + v
Infixation mI erkIII i !
P P
К К
с + vcc + vcc + vcc + v
Propagation de la voyelle - m e г k
On a de nombreuses raisons de penser que ce type général d'analyse est
correct. Nous allons ici passer en revue ces arguments d'une façon détaillée.
En premier lieu, ce

  • Univers Univers
  • Ebooks Ebooks
  • Livres audio Livres audio
  • Presse Presse
  • Podcasts Podcasts
  • BD BD
  • Documents Documents